Les chasseurs de mammouths
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« Nous avons marché vers le nord, vers le détroit. Je savais qu’il y avait là des gens qui construisaient de petits bateaux et s’en servaient pour traverser la mer. On nous avertit : c’était la mauvaise saison, et le passage était toujours difficile, même dans les meilleures conditions. Mais nous devions partir à tout prix, je le sentais, et nous avons décidé de prendre le risque.
« J’avais pris la mauvaise décision, poursuivit Wymez, d’une voix fermement contrôlée. Le bateau a chaviré. Seuls, Ranec et moi sommes arrivés sur l’autre rive, avec un paquet de ses affaires à elle.
Il s’interrompit un instant, avant de reprendre le cours de son histoire.
— Nous étions encore bien loin de chez moi, et le voyage nous a pris longtemps, mais nous avons fini par arriver ici, pendant une Réunion d’Été.
— Combien de temps étais-tu resté absent ? demanda Jondalar.
— Dix années. (Wymez sourit.) Nous avons fait sensation. Personne ne s’attendait à me revoir, et surtout pas avec Ranec. Nezzie ne m’a même pas reconnu, mais ma sœur était encore très jeune quand j’étais parti. Elle et Talut venaient de célébrer leur Union. Ils étaient en train de fonder le Camp du Lion, avec Tulie, ses deux compagnons et leurs enfants. Ils m’ont invité à me joindre à eux. Nezzie a adopté Ranec, bien qu’il soit resté le fils de mon foyer, et elle l’a élevé comme son propre fils, même après la naissance de Danug.
Lorsqu’il se tut, l’auditoire mit un moment à comprendre qu’il était arrivé au bout de son récit. Chacun avait envie d’en savoir davantage. Ils lui avaient presque tous entendu conter bien des histoires, mais il en avait apparemment toujours d’autres en réserve, ou il donnait un tour nouveau aux anciennes.
— Je crois que Nezzie serait la mère de tout le monde, si elle le pouvait, dit Tulie, qui se rappelait le retour de Wymez. J’avais alors Deegie au sein, et Nezzie ne se lassait jamais de jouer avec elle.
— Pour moi, elle est plus qu’une mère ! déclara Talut.
Avec un sourire taquin, il tapota le large séant de sa compagne. Il était allé chercher une autre outre de son puissant breuvage et la passait à ses compagnons, après avoir avalé une lampée.
— Talut ! protesta Nezzie. Je vais être autre chose qu’une mère pour toi, tu vas voir !
Elle voulait paraître furieuse mais elle dissimulait un sourire.
— C’est une promesse ? riposta-t-il.
— Tu sais très bien ce que je voulais dire, Talut, reprit Tulie.
Elle ignorait délibérément les sous-entendus échangés entre son frère et la compagne de celui-ci.
— Elle n’a même pas pu laisser mourir Rydag. Il est si chétif : la mort aurait mieux valu pour lui.
Le regard d’Ayla alla trouver l’enfant. La remarque de Tulie l’avait troublée. Elle n’avait pas voulu se montrer méchante, mais, Ayla le savait, il détestait entendre parler de lui comme s’il n’était pas là. Pourtant il n’y pouvait rien. Il était incapable de dire ce qu’il ressentait, et Tulie pensait que, puisqu’il ne pouvait parler, il n’éprouvait rien.
Ayla aurait aimé poser des questions à propos de l’enfant mais elle craignait de se montrer présomptueuse. Jondalar le fit à sa place, pour satisfaire sa propre curiosité.
— Nezzie, veux-tu nous parler de Rydag ? Cela intéresse Ayla, je pense, et moi aussi.
Nezzie se pencha pour reprendre le petit garçon à Latie et l’installer sur ses genoux, tout en rassemblant ses idées.
— Nous étions partis chasser le mégacéros, tu sais, le cerf géant aux bois démesurés, commença-t-elle. Nous avions l’intention d’élever une enceinte et d’y faire pénétrer les bêtes : c’est le seul moyen de chasser les animaux aux grandes cornes. Quand j’ai remarqué pour la première fois la femme qui se cachait près de notre campement, j’ai trouvé cela étrange. On voit rarement des femmes Têtes Plates et jamais seules.
Ayla, penchée en avant, l’écoutait attentivement.
— Elle ne s’est pas enfuie quand elle m’a vue la regarder, mais plus tard seulement, quand j’ai voulu m’approcher d’elle. J’ai noté alors qu’elle attendait un enfant. Je me suis dit qu’elle avait peut-être faim et je lui ai laissé de quoi manger près de l’endroit où elle se cachait. Le lendemain matin, la nourriture avait disparu. J’en ai déposé d’autre, avant que nous levions le camp.
« Au cours de la journée, j’ai cru la voir à plusieurs reprises, mais je n’en étais pas sûre. Le soir, pendant que j’allaitais Rugie, j’ai essayé de l’approcher. Une fois de plus, elle a pris la fuite mais elle se déplaçait comme si elle souffrait, et j’ai compris qu’elle était sur le point de mettre son enfant au monde. Je ne savais pas quoi faire. Je voulais l’aider, mais elle m’échappait toujours, et la nuit tombait. J’ai tout raconté à Talut, et il a rassemblé quelques hommes pour la rattraper.
— Ça aussi, ça m’a paru étrange, dit Talut, en prenant la suite du récit de Nezzie. Je pensais que nous allions devoir l’encercler pour la prendre au piège, mais, quand je lui ai crié de s’arrêter, elle s’est tout simplement assise par terre pour nous attendre. Elle n’a pas eu l’air trop effrayée à ma vue. Je lui ai fait signe d’approcher. Elle s’est levée et m’a suivi tout de suite, comme si elle savait ce qu’elle devait faire, comme si elle comprenait que je ne lui ferais pas de mal.
— Je ne sais pas comment elle parvenait encore à marcher, continua Nezzie. Elle souffrait tellement. Elle a vite compris que je voulais l’aider, mais je me demande si j’ai été d’un grand secours. Je n’étais même pas sûre qu’elle vivrait assez longtemps pour mettre son enfant au monde. Pourtant, elle n’a jamais poussé un cri. Finalement, le lendemain matin, son fils est né. A ma surprise, il était d’esprits mêlés. Même à cet âge, on voyait qu’il était différent.
« La femme était très faible. Si je lui montrais que son fils était vivant, me suis-je dit, elle retrouverait peut-être une raison de vivre. Et elle avait l’air d’avoir envie de le voir. Mais sans doute s’était-elle trop affaiblie. Elle devait avoir perdu trop de sang. C’était comme si elle avait renoncé à tout. Elle est morte avant le lever du soleil.
« Tout le monde me disait de le laisser mourir avec sa mère, mais, de toute manière, je nourrissais Rugie et j’avais trop de lait. Il ne m’en a pas coûté de le mettre au sein, lui aussi.
D’un geste protecteur, elle serra l’enfant contre elle.
— Il est chétif, je le sais bien. Peut-être aurais-je dû l’abandonner, mais je ne pourrais pas aimer Rydag davantage s’il était mon propre enfant. Et je ne regrette pas de l’avoir gardé.
Rydag leva vers Nezzie ses grands yeux bruns brillants, il lui passa autour du cou ses petits bras maigres, posa la tête sur sa poitrine. Nezzie se mit à le bercer.
— Il y a des gens qui le considèrent comme un animal parce qu’il ne peut pas parler, mais je sais qu’il comprend tout. Et ce n’est pas non plus un monstre, ajouta-t-elle, en lançant vers Frébec un coup d’œil furieux. Seule la Mère sait pourquoi les esprits qui l’ont formé étaient mêlés.
Ayla luttait pour retenir ses larmes. Elle ignorait comment ces gens réagiraient devant ce spectacle : ses yeux qui se mouillaient si aisément avaient toujours gêné les gens du Clan. En regardant la femme et l’enfant, elle se sentait submergée par les souvenirs. Elle éprouvait le désir douloureux de tenir son fils dans ses bras, elle ressentait de nouveau le chagrin d’avoir perdu Iza, qui l’avait recueillie et l’avait élevée avec tendresse, bien qu’elle fût aussi différente du Clan que l’était Rydag du Camp du Lion. Plus que tout, elle aurait voulu expliquer à Nezzie à quel point elle était émue, combien elle lui était reconnaissante, pour Rydag et... pour elle-même. Inexplicablement, elle avait l’impression qu’elle manifesterait sa gratitude envers Iza si elle trouvait le moyen de faire quelque chose pour Nezzie.
— Nezzie, il sait, dit Ayla à voix basse. Lui pas animal, pas Tête Plate. Il est enfant du Clan et enfant des Autres.
— Je sais que ce n’est pas un animal
, Ayla, répondit Nezzie. Mais le Clan, qu’est-ce que c’est ?
— Est gens comme mère de Rydag, expliqua la jeune femme. Vous dites Têtes Plates, eux disent Clan.
— Comment ça, « ils disent Clan » ? intervint Tulie. Ils ne savent pas parler.
— Disent pas beaucoup de mots. Mais parlent. Parlent avec mains.
— Comment le sais-tu ? questionna Frébec. D’où te vient cette science ?
Jondalar, dans l’attente de la réponse d’Ayla, retint son souffle.
— Vivais avec Clan avant. Parle comme Clan. Pas avec mots, avant arrivée de Jondalar. Clan était mon peuple.
Quand le sens de ses paroles pénétra les esprits, il se fit un silence abasourdi.
— Tu veux dire que tu vivais avec des Têtes Plates ? Tu vivais avec ces répugnants animaux ? s’exclama Frébec avec dégoût.
Il se leva d’un bond, recula de quelques pas.
— Pas étonnant qu’elle parle si mal. Si elle a vécu avec eux, elle est aussi répugnante qu’eux. Tous des animaux, ces gens-là, y compris cette petite horreur à laquelle tu tiens tant, Nezzie.
Le Camp tout entier était en effervescence. Certains auraient peut-être été de l’avis de Frébec, mais il était allé trop loin. Il avait dépassé les limites de la courtoisie due à tout visiteur, il était allé jusqu’à insulter la compagne de Celui Qui Ordonne. Mais, depuis longtemps, il était gêné d’appartenir au Camp qui avait recueilli « ce monstre d’esprits mêlés ». En même temps, il était encore irrité par les paroles acerbes décochées par la mère de Fralie au cours de leur récente querelle. Il avait besoin de passer son exaspération sur quelqu’un.
Dans un rugissement, Talut se lança à la défense de Nezzie et d’Ayla. Tulie ne perdit pas un instant pour soutenir l’honneur du Camp. Crozie, avec un sourire malicieux, tantôt haranguait Frébec, tantôt faisait les gros yeux à Fralie. Les autres exprimaient leurs opinions à haute et intelligible voix. Le regard d’Ayla allait de l’un à l’autre. Elle avait envie de se boucher les oreilles pour ne plus les entendre.
Tout à coup, la voix retentissante de Talut réclama le silence. Devant cet éclat, tout le monde se tut. On entendit alors le tambour de Mamut, et le son produisit un effet apaisant.
— Avant que quelqu’un reprenne la parole, nous devrions entendre, je crois, ce que peut nous dire Ayla, dit Talut, quand le battement cessa.
Les gens se penchèrent en avant dans une posture attentive. Ils étaient tout disposés à apprendre ce qu’était cette femme mystérieuse.
Ayla n’était pas convaincue de vouloir en dire davantage à ces êtres bruyants et grossiers mais, elle le savait, elle n’avait pas le choix. Elle releva le menton. S’ils tenaient à tout entendre, se dit-elle, ils allaient être satisfaits, mais elle partirait dès le lendemain matin.
— Je... ne pas... Pas souvenirs de première jeunesse, commença-t-elle. Seulement tremblement de terre et lion des cavernes qui fait marques sur jambe. Iza dit trouver moi près rivière... Quel mot, Mamut ? Pas en éveil ?
— Inconsciente.
— Iza trouver moi près rivière, inconsciente. Je être près âge Rydag, plus jeune. Peut-être cinq années. Blessée sur jambe par griffes lion des cavernes. Iza est... guérisseuse. Soigne jambe. Creb... Creb est mog-ur... comme Mamut... homme sage... connaît monde esprits. Creb apprend moi parler comme Clan. Iza et Creb... tout Clan... prennent soin. Je pas Clan, mais prennent soin.
Ayla faisait un grand effort pour se rappeler tout ce que lui avait dit Jondalar du langage de ces gens. Elle n’avait pas apprécié la remarque de Frébec sur ses difficultés d’élocution. Le reste non plus, d’ailleurs. Elle glissa un coup d’œil vers Jondalar, lui vit le front plissé. Il lui demandait d’être prudente. Elle n’était pas bien sûre de la nature de son inquiétude, mais peut-être n’était-il pas nécessaire de tout dire.
— Je grandis avec Clan mais je pars... pour trouver Autres, comme moi. J’ai...
Elle s’interrompit pour retrouver le nom du chiffre qui convenait.
— ... quatorze années, alors. Iza dit Autres vivant dans nord. Je chercher longtemps ; trouver personne. Je trouve vallée et je reste, pour préparer pour hiver. Tue cheval pour viande, vois petit cheval, enfant de jument. Moi sans personne. Petit cheval est comme enfant. Prends soin petit cheval. Après, trouve jeune lion, blessé. Prends lion aussi, mais lui grandit, quitte, trouve compagne. Vis dans vallée trois ans, seule. Après, Jondalar vient.
Ayla se tut. Personne ne parlait. Son explication, fournie tout simplement, sans fioritures, était certainement véridique. Elle n’était pas moins difficile à croire. Elle posait plus de questions qu’elle ne fournissait de réponses. Avait-elle été réellement recueillie et élevée par des Têtes Plates ? Ceux-ci savaient-ils vraiment parler ou, du moins, communiquer ? Pouvaient-ils se montrer si généreux, si humains ? Et elle, si elle avait été élevée par eux, était-elle humaine ?
Ayla occupa le silence qui suivit à observer Nezzie et le petit garçon. Elle se rappela alors un souvenir ancien de sa vie dans le Clan. Creb avait commencé à lui enseigner le langage des mains, mais il y avait au moins un geste qu’elle avait appris seule. C’était un signe qu’on faisait souvent devant les tout jeunes enfants, et que les plus grands utilisaient toujours avec les femmes qui s’occupaient d’eux. Elle revoyait l’émotion d’Iza, le jour où elle lui avait adressé ce signe pour la première fois.
Elle se pencha en avant, dit à Rydag :
— Je veux montrer mot. Mot tu fais avec mains.
Il se redressa, le regard brillant d’intérêt et de plaisir. Il avait compris, comme il comprenait toujours ce qu’on disait autour de lui. Et la mention de signes faits avec les mains avait éveillé en lui un vague émoi.
Sous les regards de l’assistance, Ayla fit un geste, un mouvement bien précis des deux mains. Il essaya de l’imiter, eut un froncement de sourcils perplexe. Mais soudain, surgie du plus profond de lui-même, la compréhension vint l’illuminer. Il corrigea son geste. Ayla lui sourit, hocha la tête. Il se tourna alors vers Nezzie, refit pour elle le même signe. Elle regarda Ayla.
— Il a dit à toi « mère », expliqua la jeune femme.
— Mère ? répéta Nezzie.
Elle ferma les paupières pour refouler ses larmes, serra contre elle l’enfant dont elle prenait soin depuis sa naissance.
— Talut ! Tu as vu ? Rydag vient de m’appeler « mère ». Jamais je n’aurais cru voir le jour ou Rydag m’appellerait « mère ».
4
L’atmosphère, dans le Camp, était à la préoccupation. Personne ne savait que dire, que penser. Qui étaient donc ces étrangers qui avaient surgi parmi eux ? L’homme qui prétendait venir d’un lieu situé très loin vers le couchant était plus facile à croire que la femme. Elle avait passé, disait-elle, trois années dans une vallée proche et, plus étonnant encore, avant cela, elle avait vécu avec une bande de Têtes Plates. Le récit de la femme menaçait toute une structure de convictions confortables. Il était pourtant difficile de mettre sa parole en doute.
Nezzie, les yeux pleins de larmes, était allée coucher Rydag. Tout le monde considéra son départ comme le signal que la soirée était finie, et chacun regagna son foyer. Ayla profita de l’occasion pour s’éclipser. Elle enfila sa pelisse en fourrure, en releva le capuchon et se glissa dehors.
Whinney la reconnut, hennit doucement. Guidée dans la nuit par le souffle et les ébrouements de la jument, Ayla la retrouva.
— Tout va bien, Whinney ? Tu es à ton aise ? Et Rapide ? Probablement pas plus que moi, dit Ayla.
Elle employait le langage particulier dont elle usait avec les chevaux. Whinney secoua sa crinière, piaffa délicatement, avant de poser la tête sur l’épaule de la jeune femme. Ayla entoura de ses bras l’encolure au poil rude, appuya son front contre la jument qui avait été si longtemps son unique compagnie. Rapide se rapprocha d’elle, et tous trois se serrèrent les uns contre les autres pour un instant de répit après toutes les expériences nouvelles de la journée.
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Après s’être assurée que les chevaux n’avaient pas souffert, Ayla descendit jusqu’à la berge de la rivière. Elle était heureuse d’échapper à l’habitation semi-souterraine, à tous ces gens. Elle respira à pleins poumons. L’air était vif et sec. Lorsqu’elle repoussa son capuchon de fourrure, ses cheveux crépitèrent. Elle dégagea son cou, leva la tête.
La lune, échappant au splendide compagnon qui la tenait si souvent enchaînée, avait tourné son œil brillant vers les lointaines profondeurs où des lumières tournoyantes promettaient une liberté sans limites mais n’offraient qu’un vide cosmique. Très haut dans le ciel, des nuages vaporeux enveloppaient les étoiles les moins hardies mais voilaient seulement de halos miroitants les plus déterminées. Le ciel d’un noir de suie semblait tout proche, velouté.
Ayla était la proie d’émotions contradictoires qui la déchiraient. C’étaient donc eux, ces Autres qu’elle avait recherchés. La race au milieu de laquelle elle était née. Elle aurait dû grandir parmi ceux qui leur ressemblaient et s’y sentir chez elle, si le tremblement de terre ne s’était pas produit. Elle connaissait les mœurs du Clan, mais les coutumes de son propre peuple lui étaient inconnues. Cependant, sans le Clan. Elle n’aurait jamais grandi. Elle ne pouvait pas y retourner mais elle n’avait pas non plus le sentiment d’être chez elle chez les Mamutoï.
Ils étaient si bruyants, si turbulents. Iza aurait déclaré qu’ils n’avaient pas de manières. Ce Frébec, par exemple, qui parlait à tort et à travers, sans même en demander la permission, et les autres qui hurlaient et jacassaient tous à la fois. Talut était un chef, sans doute, mais lui-même devait crier pour se faire entendre. Jamais Brun n’aurait eu besoin de crier. Les rares fois où elle l’avait entendu pousser un cri, c’était pour avertir quelqu’un d’un danger. Chacun, dans le Clan, avait toujours plus ou moins conscience de la présence du chef. Brun n’avait qu’un signe à faire pour obtenir presque immédiatement l’attention de tous.