by Jean M. Auel
— Whinney, il faut que tu descendes toute seule. Tu trouveras plus facilement ton chemin que si j’étais avec toi.
Jondalar rassura à son tour le jeune étalon. La descente était dangereuse et tout pouvait arriver, mais au moins avait-il amené les chevaux de l’autre côté du glacier. C’était maintenant à eux de jouer. Loup courait de long en large sur le rebord du glacier, comme lorsqu’il avait peur de traverser une rivière.
Encouragées par Ayla, Whinney se lança la première, posant ses sabots avec précaution. Rapide lui emboîta le pas et la distança bientôt. Ils parvinrent à un endroit glissant, dérapèrent, prirent de la vitesse et durent galoper pour garder l’équilibre. Ils seraient en sécurité avant qu’Ayla et Jondalar atteignissent la prairie... à moins que...
En haut, Loup couinait, la queue entre les pattes, affichant sa peur sans honte en voyant les chevaux dévaler la pente.
— Poussons le canot et mettons-nous en route, fit Jondalar. La descente est longue et ce ne sera pas facile.
Comme ils poussaient le bateau près de la crête du glacier, Loup sauta dedans.
— Il croit que nous allons traverser une rivière, remarqua Ayla. Ah, si nous pouvions flotter sur la glace !
Leurs regards se croisèrent et un sourire se dessina sur leurs lèvres.
— Qu’en penses-tu ? demanda Jondalar.
— Pourquoi pas ? Tu disais que la peau résisterait.
— Et nous ?
— Nous verrons bien !
Ils déblayèrent le terrain et grimpèrent dans le canot en forme de coquille de noix où Loup les attendait. Jondalar adressa une prière à la Mère, et en s’aidant d’une des perches, les propulsa dans la pente.
— Cramponne-toi bien ! cria Jondalar.
Le canot prit bientôt de la vitesse et fonça tout droit, mais il heurta un obstacle, fit un bond et tournoya. Il fit une embardée, arriva en haut d’un petit raidillon et décolla. Ayla et Jondalar poussèrent des cris de peur et d’excitation. Ils atterrirent dans une violente secousse qui les propulsa en l’air. Ils s’agrippèrent à la coque qui tourniqua, alors que Loup s’aplatissait dans le fond tout en pointant son museau par-dessus bord.
Ayla et Jondalar se cramponnaient de toutes leurs forces, ils ne pouvaient rien faire d’autre. Le canot échappait à leur contrôle et dévalait la pente du glacier. Il zigzaguait, tantôt à droite, tantôt à gauche, tournoyait, bondissait, comme ivre de joie. Heureusement, il était trop chargé pour culbuter. La descente vertigineuse arrachait des cris à Ayla comme à Jondalar, qui souriaient malgré tout. Jamais ils n’avaient connu une telle ivresse, mais la descente n’était pas terminée.
Ils ne s’étaient pas demandé comment s’arrêterait leur embarcation, mais comme ils approchaient du bas, Jondalar se souvint qu’une crevasse séparait le pied du glacier de la terre ferme. Un arrêt brutal sur du gravier pourrait les jeter par-dessus bord, les blesser, ou pire encore. Jondalar ne comprit pas tout de suite ce qui se passait, mais quand ils atterrirent dans une grande secousse et une gerbe d’éclaboussures au milieu de nuages d’eau, il comprit que le canot les avait conduits au bas de la cascade qu’ils avaient aperçue d’en haut.
La cascade les entraîna dans une autre chute, et après un nouveau choc et de nouvelles éclaboussures, ils flottèrent bientôt sur les eaux de fonte paisibles d’un petit lac. Loup était si heureux qu’il ne savait plus où donner de la tête. Il sautait sur l’un, sur l’autre, les léchait, aboyait, les léchait encore. Finalement il s’assit sur son arrière-train, tendit le cou vers le ciel et poussa un long hurlement de joie.
— Ça y est, Ayla, nous avons réussi ! s’écria Jondalar. Nous avons réussi ! Nous avons franchi le glacier.
— Oh, Jondalar, C’est fantastique ! fit Ayla avec un sourire radieux.
— Ce n’était pas très prudent, nous aurions pu nous blesser... ou nous tuer.
— D’accord, c’était dangereux, mais c’était formidable ! fit Ayla, les yeux encore brillants d’émotion.
Son enthousiasme était contagieux et malgré sa hantise d’un accident, il ne put s’empêcher de sourire.
— Je dois avouer que c’était excitant, et approprié d’une certaine manière. Je ne suis pas près de retraverser ce glacier. Deux fois dans une vie, ça me suffit, mais je suis fier de l’avoir fait... Et je n’oublierai jamais cette descente.
— Il ne nous reste plus qu’à atteindre la rive, et à retrouver Whinney et Rapide.
La nuit tombait et entre la lumière aveuglante du couchant et les ombres trompeuses du crépuscule, on distinguait mal les environs. La fraîcheur du soir avait fait retomber la température, et il gelait de nouveau. Ils apercevaient les contours du lac, rassurante terre noire parsemée de neige çà et là, mais ils ne savaient pas comment l’atteindre. Ils n’avaient pas de pagaies, et les perches étaient restées sur le glacier.
Le lac paraissait calme, mais l’écoulement rapide des eaux de fonte provoquait un courant subaquatique qui les entraînait lentement vers le rivage. Lorsqu’ils furent assez près, ils sautèrent dans l’eau suivis de Loup et tirèrent le canot sur la terre ferme. Loup s’ébroua, arrosant Ayla et Jondalar qui n’y prirent même pas garde. Ils tombèrent dans les bras l’un de l’autre, heureux d’être en vie, amoureux, et soulagés de sentir la terre sous leurs pieds.
— Nous avons réussi. Nous sommes presque arrivés, Ayla, murmura Jondalar, qui avait cru qu’il ne la tiendrait plus jamais dans ses bras.
Avec le regel, la neige détrempée crissait à nouveau sous les pas.
Main dans la main, ils traversèrent une zone de graviers et arrivèrent dans un pré. Il n’y avait pas de bois pour faire du feu, mais ils ne s’en souciaient guère. Ils mangèrent des galettes, leur seule nourriture sur le glacier, et ils burent l’eau de fonte de leurs outres. Ils plantèrent ensuite leur tente et étalèrent leurs fourrures de couchage, mais avant de se coucher Ayla scruta les ténèbres en se demandant où avaient disparu les chevaux.
Elle siffla, espérant que Whinney l’entendrait, mais aucun bruit de sabots ne lui parvint et les chevaux ne se montrèrent pas. Elle siffla encore, mais sans résultat. Il était trop tard, les recherches ne pourraient pas commencer avant le lendemain. Ayla se glissa dans ses fourrures aux côtés de Jondalar, et caressa Loup qui vint se blottir contre elle. Préoccupée par les chevaux, elle sombra néanmoins dans un sommeil profond.
L’homme contempla les cheveux blonds ébouriffés de la jeune femme dont la tête reposait au creux de son épaule, et il décida de remettre son lever à plus tard.
Plus rien ne pressait à présent, et cette absence de tension laissait un vide qui le désarçonnait. Il devait se persuader qu’ils n’étaient plus sur le maudit glacier et qu’ils pouvaient prendre tout leur temps, paresser dans leurs fourrures la journée entière, par exemple.
Le glacier était derrière eux. Ayla était saine et sauve. La vision d’Ayla disparaissant dans la crevasse s’imposa a lui, et il la serra plus fort contre lui. La jeune femme s’accouda et ouvrit les yeux. Elle adorait le regarder. Sous la tente en peau de bête, la lumière tamisée adoucissait le bleu intense de ses yeux, et son front était lisse pour la première fois depuis longtemps. Elle fit courir ses doigts le long de ses rides, sur sa joue, sur les contours de son visage.
— Tu sais, avant de te rencontrer, j’essayais de me figurer à quoi ressemblait un homme des Autres. Pas un homme du Clan, un de mes semblables. Mais je n’y arrivais jamais. Tu es si beau, Jondalar.
— Les femmes sont belles, protesta Jondalar en riant. Pas les hommes.
— Ah bon ? Comment sont-ils, alors ?
— Ils sont forts, ou braves.
— Toi, tu es fort et brave, mais la beauté n’a rien à voir là-dedans. Comment appelle-t-on un homme qu’on trouve beau ?
— On peut dire qu’il est bien bâti, suggéra-t-il, mal à l’aise au souvenir du compliment qu’on lui avait fait trop souvent.
— Bien bâti, bien bâti, répéta-t-elle comme pour l’ancrer dans sa mémoire. Non, je
préfère beau. Beau, au moins, je comprends. Jondalar éclata de rire, un rire chaud, franc et bon enfant. Peu habituée à une telle démonstration de joie, Ayla le dévisagea d’un air surpris. Elle l’avait rarement vu sourire, mais rire, jamais.
— Si tu tiens à me trouver beau, ne te gêne pas, fit-il en l’attirant contre lui. Comment refuserais-je qu’une jolie femme me trouve beau ? Les spasmes de Jondalar la secouèrent et son rire communicatif déclencha son hilarité.
— Ah, Jondalar, j’adore quand tu ris, fit-elle.
— Tu as le don de m’amuser et je t’aime tellement, murmura-t-il. Lorsque leur rire se fut calmé, Jondalar serra Ayla dans ses bras. Ému par la chaude caresse de sa poitrine, il la coucha pour l’embrasser dans le cou, pétrissant ses seins lourds et fermes. Elle glissa sa langue entre ses lèvres, surprise de s’enflammer aussi vite. Cela fait si longtemps, se dit-elle. Pendant la traversée du glacier, l’idée ne leur en était pas venue, ou l’envie n’avait pu surmonter l’obstacle de leur fatigue et de leur anxiété.
Jondalar sentit Ayla contre lui, offerte, et un désir urgent l’envahit. Il roula sur elle, entraînant les fourrures dans son ardeur, baisa son cou, sa nuque, laissa courir ses lèvres sur son corps et trouva un mamelon érigé qu’il suça avidement.
Ayla perçut des pointes de feu déferler dans tout son corps, lui arrachant un cri d’extase. Sa propre réaction la stupéfia. Il l’avait à peine effleurée, et déjà elle était prête, mieux, impatiente. Cela faisait-il si longtemps ? Elle se colla contre lui.
Jondalar glissa sa main entre les cuisses d’Ayla, trouva le bouton des Plaisirs et le massa avec douceur. Ayla gémit en atteignant une jouissance si intense qu’elle ne voulut plus attendre.
En sentant une humidité soudaine, Jondalar comprit qu’elle était prête. Il écarta les fourrures qui le gênaient et guida son membre fier dans le puits d’amour qu’Ayla lui offrait.
Lorsqu’il entra au plus profond, elle s’agrippa à ses reins et le retint en criant son plaisir. Son puits avide enfin comblé par sa verge brûlante, elle crut défaillir. C’était trop bon, c’était au-delà des Plaisirs.
Jondalar ne tarda pas à la rejoindre. Il retira son membre pour mieux l’enfoncer ensuite. Encore une fois et la vague déferla dans une multitude de secousses qui l’anéantit. Emporté par son élan, il donna encore quelques légers coups de reins et s’écroula sur Ayla.
Allongée, les yeux toujours clos, le poids de Jondalar sur son corps, Ayla se sentait merveilleusement bien. Elle ne voulait pas bouger. Lorsqu’il se leva, il ne résista pas au plaisir de l’embrasser. Elle ouvrit les yeux.
— Oh, Jondalar, c’était si bon !
— C’était rapide. Nous étions prêts tous les deux. Que voulait dire ce sourire mystérieux quand je t’ai embrassée ?
— C’est parce que je suis tellement heureuse.
— Moi aussi, fit-il en l’embrassant encore.
Il roula sur le côté et ils somnolèrent bientôt. Jondalar se réveilla avant Ayla et la regarda dormir. Le sourire mystérieux reparut sur ses lèvres, et Jondalar aurait bien aimé connaître ses rêves. Il ne put s’empêcher de déposer des baisers sur son cou et de caresser ses seins lourds et fermes. Elle ouvrit de grands yeux sombres, pleins de secrets.
Il baisa ses paupières, chatouilla une oreille, puis un mamelon. Elle lui sourit quand il effleura la douce toison. Il la sentit réceptive mais elle n’était pas encore prête, et il regretta la brièveté des Plaisirs. Soudain, il la serra, l’embrassa avec une fougue incontrôlée, pétrit son corps, ses seins, ses hanches, ses cuisses. Il ne pouvait plus s’arrêter et semblait vouloir l’étreindre comme pour l’empêcher de tomber dans une crevasse imaginaire. Il se rattrapait de l’angoisse qui l’avait saisi quand il l’avait crue disparue dans le gouffre.
— Je n’aurais jamais imaginé que je tomberais amoureux un jour, avoua-t-il en se détendant enfin. Pourquoi ai-je eu besoin d’aller chercher si loin une femme que je puisse aimer ?
Cette question l’avait travaillé depuis son réveil, et il s’aperçut qu’ils étaient presque arrivés chez lui. Il était heureux de se retrouver de ce côté du glacier, mais l’impatience le gagnait. Il commençait à penser aux siens et aurait voulu être déjà auprès d’eux.
— Parce que mon totem t’a choisi pour moi. Le Lion des Cavernes t’a guidé jusqu’à moi.
— Mais alors pourquoi la Mère nous a-t-Elle fait naître si loin l’un de l’autre ?
Ayla le dévisagea d’un air grave.
— J’ai commencé à apprendre, mais j’ignore encore beaucoup de choses sur la volonté de la Grande Terre Mère, et je sais si peu des esprits protecteurs des totems du Clan. Mais il y a une chose que je sais : tu m’as trouvée.
— Et j’ai failli te perdre, murmura-t-il, saisi d’une peur rétrospective. Ayla, que deviendrais-je si jamais je te perdais ?
Sa voix trahissait une réelle émotion qu’il n’avait pas l’habitude de montrer si clairement. Il roula sur le côté, enfouit sa tête dans le cou d’Ayla et la serra si fort qu’elle suffoqua.
— Que ferais-je sans toi ? gémit-il.
Elle s’agrippa à lui. Elle aurait voulu que leurs deux corps ne fissent plus qu’un, et lorsqu’elle sentit le désir de Jondalar monter, elle s’abandonna tout entière avec joie. Poussé par une urgence aussi exigeante que son amour, il prit le corps qu’elle lui offrait avec une ardeur égale à la sienne. Ce brusque désir fut encore plus vite satisfait que le précédent, et une douce et chaude tendresse lui succéda. Lorsqu’il voulut soulager Ayla du poids de son corps, elle le retint, comme pour faire durer l’intensité des Plaisirs qui l’avaient anéantie.
— Je n’imagine pas la vie sans toi, Jondalar, assura Ayla en reprenant la conversation où ils l’avaient laissée. Une parcelle de moi te suivrait dans le monde des esprits, et je serais condamnée à vivre avec un manque perpétuel. Mais nous avons de la chance. Pense à tous ceux qui ne rencontrent jamais l’amour, et ceux qui aiment sans retour.
— Comme Ranec ?
— Oui, comme Ranec. J’ai toujours de la peine quand je pense à lui. Jondalar se redressa et s’assit.
— Moi aussi. Je l’aimais bien... ou plutôt, j’aurais pu l’aimer... Ce n’est pas comme ça que nous arriverons chez Dalanar, dit-il brusquement, soudain impatient de repartir. J’ai hâte de le revoir.
— Oui, mais il faut d’abord retrouver les chevaux.
43
Ayla se leva et sortit devant la tente. Une brume rampante s’accrochait au sol et l’air frais et humide transperçait sa peau nue. Au loin, la cascade rugissait. Au fond du lac, langue d’eau verdâtre, le brouillard était presque opaque.
Ayla devinait qu’aucun poisson n’habitait le lac dont les abords étaient dépourvus de végétation. C’était un paysage archaïque qui semblait remonter du fond des âges, avant le commencement de toute vie, un paysage de roche et d’eau. Ayla frissonna en comprenant la solitude de la Grande Terre Mère avant qu’elle ne donnât naissance aux êtres animés.
Ayla traversa la berge de gravier en courant et plongea dans l’eau, glacée et limoneuse. Elle avait attendu ce bain depuis si longtemps depuis la traversée du glacier ! Que l’eau fût froide ne la gênait pas, mais elle l’avait crue claire et limpide.
Dépitée, elle retourna à la tente pour se rhabiller et aider Jondalar à emballer les affaires. Comme elle scrutait le paysage désertique enveloppé dans la brume, elle aperçut en contrebas la silhouette d’une forêt. Soudain, un sourire éclaira son visage.
— Ah, vous voilà ! s’exclama-t-elle, avant de pousser un long sifflement.
Jondalar se rua hors de la tente et s’illumina en voyant les deux chevaux accourir au galop. Loup, qui les suivait, semblait aussi réjoui que les deux humains. On ne l’avait pas vu de la matinée, et Ayla s’interrogea sur son rôle dans le retour de Whinney et de Rapide. Mais le saurait-elle jamais ?
Chacun accueillit sa monture avec force cajoleries et Ayla les examina soigneusement, inquiète d’une éventuelle blessure.
Whinney avait perdu son protège-sabot droit et broncha quand Ayla palpa sa jambe. Elle se dit que la jument avait probablement pris son pied dans la glace et avait arraché le protège-sabot en se libérant, ce qui avait meurtri sa jambe.
Ayla ôta la peau de mammouth toujours attachée à l’autre sabot de Whinney, aidée par Jondalar qui maintenait la jument. Rapide avait encore ses protège-sabots dont l’usure commençait à apparaître. Même une peau aussi solide que celle de mammouth finissait pas s’élimer après un tel traitement.
Après avoir rangé tout leur équipement, Ayla et Jondalar allèrent chercher le canot et découvrirent que le fond était humide et détrempé. Il fuyait.
— Je n’ai pas très envie de traverser une rivière dans un canot en pareil état, constata Jondalar. Que dirais-tu de l’abandonner ?
— C’est préférable, à moins que nous voulions le tirer nous-mêmes, fit Ayla. Les perches du travois sont restées sur le glacier, et il n’y a pas d’arbre pour en tailler d’autres.
— Voilà qui règle la question. Heureusement que nous n’avons plus de pierres à transporter, et nos bagages sont tellement réduits que nous pourrions les porter, même sans les chevaux.
— S’ils n’étaient pas revenus, c’est ce que nous aurions été obligés de faire pour partir à leur recherche, remarqua Ayla. Je suis contente qu’ils nous aient retrouvés.
— Moi aussi. Je m’inquiétais, dit Jondalar.
Comme ils descendaient le versant sud-ouest de l’ancien massif qui supportait le champ de glace désertique sur son sommet érodé, une pluie fine se mit à tomber. Elle nettoya la neige sale accumulée dans les creux ombragés de la forêt d’épicéas clairsemés qu’ils traversèrent. Un lavis de vert colorait la prairie ocre et les buissons d’arbustes qui l’entouraient. Plus bas, perçant le brouillard, on devinait le miroitement d’une rivière qui s’écoulait d’ouest au nord en suivant la vallée tectonique. Au sud de la rivière, les falaises montagneuses déchiquetées disparaissaient dans une brume pourpre dont surgissait, tel un spectre, la haute chaîne recouverte de glace jusqu’à mi-flancs.