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TENTATION

Page 32

by Stephenie Meyer


  Alice y était déjà, assise sur le divan. Ses prunelles avaient une couleur caramel.

  — Merci ! lança-t-elle en tapotant l'oreiller et en me souriant.

  — Tu es là tôt ! m'exclamai-je, enchantée.

  Je m'installai à côté d'elle et posai ma tête sur son épaule. Passant un bras froid autour de moi, elle soupira.

  — Qu'allons-nous faire de toi, Bella ?

  — Aucune idée, reconnus-je. Tu sais, j'ai vraiment essayé.

  — Je te crois.

  Il y eut un silence.

  — Est-ce qu'il... qu'il...

  J'inspirai profondément. Il m'était toujours difficile de prononcer son prénom, même si j'arrivais maintenant à le penser.

  — Edward est-il au courant de ton voyage ici ?

  J'étais obligée de demander. Après tout, c'était ma souffrance, je la gérerais quand Alice serait partie — perspective qui me tordit le ventre.

  — Non.

  Si c'était vrai, cela ne pouvait signifier qu'une chose.

  — Il n'habite pas chez Carlisle et Esmé ?

  — Il passe les voir tous les deux ou trois mois.

  — Oh.

  Il devait sûrement avoir de quoi s'occuper. N'avait-il pas soutenu que ses semblables se laissaient facilement distraire ?

  — Tu as parlé d'avion, d'où viens-tu ? m'enquis-je pour changer de sujet.

  — J'étais à Denali, en visite chez Tanya.

  — Jasper est-il ici ? T'a-t-il accompagné ?

  — Non, il s'opposait à ce que je vienne, d'ailleurs. Nous avions promis... (Elle s'interrompit puis enchaîna sur autre chose, soudain soucieuse.) Tu penses que Charlie n'aura rien contre ma présence ?

  — Il te trouve merveilleuse, Alice.

  — On ne va pas tarder à vérifier si c'est vrai.

  Effectivement, quelques secondes plus tard, j'entendis la voiture de patrouille crisser des pneus dans l'allée. Sautant sur mes pieds, je m'empressai d'aller ouvrir la porte. Charlie s'approcha lourdement de la maison, yeux baissés et épaules voûtées. Je m'avançai à sa rencontre. Ce ne fut que lorsque je l'enlaçai qu'il me remarqua. Il me serra très fort.

  — Je suis désolée pour Harry, papa.

  — Il va me manquer.

  — Sue tient le coup ?

  — Elle a l'air hébétée, comme si elle n'avait pas encore réalisé. Sam est resté auprès d'elle... Pauvres gosses. Leah n'a qu'un an de plus que toi, et Seth quatorze...

  Sans me lâcher, il se dirigea vers la maison. J'avais intérêt à l'avertir maintenant.

  — Heu... papa ? Tu ne devineras jamais qui est là.

  Il me lança un regard vide, tourna la tête et repéra, garée de l'autre côté de la rue, la Mercedes dont le capot luisait faiblement sous la lumière du porche. Alice apparut au même instant sur le seuil.

  — Bonsoir, le salua-t-elle doucement. Désolée d'arriver à un si mauvais moment.

  — Alice Cullen ? s'étonna Charlie comme s'il n'en croyait pas ses yeux. C'est bien toi ?

  — Oui. J'étais de passage dans les environs.

  — Carlisle est-il...

  — Non, je suis seule.

  Alice et moi avions tout de suite compris qui il avait en tête en demandant après Carlisle. Il resserra d'ailleurs son étreinte autour de mon épaule.

  — Ça ne t'ennuie pas qu'Alice loge chez nous, hein ? Je me suis permis de l'inviter.

  — Pas du tout, acquiesça-t-il automatiquement. Ce sera un plaisir.

  — Merci, Charlie. Encore une fois, je sais à quel point je tombe mal.

  — Ce n'est pas grave. Je risque d'être très occupé dans les prochains jours. Tant mieux si Bella a un peu de compagnie.

  — Je t'ai préparé à dîner, signalai-je.

  — Super, chérie.

  D'une pression de la main, il me remercia avant de disparaître dans la cuisine. Alice regagna le canapé, et je lui emboîtai le pas. Cette fois, ce fut elle qui m'attira contre elle.

  — Tu as l'air fatiguée.

  — Oui, admis-je. Ça me fait toujours ça, quand je frôle la mort... Alors, quelle est l'opinion de Carlisle à propos de tout ça ?

  — Il n'est pas au courant non plus. Lui et Esmé étaient partis chasser. J'aurai des nouvelles d'ici quelques jours, à son retour.

  — Mais tu ne lui diras rien... la prochaine fois qu'il passera ?

  Elle devina que je ne parlais pas de Carlisle.

  — Non. Il m'arracherait la tête.

  J'eus un bref éclat de rire, vite remplacé par un soupir.

  Je n'avais pas envie de dormir, j'aurais voulu discuter toute la nuit. D'ailleurs, je n'aurais pas dû avoir sommeil, vu que j'avais somnolé tout l'après-midi en compagnie de Jacob. Ma noyade avortée m'avait cependant vidée, et mes yeux se fermaient tout seuls. Tête appuyée contre Alice, je sombrai peu à peu dans une inconscience plus paisible que je n'aurais pu l'espérer.

  Je m'éveillai tôt, après une nuit profonde et sans rêve, me sentant reposée, quoique courbatue. Je me trouvais dans le canapé, sous les draps que j'avais préparés pour Alice. J'entendis celle-ci converser avec Charlie, dans la cuisine. Apparemment, mon père s'activait à lui fabriquer un petit déjeuner.

  — Ça a été vraiment terrible ? demanda-t-elle dans un souffle.

  D'abord, je crus qu'ils parlaient des Clearwater.

  — Pis que tu ne l'imagines.

  — Racontez-moi. Je veux savoir précisément ce qu'il s'est passé après notre départ.

  Il y eut une pause, durant laquelle on ouvrit et referma un placard. J'attendis, sur mes gardes.

  — Jamais je n'ai eu l'impression d'être aussi inutile, marmonna Charlie lentement. J'étais paumé. La première semaine, j'ai eu peur de devoir l'hospitaliser. Elle refusait de s'alimenter et de boire, elle était prostrée. Gerandy avançait des mots comme catatonie, je l'ai empêché de l'ausculter. Je craignais que ça ne l'effraie.

  — Elle a pourtant fini par sortir de cet état ?

  — J'ai demandé à Renée de l'accueillir en Floride. Je ne tenais pas à être celui qui... si elle devait finir dans une clinique ou je ne sais quoi. J'escomptais que la présence de sa mère l'aiderait. J'avais commencé à emballer ses affaires quand elle s'est réveillée de sa transe. Une vraie furie. Je ne l'avais jamais vue dans cet état ! Elle n'est pas du genre colérique, mais là, nom d'un petit bonhomme, elle est devenue enragée, à balancer ses vêtements partout, à hurler que nous n'avions pas le droit de l'obliger à s'en aller, jusqu'à ce qu'elle finisse par éclater en sanglots. Pour moi, c'était une étape décisive, et je n'ai pas insisté pour qu'elle parte... et, au début, elle a paru récupérer...

  Il se tut. L'écouter discourir ainsi sur la souffrance que je lui avais infligée était une épreuve.

  — Mais...

  — Elle est retournée au lycée et au travail ; elle mangeait, dormait, faisait ses devoirs. Elle répondait quand on lui posait une question. N'empêche, elle était... vide. Ses yeux étaient morts. Il y avait aussi certains indices. Elle n'écoutait plus de musique, j'ai trouvé une pile de CD brisés dans la poubelle. Elle ne lisait plus. Elle quittait la pièce quand la télé était allumée, même si elle n'en a jamais été une grande fan. J'ai fini par comprendre... elle évitait tout ce qui était susceptible de raviver le souvenir de... son souvenir. Nous pouvions à peine échanger quelques mots. J'avais peur de lâcher une parole malheureuse — elle réagissait à la moindre broutille -, et elle n'entamait pas la conversation, se bornant à réagir si je l'interrogeais. Elle passait son temps seule, elle ne rappelait pas ses amies qui, au bout d'un temps, se sont lassées et n'ont plus téléphoné. C'était la nuit des morts vivants. Je l'entends encore hurler dans son sommeil...

  Je le voyais presque frissonner, et je frissonnai moi aussi à l'évocation de cette époque. Il était malin — à aucun moment, je ne l'avais embobiné.

  — Je suis tellement désolée, Charlie, marmonna Alice.

  — Ce n'est pas ta faute, riposta-t-il sur un ton qui laissait clairement deviner qui il
tenait pour responsable. Tu as toujours été une amie très chère pour elle.

  — Il me semble qu'elle va mieux, à présent, non ?

  — Oui. Depuis qu'elle a commencé à fréquenter Jacob Black, j'ai noté une réelle amélioration. Elle a le visage coloré quand elle rentre à la maison, une lueur dans l'œil. Elle est moins malheureuse. (Il s'interrompit une seconde, puis reprit d'une voix toute différente.) Il est plus jeune qu'elle d'un an environ. J'ai deviné qu'elle ne pensait à lui qu'en tant qu'ami, mais j'ai le sentiment que leurs relations sont passées à quelque chose de plus sérieux. Du moins, ça en prend la direction.

  Les intonations presque belliqueuses de Charlie constituaient un avertissement, moins pour Alice que pour celui auquel elle était chargée de transmettre les nouvelles.

  — Jake est mature, pour son âge, poursuivit-il, comme sur la défensive. Il a pris soin de son père sur le plan physique comme Bella s'est occupée émotionnellement de sa mère. Ça l'a mûri. Sans compter qu'il n'est pas vilain, il tient ça de sa mère. Il fait vraiment du bien à Bella, tu sais.

  — Alors, je suis heureuse qu'il existe, convint Alice.

  Charlie poussa un gros soupir, soulagé par l'absence d'objections.

  — Je m'avance sûrement un peu, admit-il. Je ne suis sûr de rien... en dépit de Jacob, il arrive parfois que les yeux de Bella... je doute d'avoir saisi l'ampleur de son chagrin, Alice. Tant de souffrance, ce n'est pas normal... ça me fait peur. C'est comme si elle pleurait... un mort.

  Sa voix se cassa. Il avait raison. Quelqu'un était mort — j'étais morte. Parce que ça avait dépassé la simple perte du plus authentique des amours, pour peu que cela ne suffise pas à tuer quelqu'un d'ailleurs ; ça avait été perdre un avenir, une famille, la vie que j'avais choisie...

  — J'ignore si elle s'en remettra un jour, reprit Charlie avec des accents désespérés. Peut-être qu'il n'est pas dans sa nature de guérir d'une telle blessure. Elle a toujours été tellement constante. Elle n'est pas du genre à oublier, ni à changer d'avis.

  — En effet.

  — Et... tu sais combien je t'apprécie, Alice, et j'ai vu à quel point elle était heureuse de ta visite... ça n'empêche pas que je m'inquiète de ses conséquences.

  — Moi aussi, Charlie. Et je ne serais pas venue si j'avais deviné l'ampleur qu'avaient prises les choses. Je suis navrée.

  — Ne t'excuse pas. Si ça se trouve, ça lui fera du bien.

  — J'espère.

  Un long silence suivit, entrecoupé par des raclements de fourchettes sur les assiettes et le léger bruit de Charlie qui mastiquait. Je me demandai où Alice cachait la nourriture qu'elle ne mangeait pas.

  — Alice, il faut que je te pose une question, lança soudain Charlie, gêné.

  — Allez-y, répondit mon amie sans se départir de son calme.

  — Il ne reviendra pas, hein ?

  Je perçus la colère que mon père tâchait de dissimuler.

  — Il ne se doute même pas que je suis ici, le rassura-t-elle. La dernière fois que je lui ai parlé, il était en Amérique du Sud.

  Je me raidis, tendis l'oreille.

  — C'est déjà ça, alors, grommela Charlie. J'espère qu'il s'y amuse.

  — Je n'en jurerais pas, rétorqua Alice avec, pour la première fois, une certaine sécheresse.

  L'un d'eux repoussa sa chaise sans ménagement, et j'en conclus qu'il s'agissait de Charlie. Jamais Alice n'aurait été aussi bruyante. De l'eau coula, rebondissant sur un plat. Vu qu'Edward semblait un sujet clos, je décidai qu'il était temps de me réveiller. Je me retournai en faisant grincer les ressorts du canapé et bâillai sans retenue. Dans la pièce voisine, toute vie se figea. Je m'étirai, gémis.

  — Alice ? marmonnai-je en toute innocence.

  La raucité dont ma gorge douloureuse colorait ma voix fit très bien dans la mascarade.

  — Je suis dans la cuisine, me lança-t-elle.

  Rien dans son ton n'indiquait qu'elle était dupe. Quoique... elle aussi était bonne comédienne.

  Charlie était obligé de partir, car il allait aider Sue Clearwater à régler l'organisation des obsèques. Sans Alice, la journée aurait été fort longue. Elle ne parla plus de partir, et je ne lui posai pas de questions. Cette échéance était inévitable, mais je la repoussai dans un coin de mon cerveau.

  Nous évoquâmes plutôt les membres de la famille Cullen — à l'exception du seul qui comptait vraiment.

  Carlisle travaillait de nuit à Ithaca, dans l'État de New York et enseignait à temps partiel dans la prestigieuse université de Cornell. Esmé restaurait une maison du XVII e siècle, classée monument historique, située dans une forêt au nord de la ville. Emmett et Rosalie s'étaient envolés quelques mois pour l'Europe afin d'y vivre une nouvelle lune de miel ; ils en étaient revenus il y avait peu. Jasper étudiait à Cornell, la philosophie cette fois. Quant à Alice, elle avait mené des recherches personnelles sur ce que je lui avais incidemment dévoilé au printemps précédent. Elle avait retrouvé l'asile où elle avait passé les dernières années de sa vie d'humaine — une époque dont elle n'avait plus souvenance.

  — Je m'appelais Mary Alice Brandon, me révéla-t-elle à voix basse. J'avais une sœur prénommée Cynthia. Sa fille, ma nièce, vit toujours. À Biloxi.

  — As-tu découvert pour quelles raisons on t'avait enfermée dans... cet endroit ? Ce qui avait poussé tes parents à des mesures aussi drastiques ? Parce que même si leur fille avait des visions prémonitoires...

  Elle se contenta de secouer la tête, et ses yeux topaze devinrent pensifs.

  — Je n'ai pas appris grand-chose sur eux. J'ai lu tous les vieux journaux disponibles sur microfilms. Ma famille n'y est pas beaucoup mentionnée. Ils n'appartenaient pas à un cercle social susceptible d'intéresser les reporters. J'ai déniché l'avis de fiançailles de mes parents, ainsi que celui de Cynthia. Mon faire-part de naissance... celui de ma mort. J'ai vu ma tombe. J'ai aussi fauché mon dossier dans les archives de l'ancien asile. Ma date d'admission dans l'établissement et celle de ma mort correspondent.

  Je ne sus que dire et, au bout de quelques instants, elle changea de sujet.

  Les Cullen étaient désormais rassemblés — enfin, presque — et passaient les vacances de Pâques à Denali, chez Tanya et les siens. Je prêtai une oreille trop attentive aux nouvelles, y compris les plus banales. Pas une fois, Alice n'évoqua celui qui m'intéressait le plus, ce dont je lui fus reconnaissante. Il me suffisait d'écouter des histoires de la famille à laquelle j'avais pu, un jour, rêvé d'appartenir.

  Charlie ne rentra qu'à la nuit tombée, l'air encore plus éreinté que la veille. Il comptait repartir pour la réserve le lendemain matin, afin d'assister à l'enterrement de Harry. Cette nuit-là encore, je dormis en compagnie d'Alice.

  Mon père avait tout d'un étranger quand il descendit l'escalier au petit matin, attifé d'un vieux costume que je ne lui avais encore jamais vu. La veste était ouverte — elle devait être trop étroite maintenant pour qu'il la boutonnât -, et sa cravate était un peu large au regard de la mode actuelle. Il gagna la porte sur la pointe des pieds pour ne pas nous réveiller et, tant Alice que moi fîmes semblant de dormir, moi sur le divan, elle sur le fauteuil de repos.

  Dès qu'il fut sorti, elle s'assit. Elle était tout habillée.

  — Qu'y a-t-il de prévu au programme, aujourd'hui ? me demanda-t-elle.

  — Aucune idée. As-tu entrevu quelque chose d'intéressant ?

  — Non, mais il est encore tôt.

  Ayant passé l'essentiel de mon temps à La Push, j'avais négligé la maison. Résultat, pas mal de corvées exigeaient d'être rattrapées. Je désirais me rendre utile, effectuer tout ce qui soulagerait Charlie. Il se sentirait peut-être un tout petit peu mieux s'il rentrait dans un logis propre et rangé. Je commençai par la salle de bains, la pièce qui avait le plus besoin de mes services.

  Pendant que je m'éreintais, Alice, nonchalamment appuyée contre le battant de la porte, m'interrogea sur mes — nos — camarades de lycée et les changements qui s'éta
ient produits depuis son déménagement. Elle avait beau ne montrer aucune émotion, je devinai sa désapprobation devant la maigreur de ce que j'étais capable de lui rapporter. Ou alors, c'était juste que je me sentais coupable d'avoir espionné sa conversation avec mon père, la veille.

  J'étais (littéralement) dans le détergent jusqu'aux coudes, à frotter le carrelage, quand on sonna. Je relevai aussitôt la tête vers Alice, qui affichait une expression perplexe, voire inquiète, ce qui était pour le moins bizarre. Elle n'était jamais prise au dépourvu.

  — Un instant ! criai-je à la cantonade avant de me précipiter sur le lavabo pour me rincer les mains.

  — Bella, lança Alice, passablement agacée, j'ai une assez bonne idée de l'identité de ton visiteur. Il vaudrait mieux que je sorte.

  — Une assez bonne idée ? répétai-je.

  Depuis quand Alice n'était-elle plus certaine de ses visions ?

  — Pour peu que je répète ma stupide erreur d'hier, il se pourrait que ce soit Jacob Black... ou l'un de ses amis.

  — Tu ne peux pas voir les loups-garous ?

  — J'en ai bien peur.

  Ce qui, apparemment, l'irritait au plus haut point. La sonnette retentit une deuxième fois, impatiente.

  — Ne t'en va pas, Alice. Tu étais ici la première.

  Elle éclata de son petit rire argentin, derrière lequel je discernai cependant une forme de nervosité.

  — Crois-moi, ce ne serait pas une bonne idée que Jacob Black et moi-même nous retrouvions dans la même pièce.

  Elle m'embrassa rapidement sur la joue puis s'éclipsa dans la chambre de Charlie et, de là, sans aucun doute, par la fenêtre.

 

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