Complete Works of Gustave Flaubert

Home > Fiction > Complete Works of Gustave Flaubert > Page 317
Complete Works of Gustave Flaubert Page 317

by Gustave Flaubert


  — Qui ?

  — Lui enfin, lui qui m’a retardée.

  — Qu’est-ce ?

  — Je ne sais !

  — C’est moi, s’écria une voix qui partait du fond de l’appartement, avec un rire perçant.

  En effet l’étranger et le duc Arthur étaient collés contre la muraille.

  Le vieillard sauta sur son fusil accroché dans sa cheminée, et les ajusta.

  — Grâce pour lui ! s’écria Julietta en se jetant violemment autour de son cou.

  Mais la balle était partie, on n’entendait plus rien, les deux fantômes disparurent ; seulement, au bout de quelques instants, une vitre se cassa et une balle vint rouler sur les pavés.

  C’était celle que Satan renvoyait.

  VI

  Tout cela était étrange, il y avait là-dessous quelque sorcellerie, quelque piège magique ; et puis, ce lait changé en sang, cette apparition bizarre, le retard de Julietta, son regard effaré, sa voix chevrotante, et cette balle qui venait rebondir autour d’eux, avec leur rire sinistre échappé du mur, tout cela fit pâlir et trembler la famille ; on se serra les uns contre les autres et l’on se tut aussitôt. Julietta s’appuya la tête dans la main gauche, posa le coude sur la table, et défaisant le ruban qui retenait ses cheveux, elle les laissa tomber sur ses épaules, puis, ouvrant les lèvres, elle se mit à chanter entre ses dents, bien bas il est vrai ; elle murmurait un vieux refrain, aigre et monotone, qui sortait en sifflant ; elle se balançait légèrement sur la chaise et paraissait vouloir s’endormir au son de sa voix, son regard était insignifiant et à demi fermé, sa tenue était nonchalante et rêveuse.

  On l’écoutait avec étonnement, et c’était toujours les mêmes sons, aigus et faibles, le même bourdonnement ; puis peu à peu il s’apaisa, et il devint si faible et si grêle qu’il mourut entre ses dents.

  La nuit se passa ainsi, triste et longue, car chacun n’osait remuer de sa place, n’osait dire une parole ni regarder derrière soi. Le vieillard s’assoupit profondément dans son fauteuil de bois, sa femme ferma bientôt les yeux de crainte et d’ennui ; quant à ses deux fils, ils baissèrent la tête dans leurs mains et cherchèrent un sommeil qui ne vint que bien tard, mais troublé par des rêves sinistres.

  Il eût fallu voir toutes ces têtes sommeillantes et abattues, réunies autour d’une lumière mourante qui éclairait leur front soucieux d’une teinte pâle et lugubre : celle du vieillard était grave, sa bouche était entrouverte, son front était couvert de ses cheveux blancs, et ses mains décharnées reposaient sur ses cuisses ; la vieille femme, qui était posée devant lui, tournait de temps en temps la tête de côté et d’autre, son visage était ridé par une singulière expression de malheur et d’amertume ; et puis il y avait la figure pâle et paisible de Julietta, avec ses longs cheveux blonds qui balayaient la table, sa chanson monotone qui sifflait entre ses dents blanches, et son regard doux et enivré.

  Elle ne dormit pas, mais elle passa les heures de la nuit à écouter le beuglement plaintif de sa vache blanche qui, renfermée dans son étable, souffrait aussi, la pauvre bête, et se tordait peut-être d’agonie sur sa litière humide de sueur.

  En effet, quand le jour fut venu et que Julietta sortit pour l’aller faire paître dans les champs, elle portait sur le cou l’empreinte d’une griffe.

  Elle sortit, monta la colline d’un pas rapide ; arrivée au haut, elle s’assit, mais le bas de ses vêtements et ses pieds ruisselaient, elle avait marché dans la rosée, tant, ce jour, elle était folle et dormeuse tout à la fois ; elle courait, puis s’arrêtait tout à coup, portait sa main à son front, et regardait de tous côtés s’il n’allait pas venir.

  Il ! car elle aimait, la pauvre enfant ! elle aimait un grand seigneur, riche, puissant, qui était beau cavalier, avait des yeux fiers et un sourire hautain ; elle aimait un homme étrange, inconnu, un démon incarné, une créature, pensait-elle, bien élevée et bien poétique.

  Non ! rien de tout cela, car elle aimait le duc Arthur d’Almaroës.

  D’autres fois, elle retombait dans ses rêveries et souriait amèrement, comme doutant de l’avenir, et puis elle pensait à lui, elle se le créait là, assis sur l’herbe perlée, à côté d’elle ; il était là, là, lui disant de douces paroles, la regardant fixement de son regard puissant ; et sa voix était douce, était pure, était vibrante d’amour, c’était une musique toute nouvelle et toute sublime. Elle resta ainsi longtemps, les yeux fixés sur l’horizon qui lui apparaissait toujours aussi morne, aussi vide de sens, aussi stupide.

  Le soir arriva enfin, après ce long jour d’angoisses, aussi long que la nuit qui l’avait précédé. Julietta resta encore longtemps après le coucher du soleil, et puis elle revint, elle descendit lentement la montagne, s’arrêtant à chaque pas et écoutant derrière elle, et elle n’entendait que la cigale qui sifflait sous l’herbe, et l’épervier qui rentrait dans son nid en volant à tire-d’aile.

  Elle s’en allait donc ainsi triste et désespérée, la tête baissée sur son sein tout gonflé de soupirs, tenant de sa main gauche la corde tout humide qui tenait sa pauvre vache blanche qui boitait de l’épaule droite. C’était sur celle-là que Satan s’était assis.

  Arrivée à l’endroit où l’inconnu l’avait quittée, la veille, et où le duc Arthur lui était apparu, elle s’arrêta instinctivement, retint fortement sa génisse qui, luttant naturellement contre elle, l’entraîna de quelques pas.

  Arthur se présenta aussitôt, elle lâcha la corde, et la vache se mit à bondir et à galoper vers son étable.

  Julietta le regarda avec amour, avec envie, avec jalousie ; il passa en la regardant comme il regardait les bois, le ciel, les champs.

  Elle l’appela par son nom ; il fut sourd à ses cris comme au bêlement du mouton, au chant de l’oiseau, aux aboiements du chien.

  — Arthur, lui dit-elle avec désespoir, Arthur, oh ! Arthur, écoute !

  Et elle courut sur ses pas, et se traîna à ses vêtements, et elle balbutiait en sanglotant ; son coeur battait avec violence, elle pleurait d’amour et de rage. Il y avait tant de passion dans ces cris, dans ces larmes, dans cette poitrine qui se soulevait avec fracas, dans cet être faible et aérien qui se traînait les genoux sur le sol, tout cela était si éloigné des cris d’une femme pour une porcelaine brisée, du bêlement du mouton, du chant de l’oiseau, de l’aboiement du chien, qu’Arthur s’arrêta, la regarda un instant... et puis il continua sa route.

  — Oh ! Arthur, écoute de grâce un instant ! car je t’aime, je t’aime ! Oh ! viens avec moi, nous irons vivre ensemble sur la mer, loin d’ici, ou bien, tiens ! nous nous tuerons ensemble.

  Arthur marchait toujours.

  — Écoute, Arthur ! mais regarde-moi ! je suis donc bien hideuse, bien laide ? tu n’es donc pas un homme, toi, que ton coeur est froid comme le marbre et dur comme la pierre !

  Elle tomba à genoux à ses pieds, en se renversant sur le dos comme si elle allait mourir. Elle mourait, en effet, d’épuisement et de fatigue, elle se tordait de désespoir, et voulait s’arracher les cheveux, et puis elle sanglotait avec un rire forcé, des larmes qui étouffaient sa voix ; ses genoux étaient déchirés et couverts de sang à se traîner ainsi sur les cailloux ; car elle aimait d’un amour déchirant, entier, satanique ; cet amour la dévorait toujours, il était furieux, bondissant, exalté.

  C’était bien un amour inspiré par l’enfer, avec ces cris désordonnés, ce feu brûlant qui déchire l’âme, use le coeur ; une passion satanique, toute convulsive et toute forcée, si étrange qu’elle paraît bizarre, si forte qu’elle rend fou.

  — À demain, n’est-ce pas, oh, Arthur ! Une grâce ! une grâce ! et je te donnerai tout après, mon sang, ma vie, mon âme, l’éternité si je l’avais ! tu me tueras si tu veux, mais à demain ! à demain sur la falaise... Oh ! n’est-ce pas ? au clair de lune... la belle chose qu’une nuit d’amour sur les rochers, au bruit des flots, n’est-ce pas, Arthur ?... à demain ?

  Et il laissa tomber nonchalamment de ses lèvres dédaigneuses deux mots : />
  — À demain !

  VII

  À demain ! Oh ! demain ! et elle courut comme une folle vers la falaise, on ne la revit plus dans le village, elle avait disparu du pays.

  Satan l’avait emportée.

  VIII

  Il faisait nuit, la lune brillait pure et blanche, et, dégagée de ses nuages, sa lumière éclairait le cabinet d’Arthur, dont il avait laissé la fenêtre ouverte ; il se penchait sur la rampe de fer et humait avec délices l’air frais de la nuit. Il entendit ce même bruit de pattes fines et légères sur les carreaux de son fourneau, il se retourna. C’était Satan, mais, cette fois, plus hideux et plus pâle encore ; ses flancs étaient amaigris, et sa gueule béante laissait voir des dents verdâtres comme l’herbe des tombeaux.

  — Eh bien, Satan, lui dit Arthur, eh bien, est-il vrai maintenant que j’aime quelqu’un ? crois-tu que j’aie été ému par ces cris, par ces larmes et par ces convulsions forcées ?

  — Vraiment, lui répondit le démon en frémissant sur ses quatre pattes, vraiment tu es donc bien insensible ! et tu l’as laissée mourir ?

  — Elle est morte ? dit Arthur en le regardant froidement.

  — Non ; mais elle t’attend.

  — Elle m’attend ?

  — Oui, sur la falaise. Ne lui avais-tu pas promis ? il y a longtemps qu’elle y est, elle t’attend.

  — Eh bien, j’irai.

  — Tu iras ? eh bien, Arthur, je ne te demande que cette dernière grâce ; après, tu feras de moi tout ce qu’il te plaira, je t’appartiens.

  — Et que veux-tu que je fasse ?

  — Crois-tu que je tienne beaucoup à ton âme, moi ? tu l’aimeras, te dis-je...

  Arthur, ne m’as-tu pas dit que tu voudrais avoir des passions, un amour fort et brûlant, étranger des autres amours ? eh bien, tu l’aurais, cet amour... mais moi, à mon tour, n’est-ce pas ? tu me donneras ton âme ?

  — Je n’en ai pas.

  — Tu le crois, mais tu en as une, car tu es un homme puisque tu aimeras.

  Satan était habitué à voir tant d’orgueil et de vanité qu’il ne croyait qu’à cela ; le malheur ne voit que le vice, l’affamé ne sent que la faim.

  — Un homme ? Satan ! dis, en as-tu vu des hommes qui puissent s’étendre dans les airs jusqu’aux nuages ? - et il déploya ses ailes vertes - en as-tu vu des cheveux comme ceux-là ? - et il montra sa chevelure bleue. - As-tu vu chez aucun d’eux un corps blanc comme la neige, une main aussi forte que celle-là, Satan - et il lui serrait fortement la peau entre ses ongles - enfin, y en a-t-il qui ose jamais t’insulter ainsi ? Puisque tu désires mon âme, tue-moi de suite, écrase ma tête dans tes dents, déchire-moi de tes griffes, essaie et vois si je suis un homme.

  Et Satan bondissait sur le pavé, il écumait de rage et, dans ses sauts convulsifs, il allait se frapper les reins sur le plafond ; Arthur était paisible.

  — Satan, lui dit-il, tu es fort en effet, tu es puissant, je sens que tu peux m’anéantir d’un seul coup, essaie, essaie, ah ! de grâce, tue-moi !... Oui, j’ai une âme, je te la donne, mon âme ; tue-moi, cela t’est facile, car je ne suis qu’un homme.

  Le démon sauta sur sa gorge avec un cri infernal qui partait de ses entrailles ; il voulut le saisir, la peau lui glissa sous les dents. Arthur se dégagea la poitrine ; Satan s’élança d’un bond furieux, les griffes en avant, il retomba sans pouvoir effleurer l’épiderme qui était intact et poli ; il bondissait, furieux, éperdu, un aboiement rauque courait sur ses lèvres ensanglantées, ses yeux flamboyaient, il trépignait ; Arthur se coucha sur le sol, étendit ses ailes. Satan glissait dessus, il s’y traînait, y rampait, ouvrait la gueule pour le déchirer, ses griffes s’usaient comme à déchirer un roc ; il bavait, haletant, rouge de colère : pour la première fois il se trouvait vaincu. Et puis l’autre... l’autre riait mollement, et ce rire paisible était éclatant, sonore et comme mêlé à un bruit de fer ; le souffle bruyant qui s’exhalait de sa gorge repoussait Satan, comme la furieuse vibration d’une cloche d’alarme qui bondit dans la nef, rugit, ébranle les piliers et fait tomber la voûte.

  Il fallait voir aux prises ces deux créatures toutes bizarres, toutes d’exception, l’une toute spirituelle, l’autre charnelle et divine dans sa matière ; il fallait voir en lutte l’âme et le corps et cette âme, cet esprit pur et aérien, rampant, impuissant et faible devant la morgue hautaine de la matière brute et stupide.

  Ces deux monstres de la création se trouvaient en présence comme pour se haïr et se combattre, c’était une guerre acharnée, à mort, une guerre terrible... et qui devait finir entre eux, comme chez l’homme... par le doute et l’ennui.

  C’était deux principes incohérents qui se combattaient en face ; l’esprit tomba d’épuisement et de lassitude devant la patience du corps.

  Et qu’ils étaient grands et sublimes, ces deux êtres qui, réunis ensemble, auraient fait un Dieu, l’esprit du mal et la force du pouvoir ! Que cette lutte était terrible et puissante, avec ces cris d’enfer, ces rires furieux, et puis tout l’édifice en ruines qui tremblait sous les pas, et dont les pierres remuaient comme dans un rêve !

  Enfin, quand Satan eut bien des fois sauté et retombé sur le sol, haletant et fatigué, l’oeil terne, la peau humide d’une sueur glaciale, les griffes cassées ; quand Arthur l’eut contemplé longtemps, épuisé de rage et de colère, rampant tristement à ses pieds ; quand il eut savouré longtemps le râle qui s’échappait de sa poitrine, quand il eut compté les soupirs d’agonie qu’il ne pouvait retenir et qui lui brisaient le coeur, enfin, quand, revenu de sa cruelle défaite, Satan leva la tête défaillante vers son vainqueur, il trouva encore ce regard d’automate froid, et impassible, qui semblait rire dans son dédain.

  — Et toi aussi, lui dit Arthur, tu t’es laissé vaincre comme un homme... et par orgueil encore ! Crois-tu maintenant que j’aie dit vrai ?

  — Tu n’es peut-être pas un homme, dit Satan... mais tu as une âme...

  — Eh bien, Satan, j’irai demain sur la falaise.

  Et le lendemain, quand le concierge fit sa tournée dans les corridors, il trouva que les dalles étaient dérangées et usées toutes, de place en place, comme par une griffe de fer. Le brave homme en devint fou.

  IX

  Julietta attendait le duc, elle l’attendait jour et nuit, courant sur les rochers, elle l’attendait en pleurant, elle l’attendait depuis quatre années.

  Car les ans passent vite dans un récit, dans la pensée ; ils coulent vite dans le souvenir, mais ils sont lents et boiteux dans l’espérance.

  Le jour, elle se promenait sur la plage, écoutait la mer et regardait de tous côtés s’il n’allait pas venir ; et puis quand le soleil avait échauffé les roches, quand, épuisée, elle tombait de fatigue, alors elle s’endormait sur le sable, et puis se relevait pour aller cueillir des fruits, chercher le pain que des âmes charitables déposaient dans une fente de rochers.

  La nuit elle se promenait sur les falaises, errante ainsi avec ses longs vêtements blancs, sa chevelure en désordre, et des cris de douleur ; et elle restait assise des heures entières sur un roc aigu, à contempler, au clair de lune, les vagues brisées qui venaient mourir sur la grève et mousser en blanches écumes entre les rochers et les galets.

  Pauvre folle ! disait-on, si jeune et si belle ! vingt ans à peine... et plus d’espoir !... Dame ! c’est sa faute aussi, elle est folle d’amour, d’amour pour un prince ; c’est l’orgueil qui l’a perdue, elle s’est donnée à Satan.

  Oui, bien folle, en effet, d’aimer le duc Arthur, bien folle de ne point étouffer son amour, bien folle de ne point se tuer de désespoir ; mais elle croyait à Dieu et elle ne se tua pas.

  Il est vrai que souvent elle contemplait la mer et la falaise, haute de cent pieds, et puis qu’elle se mettait à sourire tout bas, avec une grimace des lèvres qui faisait peur aux enfants ; bien folle de s’arrêter devant une idée de croire à Dieu, de le respecter, de souffrir pour son plaisir, de pleurer pour ses délices. Croire à Dieu, Julietta, c’est être heureuse ; tu crois
à Dieu et tu souffres ! Oh ! tu es bien folle en effet ! Voilà ce que te diront les hommes.

  Mais non, au désespoir avait succédé l’abattement, aux cris furieux les larmes ; plus d’éclairs de voix, de profonds soupirs, mais des sons dits tout bas et retenus sur les lèvres, de peur de mourir en les criant.

  Ses cheveux étaient blancs, car le malheur vieillit ; il est comme le temps, il court vite, il pèse lourd et il frappe fort ; mais, plus encore, il faut moins de larmes au désespoir pour amaigrir un homme que de gouttes d’eau à la tempête pour creuser la pierre d’une tombe ; les cheveux se blanchissent en une nuit.

  Ses cheveux étaient blancs, ses habits déchirés, mais ses pieds s’étaient durcis à marcher sur la terre, à s’écorcher aux ronces et aux chardons ; ses mains étaient crevassées par le froid et par l’air âpre de l’océan, qui dessèche et qui brûle comme les gelées du Nord ; et puis elle était pâle, amaigrie, avait les yeux creux et ternes, que vivifiait encore un rayon d’amour, qu’éclairait une étincelle d’enfer ; sa bouche était entrouverte et comme contractée par un mouvement des lèvres involontaire et convulsif. Mais elle avait toujours le teint doré et brûlé du soleil, elle avait toujours ce regard étrange qui séduit et qui attire, c’était toujours cette âme sublime et passionnée, que Satan avait choisie pour tenter la matière endormie, le corps dénué de sens, la chair sans volupté.

  Quand elle voyait un homme, elle courait vers lui, se jetait à ses pieds, l’appelait Arthur, et puis s’en retournait triste, désespérée, en disant : “Ce n’est pas lui ! il ne vient pas !”

  Et l’on disait : Oh ! la pauvre folle, si jeune et si belle, vingt ans à peine... et plus d’espoir !

  C’était par une nuit belle, radieuse d’étoiles, toute blanche, toute azurée, toute calme comme la mer, qui était tranquille et douce, qui venait battre légèrement les rochers de la falaise.

  Julietta était là, toujours rêveuse et solitaire, et puis, je ne sais si c’est un songe, mais Arthur lui apparut.

 

‹ Prev