TENTATION

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TENTATION Page 44

by Stephenie Meyer


  — Et moi, presque cent dix. Il est temps que je me range des voitures.

  Je me tournai vers la fenêtre obscure, tâchant de contenir mon angoisse avant qu'elle me trahisse.

  — Écoute, repris-je, le mariage n'est pas franchement en tête de liste de mes priorités. Pour Charlie et Renée, ça a été une expérience plutôt fatale.

  — Très intéressant, cet adjectif.

  — Tu m'as comprise.

  — Ne me dis pas que tu as peur de t'engager ! s'écria-t-il avec des accents incrédules.

  Je compris ce qu'il sous-entendait par-là.

  — Ce n'est pas ça, esquivai-je. J'ai... c'est Renée, qui m'inquiète. Elle a des préjugés plutôt ancrés sur ce qui est du mariage avant la trentaine.

  — Elle préférerait que tu sois damnée à jamais plutôt que tu te maries, c'est ça ? ricana-t-il sans joie.

  — Je ne rigole pas.

  — Bella, comment peux-tu comparer le degré d'engagement qu'impliquerait un mariage à la perte de ton âme ? Si tu n'as pas le courage de m'épouser, alors...

  — Très bien, l'interrompis-je. Et si je l'avais, ce cran ? Si je te demandais de m'emmener à Las Vegas1 sur-le-champ, deviendrais-je pour autant vampire dans les trois jours ?

  Il sourit, et ses dents éclatantes étincelèrent dans la pénombre.

  — Bien sûr, affirma-t-il en ne marchant pas dans mon coup de bluff. Ne bouge pas, je vais chercher la voiture.

  — Nom d'une pipe ! marmonnai-je. D'accord, je te donne dix-huit mois.

  — Non, non, s'esclaffa-t-il. Je tiens à ma condition.

  — Dans ce cas, je prierai Carlisle de s'y coller après mon bac.

  — Si c'est vraiment ce que tu veux !

  Il haussa les épaules et me gratifia d'un sourire absolument angélique.

  — Tu es impossible ! grommelai-je. Un vrai monstre !

  — C'est pour ça que tu ne veux pas te marier avec moi ?

  Je grognai. Il se pencha sur moi, et ses yeux de nuit se firent lave, réduisant en cendres ma détermination.

  — S'il te plaît, Bella ? chuchota-t-il.

  Un instant, j'oubliai de respirer. Quand je recouvrai mes sens, je m'empressai de secouer la tête afin de m'éclaircir les idées.

  — Aurais-tu mieux accueilli ma demande si j'avais eu le temps d'acheter une bague ?

  — Non ! Pas de ça ! criai-je presque.

  — C'est malin ! Tu as réveillé Charlie !

  — Houps !

  — Il faut que je me sauve.

  Mon cœur s'arrêta de battre, et il me scruta un instant.

  — Serait-ce infantile de ma part si je me cachais dans le placard ?

  — Bien sûr que non, chuchotai-je. Reste. Je t'en supplie.

  Il sourit et s'évanouit. Furieuse, je guettai dans le noir l'instant où Charlie débarquerait pour vérifier que tout allait bien. Edward savait exactement ce qu'il faisait, et j'étais prête à parier que sa feinte surprise participait du stratagème. Certes, il me restait l'option Carlisle. Sauf que, maintenant que j'avais une chance qu'Edward procède en personne à ma transformation, j'en avais terriblement envie. Quel sale tricheur ! On entrebâilla ma porte.

  — Bonjour, papa.

  — Oh, salut, Bella, répondit-il, gêné. Je ne savais pas que tu étais réveillée.

  — Si. J'attendais justement que tu te lèves pour prendre une douche.

  Je sautai du lit.

  — Une seconde ! lança-t-il en allumant.

  Je clignai des yeux, aveuglée, en évitant de regarder le placard.

  — Parlons un peu, d'abord, enchaîna-t-il.

  J'eus du mal à ne pas grimacer. J'avais oublié de demander une excuse à Alice.

  — Tu es dans de sales draps, poursuivit-il. J'imagine que tu le sais ?

  — Oui.

  — Ces trois derniers jours, j'ai failli devenir dingue. Je suis rentré de l'enterrement de Harry pour m'apercevoir que tu n'étais plus là. Jacob n'a rien pu me dire, sinon que tu étais partie avec Alice Cullen, et qu'il pensait que tu avais des ennuis. Tu n'as pas laissé de numéro où te joindre, j'ignorais où tu étais et quand — ou si — tu reviendrais. As-tu la moindre idée de...

  Il s'interrompit, respira profondément.

  — Donne-moi une seule raison valable pour que je ne t'expédie pas immédiatement à Jacksonville, termina-t-il.

  Je fulminais. Ainsi, il cherchait à m'intimider par des menaces ? À ce jeu-là, nous serions deux. Je me rassis et m'enveloppai dans la couette comme si j'avais froid.

  — De toute façon, je n'irai pas, répliquai-je.

  — Dis donc, jeune fille...

  — Écoute, papa. J'endosse entièrement la responsabilité de mes actes, et tu as le droit de me punir autant de temps que tu voudras. Je ferai le ménage, la lessive et la vaisselle jusqu'à ce que tu estimes que j'ai appris ma leçon. Et tu es sans doute en droit de me jeter dehors... pour autant, ne compte pas sur moi pour aller en Floride.

  Il devint écarlate et eut besoin de quelques bonnes inspirations avant de répondre.

  — Daignerais-tu m'expliquer où tu étais passée ?

  Zut !

  — J'ai eu... une urgence.

  Il souleva les sourcils, très impressionné par ma brillante défense.

  — Pff ! soufflai-je. Je ne sais pas quoi te dire, papa. Pour l'essentiel, ce n'était qu'un malentendu. Machin a dit, truc a dit, et le tout s'est emballé.

  Pas un mot.

  — Bon. Figure-toi qu'Alice a raconté à Rosalie que j'avais sauté de la falaise...

  Je me débattais pour trouver quelque chose qui fût aussi près que possible de la vérité, histoire que mon inaptitude totale à mentir de manière convaincante ne sape pas l'excuse que j'allais inventer. Mais, avant que j'aie eu le temps de poursuivre, je compris, à l'allure de Charlie, qu'il n'était pas au courant de cet exploit. Flûte de flûte ! Comme si je n'avais déjà pas suffisamment d'ennuis.

  — Euh... j'ai dû oublier de t'en parler, m'étranglai-je. Ce n'était rien. On s'amusait seulement, avec Jake... Bref, Rosalie a vendu la mèche à Edward, il a été bouleversé. Sans le faire exprès, elle a laissé entendre que j'avais essayé de me suicider, une bêtise de ce genre. Comme il ne répondait pas au téléphone, Alice m'a emmenée en... à L.A. de façon à ce que je puisse m'expliquer de vive voix.

  Je croisai les doigts pour que la révélation involontaire de mon plongeon soit oubliée. Il s'était figé.

  — Es-tu en train de m'annoncer que tu as tenté de te tuer, Bella ?

  — Non, bien sûr que non ! Rien d'aussi dramatique. C'était pour se marrer, avec Jake. En plongeant des falaises. Les gars de La Push le font tout le temps.

  Le visage de Charlie passa du froid polaire à une fureur incandescente.

  — Pourquoi cette inquiétude envers Edward Cullen ? aboya-t-il. Alors qu'il t'a laissée tomber comme une vieille chaussette, sans...

  — Un autre malentendu, le coupai-je.

  — Il est de retour, alors ? s'empourpra-t-il.

  — Je ne sais pas trop quels sont leurs plans. Il me semble qu'ils ont tous décidé de revenir ici.

  Une veine battait sur son front.

  — Je t'interdis de l'approcher, Bella, compris ? C'est un faux-jeton. Il ne te mérite pas. Je ne lui permettrai pas de te démolir une deuxième fois.

  — Très bien, rétorquai-je sèchement.

  — Ah ! marmonna-t-il en se balançant d'avant en arrière. Je pensais que tu serais plus réticente.

  — Et tu as raison, répliquai-je en le toisant. Puisque c'est comme ça, je déménagerai.

  Je crus que les yeux allaient lui sortir de la tête. Le pourpre de son visage passa au mauve, je craignis pour sa santé, et ma résolution vacilla. Après tout, il n'était pas plus jeune que Harry.

  — Écoute, papa, je n'ai pas envie de m'installer ailleurs, tempérai-je. Je t'adore. Je comprends que tu t'inquiètes, mais je te demande de me faire confiance. Tu vas juste devoir te calmer envers Edward si tu souhaites que je reste. La question est donc : veux
-tu que je vive ou non avec toi ?

  — Tu es injuste, Bella. Tu sais bien ce que je veux.

  — Alors, sois sympa avec Edward, parce qu'il sera là où je serai.

  J'avais asséné cela avec une conviction rare — ma révélation fonctionnait toujours.

  — Jamais sous mon toit ! tonna Charlie.

  — Je n'ai pas l'intention de te poser d'autres ultimatums cette nuit... enfin, ce matin. Réfléchis-y seulement pendant quelques jours, d'accord ? Mais n'oublie pas qu'Edward et moi, c'est à prendre ou à laisser.

  — Bella...

  — Penses-y, insistai-je. Et, en attendant, voudrais-tu bien m'accorder un peu d'intimité ? J'ai vraiment besoin d'une douche.

  Violet de fureur, il ne protesta pas plus avant cependant et quitta la pièce en claquant la porte derrière lui. Je l'entendis descendre l'escalier comme un éléphant. Je me débarrassai de ma couverture, Edward était déjà installé dans le rocking-chair, comme s'il y avait été assis depuis le début de la conversation.

  — Désolée, murmurai-je.

  — Sa colère contre moi est légitime, chuchota-t-il. S'il te plaît, ne te brouille pas avec lui à cause de moi.

  — Ne t'inquiète pas, soufflai-je en rassemblant les affaires dont j'avais besoin pour me laver et des vêtements propres. Je ferai ce qu'il faut, sans pousser le bouchon. À moins que tu sois en train de suggérer que je n'ai nul endroit où aller ?

  J'écarquillai les yeux, l'air faussement alarmée.

  — Tu serais prête à vivre dans une maison pleine de vampires ?

  — C'est sûrement l'endroit le plus sûr pour quelqu'un dans mon genre. De plus, ajoutai-je en riant, si Charlie me jette dehors, le délai du bac n'aura plus lieu d'être.

  Sa mâchoire se serra.

  — Toujours aussi avide de tomber dans la damnation éternelle, hein ?

  — Tu sais que tu ne crois pas à ces histoires.

  — Vraiment ?

  — Non.

  Furibond, il me vrilla du regard, mais je repris la parole la première.

  — Si tu pensais avoir perdu ton âme, alors, à Volterra, tu aurais immédiatement saisi ce qui se passait au lieu de t'imaginer que nous étions morts tous les deux. Ce qui ne s'est pas produit, puisque tu as marmonné « Carlisle avait raison ». Tu n'as pas renoncé à tout espoir ! conclus-je, triomphante.

  Pour une fois, je lui avais coupé la chique.

  — Alors, enchaînai-je, continuons d'espérer ensemble. Même si ça n'a pas beaucoup d'importance pour moi. Si tu restes, je n'ai pas besoin de paradis.

  Lentement, il se leva et vint prendre mon visage entre ses paumes, me forçant à plonger dans ses prunelles.

  — À jamais, jura-t-il, un peu chancelant.

  — Je n'en demande pas plus.

  Sur ce, je me hissai sur la pointe des pieds afin de poser mes lèvres sur les siennes.

  1 La ville des mariages ultrarapides aux États-Unis.

  Épilogue

  LE TRAITÉ

  La situation redevint presque normale — la bonne normalité, celle d'avant ma période zombie — en moins de temps que je l'aurais cru possible. L'hôpital accueillit Carlisle à bras ouverts sans même avoir la décence de dissimuler sa joie en apprenant qu'Esmé avait trouvé L.A. assez peu à son goût. À cause de l'examen de maths que j'avais raté pendant mon séjour à l'étranger, je me retrouvai en moins bonne place pour réussir mon bac qu'Edward ou Alice. Soudain, l'entrée en fac se classa parmi les priorités (elle constituait toujours le plan B, au cas où l'offre d'Edward me détournerait de la solution post-bac de Carlisle). Les dates limites de nombreux dossiers de candidature étaient dépassées, mais Edward dénichait chaque jour de nouveaux formulaires à me faire remplir. Lui-même avait déjà terminé Harvard, si bien qu'il se moquait que nous terminions tous les deux à la modeste fac publique locale l'année suivante, du fait de ma tendance à remettre l'urgent au lendemain.

  Charlie s'était résigné mais il n'adressait pas la parole à Edward. Ce dernier avait quand même l'autorisation d'entrer chez nous — uniquement pendant les heures de visite auxquelles j'avais droit. Quant à ce que je sorte de la maison, c'était hors de question. Le lycée et le travail étaient les seules exceptions à cet interdit, et les murs jaune pâle des salles de classe avaient fini par devenir attrayants à mes yeux. Certes, mon voisin de pupitre y était pour quelque chose. Edward avait repris son cursus scolaire, si bien qu'il assistait à tous mes cours. Vu mon comportement après le départ supposé des Cullen pour la Californie, personne n'avait eu le courage de s'asseoir à côté de moi. Y compris Mike, pourtant toujours avide de l'opportunité. Avec le retour d'Edward, ce fut presque comme si les huit derniers mois n'avaient été qu'un pénible cauchemar.

  Presque — pas complètement. Pour commencer, il y avait mon confinement à la maison. Et puis, avant l'automne, je n'avais pas été amie avec Jacob Black qui, de fait, ne m'avait pas manqué. Je n'avais pas le droit de me rendre à La Push, et Jake ne daignait pas se montrer chez nous. Il refusait même de répondre à mes coups de fil.

  Je passais ces derniers le soir surtout, après qu'Edward avait été flanqué dehors, à neuf heures tapantes, par un Charlie qui ne rigolait pas, et avant qu'il revienne en douce par la fenêtre quand mon père dormait du sommeil du juste. Je profitais de ces instants pour appeler — en vain -, parce que j'avais remarqué la tête que faisait Edward quand j'avais le malheur de mentionner Jake : désapprobatrice et circonspecte... voire furieuse. Cela tenait à ses préjugés envers les loups-garous, aussi réciproques que ceux de Jacob à l'encontre des « buveurs de sang ». Au moins, Edward ne s'épanchait pas en termes méprisants.

  Du coup, j'avais cessé peu à peu de prononcer le nom de Jake.

  Avec la présence d'Edward, il m'était difficile de ruminer des idées déplaisantes. Même celle de mon ami perdu qui, à cette heure, devait être malheureux comme les pierres, par ma faute. Quand je songeais à lui, je me sentais coupable de ne pas penser plus souvent à lui. J'étais de nouveau branchée en mode conte de fées. Le prince charmant était revenu, le sortilège avait été brisé. Je ne savais trop que faire du dernier personnage. Qu'en était-il de son « tout est bien qui finit bien » personnel ? Les semaines passaient, et Jacob continuait à ne pas prendre mes appels téléphoniques, ce qui finit par devenir un souci permanent. Tel un robinet fuyant sur le sommet de mon crâne, impossible à ignorer. Ploc, ploc, ploc — Jacob, Jacob, Jacob. Bref, j'avais beau éviter de mentionner son prénom, ma frustration et mon anxiété débordaient parfois.

  — C'est tout bonnement mal élevé ! m'emportai-je un samedi après-midi où Edward était venu me chercher au travail. Insultant, ni plus ni moins !

  La colère était plus supportable que les remords. Je variais mes stratégies dans l'espoir d'obtenir une attitude différente. Cette fois, j'avais téléphoné de la boutique. Malheureusement, je n'étais tombée que sur un Billy inutile — la routine.

  — Billy a dit qu'il ne voulait pas me parler ! fulminai-je en scrutant la pluie par la fenêtre passager. Il était là, mais il ne s'est pas donné la peine de faire trois pas pour prendre l'appareil. D'habitude, son père prétend qu'il est absent, qu'il est occupé, qu'il dort, que sais-je encore ? D'accord, je suis consciente qu'il me raconte des craques, mais au moins, ça reste une façon correcte de gérer les choses. Je te parie que Billy me hait lui aussi. C'est vraiment injuste !

  — Pas toi, Bella, répondit doucement Edward. Personne ne te déteste.

  — Dans ce cas, c'est drôlement bien imité, marmonnai-je en croisant les bras sur ma poitrine.

  Simple bouderie — le trou béant avait disparu, je me rappelai à peine avoir eu cette impression de vide.

  — Jacob est au courant de notre retour, et je suis certain qu'il en a déduit que j'étais avec toi. Or, il ne s'approchera pas de moi. Son hostilité est trop profondément enracinée.

  — C'est idiot. Il sait très bien que vous n'êtes pas... comme les autres vampires.

  — Ce n'est pas une raison pour ne pas garder ses distances
.

  Je fixai le pare-brise, n'y distinguai que le visage de Jacob, son masque renfrogné et amer.

  — Bella, reprit Edward, nous sommes ce que nous sommes. J'arrive à me contrôler, je doute que ce soit son cas. Il est très jeune. Une rencontre aurait toutes les chances de tourner au pugilat, et je ne suis pas certain que je saurais l'arrêter avant de le t... avant de lui faire du mal. Ça te rendrait malheureuse, et je ne veux pas que ça arrive.

  Me revinrent les paroles que Jake avaient prononcées au sujet d'Alice dans la cuisine, de sa voix feutrée. « Je ne suis pas sûr d'être assez équilibré pour le supporter. Tu n'apprécierais sûrement pas que je la tue. » Pourtant, il était parvenu à gérer ses instincts, cette fois-là.

  — Edward Cullen, chuchotai-je, étais-tu sur le point de dire « le tuer » ?

  Il se détourna pour contempler la pluie. Le feu passa au rouge (je n'avais même pas remarqué que nous nous étions arrêtés), et il repartit, très lentement, ce qui ne lui ressemblait pas.

  — Je m'efforcerais... vraiment... de me retenir, finit-il par répondre.

  Je le dévisageai, bouche bée, mais il continuait à regarder droit devant lui. Nous ralentîmes en abordant un panneau stop. Soudain, je me souvins de ce qui était arrivé à Pâris quand Roméo était revenu. Les indications scéniques étaient simples : Ils se battent. Pâris meurt. 1

  Mais c'était ridicule. Impensable. Je respirai profondément.

  — Crois-moi, déclarai-je, vous n'êtes pas près de vous bagarrer, alors inutile de s'inquiéter. Bon, Charlie surveille la pendule, alors mieux vaudrait que tu me ramènes au bercail avant que je m'attire de nouveaux ennuis pour être rentrée en retard.

  Je lui adressai un pauvre sourire. Chaque fois que je posais les yeux sur ce visage, sur cette perfection inimaginable, mon cœur se mettait à cogner fort, sain, très présent dans ma poitrine. Là, les battements prirent une course plus rapide que celle de l'amour. Sa figure de statue arborait une expression que je ne connaissais que trop.

  — Trop tard, Bella, murmura-t-il. Tu as déjà de nouveaux ennuis.

  Je me rapprochai de lui, agrippai son bras et suivis son regard. J'ignore ce à quoi je m'attendais, peut-être à Victoria plantée au beau milieu de la rue, ses cheveux rouges ébouriffés par le vent, ou à une rangée de grands manteaux sombres, voire à une meute furibonde de loups-garous. Je ne vis rien de tout cela.

 

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