Moi, l'amour et autres catastrophes

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Moi, l'amour et autres catastrophes Page 27

by Karen Templeton


  Certains trouvent des chatons abandonnés sur leur paillasson. Ou des bébés. Nous, nous trouvons des coqs.

  Je la fixe. Elle soupire.

  — Je vais lui chercher un endroit sympa à la campagne, je le jure. Où il vivra le reste de son existence naturelle.

  Ma mère enserre mes mains dans les siennes, ce qui manque me faire sursauter. Je remarque les cernes qui soulignent ses yeux… et l’inquiétude qui y rôde. Oh mon Dieu, Nonna a raison.

  — Je sais qu’être privée de ton propre appart doit te miner, dit-elle. A ton âge, si j’avais dû retourner vivre avec ma mère, je crois que je me serais suicidée.

  Je peux le comprendre. Si vous trouvez que Nedra est un cas, vous devriez rencontrer Mamie Bernice, qui vit maintenant à Phoenix. Quand mes grands-parents habitaient encore le quartier, je me souviens de cette petite boucherie où elle avait l’habitude de se rendre, dans Amsterdam Avenue. Un jour où je l’avais accompagnée, je devais avoir sept ou huit ans, elle a pratiquement fait pleurer le boucher, en demandant à examiner un à un tous les poulets derrière la vitrine. Peut-être ne suis-je pas si mal lotie avec Nedra, non ?

  Je souris à ma mère.

  — Ça va, Nedra. Je t’assure.

  — Bien sûr. Tu es ma fille.

  Elle m’embrasse sur le front avant de se lever, avec peine, semble-t-il.

  — Je suis plus fatiguée que je ne le pensais, dit-elle dans un gigantesque bâillement. Je crois que je vais aller me coucher avant de m’écrouler. Bonne nuit, chérie.

  — Bonne nuit.

  Quand elle est partie, je me surprends à contempler mes tubes de peinture sur l’étagère du placard. Puis à les sortir. Puis à les ouvrir.

  Les doigts me démangent.

  Quel mal y aurait-il à jouer un peu avec, une fois de temps en temps ? Vous savez, comme un hobby ? Pas pour gagner de l’argent. En ce moment, le temps ne me manque pas, surtout depuis que j’ai quasiment renoncé à toute vie amoureuse.

  Tandis que cette pensée déprimante fraie son chemin dans mon esprit, mon portable sonne. Je me pétrifie. Est-ce Nick ? Greg ? Terrie ?

  Vais-je rester plantée là toute la nuit à me poser la question ou consulter l’identificateur d’appels ?

  C'est Paula.

  — Salut, toi, dit-elle. Quelle idée de t’enfuir ainsi le 4 juillet sans même dire au revoir ?

  — Je suis désolée, Paula, c’est juste que…

  — ... que toi et Nick êtes des idiots, voilà. Si je vous tenais sous la main, je taperais vos têtes l’une contre l’autre.

  Je ferme les yeux.

  — Que sais-tu exactement ?

  — Voyons voir. La fête se termine, Nick et toi ne redescendez jamais du toit — en tout cas vous ne redescendez pas ici — et oh ! une heure et demie plus tard, tu sors en courant sans même reprendre ton saladier. Qui à propos est lavé et n’attend que toi. Alors Frank et moi en avons déduit que vous aviez fait l’amour et qu’un de vous deux avait eu la frousse. Et moi je parie que cette personne, c’est toi.

  J’hésite.

  — C'était une erreur, Paula. Par dépit après une rupture, tu vois ?

  — Ne crache pas sur les liaisons par dépit après une rupture. C'est ainsi que ça a commencé entre Frank et moi.

  — Vraiment ?

  — Tu ne t’en souviens pas ? C'est vrai que nous n’étions pas très proches à l’époque.

  Non que nous le soyons maintenant.

  — Je sortais avec ce nul de Joe Simeone. Nous étions à deux doigts de nous fiancer. Un jour, lors d’une fête chez un de ses amis, j’ai voulu me rendre à la salle de bains, et en passant devant une des chambres, j’ai entendu s’en échapper le bruit familier d’un grognement masculin, un bruit, en fait, que j’avais entendu pas plus tard que la nuit précédente, dans ma propre oreille, si tu vois ce que je veux dire. J’ai failli entrer pour prendre Joe en flagrant délit, seulement je suis une dame, n’est-ce pas ? Alors j’ai attendu dans le couloir, jusqu’à ce que cette petite garce de Cindy Montefiore ne sorte, les cheveux tout emmêlés. A ma vue, elle a failli se trouver mal. Mais ce n’était pas elle qui m’intéressait — trop facile — alors j’ai fait irruption devant Joe l’imbécile, qui n’avait même pas encore remonté son pantalon…

  Je vois le tableau.

  — … seulement après avoir tabassé Joe, je me suis mise à pleurer comme une perdue. Alors Frank m’a emmenée de là et m’a consolée. Un mois plus tard, j’étais enceinte, nous nous sommes mariés, et depuis nous vivons heureux et nous avons beaucoup d’enfants. Bon, pourquoi je te raconte ça, hein ? Je n’appelle pas pour ça, mais parce que Papy Sal a décidé qu’il avait envie de faire une grande fête pour ses quatre-vingt-dix ans, dans deux semaines, et devine qui a été choisie pour l’organiser ?

  Et devinez qui semble secrètement ravie de cet honneur ? Sal est le beau-frère de Nonna, le frère de mon grand-père. L'un des deux survivants de huit frères et sœurs, il est déterminé à inviter à cette fête tous ceux de sa connaissance qui respirent encore. Ce qui inclut ma grand-mère.

  — Tu l’emmèneras ? demande Paula.

  Je dois retenir ma respiration un peu trop longtemps car elle ajoute :

  — Je doute que Nick soit dans le secteur, si c’est ce qui t’inquiète. Il ne s’agit pas de son côté de la famille. De plus, je crois qu’il est de service ce jour-là. Et non, ce n’est pas un piège. Fais-moi confiance, je n’ai aucune énergie pour jouer les entremetteuses.

  Je ne pense pas que ce soit une bonne idée, mais j’accepte. Puis je me rends dans la chambre voisine où, assise dans un profond fauteuil, ma grand-mère somnole devant un feuilleton policier. Elle s’éveille en sursaut quand j’éteins la télé.

  — Flûte, je ne vois plus la fin de rien ces temps-ci.

  Mais son humeur s’améliore quand j’évoque la fête. Son visage s’illumine. C'est curieux, parce que Nedra essaie de la sortir au moins une fois par semaine, ne serait-ce que pour déjeuner ou faire un peu de shopping, mais elle refuse presque toujours. Aujourd’hui, son expression donnerait à croire que la pauvre femme vient de passer des années en prison et qu’on lui offre son premier sursis.

  — Une fête ? Pour Salvatore, dis-tu ?

  — Oui.

  Son sourire s’éteint et elle grimace.

  — Quel est le problème ?

  Je viens juste de m’en souvenir. Salvatore Petrocelli est un emmerdeur.

  Pleine d’espoir, je m’assieds au bord du lit.

  — Alors tu ne veux pas y aller ?

  Un éclair de surprise traverse ses yeux noirs.

  — Pourquoi penses-tu une chose pareille ? Bien sûr que si je veux y aller. Lui aussi pense que je suis une emmerdeuse.

  Elle fait ensuite un… un truc avec les épaules que je ne lui ai jamais vu faire auparavant. Comme si elle… bombait la poitrine ?

  — … Mais seulement si tu m’emmènes acheter quelque chose de nouveau ? Je veux avoir l’air…

  Elle tourne vers moi un regard diabolique.

  — … più caldo.

  14

  Sexy, hein ?

  C'est ça. Essayez d’habiller une octogénaire d’un mètre quarante-six, cinquante-cinq kilos, et dont les seins touchent presque le nombril. Cette expédition shopping dure depuis trois heures. Chaque fois que je tente d’entraîner Nonna vers un article vaguement susceptible de lui aller, et accessoirement ne pas me faire fuir, elle hurle quelque chose en italien et me frappe avec son sac à main.

  Rappelez-moi de demander à Nedra ce que j’ai fait, enfant, pour m’attirer un tel châtiment.

  — Mon placard est plein de vêtements de vieilles, dit Nonna. Maintenant je veux ressembler à Britney Spears !

  Je vous jure que je n’invente rien.

  Je fais remarquer, avec autant de diplomatie que me le permettent ma migraine, mes pieds enflés et mes nerfs en pelote, que la majorité des femmes de l’âge de Britney Spears ne peuvent pas s’habiller comme Britney Spears. Et que peu de femmes plus âgées en ont envie.


  Elle me tape de nouveau et m’entraîne au rayon junior voisin, désignant un… truc. Vulgaire, orné de paillettes et de chaînes. Un peu plus loin, je remarque une lolita qui plaque contre ses seins inexistants une robe de la taille d’un Kleenex. A côté, deux autres lolitas en minijupes moulantes, avec des débardeurs découvrant leur nombril et beaucoup trop de maquillage — leurs âges additionnés, elles restent plus jeunes que moi — gloussent en faisant claquer leurs chewing-gums. Ma grand-mère regarde leurs hideuses chaussures à semelles compensées.

  — Je peux avoir les mêmes ?

  — Tu as déjà les mêmes, dis-je en désignant ses chaussures orthopédiques.

  Elle baisse le regard. Hoche la tête. Continue de tripoter le truc vulgaire. Soudain je comprends. Je ne sais pas pourquoi cela m’a pris si longtemps. Nonna sait qu’elle ne peut rien porter de tout ça. Et je parie qu’en sortant d’ici, elle se laissera guider au bon rayon, choisir une tenue qui ne fera pâlir personne. Et qui ne lui donnera pas l’air d’une prostituée à la retraite. Nonna n’a jamais eu l’opportunité d’être une lolita. Elle a été élevée dans une minuscule ville d’Italie par des parents stricts, qui vivaient dans la terreur de Dieu. Si ce genre de vêtements avaient existé à l’époque, elle n’aurait jamais été autorisée ne serait-ce qu’à les regarder. Alors ne parlons pas de les porter.

  Elle s’amuse, voilà tout. Et me répond comme il lui a toujours été interdit de le faire à sa propre mère. Ce n’est pas ma conception personnelle du divertissement, mais elle a quatre-vingts ans : est-ce à moi de la juger ?

  Nonna s’empare d’un débardeur pailleté identique à ceux portés par les lolitas.

  — Qu’en penses-tu ?

  — Ça se porte sans soutien-gorge, Nonna.

  — Et alors ?

  — Et alors tes seins vont dépasser en bas.

  Elle fixe d’un regard noir son reflet dans le miroir avant de raccrocher le top avec un soupir.

  — Je suis une emmerdeuse, sì?

  — Tu l’as dit. Viens. Allons au troisième étage.

  Comme je le soupçonnais, elle me suit timidement — pfff, il était temps que la mamie se calme — et en un quart d’heure, nous avons sélectionné un ravissant ensemble en coton imprimé d’un éclatant motif fleuri. Une robe avec laquelle elle peut porter ce chef-d’œuvre de technologie qu’elle appelle un soutien-gorge.

  Elle me sourit dans le miroir de la cabine d’essayage.

  — Je suis sexy, non ?

  — Nonna, ils vont tous en tomber raides morts.

  — Per Dio !

  Elle se signe, les yeux écarquillés.

  — … Surveille tes paroles. Tous ceux de cette fête ont déjà un pied dans la tombe.

  En quittant le rayon, elle saisit mon bras et désigne du menton le salon de beauté du magasin.

  — Je devrais couper un peu mes cheveux, peut-être.

  Je retiens un cri de surprise. La chevelure de Nonna lui tombe jusqu’à la taille, depuis toujours. A ma connaissance, personne ne s’en est jamais approché avec des ciseaux.

  — Je peux te les épointer, si tu veux.

  Mais elle secoue la tête.

  — Je ne suis jamais allée dans un institut de beauté, dit-elle d’une voix nostalgique.

  Je vois. Au contraire de tout à l’heure, je saisis l’urgence de la situation. Elle a quatre-vingts ans. Zut, quoi qu’elle ait envie de faire dans la vie, elle a intérêt à le faire sur-le-champ.

  — Allons voir si nous pouvons obtenir un rendez-vous, dis-je. Et tant que nous y sommes, je vais peut-être leur demander de couper quelques centimètres de cette tignasse.

  Un peu plus tard, nous attendons qu’on nous indique une table libre dans le salon de thé. Le seul salon de thé dans un rayon de dix pâtés de maisons autour du magasin dans lequel Nonna a daigné poser un pied.

  — Laisse-moi voir encore ton miroir, demande Nonna, les yeux brillants.

  Avec un sourire, je sors mon miroir de poche de mon sac. Au lieu de raccourcir ses cheveux de cinq centimètres, elle a demandé qu’on ne lui en laisse que cinq centimètres. Et elle est absolument adorable. Comme un elfe italien. Qui aurait cru qu’elle cachait de si mignonnes oreilles sous sa masse de cheveux ? Sincèrement, elle ne fait pas plus de soixante-quinze ans. La dame du salon a insisté pour lui épiler les sourcils et passer du blush sur ses joues. La transformation est vraiment saisissante.

  — Je suis aussi sexy que toi, dit-elle.

  Ah oui. Moi aussi, je me suis fait couper les cheveux. Je ressemble toujours à un caniche, mais un caniche tondu. Et au cou superbe.

  — Par ici, nous enjoint une hôtesse aux longs cils.

  Elle nous conduit à un box à la lumière tamisée. Pas trop tôt. Je me glisse sur la banquette avec un grand soupir, ferme mes paupières tandis que mes jambes n’osent croire qu’elles n’ont plus à me porter. Mon Dieu. J’ai connu des orgasmes moins agréables.

  Ma main heurte quelque chose. J’ouvre un œil et distingue un exemplaire plié du Post, oublié sur la banquette. Je m’en empare et parcours l’article.

  — Alors, dit Nonna en me rendant mon miroir. Que vas-tu porter à cette fête ?

  — Aucune idée, dis-je, distraite, avant de pousser un cri. Oh, mon Dieu…

  Je lève les yeux.

  La police a arrêté le meurtrier de Brice.

  Je lis l’article du journal à Nonna qui mastique avec lenteur son club-sandwich à la dinde, sans se soucier du filet de mayonnaise qui coule sur son menton. Cela m’oblige à parler plus fort que le brouhaha du restaurant, mais malgré cela, je ne suis pas sûre qu’elle entende tout ce que je dis.

  — Ton patron, il trafiquait la drogue ?

  — Apparemment.

  Donc finalement, le meurtrier n’était pas un ex. Ni Carole, l’architecte d’intérieur senior mécontente (de vous à moi, je la soupçonnais plus ou moins). Ni même un architecte d’intérieur. Juste un tueur à gages doté d’un karma pourri.

  Je ne suis pas certaine de comprendre tous les détails, ni d’en avoir envie. Ce que j’éprouve, par contre, à cette lecture, c’est une immense satisfaction en pensant à Nick. Et de la fierté. Il est même cité quelque part, où il remercie tout le monde pour leur coopération. Vous croyez que je suis comprise dedans ?

  Je me rends compte aussi que j’en ai fini avec ma culpabilité de ne pas ressentir davantage de tristesse pour le meurtre de Brice. Je ne pense pas qu’il méritait de mourir, non, mais je ne suis pas certaine non plus qu’il méritait de vivre. Désolée, mais la drogue m’effraie. Et ceux qui en prennent — ou en vendent — encore plus. C'est sûrement pour cela que je ne suis pas invitée à beaucoup de fêtes.

  Sauf celles où la moyenne d’âge est de quatre-vingt-cinq ans.

  — Tu devrais l’appeler, dit Nonna, tout en essayant d’extirper je ne sais quoi de son appareil dentaire avec sa langue.

  — Qui ?

  — Nick. Pour le féliciter. Per Dio !

  Elle met le doigt dans sa bouche, farfouille un moment et déloge un morceau de dinde. Elle me l’agite sous le nez une seconde en lançant :

  — Ce serait gentil, sì?

  Pas question.

  Je trouve les fleurs en rentrant. Des roses rouges. Trois douzaines. Je devrais trouver le geste ringard. Au lieu de quoi, mes poumons exhalent un long :

  — Oooooh…

  Ma mère prend la carte dans la boîte pour me la mettre sous le nez.

  — Peut-être devrais-tu d’abord regarder qui les envoie avant de te pâmer? Oh mon Dieu! Où sont tes cheveux?

  — Quelque part entre la 34e et Broadway.

  — Et ta grand-mère ? J’espère que la réponse n’est pas la même.

  Je continue de dévorer des yeux les roses, si joliment nichées dans leur petit couffin tapissé de papier de soie.

  — Elle parle avec le portier. Elle va monter.

  — Tu l’as laissée seule ?

  Nedra se précipite pour ouvrir la porte et regarder dans le couloir.

  — Pour l�
��amour du ciel, dis-je en ouvrant l’enveloppe, elle peut trouver le chemin jusqu’à l’ascenseur toute seule.

  Ma mère revient au pas de charge et m’observe d’un air écœuré, certainement parce que je ne le suis pas.

  — J’en déduis à ton expression, dis-je, que tu sais déjà de qui elles sont ?

  — Et alors ? J’ai remis la carte, non ?

  Bien sûr, elles sont de Greg. Vous ne pensiez quand même pas que c’était le style de Nick ? Mais aucun message ne les accompagne. Etrange. Dans un sens, cela m’intrigue.

  — Donc ce type sait brandir une carte de crédit et commander un paquet de roses, dit Nedra. Quelle histoire.

  Je réunis les fleurs sans répondre et pars à la recherche d’un vase. Remarquant que je me dirige vers la cuisine, Geoff trotte à mes côtés, toujours plein d’espoir.

  Je fais semblant de ne pas entendre ses paroles à cause de l’eau qui coule. Ce sont de très belles roses. J’ignorais que j’étais si sensible aux gestes romantiques et clichés. Du bruit dans le couloir trahit le retour de ma grand-mère, suivi d’un « Mon Dieu! Qu’est-il arrivé à tes cheveux ? »

  Mon sac posé sur la table de la cuisine se met soudain à sonner. Geoff, qui doit me confondre avec Nonna, aboie jusqu’à ce que je réponde.

  — Mademoiselle Petrocelli ? Dana Alsworth, d’Alsworth Interiors. Vous êtes venue chez nous pour un entretien il y a deux semaines.

  Il faut entendre son accent du Sud pour la croire. Née et élevée à Dallas, Dana Alsworth a épousé un homme du Nord il doit y avoir trente ans, et a dû rapporter son accent dans ses bagages Gucci. Je ravale mon envie instinctive de répondre « Oui m’ame » avec le même accent, et me contente d’un simple :

  — Oui ?

  — Eh bien…

  Un petit rire léger, un brin nerveux, résonne dans le téléphone.

  — Je crois que vous avez travaillé avec Annabelle Souter avant… quand vous étiez chez Fanning ?

  — Oui, effectivement. C'était l’une de mes meilleures clientes.

  Elle dépensait l’argent de son mari comme si elle devait mourir le lendemain.

  — Eh bien, mon petit, elle nous a confié un projet il y a deux semaines. Depuis, elle a avalé tout cru et digéré les meilleures de mes architectes. Elle dit ne vouloir travailler qu’avec vous.

 

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