LE GRAND VOYAGE

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LE GRAND VOYAGE Page 102

by Jean M. Auel


  — Jerika ! s’exclama joyeusement Jondalar.

  — Jondalar ! Comme je suis contente de te revoir ! (Ils s’étreignirent affectueusement.) Eh bien, puisque cet ours a oublié les bonnes manières, présente-moi donc à ta compagne. Ensuite, tu nous expliqueras pourquoi ces animaux restent avec vous au lieu de s’enfuir dans la nature.

  Elle se glissa entre les deux hommes et parut encore plus petite. Dalanar et Jondalar étaient de taille égale, et elle leur arrivait à peine à mi-hauteur de la poitrine. Elle marchait à petits pas énergiques et Ayla la compara à un oiseau, impression renforcée par sa silhouette menue.

  — Jerika des Lanzadonii, voici Ayla des Mamutoï. C’est elle qui a apprivoisé les animaux, déclara Jondalar. Elle t’expliquera mieux que moi pourquoi ils ne cherchent pas à s’enfuir.

  — Tu es la bienvenue, Ayla des Mamutoï, assura Jerika, les mains tendues. Et les animaux aussi, si tu me promets qu’ils auront toujours ce comportement inhabituel, ajouta-t-elle en surveillant Loup du coin de l’œil.

  — Je te salue, Jerika des Lanzadonii, fit Ayla en lui retournant son sourire.

  La poigne de la petite femme trahissait un caractère inflexible.

  — Le loup aime bien les humains, il ne fera de mal à personne, assura Ayla, sauf s’il nous voit menacés. Par contre, il vaudrait mieux se tenir à l’écart des chevaux. La présence d’étrangers les rend nerveux, et ils risquent de ruer si on les approche. Il faut leur laisser le temps de s’habituer.

  — Cela paraît raisonnable, et je te remercie de nous prévenir, fit la petite femme en dévisageant Ayla avec une insistance déconcertante. Tu viens de loin, Les Mamutoï vivent au-delà de l’embouchure de la Grande Rivière Mère.

  — Tu connais le territoire des Chasseurs de Mammouths ? s’étonna Ayla.

  — Oui, et même encore plus loin à l’est, bien que j’en garde peu de souvenirs. Hochaman sera très heureux de t’en dire davantage. Il adore raconter ses vieilles histoires. Ma mère et lui sont venus de l’est, d’un pays proche de la mer Sans Fin. Je suis née en route. Nous avons vécu avec de nombreux peuples chez qui nous restions parfois plusieurs années. Je me souviens des Mamutoï. Peuple chaleureux, bons chasseurs. Ils souhaitaient nous garder parmi eux.

  — Pourquoi avez-vous refusé ?

  — Hochaman voulait poursuivre le Voyage jusqu’au bout du monde, son rêve était de voir où la terre s’arrêtait. Nous avons rencontré Dalanar peu après la mort de ma mère et nous avons décidé de rester avec lui et de l’aider à exploiter la mine de silex. Mais Hochaman a réalisé son rêve, fit Jerika en coulant un regard vers Dalanar. Il a parcouru la terre, de la mer Sans Fin jusqu’aux Grandes Eaux de l’ouest. Dalanar l’a aidé à terminer son Voyage il y a quelques années, en le portant sur son dos la plupart du chemin. Hochaman ne peut plus marcher, mais personne n’a jamais été aussi loin que lui.

  — A part toi, Jerika, intervint Dalanar avec fierté. Tu as voyagé presque aussi loin.

  — Oh ! fit-elle, moi j’étais obligée. Mais je réprimande Dalanar et voilà que je bavarde autant que lui.

  Jondalar tenait toujours contre lui la jeune femme qu’il avait surprise en train de tailler le silex.

  — J’aimerais que tu me présentes ta compagne de voyage, lui demanda-t-elle.

  — Oh, je suis désolé ! s’excusa Jondalar. Ayla des Mamutoï, je te présente Joplaya des Lanzadonii.

  — Bienvenue à toi, Ayla des Mamutoï, déclara Joplaya en étreignant les mains d’Ayla.

  — Je te salue, Joplaya des Lanzadonii. Jondalar m’a si souvent parlé de toi.

  — Je suis contente d’apprendre qu’il ne m’a pas oubliée, répondit Joplaya en se blottissant de nouveau contre Jondalar.

  Une foule s’était rassemblée autour d’eux, et Ayla dut saluer chaque membre de la Caverne selon les usages. Tout le monde questionnait et dévisageait sans vergogne celle que Jondalar avait ramenée, et elle accueillit l’intervention de Jerika avec soulagement.

  — Allons, assez de questions pour l’instant, déclara-t-elle. Ils ont certainement une quantité d’histoires à nous raconter, mais ils doivent être fatigués. Viens Ayla, je vais te montrer où t’installer. Les animaux ont-ils besoin de quelque chose de particulier.

  — Il faut décharger les chevaux, et leur trouver un endroit où paître. Loup restera avec nous, si tu n’y vois pas d’inconvénient.

  Voyant Jondalar en grande conversation avec Joplaya, elle entreprit seule de débarrasser les chevaux de leurs paniers mais il accourut pour l’aider à transporter les affaires dans la caverne.

  — Je crois savoir où faire paître les chevaux, dit-il. Je les y emmène. J’attacherai Rapide avec une longue corde, veux-tu que j’attache aussi Whinney ?

  — Non, c’est inutile. Elle restera près de Rapide.

  Ayla nota que Jondalar se sentait tellement à l’aise qu’il n’avait même pas demandé l’autorisation pour le pâturage. Après tout, ces gens étaient ses parents, se dit-elle.

  — Je t’accompagne.

  Suivis de Loup, ils marchèrent jusqu’à un vallon à l’herbe tendre traversé par un ruisseau d’eau claire près duquel Jondalar attacha Rapide.

  — Tu viens ? demanda-t-il ensuite à Ayla.

  — Non, je préfère rester un peu avec Whinney.

  — Je retourne m’occuper de nos affaires, alors.

  — Oui, vas-y.

  Il avait l’air pressé, et elle ne lui en tenait pas rigueur. Elle fit signe à Loup de rester. Tout était nouveau pour lui aussi, et comme elle, il avait besoin de s’habituer. Lorsqu’elle rentra à la caverne, Ayla trouva Jondalar et Joplaya plongés dans une discussion animée. Elle hésita à les interrompre.

  — Ayla, fit Jondalar quand il remarqua sa présence. Je parlais de Wymez. Tu montreras à Joplaya la pointe qu’il t’a donnée ?

  Ayla acquiesça d’un signe de tête et Jondalar reprit sa conversation.

  — Attends de la voir. Les Mamutoï sont d’excellents chasseurs de mammouths, ils équipent leurs sagaies de pointes en silex. Elles sont plus efficaces que les pointes en os pour percer les peaux dures et épaisses, surtout si elles sont bien effilées. Wymez a adopté une technique nouvelle. Il façonne des bifaces en chauffant la pierre, ce qui lui permet de tailler des éclats très fins. Il fabrique des pointes aussi longues que ma main et tellement fines que tu n’en croirais pas tes yeux.

  Ils étaient si près l’un de l’autre que leurs deux corps se touchaient presque, et leur tendre complicité troubla Ayla. Ils avaient vécu leurs années d’adolescence ensemble. Quels secrets s’étaient-ils confiés ? Quelles joies et quels chagrins avaient-ils partagés ? Quelles déceptions et quels triomphes dans leur apprentissage de la taille des silex ? Joplaya connaissait-elle mieux Jondalar qu’elle ? se demandait Ayla.

  Auparavant, ils étaient tous deux des étrangers pour les gens qu’ils rencontraient. A présent, elle seule était une étrangère.

  — Et si j’allais chercher cette pointe ? Où l’as-tu rangée ? demanda-t-il à Ayla, en se dirigeant vers la caverne.

  Elle lui donna les indications. Après son départ, elle sourit d’un air contraint à la jeune femme aux cheveux noirs, mais toutes deux restèrent silencieuses. Jondalar fut vite de retour.

  — J’ai demandé à Dalanar de nous rejoindre, annonça-t-il.

  Il défit l’emballage avec précaution et en sortait la délicate lame de silex quand Dalanar arriva. Voyant l’objet, celui-ci le prit et l’examina attentivement.

  — C’est du travail de maître ! s’exclama-t-il. Regarde ça, Joplaya. C’est un biface, et pourtant il est très effilé. Tu imagines la précision et l’habileté qu’il a fallu pour tailler d’aussi fins éclats. Le grain du silex est différent, et le lustre aussi. C’est... c’est presque huileux. Où as-tu trouvé cela, Jondalar ? Le silex est-il d’une nature différente dans l’est ?

  — Non. C’est Wymez, un Mamutoï, qui a inventé un procédé nouveau. C’est le seul tailleur de pierre qui soit digne de toi, Dalanar. Il chauffe la
pierre avant de la travailler, c’est ce qui lui donne son lustre et son grain ; mais c’est surtout ce qui permet d’ôter des éclats extrêmement fins, expliqua Jondalar, enthousiaste.

  Ayla l’observait.

  — Les éclats sautent presque tout seuls. Je te montrerai la technique. Je ne suis pas encore aussi habile que Wymez, mais tu comprendras tout de même. J’aimerais beaucoup rapporter quelques bons silex des Lanzadonii chez moi.

  — Mais tu es ici chez toi, Jondalar, assura Dalanar avec douceur. Enfin, puisque tu le veux, nous irons demain à la mine choisir de belles pierres. J’ai hâte de te voir tailler des bifaces ! Mais es-tu vraiment sûr que cette pointe serve à chasser ? Elle semble tellement fragile !

  — C’est avec ça qu’ils chassent le mammouth. Ça casse plus facilement, c’est vrai, mais le silex perce la peau épaisse mieux que l’os et s’enfonce entre les côtes. J’ai autre chose encore à te montrer. Quelque chose que j’ai découvert dans la vallée d’Ayla, quand je me rétablissais de la blessure que m’avait faite le lion des cavernes. C’est un propulseur qui permet de lancer une sagaie deux fois plus loin ! Je te montrerai.

  — Je crois qu’on nous attend pour manger, Jondalar, déclara Dalanar en remarquant les Lanzadonii rassemblés à l’entrée de la caverne. Tout le monde veut entendre vos récits. Venez, nous serons mieux installés à l’intérieur. Vous nous avez appâtés avec ces animaux qui vous obéissent, ces allusions à l’attaque d’un lion des cavernes, le propulseur, les nouvelles techniques pour tailler les silex. Qu’allez-vous encore nous raconter ?

  — Tout cela n’est rien ! s’exclama Jondalar en riant. Me croirais-tu si je te disais que nous avons vu des pierres qui font du feu, d’autres qui brûlent ? Et des habitations construites avec des os de mammouths, des pointes en ivoire qui tirent les fils, d’énormes bateaux pour chasser des poissons si gigantesques qu’il faudrait cinq hommes grands comme toi pour égaler leur taille !

  Ayla n’avait jamais vu Jondalar si détendu. Il les enlaça, Joplaya et elle et les entraîna vers la caverne.

  — Dis-moi, Joplaya, t’es-tu choisi un compagnon ? demanda-t-il. Je n’ai encore vu personne à qui tu sembles appartenir.

  — Non, je t’attendais, répondit Joplaya en plaisantant.

  — Ah, tu n’as pas changé ! pouffa Jondalar. Les proches cousins ne peuvent pas s’unir, expliqua-t-il à l’adresse d’Ayla.

  — J’ai tout prévu, poursuivit Joplaya. Nous nous enfuirons et nous fonderons notre propre Caverne, comme l’a fait Dalanar. Bien sûr nous n’accepterons que des tailleurs de silex.

  Son rire semblait forcé et elle n’osait regarder que Jondalar.

  — Tu vois ce que je te disais, Ayla ? fit Jondalar en pressant la taille de Joplaya. Elle plaisante tout le temps.

  Mais Ayla ne trouvait pas la plaisanterie si drôle.

  — Sérieusement, Joplaya, tu ne t’es promise à personne ?

  — Echozar m’a demandé, mais je ne me suis pas encore décidée.

  — Echozar ? Je ne crois pas le connaître. C’est un Zelandonii ?

  — Non, il est Lanzadonii. Il nous a rejoints il y a quelques années, après que Dalanar l’a sauvé de la noyade. Il doit être encore dans la caverne. Il est très timide. Tu comprendras quand tu le verras, il a l’air... il est différent. Il n’aime pas rencontrer des étrangers, il ne veut pas aller à la Réunion d’Été des Zelandonii. Mais quand on le connaît mieux, il est très gentil. Et il donnerait sa vie pour Dalanar.

  — Iras-tu à la Réunion d’Été cette année ? Viens au moins assister à notre Cérémonie de l’Union. Oui, nous allons nous unir, Ayla et moi, ajouta-t-il en pressant la taille d’Ayla, cette fois-ci.

  — Je ne sais pas encore, fit Joplaya en baissant les yeux. J’ai toujours su que tu ne t’unirais pas à Marona, mais je n’avais pas imaginé que tu ramènerais une femme de ton Voyage.

  En entendant le nom de la femme à qui il avait promis de s’unir et qu’il avait abandonnée en partant, Jondalar se troubla, et ne remarqua pas qu’Ayla se raidissait en voyant l’homme que Joplaya courait rejoindre à l’entrée de la caverne.

  — Jondalar ! Regarde cet homme !

  La voix d’Ayla le surprit. Il l’observa. Elle était livide.

  — Qu’est-ce qui ne va pas, Ayla ?

  — On dirait Durc ! Ou en tout cas, mon fils lui ressemblera quand il sera adulte. Jondalar, cet homme est un demi-Clan ! Jondalar examina l’homme plus attentivement. Ayla avait raison.

  L’homme que Joplaya poussait vers eux avait l’apparence d’un membre du Clan. Mais quand il approcha, Ayla remarqua des différences notables. D’abord, il était presque aussi grand qu’elle.

  Elle fit un geste furtif de la main, un geste que personne ne pouvait remarquer, mais l’homme écarquilla les yeux, incrédule.

  — Où as-tu appris ça ? demanda-t-il en lui renvoyant son signe.

  Sa voix était profonde, mais claire. Il n’avait pas d’accent, pas de problème de prononciation. C’était bien un esprit mêlé.

  — J’ai été élevée par un clan. Ils m’ont recueillie quand j’étais toute petite. Je ne me souviens pas avoir eu une autre famille.

  — Tu as été élevée par un clan ? s’exclama-t-il. Eux ont maudit ma mère de m’avoir mis au monde ! dit-il d’un ton amer. Quel est donc le clan qui a voulu de toi ?

  — J’avais bien deviné qu’elle n’avait pas l’accent mamutoï ! intervint Jerika.

  On s’attroupait autour d’eux. Jondalar poussa un profond soupir et se redressa. Il avait toujours su que les antécédents d’Ayla viendraient à la surface un jour ou l’autre.

  — Lorsque j’ai connu Ayla, elle ne parlait même pas, Jerika, expliqua-t-il. En tout cas, pas avec des mots. Mais elle m’a sauvé des griffes du lion des cavernes. Et c’est précisément parce qu’elle est experte dans l’art de donner des soins que le Foyer du Mammouth des Mamutoï l’a adoptée.

  — Alors c’est une mamut ? Où est donc son tatouage ? Je ne vois pas de marques sur ses joues, s’étonna Jerika.

  — C’est la femme qui l’a élevée, une guérisseuse de ceux qu’elle appelle le Clan – les Têtes Plates – qui lui a enseigné l’art de soigner, mais elle est aussi puissante qu’une Zelandoni. Mamut avait commencé à l’initier au Service de la Mère, mais nous sommes partis avant qu’il ait terminé. C’est la raison pour laquelle elle n’est pas tatouée.

  — Je me doutais bien qu’elle était une Zelandoni. Évidemment, pour avoir ce pouvoir sur les animaux ! Mais comment une Tête Plate a-t-elle pu lui apprendre à soigner ? s’exclama Dalanar. Vois-tu, avant de rencontrer Echozar, je les prenais pour des animaux. Il m’a fait comprendre qu’ils possédaient une sorte de langage, et maintenant j’apprends qu’ils ont des gens qui soignent. Tu aurais dû m’en parler, Echozar.

  — Comment l’aurais-je pu ? Je ne suis pas une Tête Plate ! s’offusqua Echozar. Je n’ai connu que ma mère, et Andovan.

  Il avait craché le nom, et Ayla s’étonna d’une telle amertume.

  — Tu disais que ta mère avait été maudite ? demanda-t-elle. Et pourtant elle a survécu à la Malédiction Suprême, et t’a élevé ? Ce devait être une femme remarquable.

  Echozar plongea son regard dans les yeux gris bleu de la grande femme blonde. Elle ne chercha pas à le fuir. Il éprouvait une étrange attirance envers cette femme qu’il voyait pour la première fois de sa vie.

  — Elle n’en parlait pas beaucoup, raconta Echozar. Elle avait été attaquée par des hommes qui avaient tué son compagnon parce qu’il essayait de la protéger. C’était le frère du chef de son clan, et on la rendit responsable de sa mort. Le chef disait qu’elle portait malheur. Plus tard, quand il a su qu’elle était enceinte, il l’a prise comme seconde femme. Quand je suis né, il a dit que c’était la preuve qu’elle portait malheur : non seulement elle avait fait mourir son compagnon, mais elle donnait naissance à un enfant difforme. Il lui a jeté la Malédiction Suprême.

  Il se surprenait à se confier à cette inconnue comme il ne l’avait ja
mais fait avec quiconque auparavant.

  — La Malédiction Suprême... je ne comprenais pas ce que c’était. Elle m’a expliqué que tout le monde la fuyait, qu’on la regardait sans la voir. Les autres prétendaient qu’elle était morte. Elle essayait de les obliger à la regarder, mais c’était comme si elle n’existait plus, comme si elle était vraiment morte. Ce devait être une expérience affreuse.

  — Oui, c’était affreux, prononça Ayla d’une voix douce. On n’a plus envie de vivre quand on n’existe plus pour ceux qu’on aime, expliqua-t-elle, le regard embué.

  — Ma mère m’a emporté loin du clan pour mourir, et c’est alors qu’Andovan nous a trouvés. Il était déjà vieux, et il vivait seul. Il ne m’a jamais précisé pourquoi il avait fui sa Caverne. Je crois que Celle Qui Ordonne était une femme cruelle...

  — Andovan... intervint Ayla. N’était-il pas s’armunaï ?

  — Oui, je crois. Il ne parlait pas souvent de son peuple.

  — Nous avons connu la cruauté de cette femme, fit Jondalar d’un air sombre.

  — Andovan nous a recueillis, poursuivit Echozar. Il m’a appris à chasser. Ma mère lui a enseigné le langage des signes, mais elle ne pouvait articuler que peu de mots. Moi, j’ai appris les deux langages, et elle était très étonnée que je puisse reproduire les sons d’Andovan. Il est mort il y a quelques années, et ma mère a perdu goût à la vie. La Malédiction Suprême l’a finalement rattrapée.

  — Qu’as-tu fait ? demanda Jondalar.

  — J’ai vécu seul.

  — Ce n’est pas facile, remarqua Ayla.

  — Non, ce n’est pas facile. J’ai essayé de trouver des gens avec qui habiter, mais aucun clan ne me laissait approcher. Ils me jetaient des pierres en disant que j’étais difforme et que je portais malheur. Ceux des Cavernes ne voulaient pas de moi non plus. Ils disaient que j’étais un monstre, un esprit mêlé, mi-homme, mi-bête. J’étais las d’être rejeté par tous, et je ne voulais plus vivre seul. Un jour, j’ai sauté d’une falaise dans une rivière. Quand je suis revenu à moi, j’ai vu Dalanar qui me regardait. Il m’a ramené dans sa Caverne, et maintenant je suis Echozar des Lanzadonii, conclut-il avec fierté en jetant un coup d’œil à l’homme qu’il respectait tant.

 

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