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20000 Lieues sous les mers Part 1

Page 14

by Jules Verne


  La lumière, qui éclairait le sol jusqu'à trente pieds au-dessous de la surface de l'Océan, m'étonna par sa puissance. Les rayons solaires traversaient aisément cette masse aqueuse et en dissipaient la coloration. Je distinguais nettement les objets à une distance de cent mètres. Au-delà, les fonds se nuançaient des fines dégradations de l'outremer, puis ils bleuissaient dans les lointains, et s'effaçaient au milieu d'une vague obscurité. Véritablement, cette eau qui m'entourait n'était qu'une sorte d'air, plus dense que l'atmosphère terrestre, mais presque aussi diaphane. Au-dessus de moi, j'apercevais la calme surface de la mer.

  Nous marchions sur un sable fin, uni, non ridé comme celui des plages qui conserve l'empreinte de la houle. Ce tapis éblouissant, véritable réflecteur, repoussait les rayons du soleil avec une surprenante intensité. De là, cette immense réverbération qui pénétrait toutes les molécules liquides. Serai-je cru si j'affirme, qu'à cette profondeur de trente pieds, j'y voyais comme en plein jour ?

  Pendant un quart d'heure, je foulai ce sable ardent, semé d'une impalpable poussière de coquillages. La coque du Nautilus, dessinée comme un long écueil, disparaissait peu à peu, mais son fanal, lorsque la nuit se serait faite au milieu des eaux, devait faciliter notre retour à bord, en projetant ses rayons avec une netteté parfaite. Effet difficile à comprendre pour qui n'a vu que sur terre ces nappes blanchâtres si vivement accusées. Là, la poussière dont l'air est saturé leur donne l'apparence d'un brouillard lumineux ; mais sur mer, comme sous mer, ces traits électriques se transmettent avec une incomparable pureté.

  Cependant, nous allions toujours, et la vaste plaine de sable semblait être sans bornes. J'écartais de la main les rideaux liquides qui se refermaient derrière moi, et la trace de mes pas s'effaçait soudain sous la pression de l'eau.

  Bientôt, quelques formes d'objets. à peine estompées dans l'éloignement, se dessinèrent à mes yeux. Je reconnus de magnifiques premiers plans de rochers, tapissés de zoophytes du plus bel échantillon, et je fus tout d'abord frappé d'un effet spécial à ce milieu.

  Il était alors dix heures du matin. Les rayons du soleil frappaient la surface des flots sous un angle assez oblique, et au contact de leur lumière décomposée par la réfraction comme à travers un prisme, fleurs, rochers, plantules, coquillages, polypes, se nuançaient sur leurs bords des sept couleurs du spectre solaire. C'était une merveille, une fête des yeux, que cet enchevêtrement de tons colorés, une véritable kaléidoscopie de vert, de jaune, d'orange, de violet, d'indigo, de bleu, en un mot, toute la palette d'un coloriste enragé ! Que ne pouvais-je communiquer à Conseil les vives sensations qui me montaient au cerveau, et rivaliser avec lui d'interjections admiratives ! Que ne savais-je, comme le capitaine Nemo et son compagnon, échanger mes pensées au moyen de signes convenus ! Aussi, faute de mieux, je me parlais à moi-même. je criais dans la boîte de cuivre qui coiffait ma tête, dépensant peut-être en vaines paroles plus d'air qu'il ne convenait.

  Devant ce splendide spectacle, Conseil s'était arrête comme moi. Évidemment, le digne garçon. en présence de ces échantillons de zoophytes et de mollusques, classait, classait toujours. Polypes et échinodermes abondaient sur le sol. Les isis variées, les cornulaires qui vivent isolément, des touffes d'oculines vierges, désignées autrefois sous le nom de « corail blanc », les fongies hérissées en forme de champignons, les anémones adhérant par leur disque musculaire, figuraient un parterre de fleurs, émaillé de porpites parées de leur collerette de tentacules azurés. d'étoiles de mer qui constellaient le sable, et d'astérophytons verruqueux, fines dentelles brodées par la main des naïades, dont les festons se balançaient aux faibles ondulations provoquées par notre marche. C'était un véritable chagrin pour moi d'écraser sous mes pas les brillants spécimens de mollusques qui jonchaient le sol par milliers, les peignes concentriques, les marteaux, les donaces, véritables coquilles bondissantes, les troques, les casques rouges, les strombes aile-d'ange, les aphysies, et tant d'autres produits de cet inépuisable Océan. Mais il fallait marcher, et nous allions en avant, pendant que voguaient au-dessus de nos têtes des troupes de physalies, laissant leurs tentacules d'outre-mer flotter à la traîne, des méduses dont l'ombrelle opaline ou rose tendre, festonnée d'un liston d'azur, nous abritait des rayons solaires, et des pélagies panopyres, qui, dans l'obscurité, eussent semé notre chemin de lueurs phosphorescentes !

  Toutes ces merveilles, je les entrevis dans l'espace d'un quart de mille, m'arrêtant à peine, et suivant le capitaine Nemo, qui me rappelait d'un geste. Bientôt, la nature du sol se modifia. A la plaine de sable succéda une couche de vase visqueuse que les Américains nomment « oaze », uniquement composée de coquilies siliceuses ou calcaires. Puis, nous parcourûmes une prairie d'algues, plantes pélagiennes que les eaux n'avaient pas encore arrachées, et dont la végétation était fougueuse. Ces pelouses à tissu serré, douces au pied, eussent rivalisé avec les plus moelleux tapis tissés par la main des hommes. Mais, en même temps que la verdure s'étalait sous nos pas, elle n'abandonnait pas nos têtes. Un léger berceau de plantes marines, classées dans cette exubérante famille des algues, dont on connaît plus de deux mille espèces, se croisait à la surface des eaux. Je voyais flotter de longs rubans de fucus, les uns globuleux, les autres tubulés, des laurencies, des cladostèphes, au feuillage si délié, des rhodymènes palmés, semblables à des éventails de cactus. J'observai que les plantes vertes se maintenaient plus près de la surface de la mer, tandis que les rouges occupaient une profondeur moyenne, laissant aux hydrophytes noires ou brunes le soin de former les jardins et les parterres des couches reculées de l'Océan.

  Ces algues sont véritablement un prodige de la création, une des merveilles de la flore universelle. Cette famille produit à la fois les plus petits et les plus grands végétaux du globe. Car de même qu'on a compté quarante mille de ces imperceptibles plantules dans un espace de cinq millimètres carrés, de même on a recueilli des fucus dont la longueur dépassait cinq cents mètres.

  Nous avions quitté le Nautilus depuis une heure et demie environ. Il était près de midi. Je m'en aperçus à la perpendicularité des rayons solaires qui ne se réfractaient plus. La magie des couleurs disparut peu à peu, et les nuances de l'émeraude et du saphir s'effacèrent de notre firmament. Nous marchions d'un pas régulier qui résonnait sur le sol avec une intensité étonnante. Les moindres bruits se transmettaient avec une vitesse à laquelle l'oreille n'est pas habituée sur la terre. En effet, l'eau est pour le son un meilleur véhicule que l'air, et il s'y propage avec une rapidité quadruple.

  En ce moment, le sol s'abaissa par une pente prononcée. La lumière prit une teinte uniforme. Nous atteignîmes une profondeur de cent mètres, subissant alors une pression de dix atmosphères. Mais mon vêtement de scaphandre était établi dans des conditions telles que je ne souffrais aucunement de cette pression. Je sentais seulement une certaine gêne aux articulations des doigts, et encore ce malaise ne tarda-t-il pas à disparaître. Quant à la fatigue que devait amener cette promenade de deux heures sous un harnachement dont j'avais si peu l'habitude, elle était nulle. Mes mouvements, aidés par l'eau, se produisaient avec une surprenante facilité.

  Arrivé à cette profondeur de trois cents pieds, je percevais encore les rayons du soleil, mais faiblement. A leur éclat intense avait succédé un crépuscule rougeâtre. moyen terme entre le jour et la nuit. Cependant, nous voyions suffisamment à nous conduire. et il n'était pas encore nécessaire de mettre les appareils Ruhmkorff en activité.

  En ce moment, le capitaine Nemo s'arrêta. Il attendit que je l'eusse rejoint, et du doigt, il me montra quelques masses obscures qui s'accusaient dans l'ombre à une petite distance.

  « C'est la forêt de l'île Crespo », pensai-je, et je ne me trompais pas.

  XVII. UNE FORET SOUS-MARINE

  Nous étions enfin arrivés à la lisière de cette forêt, sans doute l'une des plus belles de l'immense domaine du capitaine Nemo. Il la considérait comme étant sienne, et s'attribuait sur elle les même
s droits qu'avaient les premiers hommes aux premiers jours du monde. D'ailleurs, qui lui eût disputé la possession de cette propriété sous-marine ? Quel autre pionnier plus hardi serait venu, la hache à la main, en défricher les sombres taillis ?

  Cette forêt se composait de grandes plantes arborescentes, et, dès que nous eûmes pénétré sous ses vastes arceaux. mes regards furent tout d'abord frappés d'une singulière disposition de leurs ramures— disposition que je n'avais pas encore observée jusqu'alors.

  Aucune des herbes qui tapissaient le sol, aucune des branches qui hérissaient les arbrisseaux, ne rampait, ni ne se courbait, ni ne s'étendait dans un plan horizontal. Toutes montaient vers la surface de l'Océan. Pas de filaments, pas de rubans, si minces qu'ils fussent, qui ne se tinssent droit comme des tiges de fer. Les fucus et les lianes se développaient suivant une ligne rigide et perpendiculaire, commandée par la densité de l'élément qui les avait produits. Immobiles, d'ailleurs, lorsque je les écartais de la main, ces plantes reprenaient aussitôt leur position première. C'était ici le règne de la verticalité.

  Bientôt, je m'habituai à cette disposition bizarre, ainsi qu'à l'obscurité relative qui nous enveloppait. Le sol de la forêt était semé de blocs aigus, difficiles à éviter. La flore sous-marine m'y parut être assez complète, plus riche même qu'elle ne l'eût été sous les zones arctiques ou tropicales, où ses produits sont moins nombreux. Mais, pendant quelques minutes, je confondis involontairement les règnes entre eux, prenant des zoophytes pour des hydrophytes, des animaux pour des plantes. Et qui ne s'y fût pas trompé ? La faune et la flore se touchent de si près dans ce monde sous-marin !

  J'observai que toutes ces productions du règne végétal ne tenaient au sol que par un empâtement superficiel. Dépourvues de racines, indifférentes au corps solide, sable, coquillage, test ou galet, qui les supporte, elles ne lui demandent qu'un point d'appui, non la vitalité. Ces plantes ne procèdent que d'elles-mêmes, et le principe de leur existence est dans cette eau qui les soutient, qui les nourrit. La plupart, au lieu de feuilles, poussaient des lamelles de formes capricieuses, circonscrites dans une gamme restreinte de couleurs, qui ne comprenait que le rose, le carmin, le vert, l'olivâtre, le fauve et le brun. Je revis là, mais non plus desséchées comme les échantillons du Nautilus, des padines-paons, déployées en éventails qui semblaient solliciter la brise, des céramies écarlates, des laminaires allongeant leurs jeunes pousses comestibles, des néréocystées filiformes et fluxueuses, qui s'épanouissaient à une hauteur de quinze mètres, des bouquets s'acétabules, dont les tiges grandissent par le sommet, et nombre d'autres plantes pélagiennes, toutes dépourvues de fleurs. « Curieuse anomalie, bizarre élément, a dit un spirituel naturaliste, où le règne animal fleurit, et où le règne végétal ne fleurit pas ! »

  Entre ces divers arbrisseaux, grands comme les arbres des zones tempérées, et sous leur ombre humide, se massaient de véritables buissons à fleurs vivantes, des haies de zoophytes, sur lesquels s'épanouissaient des méandrines zébrées de sillons tortueux, des cariophylles jaunâtres à tentacules diaphanes, des touffes gazonnantes de zoanthaires, et pour compléter l'illusion -, les poissons-mouches volaient de branches en branches, comme un essaim de colibris, tandis que de jaunes lépisacanthes, à la mâchoire hérissée, aux écailles aiguës, des dactyloptères et des monocentres, se levaient sous nos pas, semblables à une troupe de bécassines.

  Vers une heure, le capitaine Nemo donna le signal de la halte. J'en fus assez satisfait pour mon compte, et nous nous étendîmes sous un berceau d'alariées, dont les longues lanières amincies se dressaient comme des flèches.

  Cet instant de repos me parut délicieux. Il ne nous manquait que le charme de la conversation. Mais impossible de parler, impossible de répondre. J'approchai seulement ma grosse tête de cuivre de la tête de Conseil. Je vis les yeux de ce brave garçon briller de contentement, et en signe de satisfaction. il s'agita dans sa carapace de l'air le plus comique du monde.

  Après quatre heures de cette promenade, je fus très étonné de ne pas ressentir un violent besoin de manger. A quoi tenait cette disposition de l'estomac, je ne saurais le dire. Mais, en revanche, j'éprouvais une insurmontable envie de dormir, ainsi qu'il arrive à tous les plongeurs. Aussi mes yeux se fermèrent-ils bientôt derrière leur épaisse vitre, et je tombai dans une invincible somnolence, que le mouvement de la marche avait seul pu combattre jusqu'alors. Le capitaine Nemo et son robuste compagnon, étendus dans ce limpide cristal, nous donnaient l'exemple du sommeil.

  Combien de temps restai-je ainsi plongé dans cet assoupissement, je ne pus l'évaluer ; mais lorsque je me réveillai, il me sembla que le soleil s'abaissait vers l'horizon. Le capitaine Nemo s'était déjà relevé, et je commençais à me détirer les membres, quand une apparition inattendue me remit brusquement sur les pieds.

  A quelques pas, une monstrueuse araignée de mer, haute d'un mètre, me regardait de ses yeux louches, prête à s'élancer sur moi. Quoique mon habit de scaphandre fût assez épais pour me défendre contre les morsures de cet animal, je ne pus retenir un mouvement d'horreur. Conseil et le matelot du Nautilus s'éveillèrent en ce moment. Le capitaine Nemo montra à son compagnon le hideux crustacé, qu'un coup de crosse abattit aussitôt, et je vis les horribles pattes du monstre se tordre dans des convulsions terribles.

  Cette rencontre me fit penser que d'autres animaux, plus redoutables, devaient hanter ces fonds obscurs, et que mon scaphandre ne me protégerait pas contre leurs attaques. Je n'y avais pas songé jusqu'alors, et je résolus de me tenir sur mes gardes. Je supposais, d'ailleurs, que cette halte marquait le terme de notre promenade ; mais je me trompais, et, au lieu de retourner au Nautilus, le capitaine Nemo continua son audacieuse excursion.

  Le sol se déprimait toujours, et sa pente, s'accusant davantage, nous conduisit à de plus grandes profondeurs. Il devait être à peu près trois heures, quand nous atteignîmes une étroite vallée, creusée entre de hautes parois à pic, et située par cent cinquante mètres de fond. Grâce à la perfection de nos appareils, nous dépassions ainsi de quatre-vingt-dix mètres la limite que la nature semblait avoir imposée jusqu'ici aux excursions sous-marines de l'homme.

  Je dis cent cinquante mètres, bien qu'aucun instrument ne me permît d'évaluer cette distance. Mais je savais que, même dans les mers les plus limpides, les rayons solaires ne pouvaient pénétrer plus avant. Or, précisément, l'obscurité devint profonde. Aucun objet n'était visible à dix pas. Je marchais donc en tâtonnant, quand je vis briller subitement une lumière blanche assez vive. Le capitaine Nemo venait de mettre son appareil électrique en activité. Son compagnon l'imita. Conseil et moi nous suivîmes leur exemple. J'établis, en tournant une vis, la communication entre la bobine et le serpentin de verre, et la mer, éclairée par nos quatre lanternes, s'illumina dans un rayon de vingt-cinq mètres.

  Le capitaine Nemo continua de s'enfoncer dans les obscures profondeurs de la forêt dont les arbrisseaux se raréfiaient de plus en plus. J'observai que la vie végétale disparaissait plus vite que la vie animale. Les plantes pélagiennes abandonnaient déjà le sol devenu aride, qu'un nombre prodigieux d'animaux, zoophytes, articulés, mollusques et poissons y pullulaient encore.

  Tout en marchant, je pensais que la lumière de nos appareils Ruhmkorff devait nécessairement attirer quelques habitants de ces sombres couches. Mais s'ils nous approchèrent, ils se tinrent du moins à une distance regrettable pour des chasseurs. Plusieurs fois, je vis le capitaine Nemo s'arrêter et mettre son fusil en joue ; puis, après quelques instants d'observation, il se relevait et reprenait sa marche.

  Enfin, vers quatre heures environ, cette merveilleuse excursion s'acheva. Un mur de rochers superbes et d'une masse imposante se dressa devant nous, entassement de blocs gigantesques, énorme falaise de granit, creusée de grottes obscures, mais qui ne présentait aucune rampe praticable. C'étaient les accores de l'île Crespo. C'était la terre.

  Le capitaine Nemo s'arrêta soudain. Un geste de lui nous fit faire halte, et si désireux que
je fusse de franchir cette muraille, je dus m'arrêter. Ici finissaient les domaines du capitaine Nemo. Il ne voulait pas les dépasser. Au-delà, c'était cette portion du globe qu'il ne devait plus fouler du pied.

  Le retour commença. Le capitaine Nemo avait repris la tête de sa petite troupe, se dirigeant toujours sans hésiter. Je crus voir que nous ne suivions pas le même chemin pour revenir au Nautilus. Cette nouvelle route, très raide, et par conséquent très pénible, nous rapprocha rapidement de la surface de la mer. Cependant, ce retour dans les couches supérieures ne fut pas tellement subit que la décompression se fit trop rapidement, ce qui aurait pu amener dans notre organisme des désordres graves, et déterminer ces lésions internes si fatales aux plongeurs. Très promptement, la lumière reparut et grandit, et, le soleil étant déjà bas sur l'horizon, la réfraction borda de nouveau les divers objets d'un anneau spectral.

  A dix mètres de profondeur, nous marchions au milieu d'un essaim de petits poissons de toute espèce, plus nombreux que les oiseaux dans l'air, plus agiles aussi, mais aucun gibier aquatique, digne d'un coup de fusil. ne s'était encore offert à nos regards.

  En ce moment, je vis l'arme du capitaine, vivement épaulée, suivre entre les buissons un objet mobile. Le coup partit, j'entendis un faible sifflement, et un animal retomba foudroyé à quelques pas.

  C'était une magnifique loutre de mer, une enhydre, le seul quadrupède qui soit exclusivement marin. Cette loutre, longue d'un mètre cinquante centimètres, devait avoir un très grand prix. Sa peau, d'un brun marron en dessus, et argentée en dessous, faisait une de ces admirables fourrures si recherchées sur les marchés russes et chinois ; la finesse et le lustre de son poil lui assuraient une valeur minimum de deux mille francs. J'admirai fort ce curieux mammifère à la tête arrondie et ornée d'oreilles courtes, aux yeux ronds, aux moustaches blanches et semblables à celles du chat, aux pieds palmés et unguiculés, à la queue touffue. Ce précieux carnassier, chassé et traqué par les pêcheurs, devient extrêmement rare, et il s'est principalement réfugié dans les portions boréales du Pacifique, où vraisemblablement son espèce ne tardera pas à s'éteindre.

 

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