Do you search for treasure to pay your hopes a wage?
White-headed, now it approaches, the carnival,
Bringing the treasure you hunted through the years.
For these are sounding masks, these are hollow tears
That won’t allow you to see your native soil.
NAISSANCE DU MONSTRE
Le paysage était fourrure,
Pelage de fleurs et moissons,
Brume vibrante, échos, frissons:
Le voici prêt à la morsure,
Il s’incarne et devient ce fauve
Qui, tour à tour, séduit, repousse
Et fait surgir, à la rescousse,
Un rêve de viols et d’alcôves.
Sabine, Hyppolite, Andromède
Et Rosemonde et leurs compagnes,
Un tel délire les possède,
Dansent de fureur et s’enfuient,
Aux quatre coins d’une campagne,
Vers des forêts, sans lacs ni puits,
Dont l’ombre, masquant les figures,
Adoptera leur chevelure.
Ronronnant, au creux du fauteuil,
Le monstre surveille la proie
Qui s’agite au fond de son œil.
II baille de faim et de joie,
Révélant la langue gourmande,
Le palais rose et les crocs blancs
Et l’haleine, à odeur de viande,
Qui d’abord soulève son flanc.
Enfant de quel tragique amour,
Hors de quel ventre ténébreux,
Vagissant, jaillit-il au jour?
Du haut des montagnes? Du creux
Où, bue, aux cris des tragédies,
Par un roi de flamme et de vent,
La lave craque et incendie,
Au soir, d’insolites levants.
Ventre palpitant de désirs,
À tous baisers la gorge offerte,
Prêt à pâmer, prêt à gésir,
Le monstre excite et déconcerte
Un appetit d’ombre et de sang,
De chair ouverte sous les griffes
Et, sous les poils qui s’ébouriffent,
D’un souffle bientôt rugissant.
Velours, satins, sang et baisers,
Tout est luxe, tout est horreur
Dans les corps, d’amour embrasés,
Dans les cœurs, sujets a l’erreur,
Et quelque terrible mystère
De la matière même, à terre,
Réunira, dans une étreinte,
Les chairs aspirant à la plainte.
Oui, bien sûr, la nuit est propice
Aux plongeons dans les précipices.
Quant au soleil, qu’il s’abolisse
À l’instant de ces exercices.
BIRTH OF THE MONSTER
The landscape was fur,
Pelt of harvests and flowers,
Scary echoes, fog-blur.
He’s here with his jaws,
Incarnate wild beast,
Repels and seduces
To rouse dreams of rescues,
Of rapes and recesses.
Driven wild by desire
All the bevy of girls
Madly dance and retire
To the distant four corners
To woods without wells
Or pools, where the shadow
Disguises their faces
Adopting their hairdo.
From a big chair he purrs,
Sees the scurrying prey
In the depth of his eye.
Joy and hunger! He yawns,
And shows his tongue, greedy,
Pink palate, white teeth,
Meat-stink of his breath,
Up-thrusting his haunch.
By what tragic love, run
Through what murky belly,
Did he cry out and spawn?
From hills? From the hollow,
Drunk down by some sovereign
Of flame-wind and wailing,
The lava creaked, kindled
At dusk the strange dawn.
Cupidinous belly
A throat for all kisses
Quick-swooning, quick-bedding,
He stirs and he baffles
A craving for shadow,
For blood, for fur ruffled,
Flesh opened by talons,
Breath presently roaring.
Kisses, blood, velvet, satins,
Luxurious horror
Of bodies impassioned,
Hearts tending to error:
O earth! Obscure terror
Inherent in matter!
Deep-moaning, the fleshes
Combine their embraces.
Yes, the night is most propitious
For a plunge down precipices;
And the sun should minimise his
Presence at such exercises.
BANQUET
La cote se découpe en golfes ou l’echo
Sonne, comme une trompe, aux murs de Jéricho,
Un Jéricho de brume et flexible comme elle,
La mer y gonfle en vain ses chants et ses querelles.
Dans un de ces abris est servi le banquet
Pour douze garçons nus qui n’ont d’autre projet
Que de boire les vins au goulot des bouteilles,
Mordre aux quartiers de viande et vider les corbeilles
Faire sécher leur corps au soleil de midi,
Chanter et puis dormir sur le sable tiédi.
Le sable, que le vent soulève et qu’il égraine,
Fait murmurer parfois les plats de porcelaine
Et le cristal où tremble une goutte de vin
Qui reflète le ciel et les doigts de la main.
Mais le sang apparaît aux bords d’une blessure
Lorsque le maladroit, d’une lame peu sûre,
Se coupe en entamant le jambon. Un rideau
Rouge flotte soudain, claquant comme un drapeau.
Il vacille et ses plis balaient le paysage.
La mer, qui le répète agite son image
Et celle d’un bateau, toutes voiles dehors,
Qui figure une rose en un coin du décor.
Il aimerait, dit-il, que des lèvres plus tendres
Cicatrisent la plaie et, quitte pour répandre
Plus longuement son sang, à rendre ce baiser
Au monstre imaginaire en son cœur précisé.
N’entend-il pas des cris du haut de la falaise?
Son sang n’explique pas l’insolite malaise
Qui transforme la terre et lui fait souhaiter
Le silence et la nuit et la mort de l’été.
Il se lève et, fuyant ses onze camarades,
Disparaît au tournant des rochers de la rade.
Onze verres, levés au ciel par onze mains,
D’une combe identique ont renversé le vin
Dans des gorges, au chant prêtes, mais, vers la route
Indiquée, un regard s’alanguit et, sans doute,
Un convive bientôt quittera le banquet.
Il est une prairie où cueillir des bouquets,
Il est une forêt, derrière le rivage,
Et des sources d’eau fraîche où baigner les visages
Et le monde habité, ses villes, ses appels.
Qu’ils boivent! Le temps passe et dépose son sel
Sur les jours, sur les cœurs, les lèvres et les rêves.
Pourtant la vie est là, pourtant la vie est brève,
Qu’ils boivent! L’horizon se dénoue à l’entour,
L’heure vient, pour chacun, à partir �
� son tour.
C’est midi, tout sanglant, gisant dans sa tunique,
Sur le bûcher qu’il alluma. Heure panique,
Il faut choisir, il faut, vers le soir progresser
Ou vieillir en tentant d’évoquer le passé.
C’est midi. Dans le ciel claque une draperie
Rouge et le monde est plein d’amour et de féerie.
BANQUET
The coast is cut up into gulfs where the echo
Sounds forth, like a trump at the old walls of Jericho,
Walled city of vapour and equally ductile.
The sea’s swollen singing and sulking are futile.
In one of these havens they’ve served up the banquet
For twelve naked boys who have no other project
Than drinking the wines from the neck of the bottles,
And biting roast haunches and emptying baskets
And drying their bodies in noonday sun, and
Singing, then sleeping, on well-warmed sand.
The sand, which the wind likes to lift as it sifts,
Sometimes causes the porcelain dishes to murmur,
And the crystalline glass where a drop of wine shivers,
Reflecting the sky and a set of five fingers.
But there’s blood to be seen at the edge of a wound
When the clumsy buffoon who’s attacking the gammon
Cuts himself on the erring blade. All of a sudden
A red curtain waves, flaps and snaps like a flag,
Back and forth, and the landscape is swept in its pleats;
The sea takes its image and shakes and repeats
And adds in a boat with its sails to the wide
That sports a fine rose tucked away on its side.
He’d be happy, he says, for lips rather more yielding
To stitch up his wound; in return, too, for spreading
His blood rather far, he’s a kiss to impart
To the monster, imagined, described in his heart.
Can’t he hear any cries from the top of the bluff?
There’s an awkward unease, not explained by his blood,
That has caused him to wish (for it’s altered the earth)
For night and for silence and summertime’s death.
On his feet to escape his eleven companions,
He’s gone round the rocks by the roadstead. Eleven
Hands raise the same number of glasses to heaven.
One identical tilt and the wine is poured down
Into throats set to sing; but a slow glance is thrown
At the route aforementioned; quite shortly, it’s clear,
One friend at the feast will no longer be here.
There’s a field to pick flowers, a wood near the place
Of safe mooring, fresh water for washing your face,
And the world full of people, its cities and cries.
Let them drink! For time passes, its salts crystallise
On days and on hearts and on lips and desires.
Nonetheless there is life, nonetheless life expires.
Let them drink! The horizon unfolds all about,
And the time will arrive for each one to set out.
It’s the noon that is bleeding, laid out in its tunic
On the pyre it has kindled. What’s this! Time to panic.
Time to choose, to move on towards evening at last,
Or grow older from trying to call up the past.
It is noon. In the sky, flap and snap of red drapery.
The world’s fully laden with love and with faërie.
ANDROMÈDE EN PROIE AU MONSTRE
Quel sera, monstre, mon supplice?
Déjà, dérisoire, ton nom
Devient mot d’amour et complice
De ma honte et de notre union.
J’adopterai, d’abord, la pose
Propice à ma métamorphose.
En t’épousant, que je m’endorme,
Par volupté, je prends ta forme.
Car au-delà de la nausée,
Je découvre, en moi, des domaines
Qui sont la dot à l’épousée:
J’y trouverai la clef des chaînes
Et l’endroit de ta sépulture
Quand, monstre, il te faudra mourir
À la fin de notre luxure,
De la mort de notre désir.
Car tout est nôtre, désormais,
Je suis ton monstre et ta réplique,
Je suis la porte du palais,
Je suis l’image symétrique
Qui surgit, lorsque tu parais,
Je suis ta rivale lubrique
Et mon désir se faisait fuite
Pour sentir ton souffle à ma suite.
Le monstre dit: «Pas tant d’histoires
Pas tant de cris et de paroles.
Je suis le maître et mon vouloir
Ne s’embarrasse ni d’un viol
Ni d’accordailles, ni de noces.
Ta voix me brise le tympan.
Je vais mon train, selon l’élan
Qui m’entraîne et me rend féroce.»
Andromède, étant tout enfant
Chérissait un parc solitaire
Où, chaque soir, un éléphant
Se promenait en grand mystère.
Un éléphant? Est-ce bien vrai?
Ce n’est, peut-être, qu’un vieux rêve,
Mais elle y pense et jurerait
Qu’il la piétine et la soulève.
Andromède étant tout enfant
Andromède que fait la bête?
Andromède qui te défend?
Quelle tempête, dans ta tête,
Au réel mélange un vieux rêve?
Mais la chanson que tu répètes
Nul ne sait comme elle s’achève.
Andromède étant tout enfant…
Le monstre dit: «Je suis la bête
Mais, dans le ciel, tout comme toi,
Enrichi d’étoiles en fête
J’aurai ma place et mon emploi.»
ANDROMEDA, THE MONSTER’S PREY
Monster, what’s my punishment?
Now a mockery, your name
Has connived as blandishment
In our union and my shame.
There’s a posture I’ll assume,
Firstly, to transmute my form.
We shall marry, I must sleep:
Rapt with joy, I take your shape.
For, beyond disgust, inside
Myself I unearth domains
That are the dowry of the bride:
Find the key to free my chains,
And the place to lay you by,
Monster, when you have to die,
When our orgy shall expire
Of the death of our desire.
From this moment, all is ours:
I’m your monstrous duplicate,
I am the palatial doors,
When your lifelike form appears
I rise up in symmetry,
Rival of your lechery.
Quickly my desire took flight,
Felt your breath in hot pursuit.
Says the monster: ‘Stop your cries,
Sobs and stories and alarms.
I am the master, and my will
Does not jib at marriages,
Rapes, or contracts, has no qualms.
Spare my eardrum with your voice!
I am fierce, I run my course,
Charging where my urges pull.’
When Andromeda was small
She held dear a lonely park
Where a mystery elephant
Sauntered in the looming dark.
Could it be? A pachyderm?
Probably a childish dream,
But she dwells on it, would swear
She is trampled, swung in air.
When Andromeda was small…
Andromède, beware the beast!
Who will save you, Andromède?
What’s the brainstorm in your head
Mixes fact with daydreams past?
Though the lines you sing are sweet,
None of us may know the last.
When Andromeda was small…
Says the monster: ‘I’m the beast:
Yet like you, in skies above
Rich with stars that flaunt and feast,
I shall belong and I shall serve.’
MEURTRE
Andromède se tait au fond des bois,
Les guêpes, les abeilles et les mouches
En culbutant, dans l’air, font des tournois
Et le ciel est ouvert comme une bouche.
Mais du ciel béant ne sort aucun cri,
L’heure est stupide, immense et solennelle,
La lumière est un fleuve tari
Surveillé par d’inertes sentinelles.
Pour animer ce pays suspendu,
Il faudrait l’appel d’un nageur qui coule
Ou, faisant danser le corps d’un pendu,
L’ouragan frémissant comme une foule.
Pourtant le meurtre, attendu par la terre
Pour s’imbiber de salive et de sang,
Surrealist, Lover, Resistant Page 38