Frontiere Interdite

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Frontiere Interdite Page 14

by Rifkin,Shepard


  Plus Carson réfléchissait, plus l'affaire lui plaisait. Sans le savoir, Bond l'aiderait à retrouver le général. Ainsi, non seulement il ferait d'excellents bénéfices, mais il éliminerait le général et deviendrait propriétaire d'une immense hacienda, bien plus vaste que le ranch de King Fisher et si loin au sud qu'il n'aurait pas à s'inquiéter du désir de vengeance de Fisher et de son clan.

  Oui, se dit-il avec satisfaction, le mieux était de quitter ce foutu pays. Sinon il devrait toujours se méfier des Fisher, qui ne pardonneraient jamais la mort du vieux gardien. Tôt ou tard, il tomberait dans une embuscade, on lui tirerait dans le dos, ou bien une balle le frapperait alors qu'il serait tranquillement en train de souper.

  C'était ce qui arriverait, même si King Fisher essayait de retenir ses hommes. Et si Fisher leur laissait la bride sur le cou ? Il crèverait de peur chaque fois qu'il passerait près d'un fourré.

  — Ça va comme ça, monsieur Carson ? Il se regarda vaguement dans la glace.

  — Oui, c'est très bien, merci.

  Il enfila sa veste, paya le barbier et sortit. Maintenant, il devait retirer son argent de la banque et télégraphier à Bond.

  — Tu es sûr qu'il n'a rien vu ?

  — Sûr, monsieur King Fisher, assura le barbier. Cela se passait le lendemain après-midi. Le barbier aiguisait son rasoir sur un cuir.

  — Sa figure était entièrement couverte de serviettes chaudes, même les yeux, ajouta-t-il.

  — Il t'a pas entendu ouvrir l'enveloppe ?

  — Pensez-vous. Y avait des gosses qui jouaient dans la rue, qui criaient, et deux gros chariots sont passés. J'aurais jamais lu la correspondance privée d'une personne si j'avais pas vu le timbre où c'était marqué Isleta, et si j'avais pas su que vous faisiez des affaires là-bas. Autrement, jamais j'y aurais touché !

  — Je m'occuperai de toi.

  King Fisher sortit, puis il se ravisa et rentra dans la boutique.

  — Tu ne parleras de cette lettre à personne, tu entends, Wheat ? Jamais. En aucun cas. Sans ça, je l'apprendrai. Et si j'apprends que t'en as parlé, je reviendrai te voir.

  Il saisit la main qui tenait le rasoir, retourna le poignet et leva l'avant-bras de Wheat jusqu'à ce que le rasoir effleure sa gorge. Puis il imprima au bras un mouvement de va-et-vient :

  — Compris ?

  Wheat hocha nerveusement la tête. King Fisher lui lâcha la main, sauta sur son cheval et partit au trot

  — Ainsi, vous voulez vendre, dit King Fisher. Vous me surprenez, Carson.

  — Ma foi, je peux pas travailler pour vous et m'occuper d'un ranch en même temps.

  — Embauchez quelqu'un en qui vous avez confiance.

  King Fisher se pencha hors de son hamac lorsque Carson eut fini de rouler sa cigarette.

  — Prenez du feu à mon cigare.

  Carson inclina le buste et tira sur sa cigarette.

  Leurs regards se croisèrent. Carson eut soudain l'impression que Fisher savait qu'il mentait, mais il repoussa cette idée en se disant qu'il avait trop d'imagination.

  — C'est difficile à trouver, dit-il. Et tout l'argent que j'engagerai sur ce ranch, en forages de puits artésiens, construction de moulins, achat de barbelés et de bêtes de race, tout ça sera gaspillé si je ne suis pas là pour tout surveiller. Et les impôts grignoteront toutes mes économies.

  — Oui, c'est difficile de trouver un homme en qui on peut avoir confiance, murmura King Fisher.

  — Alors j'ai l'intention de vendre un bon prix, de placer mon argent en bons d'Etat, avec un bon intérêt régulier, et travailler quelques années pour vous, en faisant des économies. Après ça, je pourrai repartir à zéro, mais avec un bon capital.

  — Pas mal raisonné. Combien vous en voulez ?

  — Tel que c'est, avec le bétail, la maison, les corrals et tout, quatre-vingt-cinq mille.

  — Dites donc, c'est gros, Carson.

  — Y a pas de meilleur pâturage d'été dans le coin.

  — C'est vrai.

  — Et pas de meilleur pour l'hiver non plus.

  — Ouais.

  — C'est plein d'arroyos avec des saules et des peupliers. Bien abrités du vent du nord. C'est frais en été. Quand il neige, le bétail ne risque pas de se perdre. On peut engranger du fourrage. Les chevaux peuvent manger l'écorce des saules et des buissons. A la fonte des neiges, j'ai des citernes au creux des vallées qui recueillent toute l'eau et la conservent pendant tout l'été. Une région vallonnée, ce qui fait que les bêtes peuvent monter sur les hauteurs et laisser le vent chasser les mouches.

  — Vous connaissez bien votre boulot, pas de doute. Un jour, vous deviendrez un grand éleveur.

  — Combien de temps vous a-t-il fallu pour apprendre le métier ?

  — Ça fait trente et un ans que je l'exerce et j'en apprends encore tous les jours. Dans l'élevage, on ne distribue pas de diplômes. Et quand je suis arrivé ici, y avait pas une barrière ni une voie de chemin de fer dans tout le Texas.

  « Je suis heureux que vous consacriez tout votre temps au ranch Fisher, Carson. Donnez-moi quatre ans et vous voudrez plus avoir un ranch à vous. C'est assez passionnant de diriger un grand domaine comme celui-ci. Et ces derniers temps, je me suis mis à penser que ce serait quand même agréable de pouvoir déboucler mon ceinturon, jeter mon colt au feu et me croiser les bras en regardant un gars capable de se servir de ses méninges faire le boulot à ma place. Et c'est vraiment quelque chose de voir ces grands troupeaux la nuit, avec le clair de lune qui brille sur leurs grandes cornes. Je crois que vous renoncerez vite à avoir un petit ranch à vous. Quatre-vingts. »

  — Quatre-vingt-quatre.

  — Quatre-vingt-un. Ils éclatèrent de rire.

  — Quatre-vingt-deux mille cinq cents, dit Carson.

  — Adjugé.

  Ils se serrèrent la main et Carson dit négligemment :

  — Je voudrais prendre une semaine de congé.

  — Facile.

  — Je voudrais descendre à San Antonio pour acheter ces bons d'Etat.

  — Et votre petite amie?

  — Je l'emmène. A San Antonio, elle prendra la diligence de Galveston, et de là un bateau pour Veracruz.

  — Je croyais qu'elle ne voulait pas retourner au Mexique ?

  — Moi aussi. Mais je l'ai persuadée.

  — Ah, très bien.

  King Fisher se rallongea dans son hamac et lui donna de l'élan d'un coup de botte au plancher.

  — J'aurai votre argent demain après-midi, Carson. Et si vous aviez deux sous de bon sens, vous épouseriez la petite. Elle est bien trop précieuse pour la laisser traîner dans tout le Texas.

  Il croisa ses mains sous sa nuque et regarda Carson sortir.

  — Quatre-vingts, dit King Fisher. Quatre-vingt-un, quatre-vingt-deux... Et cinq cents.

  Carson fourra l'argent dans deux grands sacs de selle.

  — Je serais plus tranquille si vous recomptiez.

  — J'ai confiance en vous, assura Carson.

  Il donna les sacs à Sebastiano, qui les porta dehors. Par la porte ouverte, King Fisher vit le Mexicain les lancer sur la selle de Carson.

  — Ma foi, vous me faites là un bien grand compliment... C'est vraiment gentil.

  Il remarqua que les neveux de Sebastiano montaient d'excellents chevaux, et qu'ils étaient bien armés. Deux burros portaient les provisions et les sacs de couchage. Luisa était déjà à cheval, et attendait. King Fisher sortit avec Carson.

  — Soyez prudent, Carson, dit-il joyeusement. Je ne voudrais pas perdre un homme précieux. Adios, senorita, vaya con Dios.

  — Y usted. Gracias.

  — Hasta la vista, Carson.

  — Hasta la vista.

  La petite troupe s'ébranla. King Fisher la suivit des yeux. Bearclaw sortit de la maison.

  — Ça va pas, non ? protesta-t-il. Vous le laissez filer avec tout ce fric ? Vous savez qu'il a encore quarante mille dollars sur lui, en plus ? Pourquoi vous nous laissez pas tendre une embuscade ? On pourrait les devancer et les faire aux pattes demai
n au coucher du soleil. Faudra qu'ils campent dans l'Arroyo Hondo. Avec Archie, le vieux Dave et moi, ça serait du gâteau.

  — Non. Et le vieux Dave tète sa bouteille de bourbon comme si c'était une sucette.

  — Personne saurait jamais que c'est nous. Après ça, on pousserait vers le sud pendant deux trois jours, on franchirait le Quitaque, et on remonterait vers le nord. Personne nous verrait, comme ça.

  — Non.

  — Ça vous fait pas mal au cœur de voir tout cet argent Fisher qui fout le camp pour toujours ? Bon Dieu, je vous comprends pas ! Ce serait pas que vous êtes devenu un peu cinglé à force de penser à cette petite de Parral ?

  King Fisher se retourna et regarda fixement Bearclaw, qui recula en marmonnant des excuses. Fisher grogna.

  — Laissez-nous nous occuper de lui, allez, insista Bearclaw. On touchera pas à la fille. Et vous faites pas de bile pour le vieux Dave, il sait tirer, il sait monter à cheval. Et il sait la boucler, aussi. Et...

  — Bougre d'imbécile, dit aimablement King Fisher. Je vais te dire pourquoi tu es stupide. Je vais descendre moi-même à Isleta, et c'est moi qui vais traiter avec le général pour lui acheter tout son bazar. Pour ça j'ai besoin d'argent. Pourquoi veux-tu que je trimbale une fortune et passe mon temps à craindre de me faire attaquer par des bandits de grands chemins ? Laissons Carson se faire du mouron. Il prendra bien soin de cet argent, et les Valdez aussi. Encore mieux que moi. Et quand il arrivera là-bas, devine qui sera là pour l'accueillir à bras ouverts ?

  Bearclaw ouvrit la bouche, puis il sourit largement, d'un air pénétré d'admiration.

  — Et on lui reprendra tout l'argent en lui disant poliment merci.

  Bearclaw s'exclama :

  — Ça, c'est une embuscade !

  — Mais avant, il faudra rendre visite à M. Bond et lui donner peut-être une petite fessée pour lui apprendre que le vieux n'est pas encore mort, hein ? Pourtant, j'ai besoin de lui, alors je n'aurai pas la main trop lourde. Il peut me donner un tas de renseignements précieux. J'aurai peut-être envie d'acheter une mine ou deux au Mexique. Ou des chemins de fer. Et quand je serai à Sonora, il me sera très utile pour s'occuper de mes affaires avec le Mexique. Et avec quelqu'un de confiance pour diriger le vieux ranch K. F...

  — Vous allez rester à Sonora ?

  — Cette petite de Parral a fait une proposition à Carson. Il ne m'a pas eu l'air tellement intéressé. Ou s'il l'est, il pourra pas faire grand-chose. Alors j'irai la voir, je lui donnerai un coup de chapeau et je lui dirai : « Mes excuses, mademoiselle, mais j'ai entendu dire que vous aviez un général à faire assassiner en échange d'une hacienda. » Et elle me répondra : « En effet, señor. » Alors je lui dirai : « Mademoiselle, si vous voulez bien passer par ici, je vais vous montrer un général tout à fait mort. »

  — Mais qui c'est qui va diriger le K. F. ?

  — Toi, Bearclaw.

  — Nom de Dieu !

  — Mais faudra faire ce que je dis. Et tenir Archie en laisse. Flanque-lui des gifles s'il le faut. Je viendrai deux fois par an pour tout vérifier. Alors tâche de marcher droit, mon gars. Y a des gens, on leur donne une chance et ils réclament la lune pour y faire paître leurs vaches !

  — Bon. Quand on sera à Isleta, faudra prendre possession des chevaux, des burros et des armes du général tout à fait légalement, avec un reçu en bonne et due forme signé par lui parce que l'armée U. S. sera en train de fouiner dans le coin. C'est pour ça qu'il faudra pas être trop méchant avec Bond, vu que c'est lui qui arrangera tout ça. On sera obligé de remettre l'argent de Carson au général. On le récupérera plus tard, t'énerve pas ! Ce sera pas commode, je te l'accorde. Ce type-là, c'est pas une petite fleur des prés. Il aura pas confiance en moi, il a confiance en personne, et il sera entouré de ses gardes du corps, de jour comme de nuit. Personne fera confiance à personne, en fait. Je veux donc que personne ait la détente nerveuse, ni qu'on cause trop fort une fois là-bas. Et quand on tirera, faudra viser juste. Au fait, qu'est-ce qu'il fout, Archie ?

  — Il court les filles.

  — Va le chercher. Dis-lui que j'ai un boulot pour lui qui lui plaira. Dis-lui que c'est un truc qu'il a envie de faire depuis longtemps. Depuis le jour où il surpris M. Carson en train de roupiller, là-bas au Mexique.

  — Il va rappliquer au galop, promit Bearclaw. Le vieux Dave sortit du ranch et s'approcha d'un pas mal assuré.

  — Encore bourré ! s'exclama King Fisher avec irritation. Il va biberonner tout le whisky disponible à Isleta.

  — Il tire quand même juste, dit Bearclaw.

  Ils regardèrent tous deux le vieillard sale et dépenaillé s'avancer en titubant. Sa moustache tombante était jaunie par le tabac ; il portait un gilet de peau luisant de crasse, barré par la chaîne d'un gros oignon en or qu'il s'était attribué un jour au cours de l'attaque d'un train. La montre ne marchait plus depuis des années et le vieux répétait qu'il allait la faire réparer dès qu'il aurait le temps.

  — Tes bacchantes ont l'air d'une vieille peau de lapin collée sous ton nez, lança Bearclaw.

  — Ta gueule, bougre d'empaqueté, répliqua Dave d'une voix cassée. Cette main-là t'a tanné le cul et elle peut recommencer, t'entends, shérif de mes deux ?

  — Tu veux venir en balade, pépé ?

  — Non.

  — Tu préfères rester ici pour que les mômes s'entraînent au lasso sur ta carcasse ?

  — Je m'en fous. Ça vaut toujours mieux que d'écouter tes conneries.

  — Quand c'est que tu vas faire réparer cette montre que t'as volée ?

  — Foutue génération de vipères et de jean-foutre, grommela Dave en se cramponnant à un pieu du corral. C'est pas tes oignons.

  — Hé, pépé...

  — Et comment ça se fait que pas un de vous autres jeunots ait filé le train à la petite Mexicaine ? Elle a des lèvres roses comme le pis d'une génisse, une taille de guêpe, elle doit pas peser bien lourd en jupon, et elle a des cheveux luisants comme cette bouteille-là et longs comme la queue d'un cheval. Je les ai vus cascader dans son dos, un jour qu'elle se les brossait au soleil. Y à seulement vingt ans, j'aurais cassé la gueule à ce Carson pour cette fille.

  Et je descendrai pas à Isleta. Les broussailles sont si épaisses qu'on y plongerait pas un couteau et dans ce foutu pays, tout ce qu'on trouve est plein de vermine ou empoisonné.

  — Mais tu viendras, déclara King Fisher.

  — Non, j'irai pas. Et t'as pas d'ordres à me donner, petit ! Tu t'occupes de nous autres les Fisher, tu nous commandes, et puis tu t'en vas donner tout ton fric à ce Carson, alors tu peux aller te faire mettre !

  — Dave, c'est plus comme ça, dit Bearclaw.

  — Toi, ferme-la !

  — On va régler son compte à Carson, tout est arrangé.

  — Toi ? T'es pas capable de sortir sans ta bonne, t'es jamais tout seul ; c'est comme Archie. Quand on part sur le sentier de la guerre, faut y aller tout seul. Toi, t'as besoin qu'on te tienne la main. Faudra nous tous pour l'avoir, ce Carson. Et j'ai plus rien dans le ventre, moi non plus. Le vieux rentra dans la maison pour se remettre à boire.

  — Quand il sera dessoûlé, il fera bien l'affaire, déclara King Fisher. Puis il changea d'expression et poursuivit d'une voix très douce : Si jamais toi ou un autre, vous touchez à la petite de Parral, si seulement vous la regardez de travers, j'aurai le très grand plaisir de me payer une place au premier rang pour voir un busard vous arracher les tripes par le trou du cul. Fais passer la consigne. Et prépare-toi. On part dans une heure.

  XXI

  — Range cette étoile, bougre d'imbécile, gronda King Fisher.

  Il se pencha sur l'encolure de son cheval et frappa du poing sur la grande vitrine portant en lettres d'or fanées : « bond, fournitures pour ranche ». Sur le trottoir de bois, des vaqueros mexicains jouaient avec des cartes crasseuses, en misant des munitions.

  Bond leva les yeux. La journée avait été chaude et il s'éventait lentement.

  Le vieux Dave pouffa de rire.

 
— On dirait qu'on vient de lui couper la tête. Elle est plus sèche qu'une bouteille de whisky éclusée par quarante bonshommes. Bon, je descends boire un coup.

  — Ne te perds pas, espèce de vieux schnock ! lança King Fisher.

  Bond sortit de son bureau, l'éventail à la main.

  — Heureux de vous voir, King Fisher. Entrez donc vous asseoir.

  King Fisher mit pied à terre et lança ses rênes à Archie.

  Bond regagna son fauteuil.

  — Il en fait un plat, pas vrai ? dit-il en offrant son éventail à King Fisher.

  Fisher s'assit sur le bord du bureau et s'éventa doucement en silence. Des gouttes de sueur apparurent sur le front de Bond, puis se mirent à ruisseler le long de ses joues. Fisher l'observait. Puis il se tourna vers les vaqueros vautrés sur le trottoir :

  — On dirait une ville mexicaine.

  — Y a pas de rangers plus près qu'El Paso. Et c'est à trente lieues. On a bien un shérif mais c'est moi qui l'ai fait élire, alors il est bon à rien d'autre qu'à faire ce que je lui dis. Il s'est lancé aux trousses de l'ivrogne du village, sous prétexte que le vieux a volé le petit agneau de la môme à Briggs. Il prétend que la petite n'arrête pas de chialer. Quand il a appris que le général traversait le fleuve pour venir à Isleta, il a mis les bouts à toute pompe pour filer le train à ce voleur d'agneaux. Il y a deux compagnies de cavalerie, mais elles sont cantonnées à Fort Duncan, à vingt lieues à l'ouest. Ils envoient bien des patrouilles par-ci, par-là, mais on sait jamais où elles sont, alors ça sert à que dalle. Personne cherche la bagarre avec ces vaqueros, c'est des durs, et le patelin en est pourri.

  — Où est l'armée mexicaine qui a poursuivi le général ?

  — A cinq ou six lieues du Rio, au Mexique. Ils envoient aussi des patrouilles le long du fleuve, jour et nuit.

  — Comment se fait-il qu'ils soient si loin ?

  — Ils ont reçu des ordres. Le président Diaz recherche des capitaux américains pour financer ses chemins de fer et son industrie, alors il veut pas d'incidents de frontières avec des citoyens américains. Vous savez ce que c'est, un type va apercevoir un soldat mexicain près du fleuve et il fera un carton dessus, et deux ou trois des amigos du Mexicain passeront l'eau pour le venger. Et puis y a la cavalerie U. S... si ça se trouve, un officier mexicain énervé ordonne à ses hommes de tirer, les Américains ripostent et c'est la pagaille générale, ou même la guerre. Le vieux Diaz n'est donc pas un imbécile.

 

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