The Complete Poetry of Aimé Césaire

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The Complete Poetry of Aimé Césaire Page 28

by Césaire, Aimé; Eshleman, Clayton; Arnold, A. James


  and I drank urine, trampled, betrayed, sold

  and I ate excrement

  and I acquired the strength to speak

  louder than rivers

  louder than disasters

  et j’ai attendu en san-benito l’heure de l’auto-da-fé

  et j’ai bu de l’urine, piétiné, trahi, vendu

  et j’ai mangé des excréments

  et j’ai acquis la force de parler

  plus haut que les fleuves

  plus fort que les désastres

  JAILER

  How about that the coon is mocking us . . . sure he’s pretending to be mad.

  harder, harder still. . .

  (He strikes).

  LE GEÔLIER

  Dis donc il se fout de nous le moricaud… bien sûr qu’il fait le fou.

  plus fort, encore plus fort…

  (Il frappe).

  THE REBEL

  Strike . . . strike overseer . . . strike till the blood runs . . . an unmoaning race was born in the furrows . . . strike ‘til you wear yourself out.

  LE REBELLE

  Frappe… frappe commandeur… frappe jusqu’au sang… il est né du sillon une race sans gémissements… frappe et lasse-toi.

  JAILER’S WIFE

  blockhead; what a blockhead. I tell you he’s a blockhead . . . a funny race these niggers . . . do you think our blows cause him pain? In any case it doesn’t show (she strikes). Oh, oh. his blood is flowing.

  LA GEÔLIÈRE

  bûche ; quelle bûche. c’est une bûche te dis-je… une drôle de race ces nègres… crois-tu que nos coups lui fassent mal ? en tout cas ça ne marque pas (elle frappe). Oh, oh, son sang coule.

  JAILER

  he’s trying to frighten us, let’s leave. . .

  LE GEÔLIER

  il essaie de nous faire peur, allons-nous en…

  JAILER’S WIFE

  Ah, he’s really out of his mind . . . I could die laughing . . . Say isn’t red blood on black skin funny.

  LA GEÔLIÈRE

  Ah, il déraille sérieusement… c’est à mourir de rire… Dis c’est marrant le sang rouge sur la peau noire.

  THE REBEL (with a start).

  severed hands . . . spurting brain . . . soft carrion

  why remain beneath the rain of venomous scorpions?

  anteaters lost in epochs lick on the urban pavement aquamarine ants. Opossums look between the joints of equinoxes for

  a russet tree a silver tree

  a volition is convulsed in the muddy putty of fatalities and in the hide-and-seek of glowworms

  (He collapses moaning).

  LE REBELLE (sursautant).

  des mains coupées… de la cervelle giclante… de la charogne molle

  pourquoi rester sous la pluie de scorpions venimeux ?

  les tamanoirs égarés dans les époques lapent au pavé des villes des fourmis d’aigue-marine. Les sarigues cherchent entre le joint des équinoxes

  un arbre roux un arbre d’argent

  une volonté se convulse dans le mastic bourbeux des fatalités et le cache-cache des vers luisants

  (Il s’écroule en gémissant).

  NARRATRESS

  what a night; what a wind: it’s as though the wind and the night were struggling furiously: great shadowy masses collapse with the entire sky panel and the cavalry of wind rushing into flight whipped by a hundred thousand burnouses.

  (Snatches of spirituals are heard on the wind).

  LA RÉCITANTE

  quelle nuit ; quel vent : c’est comme si le vent et la nuit s’étaient furieusement battus : de grosses masses d’ombre s’écroulent avec tout le panneau du ciel et la cavalerie du vent se précipite au vol fouetté de ses cent mille burnous

  (Le vent apporte des bribes de spirituals).

  THE REBEL

  Everything is fading, everything is crumbling

  all that I care for now are my recollected skies

  all that I have left is a stairway to descend step by step

  all that I have left is a little stolen ember rose

  a scent of naked women

  a country of fabulous explosions

  an icecap’s peal of laughter

  a necklace of desperate pearls

  Tout s’efface, tout s’écroule

  il ne m’importe plus que mes ciels mémorés

  il ne me reste plus qu’un escalier à descendre marche par marche

  il ne me reste plus qu’une petite rose de tison volé

  qu’un fumet de femmes nues

  qu’un pays d’explosions fabuleuses

  qu’un éclat de rire de banquise

  qu’un collier de perles désespérées

  an obsolete calendar

  the taste, the vertigo the luxury of exhilarating sacrilege

  Kings magi

  eyes protected by three rows of honeycombed eyelids

  salt of grey noons

  distilling thorn by thorn a meager road

  a wild path

  a stratum of regrets and expectations

  qu’un calendrier désuet

  que le goût, le vertige le luxe du sacrilège capiteux

  Rois mages

  yeux protégés par trois rangs de paupières gaufrées

  sel des midis gris

  distillant ronce par ronce un maigre chemin

  une piste sauvage

  gisement des regrets et des attentes

  phantoms caught in the crazed circles of black-blooded rocks

  I am thirsty

  oh, I am thirsty

  questing for peace and verdant light

  I have plunged throughout the pearly season

  into the sewers

  without seeing anything

  burning

  fantômes pris dans les cercles fous des rochers de sang noir

  j’ai soif

  oh, comme j’ai soif

  en quête de paix et de lumière verdie

  j’ai plongé toute la saison des perles

  aux égouts

  sans rien voir

  brûlant

  NARRATRESS

  curses crushed by stones throb across the path with heavy toad eyes; a great demented noise shakes the island by its sky, tragic bones unroll against nature, a poorly drained and unhealthy night circumnavigates the world.

  LA RÉCITANTE

  des malédictions écrasées sous des pierres palpitent en travers du chemin avec de lourds yeux de crapauds ; un grand bruit dément secoue l’île par le ciel, les os tragiques se déroulent contre nature, une nuit mal drainée et malsaine fait le tour du monde.

  CHORUS

  I recall the morning of the isles

  morning was kneading almond and glass

  thrushes were laughing in the pod tree

  and the cane juice did not smell bad

  no

  in the fruity morning

  LE CHŒUR

  je me souviens du matin des îles

  le matin pétrissait de l’amande et du verre

  les grives riaient dans l’arbre à graines

  et le vesou ne sentait pas mauvais

  non

  dans le matin fruité

  THE REBEL

  I search for the traces of my power like one who in the bush searches for the lost tracks of a great herd and I sink to my knees in the tall grasses of blood.

  pitiable gods debonaire faces, long dangling arms expelled from a paradise of rum, ashy palms visited by bats and sleep-walking packs

  Rise, fumes, illuminate the disaster. . .

  LE REBELLE

  je cherche les traces de ma puissance comme un dans la brousse les traces perdues d’un grand troupeau et j’enfonce à mi-jambes dans les hautes herbes du sang.

  pauvres dieux faces débonnaires, bras trop longs chassés d’un paradis de rhum, paumes cendreuses visitées de chauves-souris et de meutes somnambules

  Montez, fumées, éclairez le désastre…

  I have bled in secret corridors, onto the churned
-open battlegrounds

  And

  I advance, ungilded fly great voracious malicorne* insect

  attracted by the succulence of my own saw-toothed skeleton,

  legacy of my assassinated body violent across the bars of the sun

  j’ai saigné dans les couloirs secrets, sur le sol grand ouvert des batailles

  Et

  je m’avance, mouche dédorée grand insecte malicorne et vorace

  attiré par les succulences de mon propre squelette en dents de scie,

  legs de mon corps assassiné violent à travers les barreaux du soleil

  NARRATOR

  dismembered, scattered about

  in the soil in the coverts

  gutted poem

  emigration of doves, sprinkled with brandy burned. . .

  LE RÉCITANT

  dépecé, éparpillé

  dans les terrains dans les halliers

  poème éventré

  émigration de colombes, brûlées arrosées d’eau-de-vie…

  NARRATRESS

  The island bleeds

  LA RÉCITANTE

  L’île saigne

  NARRATOR

  The island bleeds

  LE RÉCITANT

  L’île saigne

  NARRATRESS

  cul-de-sac of poverty of solitude of stinking weeds

  LA RÉCITANTE

  cul de sac de misère de solitude d’herbe puante

  THE REBEL

  the caiman the torches the flags

  and the Amazon erect with heveas

  and the moons fallen like winged seeds into the warm compost of the sky

  my soul swims at the very heart of the maelstrom

  where strange monograms sprout

  a drowned man’s phallus a tibia a sternum

  (Now the prison is filled with Martenot* waves, massive hallucinatory shadows and nightmarish somber visions).

  LE REBELLE

  le caïman les torches les drapeaux

  et l’Amazone debout d’hévéas

  et les lunes tombées comme des graines ailées dans l’humus tiède du ciel

  mon âme nage en plein cœur de mælström

  là où germent d’étranges monogrammes

  un phallus de noyé un tibia un sternum

  (Ici la prison est envahie d’ondes Martenot*1 et des grandes ombres de l’hallucination et des réalités sombres du cauchemar).

  FIRST SUBTERRANEAN VOICE

  O king

  PREMIÈRE VOIX SOUTERRAINE

  Ô roi

  SECOND SUBTERRANEAN VOICE

  Arise o king

  DEUXIÈME VOIX SOUTERRAINE

  Ô roi debout

  FIRST WHISPERING

  horses of the night

  PREMIER CHUCHOTEMENT

  chevaux de la nuit

  SECOND WHISPERING

  Take him away, take him away

  DEUXIÈME CHUCHOTEMENT

  Entraînez-le, entraînez-le

  THE REBEL

  do they expect to have me like the wild sow and her young?

  to extirpate me like a root without descendants?

  defeated,

  Africa, America Europe, I hide a frenzy beneath the leaves

  of my self-satisfaction;

  I hold the key to perturbations

  sheltered from fury-flanked hearts

  LE REBELLE

  est-ce qu’ils croient m’avoir comme la laie et le marcassin ?

  m’extirper comme une racine sans suite ?

  vaincu,

  Afrique, Amérique Europe, j’ai de la frénésie cachée sous les feuilles

  à ma suffisance ;

  je tiens à l’abri des cœurs à flanc de furie

  la clé des perturbations

  and all to destroy

  sulphur my brother, sulphur my blood

  will spill out in the proudest city centers

  its perfumed effluvia

  the charisma of its grace

  useless to contradict me

  I hear nothing

  nothing other than the catastrophes that rise to the relief of cities

  et tout à détruire

  le soufre mon frère, le soufre mon sang

  répandra dans les cités les plus orgueilleuses

  ses effluves parfumées

  les charismes de sa grâce

  inutile de me contredire

  je n’entends rien

  rien que les catastrophes qui montent à la relève des villes

  FIRST CELESTIAL VOICE

  Sunflowers of the shadow, incline your compass faces toward the blackest of midnights. . .

  PREMIÈRE VOIX CÉLESTE

  Tournesols de l’ombre, inclinez vos faces de boussoles vers le plus noir des minuits…

  SECOND CELESTIAL VOICE

  let tortures be invented for me, let the oliphant sound, strand of rope

  strand of rope

  DEUXIÈME VOIX CÉLESTE

  que l’on m’invente des tortures, que l’on sonne l’olifant, fil de toron

  fil de toron

  CHORUS (subterraneously)

  here is my hand. here is my hand

  my cool hand, my hand a fountain of blood

  my hand of kelp and iodine

  my hand of light and vengeance. . .

  LE CHŒUR (souterrain)

  voici ma main. voici ma main

  ma main fraîche, ma main de jet d’eau de sang

  ma main de varech et d’iode

  ma main de lumière et de vengeance…

  THE REBEL

  Gods of the nether world, benevolent gods

  I bring only my devastated mug

  the buzzing of living flesh

  here I am. . .

  (Pause).

  LE REBELLE

  Dieux d’en bas, dieux bons

  j’emporte dans ma gueule délabrée

  le bourdonnement d’une chair vivante

  me voici…..

  (Pause).

  a rumble of chains of carcans rises from the sea. . .

  a gurgling of the drowned from the green belly of the sea . . . a crackling

  of fire a whip cracking, screams of the murdered. . .

  . . .the sea is burning

  or it is the tow of my blood that is burning

  Oh the scream . . . always this scream bursting from the mornes . . . and the drums rutting and the wind swells vainly with the tender odor of the musty ravine

  with breadfruit trees with sugar mills with bagasse harassed by fruit flies. . .

  une rumeur de chaînes de carcans monte de la mer…

  un gargouillement de noyés de la panse verte de la mer… un claquement

  de feu un claquement de fouet, des cris d’assassinés…

  … la mer brûle

  ou c’est l’étoupe de mon sang qui brûle

  Oh le cri… toujours ce cri fusant des mornes… et le rut des tambours et vainement se gonfle le vent de l’odeur tendre du ravin moisi

  d’arbres à pain de sucreries de bagasse harcelée de moucherons…

  Earth my mother I have understood your cloak and dagger language

  my brothers the maroons* with the bit in their teeth

  my brothers their feet out of the enclosure and in the torrent

  my sister the shooting star, my brother the ground glass

  my brother the bloody kiss to the severed head on the silver platter

  and my epizootic sister and my epileptic sister

  my friend the kite

  my friend the conflagration

  Terre ma mère j’ai compris votre langage de cape et d’épée

  mes frères les marrons le mors au dent

  mes frères les pieds hors clôture et dans le torrent

  ma sœur l’étoile filante, mon frère le verre pilé

  mon frère le baiser de sang de la tête coupée au plat d’argent

  et ma sœur l’épizootie et ma sœur l’épilepsie

  mon ami le milan


  mon ami l’incendie

  each drop of my blood explodes in the tubulure of my veins

  and my brother the pistol-paunched volcano

  and my brother the precipice without a balisier ramp

  and my mother the madness of smoke and heresy herbs

  of crusade and baton feet

  of dry season and never hands

  and of jujube and of perturbation and of bayoneted sun

  (The Rebel starts to walk, to crawl, to run among imaginary thickets, naked warriors leap out, a tom-tom is heard in the distance).

  chaque goutte de mon sang explose dans la tubulure de mes veines

  et mon frère le volcan aux panses de pistolet

  et mon frère le précipice sans rampe de balisiers

  et ma mère la folie aux herbes de fumée et d’hérésie

  aux pieds de croisade et de bâton

  aux mains d’hivernage et de jamais

  et de jujubier et de perturbation et de soleil bayonnetté

  (Le Rebelle se met à marcher, à ramper, à courir dans d’imaginaires broussailles, des guerriers nus bondissent, un tam-tam bat lointainement).

  NARRATRESS

  O the dance of nameless stars . . . the savannas come alive . . . the rains steam . . . unknown trees fall flattened by lightning

  LA RÉCITANTE

  Ô la danse des étoiles sans nom… les savanes s’animent… les pluies fument… des arbres inconnus tombent palmés de foudre

  NARRATOR

  What is she saying? what is she saying?

  (At this point the Rebel straightens up).

  LE RÉCITANT

  Qu’est-ce qu’elle dit ? qu’est-ce qu’elle dit ?

  (À ce moment le Rebelle se redresse).

  THE REBEL

  Caterpillars crawl toward the cotton bonnet inn. . . The earth’s vat is extinguished . . . that’s all right . . . but the sky is eating betel nuts . . . ha, ha the sky is sucking on daggers. . . King of Malaysia and of insect-infested fever, chew well your kriss and your betel. . . My son, my son a bullet is rotting amid your white smiles . . . ouch, I’m walking on starry thorns. I walk. . . I accept responsibility. . . I embrace. . .

 

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