20000 Lieues sous les mers Part 2

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20000 Lieues sous les mers Part 2 Page 16

by Jules Verne


  Pourquoi, Ned ?

  Parce que personne ne peut franchir la banquise. Il est puissant, votre capitaine; mais, mille diables ! il n'est pas plus puissant que la nature, et là où elle a mis des bornes, il faut que l'on s'arrête bon gré mal gré.

  En effet, Ned Land, et cependant j'aurais voulu savoir ce qu'il y a derrière cette banquise ! Un mur, voilà ce qui m'irrite le plus !

  Monsieur a raison, dit Conseil. Les murs n'ont été inventés que pour agacer les savants. Il ne devrait y avoir de murs nulle part.

  Bon ! fit le Canadien. Derrière cette banquise, on sait bien ce qui se trouve.

  Quoi donc ? demandai-je.

  De la glace, et toujours de la glace !

  Vous êtes certain de ce fait, Ned, répliquai-je, mais moi je ne le suis pas. Voilà pourquoi je voudrais aller voir.

  Eh bien, monsieur le professeur, répondit le Canadien, renoncez à cette idée. Vous êtes arrivé à la banquise, ce qui est déjà suffisant, et vous n'irez pas plus loin, ni votre capitaine Nemo, ni son Nautilus. Et qu'il le veuille ou non, nous reviendrons vers le nord, c'est-à-dire au pays des honnêtes gens. »

  Je dois convenir que Ned Land avait raison, et tant que les navires ne seront pas faits pour naviguer sur les champs de glace, ils devront s'arrêter devant la banquise.

  En effet, malgré ses efforts, malgré les moyens puissants employés pour disjoindre les glaces, le Nautilus fut réduit à l'immobilité. Ordinairement, qui ne peut aller plus loin en est quitte pour revenir sur ses pas. Mais ici, revenir était aussi impossible qu'avancer, car les passes s'étaient refermées derrière nous, et pour peu que notre appareil demeurât stationnaire, il ne tarderait pas à être bloqué. Ce fut même ce qui arriva vers deux heures du soir, et la jeune glace se forma sur ses flancs avec une étonnante rapidité. Je dus avouer que la conduite du capitaine Nemo était plus qu'imprudente.

  J'étais en ce moment sur la plate-forme. Le capitaine qui observait la situation depuis quelques instants, me dit :

  « Eh bien, monsieur le professeur, qu'en pensez-vous ?

  Je pense que nous sommes pris, capitaine.

  Pris ! Et comment l'entendez-vous ?

  J'entends que nous ne pouvons aller ni en avant ni en arrière, ni d'aucun côté. C'est, je crois, ce qui s'appelle « pris », du moins sur les continents habités.

  Ainsi, monsieur Aronnax, vous pensez que le Nautilus ne pourra pas se dégager ?

  Difficilement, capitaine, car la saison est déjà trop avancée pour que vous comptiez sur une débâcle des glaces.

  Ah ! monsieur le professeur, répondit le capitaine Nemo d'un ton ironique, vous serez toujours le même ! Vous ne voyez qu'empêchements et obstacles ! Moi, je vous affirme que non seulement le Nautilus se dégagera, mais qu'il ira plus loin encore !

  Plus loin au sud ? demandai-je en regardant le capitaine.

  Oui, monsieur, il ira au pôle.

  Au pôle ! m'écriai-je, ne pouvant retenir un mouvement d'incrédulité.

  Oui, répondit froidement le capitaine, au pôle antarctique, à ce point inconnu où se croisent tous les méridiens du globe. Vous savez si je fais du Nautilus ce que je veux. »

  Oui ! je le savais. Je savais cet homme audacieux jusqu'à la témérité ! Mais vaincre ces obstacles qui hérissent le pôle sud, plus inaccessible que ce pôle nord non encore atteint par les plus hardis navigateurs, n'était-ce pas une entreprise absolument insensée, et que, seul, l'esprit d'un fou pouvait concevoir !

  Il me vint alors à l'idée de demander au capitaine Nemo s'il avait déjà découvert ce pôle que n'avait jamais foulé le pied d'une créature humaine.

  « Non, monsieur, me répondit-il, et nous le découvrirons ensemble. Là où d'autres ont échoué, je n'échouerai pas. Jamais je n'ai promené mon Nautilus aussi loin sur les mers australes; mais, je vous le répète, il ira plus loin encore.

  Je veux vous croire, capitaine, repris-je d'un ton un peu ironique. Je vous crois ! Allons en avant ! Il n'y a pas d'obstacles pour nous ! Brisons cette banquise ! Faisons-la sauter, et si elle résiste, donnons des ailes au Nautilus, afin qu'il puisse passer par-dessus !

  Par-dessus ? monsieur le professeur, répondit tranquillement le capitaine Nemo. Non point par-dessus, mais par-dessous.

  Par-dessous ! » m'écriai-je.

  Une subite révélation des projets du capitaine venait d'illuminer mon esprit. J'avais compris. Les merveilleuses qualités du Nautilus allaient le servir encore dans cette surhumaine entreprise !

  « Je vois que nous commençons à nous entendre, monsieur le professeur, me dit le capitaine, souriant à demi. Vous entrevoyez déjà la possibilité moi, je dirai le succès de cette tentative. Ce qui est impraticable avec un navire ordinaire devient facile au Nautilus . Si un continent émerge au pôle, il s'arrêtera devant ce continent. Mais si au contraire c'est la mer libre qui le baigne, il ira au pôle même !

  En effet, dis-je, entraîné par le raisonnement du capitaine, si la surface de la mer est solidifiée par les glaces, ses couches inférieures sont libres, par cette raison providentielle qui a placé à un degré supérieur à celui de la congélation le maximum de densité de l'eau de mer. Et, si je ne me trompe, la partie immergée de cette banquise est à la partie émergeante comme quatre est à un ?

  A peu près, monsieur le professeur. Pour un pied que les icebergs ont au-dessus de la mer, ils en ont trois au-dessous. Or, puisque ces montagnes de glaces ne dépassent pas une hauteur de cent mètres, elles ne s'enfoncent que de trois cents. Or, qu'est-ce que trois cents mètres pour le Nautilus?

  Rien, monsieur.

  Il pourra même aller chercher à une profondeur plus grande cette température uniforme des eaux marines, et là nous braverons impunément les trente ou quarante degrés de froid de la surface.

  Juste, monsieur, très juste, répondis-je en m'animant.

  La seule difficulté, reprit le capitaine Nemo, sera de rester plusieurs jours immergés sans renouveler notre provision d'air.

  N'est-ce que cela ? répliquai-je. Le Nautilus a de vastes réservoirs, nous les remplirons, et ils nous fourniront tout l'oxygène dont nous aurons besoin.

  Bien imaginé, monsieur Aronnax, répondit en souriant le capitaine. Mais ne voulant pas que vous puissiez m'accuser de témérité, je vous soumets d'avance toutes mes objections.

  En avez-vous encore à faire ?

  Une seule. Il est possible, si la mer existe au pôle sud, que cette mer soit entièrement prise, et, par conséquent, que nous ne puissions revenir à sa surface !

  Bon, monsieur, oubliez-vous que le Nautilus est armé d'un redoutable éperon, et ne pourrons-nous le lancer diagonalement contre ces champs de glace qui s'ouvriront au choc ?

  Eh ! monsieur le professeur, vous avez des idées aujourd'hui !

  D'ailleurs, capitaine, ajoutai-je en m'enthousiasmant de plus belle, pourquoi ne rencontrerait-on pas la mer libre au pôle sud comme au pôle nord ? Les pôles du froid et les pôles de la terre ne se confondent ni dans l'hémisphère austral ni dans l'hémisphère boréal, et jusqu'à preuve contraire, on doit supposer ou un continent ou un océan dégagé de glaces à ces deux points du globe.

  Je le crois aussi, monsieur Aronnax, répondit le capitaine Nemo. Je vous ferai seulement observer qu'après avoir émis tant d'objections contre mon projet, maintenant vous m'écrasez d'arguments en sa faveur. »

  Le capitaine Nemo disait vrai. J'en étais arrivé à le vaincre en audace ! C'était moi qui l'entraînais au pôle ! Je le devançais, je le distançais... Mais non ! pauvre fou. Le capitaine Nemo savait mieux que toi le pour et le contre de la question, et il s'amusait à te voir emporté dans les rêveries de l'impossible !

  Cependant, il n'avait pas perdu un instant. A un signal le second parut. Ces deux hommes s'entretinrent rapidement dans leur incompréhensible langage, et soit que le second eût été antérieurement prévenu, soit qu'il trouvât le projet praticable, il ne laissa voir aucune surprise.

  Mais si impassible qu'il fût il ne montra pas une plus complète impassibilité que Conseil, l
orsque j'annonçai à ce digne garçon notre intention de pousser jusqu'au pôle sud. Un « comme il plaira à monsieur » accueillit ma communication, et je dus m'en contenter. Quant à Ned Land, si jamais épaules se levèrent haut, ce furent celles du Canadien.

  « Voyez-vous, monsieur, me dit-il, vous et votre capitaine Nemo, vous me faites pitié !

  Mais nous irons au pôle, maître Ned.

  Possible, mais vous n'en reviendrez pas ! »

  Et Ned Land rentra dans sa cabine, « pour ne pas faire un malheur », dit-il en me quittant.

  Cependant, les préparatifs de cette audacieuse tentative venaient de commencer. Les puissantes pompes du Nautilus refoulaient l'air dans les réservoirs et l'emmagasinaient à une haute pression. Vers quatre heures, le capitaine Nemo m'annonça que les panneaux de la plate-forme allaient être fermés. Je jetai un dernier regard sur l'épaisse banquise que nous allions franchir. Le temps était clair, l'atmosphère assez pure, le froid très vif, douze degrés au-dessous de zéro; mais le vent s'étant calmé, cette température ne semblait pas trop insupportable.

  Une dizaine d'hommes montèrent sur les flancs du Nautilus et, armés de pics, ils cassèrent la glace autour de la carène qui fut bientôt dégagée. Opération rapidement pratiquée, car la jeune glace était mince encore. Tous nous rentrâmes à l'intérieur. Les réservoirs habituels se remplirent de cette eau tenue libre à la flottaison. Le Nautilus ne tarda pas à descendre.

  J'avais pris place au salon avec Conseil. Par la vitre ouverte, nous regardions les couches inférieures de l'Océan austral. Le thermomètre remontait. L'aiguille du manomètre déviait sur le cadran.

  A trois cents mètres environ, ainsi que l'avait prévu le capitaine Nemo, nous flottions sous la surface ondulée de la banquise. Mais le Nautiluss'immergea plus bas encore. Il atteignit une profondeur de huit cents mètres. La température de l'eau, qui donnait douze degrés à la surface, n'en accusait plus que onze. Deux degrés étaient déjà gagnes. Il va sans dire que la température du Nautilus, élevée par ses appareils de chauffage, se maintenait à un degré très supérieur. Toutes les manoeuvres s'accomplissaient avec une extraordinaire précision.

  « On passera, n'en déplaise à monsieur, me dit Conseil.

  J'y compte bien ! » répondis-je avec le ton d'une profonde conviction.

  Sous cette mer libre, le Nautilus avait pris directement le chemin de pôle, sans s'écarter du cinquante-deuxième méridien. De 67°30' à 90° vingt-deux degrés et demi en latitude restaient à parcourir, c'est-à-dire un peu plus de cinq cents lieues. Le Nautilus prit une vitesse moyenne de vingt-six milles à l'heure, la vitesse d'un train express. S'il la conservait, quarante heures lui suffisaient pour atteindre le pôle.

  Pendant une partie de la nuit, la nouveauté de la situation nous retint, Conseil et moi, à la vitre du salon. La mer s'illuminait sous l'irradiation électrique du fanal. Mais elle était déserte. Les poissons ne séjournaient pas dans ces eaux prisonnières. Ils ne trouvaient là qu'un passage pour aller de l'Océan antarctique à la mer libre du pôle. Notre marche était rapide. On la sentait telle aux tressaillements de la longue coque d'acier.

  Vers deux heures du matin, j'allai prendre quelques heures de repos. Conseil m'imita. En traversant les coursives, je ne rencontrai point le capitaine Nemo. Je supposai qu'il se tenait dans la cage du timonier.

  Le lendemain 19 mars, à cinq heures du matin, je repris mon poste dans le salon. Le loch électrique m'indiqua que la vitesse du Nautilus avait été modérée. Il remontait alors vers la surface, mais prudemment, en vidant lentement ses réservoirs.

  Mon coeur battait. Allions-nous émerger et retrouver l'atmosphère libre du pôle ?

  Non. Un choc m'apprit que le Nautilus avait heurté la surface inférieure de la banquise, très épaisse encore, à en juger par la matité du bruit. En effet, nous avions « touché » pour employer l'expression marine, mais en sens inverse et par mille pieds de profondeur. Ce qui donnait deux mille pieds de glaces au-dessus de nous, dont mille émergeaient. La banquise présentait alors une hauteur supérieure à celle que nous avions relevée sur ses bords. Circonstance peu rassurante.

  Pendant cette journée, le Nautilus recommença plusieurs fois cette même expérience, et toujours il vint se heurter contre la muraille qui plafonnait au-dessus de lui. A de certains instants, il la rencontra par neuf cents mètres, ce qui accusait douze cents mètres d'épaisseur dont deux cents mètres s'élevaient au-dessus de la surface de l'Océan. C'était le double de sa hauteur au moment où le Nautilus s'était enfoncé sous les flots.

  Je notai soigneusement ces diverses profondeurs, et j'obtins ainsi le profil sous-marin de cette chaîne qui se développait sous les eaux.

  Le soir, aucun changement n'était survenu dans notre situation. Toujours la glace entre quatre cents et cinq cents mètres de profondeur. Diminution évidente, mais quelle épaisseur encore entre nous et la surface de l'Océan !

  Il était huit heures alors. Depuis quatre heures déjà, l'air aurait dû être renouvelé à l'intérieur du Nautilus, suivant l'habitude quotidienne du bord. Cependant, je ne souffrais pas trop, bien que le capitaine Nemo n'eût pas encore demandé à ses réservoirs un supplément d'oxygène.

  Mon sommeil fut pénible pendant cette nuit. Espoir et crainte m'assiégeaient tour à tour. Je me relevai plusieurs fois. Les tâtonnements du Nautilus continuaient. Vers trois heures du matin, j'observai que la surface inférieure de la banquise se rencontrait seulement par cinquante mètres de profondeur. Cent cinquante pieds nous séparaient alors de la surface des eaux. La banquise redevenait peu à peu ice-field. La montagne se refaisait la plaine.

  Mes yeux ne quittaient plus le manomètre. Nous remontions toujours en suivant, par une diagonale, la surface resplendissante qui étincelait sous les rayons électriques. La banquise s'abaissait en dessus et en dessous par des rampes allongées. Elle s'amincissait de mille en mille.

  Enfin, à six heures du matin, ce jour mémorable du 19 mars, la porte du salon s'ouvrit. Le capitaine Nemo parut.

  « La mer libre ! » me dit-il.

  XIV. LE PÔLE SUD

  Je me précipitai vers la plate-forme. Oui ! La mer libre. A peine quelques glaçons épars, des icebergs mobiles ; au loin une mer étendue ; un monde d'oiseaux dans les airs, et des myriades de poissons sous ces eaux qui, suivant les fonds, variaient du bleu intense au vert olive. Le thermomètre marquait trois degrés centigrades au-dessus de zéro. C'était comme un printemps relatif enfermé derrière cette banquise, dont les masses éloignées se profilaient sur l'horizon du nord.

  « Sommes-nous au pôle ? demandai-je au capitaine, le coeur palpitant.

  Je l'ignore, me répondit-il. A midi nous ferons le point.

  Mais le soleil se montrera-t-il à travers ces brumes ? dis-je en regardant le ciel grisâtre.

  Si peu qu'il paraisse, il me suffira, répondit le capitaine. »

  A dix milles du Nautilus, vers le sud, un îlot solitaire s'élevait à une hauteur de deux cents mètres. Nous marchions vers lui, prudemment, car cette mer pouvait être semée d'écueils.

  Une heure après, nous avions atteint l'îlot. Deux heures plus tard, nous achevions d'en faire le tour. Il mesurait quatre à cinq milles de circonférence. Un étroit canal le séparait d'une terre considérable, un continent peut-être, dont nous ne pouvions apercevoir les limites.

  L'existence de cette terre semblait donner raison aux hypothèses de Maury. L'ingénieur américain a remarqué, en effet, qu'entre le pôle sud et le soixantième parallèle, la mer est couverte de glaces flottantes, de dimensions énormes, qui ne se rencontrent jamais dans l'Atlantique nord. De ce fait, il a tiré cette conclusion que le cercle antarctique renferme des terres considérables, puisque les icebergs ne peuvent se former en pleine mer, mais seulement sur des côtes. Suivant ses calculs, la masse des glaces qui enveloppent le pôle austral forme une vaste calotte dont la largeur doit atteindre quatre mille kilomètres.

  Cependant, le Nautilus, par crainte d'échouer, s'était arrêté à trois encablures d'une grève
que dominait un superbe amoncellement de roches. Le canot fut lancé à la mer. Le capitaine, deux de ses hommes portant les instruments, Conseil et moi, nous nous y embarquâmes. Il était dix heures du matin. Je n'avais pas vu Ned Land. Le Canadien, sans doute, ne voulait pas se désavouer en présence du pôle sud.

  Quelques coups d'aviron amenèrent le canot sur le sable, où il s'échoua. Au moment où Conseil allait sauter à terre, je le retins.

  « Monsieur, dis-je au capitaine Nemo, à vous l'honneur de mettre pied le premier sur cette terre.

  Oui, monsieur, répondit le capitaine, et si je n'hésite pas à fouler ce sol du pôle, c'est que, jusqu'ici, aucun être humain n'y a laissé la trace de ses pas. »

  Cela dit, il sauta légèrement sur le sable. Une vive émotion lui faisait battre le coeur. Il gravit un roc qui terminait en surplomb un petit promontoire, et là, les bras croisés, le regard ardent, immobile, muet, il sembla prendre possession de ces régions australes. Après cinq minutes passées dans cette extase, il se retourna vers nous.

  « Quand vous voudrez, monsieur », me cria-t-il.

  Je débarquai, suivi de Conseil, laissant les deux hommes dans le canot.

  Le sol sur un long espace présentait un tuf de couleur rougeâtre, comme s'il eût été de brique pilée. Des scories, des coulées de lave, des pierres ponces le recouvraient. On ne pouvait méconnaître son origine volcanique. En de certains endroits, quelques légères fumerolles, dégageant une odeur sulfureuse, attestaient que les feux intérieurs conservaient encore leur puissance expansive. Cependant, ayant gravi un haut escarpement, je ne vis aucun volcan dans un rayon de plusieurs milles. On sait que dans ces contrées antarctiques, James Ross a trouvé les cratères de l'Érébus et du Terror en pleine activité sur le cent soixante-septième méridien et par 77°32' de latitude.

  La végétation de ce continent désolé me parut extrêmement restreinte. Quelques lichens de l'espèce Unsnea melanoxantha s'étalaient sur les roches noires. Certaines plantules microscopiques, des diatomées rudimentaires, sortes de cellules disposées entre deux coquilles quartzeuses, de longs fucus pourpres et cramoisis, supportés sur de petites vessies natatoires et que le ressac jetait à la côte, composaient toute la maigre flore de cette région.

 

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