by Alain-Fournier, Henri; Costello, Anthony; Howell, Anthony
Oh, my very sweet,
I will lay my head, will lay it on your dress,
In the low cool room where we take our ease
And it will be as if, since break of day,
We have been out, among the ripened wheat,
Out in the wheat the whole mad day!
As if the two of us had heard,
On leaving town, the heavy creaking
Of some lowly door, a worm-eaten shutter being eased.
And when we’re beyond that, in the fields,
There are the wheezy combines juddering out the rumble of their ilk.
And then it will be as if we had come
At dusk to the humble room
Of some strange farm
Simply to ask for some milk.
Miracles
SUR LA NACELLE …
Sur la nacelle
Une ombrelle
De satin.
La tache est rouge
L’eau ne bouge
Ce matin.
Sous l’ombre chaude
Un reflet rôde
D’émeraude.
Et de prés frais
Et de forêts
On sent à peine
L’haleine.
Pour un midi brûlant d’été,
Un ruisseau clair, une tourelle,
Ne va pas rêver, Isabelle,
De soleil et de liberté.
JE PENSE À CELLES …
Je pense à celles qui seront,
Frêles et brunes au salon
À l’heure grise
Avant les lampes allumées
Petites robes, soies froissées
Nos filles.
Je pense aux heures de plus tard
Sonneuses lentes de départ
[…] portant leurs pas vers la mer
[…] dans leurs yeux clairs
De larmes.
TRISTESSES D’ ÉTÉ
Dimanche
Les rideaux sont fermés, aux carrefours déserts…
Fraîches, Elles ont quitté le rouet et la porte
Pour la fraîcheur et la gaieté des lointains verts…
… Quelque part, un piano sanglote…
*
Et ce matin pourtant, parce que c’était l’Été,
on avait cru les voir sourire en robe blanche;
Et pourtant, ce matin, les cloches ont chanté
parce que c’était Dimanche…
*
Désespoirs ensoleillés d’après-midi déserts,
Poussière… silence… et rayons des gaietés mortes,
Jours de rideaux baissés, tristes comme des hivers!..
.. Et, pleureuses venues.. et lasses.., des notes
Qu’un piano,.. quelque part.., d’oubliée, sanglote…
ADOLESCENTS
(À Monsieur M. Maeterlinck.)
«… et cherchez doucement
Avec vos mains de sang qui s’écorchent dans l’ombre.»
De la Colline – enivrés de printemps,
d’avoir senti rêver les sapins trop longtemps,
et d’avoir regardé bleuir au loin la Ville,
Nous sommes descendus.. au soir.. et au printemps.
Nous étions vingt, nous étions mille
Et nos sanglots d’amour s’en allaient vers la Ville.
*
Nous avons passé les seuils et leurs treilles,
et nous avons frôlé l’âme petite et vieille
gardienne du chemin, berceuse des hameaux,
et familière, au soir, quand les âtres s’égayent.
Au souffle calme des hameaux,
Nous sommes descendus en cueillant des rameaux.
*
La gloire du couchant s’en est allée,
II a fait trop clair de lune sur la vallée,
La ville s’est éteinte.. et nous allons à pied..
à pieds percés aux graviers blancs de la vallée.
En pleurant le bois muet des ramiers,
Nous marchons vers la Mort dans le sang de nos pieds.
*
Ho!.. Mon coeur a perdu le reste de la bande!..
Mon coeur est froid de lune et tout seul dans la lande!..
Qui donc va m’enseigner la route du Matin?
Qui donc viendrait porteur de toile et de lavande?
Les charrettes, ce soir, en grelots aux chemins,
en fanaux cahotés, sont parties par la lande..
.. Il ne passera plus de bon Samaritain.
*
Ho!.. Voici qu’il y a quelque chose sur la lande,
La douce ombre de la Tour sur toute la lande
de la Tour mystérieuse d’être avant le Matin!..
– et sur mon coeur et sur mes mains..
(J’ai retrouvé les bons chemins..
Oh! les grelots sont clairs sur le nouveau chemin..
Oh! les grelots sont clairs de chanter au matin!)
– et sur mon coeur et sur mes mains,
Crépuscule avant l’aube et sur toute la lande,
sur tout mon sang, bonne lavande,
– et sur mon coeur et sur mes mains,
ta chevelure, ô Mélisande!
L’ONDÉE …
«Une touffe de fleurs où trembleraient des larmes.»
(A. Samain.)
L’ondée a fait rentrer les enfants en déroute,
La nuit vient lente et fraîche au silence des routes,
Et mon coeur au jardin s’épanche goutte à goutte
Si discret, maintenant, et si pur… qu’à l’aimer
On pourrait se risquer − Oh! Belle qui viendrez,
Vous ouvrirez la grille un soir mouillé de mai.
*
Timidement, avec des doigts qui se méfient,
Et qui tremblent… un peu, vous ouvrirez, ravie
D’amour et de fraîcheur et de frayeur… un peu:
Les lilas aux barreaux sont encore lourds de pluie…
Qui sait si les lilas, inclinés, lourds d’aveux,
Vont pas pleurer sur vos cheveux!..
*
Vous irez, doucement, tout le long des bordures,
Chercher des fleurs pour vous les mettre à la ceinture
Mes pensées frissonnantes pour en faire un bouquet;
Gardez-vous bien, surtout, de passer aux sentiers
Où les herbes, ce soir, ont d’étranges allures,
Où les herbes sont folles et meurent de rêver!..
Si vous alliez mouiller vos petits pieds!…
*
Les rondes folles se sont tues.
– Les herbes folles vont dormir.
L’allée embaume à en mourir…
Tu peux venir, ma bienvenue!
Tout le soir, sagement, tu descendras l’allée
Tiède d’amour, de pétales et de rosée.
Tu viendras t’accouder au ruisseau de mon coeur,
Y délier ta cueillette, y délier fleur à fleur
La candeur des jasmins et l’orgueil des pensées.
– Et tout le soir, dans l’ombre humide et parfumée,
Débordant de printemps, de pluie et de bonheur,
Les larges eaux de paix, les eaux fleurdelisées
Rouleront vers la Nuit des branches et des fleurs…
CONTE DU SOLEIL ET DE LA ROUTE
(À une petite fille.)
− Un peu plus d’ombre sous les marronniers des places,
Un peu plus de soleil sur la grand’ route lasse…
Des noces passeront, aux «beaux jours» étouffants,
sur la grand’ route, au grand soleil, et sur deux rangs.
De très longs cortèges de noces campagnardes
avec de beaux habits dont tout le monde parle
Et de petits enfants, dans la noce, effarés
auront de très petits «gros chagrins» ignorés…
− Je songe à l’Un, petit garçon, qui me ressemble
et, les matins légers de printemps, sous les trembles,
à ca
use du ciel tiède et des haies d’églantiers,
parce qu’il était seul, qu’on l’avait invité,
se prenait à rêver à la noce d’Été:
«… On me “mettra” peut-être − on l’a dit − avec Elle
qui me fait pleurer dans mon lit, et qui est belle…
(Si vous saviez − les soirs, quelquefois − oh mamans,
les pleurs de tristesse et d’amour de vos enfants!)
«… J’aurai mon grand chapeau de paille neuve et blanche;
sur mon bras la dentelle envolée de sa manche…»
− Et je rêve son rêve aux habits de Dimanche.
«… Oh! le beau temps d’amour et d’Été qu’il fera,
Et qu’elle sera douce et penchée, à mon bras.
J’irai à petits pas. Je tiendrai son ombrelle.
Très doucement, je lui dirai “Mademoiselle”
d’abord − Et puis, le soir, peut-être, j’oserai,
si l’étape est très longue, et si le soir est frais,
serrer si fort son bras, et lui dire si près,
à perdre haleine, et sans chercher, des mots si vrais
qu’elle en aura “ses” yeux mouillés – des mots si tendres
qu’elle me répondra, sans que personne entende…»
− Et je songe, à présent, aux mariées pas jolies
qu’on voit, les matins chauds, descendre des mairies
Sur la route aveuglante, en musique, et traîner
des couples en cortège, aux habits étrennés.
– Et je songe, dans la poussière de leurs traînes
où passent, deux à deux, les fillettes hautaines
les fillettes en blanc, aux manches de dentelles,
Et les garçons venus des grandes Villes – laids,
avec de laids bouquets de fleurs artificielles,
– je songe aux petits gars oubliés, affolés
qu’on n’a mis, «au dernier moment», avec personne
− aux petits gars des bourgs, amoureux bousculés
par le cortège au pas ridicule et rythmé
− aux petits gars qui ne s’en vont avec personne
dans le cortège qui s’en va, fier et traîné
vers l’allégresse sans raison, là-bas, qui sonne.
− Et tout petits, tout éperdus, le long des rangs,
ne peuvent même plus retrouver leurs mamans.
− Un surtout… qui me ressemble de plus en plus!
un surtout, que je vois – un surtout… a perdu
au grand vent poussiéreux, au grand soleil de joie,
son beau chapeau tout neuf, blanc de paille et de soie,
et je le vois… sur la route… qui court après
− et perd le défilé des «Messieurs» et des «Dames» −
court après – et fait rire de lui – court après,
aveuglé de soleil, de poussière et de larmes…
SUR CE GRAND CHEMIN GRIS …
«Je suis plus près de toi dans l’obscurité»
(Pelléas et Mélisande, acte IV, scène 3)
Sur ce Grand Chemin gris
où nous ont amenés deux sentiers de traverse,
nous voilà pris tous deux par l’orage et l’averse
et la nuit. Pas d’abris
en vue. Il va falloir marcher par les ornières
en guettant aux détours les premières lumières
lointaines d’un pays…
Il va falloir marcher en se donnant la main
– Voyageurs des mois gris, perdus aux grands chemins
devant soi, par la nuit…
*
Nous ne pourrons pas lire aux bornes des chemins,
nous ne pourrons pas lire à cause de la nuit,
de la nuit sans étoile, à cause de la pluie.
*
Et pourtant nous irons, aveugles et confiants
et contents de la route et contents de la vie,
comme si nous étions deux tout petits enfants
sur le chemin du bourg, sous un grand parapluie.
*
Nous irons au hasard, tous deux: une ombre, un pas…
Et nous pardonnerons à la nuit, dans les bois,
à la nuit sur nos pas, à la nuit qui fait perdre.
Puisque j’ai dit: «Viens près de moi,.. plus près de moi»,
de crainte de te perdre.
Puisque tu as, ce soir, osé prendre mes doigts,
dans l’ombre qui fait peur, avec tes doigts timides
pour ne plus avoir peur et pour que je te guide.
*
Nous sortirons parfois du chemin, tous les deux
et nous aurons parfois de l’eau jusqu’aux chevilles;
les rafales de vent, de pluie et de ramilles
arrêteront nos pas, et fermeront nos yeux…
Et nous n’en voudrons pas davantage à la pluie
Puisqu’elle est, quelque part, la seule pauvre amie
de ceux qui pensent, éveillés, jusqu’au matin,
et, tout seuls, dans leur lit, avec la fièvre aux mains,
l’écoutent, consolés, leur tenir compagnie
de son petit sanglot par la plaine endormie…
et ruisseler toute la nuit dans les jardins…
*
… Nous irons si longtemps, si longtemps, par la plaine
qu’à la fin… à la fin, exténuée, hors d’haleine
et le coeur gros, tu ne pourras plus faire un pas.
– Alors, c’est moi, soudain, qui porterai ta peine,
ta peine reposée et bercée à mon pas,
qui sera presque du bonheur, puisqu’il faudra
que je te prenne dans mes bras…
– Alors… Alors, il faudra bien que ces lointaines
ces premières lueurs lointaines d’un pays,
à mes yeux fatigués d’avoir fouillé la nuit,
finissent par briller, paisibles et soudaines.
… Rassurantes lueurs du bourg et des domaines
… lampes de la veillée et veilleuses lointaines
et foyer, quelque part, d’une auberge – lueur
de l’auberge où, ce soir, j’emporte ma compagne,
de l’auberge, là-bas, que tout ce soir je gagne,
ton coeur contre mon coeur…
Et dans la toile rude à l’odeur de campagne
où nous reposerons nos membres douloureux
en rêvant au bonheur tranquille des campagnes,
en parlant de la nuit et des chemins peureux,
– ta chair sera si douce et tiède et parfumée,
ta douce chair d’amour, ta chair de bien-aimée,
ta chair où l’on s’endort, ta chair consolatrice,
qu’elle sera pareille aux linges des églises,
délicats et divins, linges de soie et d’or,
que l’on met soigneusement autour des calices,
pour que le sang de ceux «tristes jusqu’à la mort»,
qui font l’étape, un soir, seuls avec une croix,
en laissant sur la route, où, silencieux, ils passent,
un peu de pauvre sang que des femmes ramassent,
– pour que ce sang précieux, dans les calices froids,
coulé des pieds, les soirs, coulé des faces lasses
– pour que ce sang des Christs ait moins mal et moins froid.
RONDE
«Nous n’irons plus au bois
Les lauriers sont coupés…»
Le soir est doux, la ronde est folle,
Donnez vos mains, ô mes frivoles,
Allons danser sous les tilleuls!…
Nos coeurs et vos jupes s’envolent;
le soir est bleu, mon âme est folle;
Allons tourner sous les tilleuls!…
*
… On tournera jusqu’au froid
avec «la belle que voilà» …
*
La fillette entre dans la ronde;
La place est brune, la ronde est blo
nde
Et le soir chante au pas des portes…
Mon âme est la fillette blonde:
Nous n’irons pas courir le monde!
Restons danser au pas des portes!…
*
… On a dansé jusqu’au froid
avec «la belle que voilà» …
*
Encore un tour avant la nuit!
Un tour, avant d’avoir grandi!
Un tour, et nous irons dormir…
Au dernier, sous les marronniers,
Au dernier tour, on a tourné..
on a tourné jusqu’à mourir!
*
… On a tourné jusqu’à mourir…
À TRAVERS LES ÉTÉS …
(À une Jeune Fille.
À une Maison.
À Francis Jammes.)
Attendue
à travers les étés qui s’ennuient dans les cours
en silence
et qui pleurent d’ennui..
Sous le soleil ancien de mes après-midi
lourds de silence,
solitaires et rêveurs d’amour
d’amours sous des glycines, à l’ombre, dans la cour