Moi, l'amour et autres catastrophes

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Moi, l'amour et autres catastrophes Page 25

by Karen Templeton

— Que dis-tu, Greg ?

  Je lis maintenant le désespoir dans ses yeux.

  — Je ne dis rien. Je demande.

  Il s’avance d’un pas. Geoff grogne. Greg jette un coup d’œil au chien et s’arrête. Mais ne bat pas en retraite non plus.

  — Geoff, ça va, dis-je.

  Le chien part en se dandinant s’installer à un endroit qui lui permet de surveiller les moindres mouvements de l’intrus. Un faux mouvement et ses chevilles gainées de socquettes signées appartiendront au passé. Je regarde Greg, les bras toujours croisés.

  — Vas-y.

  — Nous étions bien ensemble, Ginge. Vraiment, vraiment bien. Et je ne peux pas croire que j’ai fichu tout ça en l’air, ou failli le faire.

  Un de mes sourcils se hausse. Waouh, j’ignorais que je savais faire ça !

  — Non Greg, ta première formulation était la bonne. Tu m’as humiliée.

  — Je sais.

  — Ça fait mal. C'est toujours douloureux. Surtout parce que je ne m’attendais pas à un tel comportement de ta part. Quelques mots ne suffiront pas à tout arranger, comme par magie. Comment te faire confiance ? Croire en tes paroles ?

  Il hoche la tête, se frotte la nuque.

  — Oui, c’est ce que je pensais. Laisse-moi te demander… que puis-je faire pour arranger les choses ?

  — Je ne sais pas. Zut, je ne sais même pas si j’ai envie que tu essaies.

  Vous n’imaginez pas combien il m’est difficile de prononcer ces paroles.

  — Sincèrement, je ne vois pas comment notre histoire aurait un avenir. Je ne vais pas me faire avoir deux fois.

  Il avance jusqu’à moi et cette fois, quand le chien grogne, Greg le regarde et lui intime très calmement de se taire. Comme Geoff est doté du courage d’un mouton, il gémit et pose sa tête entre ses pattes.

  Je jette un regard noir à la pauvre bête. Quel chien de garde! Mais les doigts de Greg s’emparent de mon menton et tournent doucement mon visage vers lui. Zut ! Pourquoi faut-il qu’il ait l’air si malheureux ? Pourquoi ne peut-il, comme le ferait n’importe quel autre homme, agir comme si tout était ma faute ?

  — Un jour, tu m’as aimé. Un amour que j’admets ne pas avoir mérité. Ni apprécié, jusqu’à ce qu’il soit trop tard. Je ne le mérite plus. Mais je ferai tout ce qui est en mon pouvoir pour regagner ton amour. Et ta confiance. Si tu m’en donnes la chance.

  Il fouille dans sa poche arrière à la recherche de son portefeuille — seul Greg Munson a l’arrogance de défier ainsi les pickpockets — et en sort une carte.

  — La maison de Scarsdale est en vente. Je vis à New York maintenant. Voici mon nouveau numéro, si tu décides que je vaux la peine d’une seconde chance. Ou tu peux me joindre sur mon portable, n’importe quand. J’ai laissé des consignes au bureau pour qu’on me passe tes appels, peu importe ce que je fais.

  Il se penche, m’embrasse doucement sur le front, puis sort dans le couloir et quitte l’appartement.

  Geoff et moi fixons la porte close un instant. Puis je me lève pour mettre la chaîne et fermer les deux verrous. Waouh ! Je ne sais par quel miracle, la balle est dans mon camp, en ce qui concerne deux hommes différents.

  Mais je n’ai envie de jouer avec aucun des deux.

  Incroyable, presque deux semaines passent sans qu’un seul cataclysme ne se produise. Si l’argent caché dans le sac de croquettes constituait un élément important de l’enquête, la nouvelle n’est pas parvenue jusqu’au journal télévisé. Le coq vit toujours chez nous, malheureusement, mais Nedra et sa couverture magique l’ont dressé à ne pas chanter avant 8 heures. J’ai fini par comprendre que durant l’été, beaucoup des locataires — principalement de profs de Columbia — s’absentaient, et que les étudiants qui sous-louaient leurs appartements ne tenaient pas à attirer l’attention en dénonçant la présence d’un coq.

  Mais Rocky ne va pas devenir notre coloc officiel. Je crois que même si elle ne l’a pas clairement exprimé, Nedra lui cherche un autre foyer. Telle que je connais ma mère, la seule pensée de le renvoyer dans un endroit où il serait maltraité doit la tenir éveillée la nuit.

  Sinon, le match Nedra-Ginger ne se déroule pas aussi mal que je l’aurais cru. Tant mieux, parce que je ne vais pas quitter les lieux de sitôt (gros soupir, mon compte en banque étant parti en fumée). Bien sûr, Nedra et moi continuons de nous empoigner toutes les vingt-quatre heures minimum, mais l’autre jour, alors que nous regardions un talk-show à la télé dans sa chambre, un abruti a commencé à éructer des horreurs sur les droits des femmes. En un clin d’œil, toutes deux nous sommes mises à injurier l’écran et suggérer au crétin, dans des termes précis, où il pouvait se mettre ses idées rétrogrades. Deux minutes plus tard, un autre crétin a envahi l’écran, mais Nedra était d’accord avec ce crétin-là, alors que moi non. Comme d’habitude, nous avons fini par nous invectiver mutuellement, mais bon.

  Elle refuse toujours de m’en dire plus sur son Amant Secret, ce qui me rend folle. Mais après tout, c’est sa vie. Ce qu’elle fait — et avec qui — ne me regarde pas. Alors je me tais.

  Mais je garde les yeux et les oreilles grands ouverts, faites-moi confiance.

  Quant à la saga Nick et Greg… Pas grand-chose à dire, vraiment. Je n’ai vu ou entendu ni l’un ou l’autre depuis la fameuse soirée du sac de croquettes, ce dont je suis ravie. Ce qui ne m’empêche pas de penser à eux. Ni de parler d’eux, comme je viens de le faire une demi-heure durant avec Terrie et Shelby, avec qui je déjeune dans un petit bistrot grec à côté du magasin. Ce qui — je parle du magasin — est une tout autre histoire, dans laquelle je préfère ne pas me lancer.

  — Ma grande, dit Terrie, agitant une fourchette emplie d’épinards dans ma direction, je ne peux pas croire que deux mecs se traînent à tes genoux. Encore que je serais tentée de castrer l’un d’eux. Je ne parle pas de Nick.

  — Tu n’as jamais rencontré Nick, fais-je remarquer.

  — Exact. Mais j’ai rencontré Greg.

  Le problème Davis, qui après deux autres rendez-vous et une séance de batifolage sérieux, est toujours non résolu, a déjà été évoqué. Mais Terrie semble vivre sa pénible situation avec une joie sans pareile.

  Ma situation à moi s’apparente davantage à un dilemme et mon instinct me souffle qu’il serait plus simple de tout effacer et repartir de zéro, plutôt que de tenter de tirer quelque chose de ce gâchis.

  — Si j’ai bien compris, reprend Terrie, tu craques pour Nick, que tu ne connais pas vraiment, mais qui pourrait te plaire, seulement tu ne crois pas que cette relation ait de l’avenir.

  Je réfléchis, enfourne une feuille de vigne farcie et hoche la tête, notant que Shelby, d’un calme inhabituel durant tout le repas, a à peine touché à sa moussaka.

  — Tu as oublié l’aspect : « Ça me flanque une frousse du tonnerre ».

  — Ah-ah. Mais tu n’es pas non plus certaine de ne plus aimer Greg ?

  Je soupire.

  — Sincèrement, je ne sais pas ce que j’éprouve. Si c’était vraiment terminé, je ne devrais plus l’aimer. Et je sais, je sais, je devrais avoir envie de l’étriper. Mais Seigneur, Terrie, tu aurais dû voir son expression. S'il avait montré une once d’arrogance, je lui aurais désigné la porte, je le jure.

  Miam… une olive grecque cachée sous la laitue.

  — … Si je m’étais comportée comme lui, je désirerais une seconde chance. Qui n’a jamais commis d’erreur ?

  Elle me lance un drôle de regard.

  — Ma grande, je choisis sans hésiter le mec craquant plutôt que celui qui donne dans l’erreur. D’ailleurs, je ne t’imagine pas lâcher quelqu’un comme il l’a fait.

  Je lui rends son regard.

  — J’ai lâché Nick.

  — Pas le jour de ton mariage.

  — D’accord. Mais je l’ai quand même blessé. Ou du moins énervé.

  — Tu crois que cet homme qui, d’après ce que tu en sais, a dû avoir des douzaines de femmes, n’en n’a pas énervé une ou deux ?

 
— Ne mélange pas les problèmes.

  Encore qu’à ce stade, je ne sache plus très bien quel est le problème.

  — … Je ne nie pas que Greg ait mal agi. Son regard de chiot perdu n’a pas suffi à tout effacer. Mais…

  — Oh, pour l’amour du ciel, bouclez-la toutes les deux!

  Terrie et moi — comme les convives des autres tables — nous tournons, bouche bée, vers Shelby dont le visage a viré à l’écarlate.

  Les poings sur son assiette, Shelby nous regarde tour à tour, Terrie et moi.

  — Vous vous écoutez, toutes les deux ? Seigneur, à vous deux, vous avez trois hommes fabuleux qui vous courent après ! Et vous ne savez pas quoi en faire? Vous ne comprenez pas ? Vous pouvez faire ce que vous voulez ! Vous êtes libres comme l’air, toutes les options de l’univers sont possibles, des hommes sont à vos pieds, vous traitent comme de précieux trésors et… et…

  Elle bondit de sa chaise. Terrie et moi rattrapons la table de justesse. Shelby s’empare de son sac et jette sa serviette.

  — Putain ! Vous êtes les femmes les plus égocentriques, les plus stupides que j’aie jamais rencontrées de ma vie, lance-t-elle avant de quitter le restaurant en trombe.

  — Je règle l’addition, dit Terry en sortant son porte-monnaie. Toi, rattrape-la.

  Je cours dehors, puis reste plantée au milieu du trottoir, me demandant si Shelby n’a pas sauté dans un taxi. Le trottoir fourmille de passants et je n’ai aucune idée de la direction qu’elle a prise. Mais presque au bout du trottoir sur ma droite, un imprimé à fleurs Laura Ashley attire mon regard. Mes talons de sept centimètres ne me retiennent pas de courir à travers la foule pour la rattraper et l’empoigner, juste au moment où elle allait traverser sans regarder.

  Shelby fait volte-face avec un petit cri de surprise. Les larmes inondent son visage.

  — Laisse-moi ! crie-t-elle, tentant de me repousser.

  — Cours toujours ! Shelby, zut, qu’est-ce qui ne va pas?

  — Ce ne sont pas tes affaires !

  Elle arrache son bras de mon emprise et se lance au milieu de la rue. Des pneus crissent, des Klaxon retentissent, mais Shelby fonce.

  — Merde, Shelby !

  Je m’élance et évite trois vélos et un taxi. Elle accélère, et ses petites ballerines Pappagallo lui donnent un avantage décisif. Qui aurait cru qu’elle pouvait cavaler ainsi ? Mais mes jambes sont deux fois plus longues que les siennes. Je réduis la distance et attrape son poignet pour l’empêcher de s’échapper. Les passants doivent croire à une querelle d’amoureuses, mais je m’en fiche.

  Terrie — en short et en Adidas — nous rattrape, haletante, et s’empare de l’autre poignet de Shelby.

  — Bon, dit-elle, maintenant tu vas nous raconter ce qui se passe, à moins que tu ne préfères que je te fasse parler ? Et crois-moi, je peux te démolir sans même me casser un ongle.

  Mais Shelby ne sourit pas. Son visage se chiffonne à vue d’œil.

  — Pourquoi devrais-je vous expliquer quoi que ce soit ? Vous ne comprendriez pas.

  — Ecoute, sale gamine, rétorque Terrie, si tu n’arrêtes pas tes conneries et ne nous dis pas ce qui se passe, je te jure que tu vas avoir des ennuis !

  Je renchéris.

  — Ouais, c’est vrai.

  Shelby nous regarde tour à tour.

  — Je suis de nouveau enceinte, lâche-t-elle.

  A en juger par son expression ravagée, je doute qu’il s’agisse d’un heureux événement. Je ne crois pas qu’elle comprendrait le vilain petit pincement d’envie qui m’étreint. C'est pas juste, pourquoi en a-t-elle trois, alors, et moi aucun.

  Mais au fait, on ne parle pas de moi.

  — Mais…, dis-je sachant que j’avance en terrain miné, je croyais que Mark avait subi une vasectomie ?

  Shelby se contente de me regarder.

  — Il ne s’est pas fait opérer ?

  — Elle n’a pas marché, dit-elle d’un air écœuré. Voilà ce qui arrive quand on fait confiance à ses copains de la fac de médecine.

  Elle pivote et entreprend de descendre la rue, mais à une vitesse qui donne à penser qu’il ne s’agit pas d’une tentative de fuite. Terrie et moi échangeons un haussement d’épaules et lui emboîtons le pas. Shelby s’arrête devant un nouveau restaurant, avec une terrasse cette fois.

  — J’ai besoin d’une part de gâteau, dit-elle, fixant le plateau d’un serveur qui nous passe sous le nez. Venez. Je vous l’offre.

  — Waouh…

  Terrie nous observe toutes deux par-dessus ses lunettes de soleil.

  — Vous réalisez l’importance de cet instant ?

  Shelby et moi échangeons un regard.

  — Quoi ? demande Shelby avec un rictus. Parce que j’ai dit « putain » ?

  — Ça aussi. Mais réalises-tu que c’est la première fois que tu convoques une réunion de garces ?

  — Ce n’est pas…

  — Si. Allez viens.

  Shelby me jette un regard écarquillé tandis que Terrie la tire par le bras à la terrasse du restaurant et l’assied de force devant une table de la taille d’une capsule de bouteille.

  Je choisis la place en face de Shelby, et fixe son ventre encore plat et m’interrogeant sur la vie qui commence à se former à l’intérieur.

  Stupéfiant. Malgré notre détermination à contrôler la nature, c’est toujours elle qui a le dessus, n’est-ce pas ? Peu importe avec quel talent nous tentons d’ignorer notre utérus, quand nos ovules vieillissant à toute allure réclament d’être fécondés, on ne s’entend plus penser.

  L'instinct de survie nous empoisonne l'existence.

  Mais je l’ai déjà dit, il ne s’agit pas de moi. Ni de Terrie, dont l’expression est la même que la mienne. Je suppose que ses ovules aussi, désespérés, se ratatinent. Shelby dévore deux tiers de son gâteau avant de parler.

  — Désolée, les filles, de vous avoir ainsi agressées.

  Nous émettons toutes deux les dénégations appropriées.

  Un petit sourire erre sur les lèvres rose clair de Shelby, qui hausse les épaules.

  Une nouvelle bouchée de gâteau disparaît, mais ses yeux brillent de larmes.

  — Parfois, je vous envie tant que c’en est insupportable.

  Terrie et moi échangeons des regards surpris.

  — Pourquoi ? demandons-nous en chœur.

  — Pourquoi ? Parce que vous êtes libres. Parce que vous pouvez aller n’importe où, faire ce que vous voulez sans rendre de comptes. Parce que vous n’avez pas deux enfants qui vous dévorent au quotidien. Bientôt trois enfants. Oh, mon Dieu…

  Elle presse sa main tremblante sur sa bouche.

  — … ce que je dis est affreux.

  — Mais chérie, tu désirais des enfants.

  — Je sais, je sais. Et j’imagine que je vais finir par désirer celui-ci. C'est incompréhensible, je le sais. J'adore mes enfants. Et Mark. Et non, je ne cherche pas à m’en convaincre. Mais je regrette…

  Elle laisse échapper un soupir.

  — … Je regrette de ne pas avoir réfléchi davantage, pris un peu de temps pour moi avant de devenir mère, de ne pas avoir expérimenté davantage de possibilités.

  Je hausse les sourcils.

  — Comme… ?

  Nouveau soupir qui s’achève par un petit rire.

  — Qui sait? N’importe quoi. Sapristi, je n’ai même jamais vécu seule ! Avant de me marier, je croyais savoir qui j’étais, ce que je désirais, mais…

  Ses mains s’agitent.

  — … Mais tout ça, c’est le passé. Ce qui me perturbe c’est qu’il y a plusieurs mois déjà, j’ai compris combien mon boulot me manquait. Je meurs d’envie de travailler et de parler à d’autres adultes. D’autre chose que d’apprentissage du pot et d’otites. La vie m’a tant gâtée que cela doit sembler dérisoire… J’étais persuadée que la maternité me comblerait en tant que femme, que je connaîtrais la plénitude. Et parfois, c’est vrai…

  Son regard gris plein de larmes erre entre Terrie et moi.
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br />   — … Mais cela ne me suffit pas. Or un autre bébé s’annonce, et je vais devoir mettre ma vie professionnelle entre parenthèses cinq années de plus. Et je ne veux pas en vouloir à mon mari et mes enfants d’avoir besoin de moi, mais je leur en veux quand même. Et ça me rend malade.

  Nous prenons chacune une de ses mains. Peu importe que je ne comprenne pas tout de ce qui la bouleverse. Il s’agit de ma cousine, mon amie, et elle est totalement perdue et elle souffre. Alors je souffre pour elle, comme toujours depuis que nous sommes petites.

  — Tu as parlé à Mark de ce que tu ressens ? dis-je.

  Elle émet un petit « pfff » censé passer pour un rire.

  — Comme s’il allait comprendre. Il part travailler tous les jours, vit sa vie, rentre à la maison pour retrouver des enfants propres, un dîner raffiné, fait l’amour trois fois par semaine… Hé ! Pour lui la vie est parfaite. Comment pourrait-il comprendre ce que je ressens ?

  Une larme solitaire roule sur sa joue. Terrie lui tend une serviette afin qu’elle se mouche.

  — Laisse-moi deviner. Tu ne lui as pas encore appris ta grossesse ?

  Shelby secoue la tête.

  — Pourquoi?

  Elle s’essuie les yeux. Dans sa jolie petite robe à fleurs, elle ressemble à une petite fille effrayée et sans défense.

  — Parce que je me mettrais dans cet état et que je refuse de passer pour une pleurnicharde. Bon sang, toutes ces salades à propos des choix qui s’offrent aux femmes… Ce sont des co… conneries. Oui, on peut choisir ou non d’avoir des enfants, mais en avoir réduit sacrément nos choix.

  — Pourquoi n’envisages-tu pas de faire garder les deux plus grands ? Mark et toi en avez les moyens.

  Elle secoue la tête, un petit nœud têtu s’est formé entre ses sourcils.

  — Ce sont mes bébés. Je ne les ai pas mis au monde pour que quelqu’un d’autre les élève.

  — Alors ça, tu vois, ce sont des conneries ! s’exclame Terrie. Pour tout dire, chérie, offrir à tes enfants l’opportunité d’explorer le monde sans maman à leurs basques ne signifie pas renoncer à ta responsabilité envers eux. As-tu idée du nombre de femmes qui tueraient pour donner cette chance à leurs petits ?

  Dans les yeux de Shelby, je lis la sensation d’être prise au piège. Par les circonstances, par ses propres peurs, par la barre qu’elle s’est fixée elle-même à une hauteur impossible. Rien de ce que Terrie ou moi pourrons dire ne fera un iota de différence. Peu importe le choix effectué par Shelby, elle se le reprochera de toute façon.

 

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