LE GRAND VOYAGE

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LE GRAND VOYAGE Page 78

by Jean M. Auel


  — Avant de partir, je voudrais te donner quelque chose. J’ai découvert cela quand je vivais dans ma vallée, dit Ayla en ouvrant sa main. J’ai pensé que tu pourrais l’utiliser dans ta Cérémonie du Feu.

  S’Armuna regarda l’objet et jeta un coup d’œil interrogateur à Ayla.

  — Regarde. Cette pierre contient du feu, dit Ayla. Je vais te montrer.

  Elle marcha jusqu’au foyer, prit un peu d’amadou, et rassembla quelques copeaux de bois autour d’une botte de massettes séchées. Elle prépara du petit bois, se baissa et frappa la pyrite de fer avec un silex. Une grande étincelle jaillit et tomba sur l’amadou. Ayla souffla dessus et une petite flamme s’éleva comme par miracle. Ayla ajouta des brindilles pour faire démarrer le feu, et se releva pour découvrir une S’Armuna ébahie.

  — Cavoa m’a soutenu avoir vu une munaï qui avait ton visage, et voilà que tu fais naître du feu. Serais-tu... serais-tu celle qu’on prétend ?

  — Jondalar a sculpté cette figurine parce qu’il m’aimait, répondit Ayla avec un sourire tranquille. Il voulait capturer mon esprit, mais il m’en a ensuite fait cadeau. Ce n’est ni une donii, ni une munaï. C’est une preuve de son amour. Et pour ce qui est du feu, je n’y suis pour rien, c’est la pierre à feu qui fait tout. Veux-tu apprendre à l’utiliser ?

  — Est-ce que je vous dérange ? dit une voix près de l’entrée. Les deux femmes se retournèrent et aperçurent Cavoa.

  — Je suis venue chercher les mitaines que j’avais oubliées, expliqua-t-elle.

  S’Armuna et Ayla échangèrent un coup d’œil.

  — Pourquoi pas ? fit Ayla.

  — Cavoa m’assiste, précisa S’Armuna.

  — Alors, je vais vous montrer à toutes les deux comment marchent les pierres, décida Ayla.

  Elle recommença l’expérience. Lorsque les deux femmes eurent essayé à leur tour, elles se détendirent un peu, émerveillées par les propriétés de la pierre étrange. Cavoa osa même poser une question sur la munaï.

  — Cette figurine que j’ai vue...

  — C’est Jondalar qui l’a sculptée, peu après notre rencontre. C’était pour prouver qu’il m’aimait, assura Ayla.

  — Alors, si je veux montrer à une personne combien elle est importante pour moi, je pourrai sculpter son visage ? demanda Cavoa.

  — Bien sûr, dit Ayla. Quand tu fabriques une munaï, tu ressens une émotion particulière, n’est-ce pas ?

  — Oui, et il y a aussi des rituels à respecter.

  — Je crois que c’est l’émotion que tu transmets à la figurine qui fait toute la différence.

  — Tu crois que je pourrais sculpter un visage à condition de ressentir des émotions bénéfiques ?

  — Oui, il n’y aurait aucun mal à ça. Tu es une excellente artiste, Cavoa.

  — Sans doute vaudrait-il mieux t’abstenir de sculpter la figurine en entier, intervint S’Armuna. Fais seulement la tête, et il n’y aura pas de confusion possible.

  Cavoa acquiesça d’un signe de tête et les deux femmes quêtèrent ensuite l’approbation d’Ayla. Au plus profond d’elles-mêmes, elles continuaient de s’interroger sur la véritable identité de la visiteuse.

  Le lendemain matin, Jondalar et Ayla se réveillèrent avec la ferme intention de partir, mais la neige tombait si fort qu’on voyait à peine au-delà des habitations.

  — Avec un blizzard qui se prépare, ça m’étonnerait que nous partions aujourd’hui, remarqua Jondalar que le moindre retard contrariait. J’espère que la tempête ne va pas durer.

  Ayla s’avança jusqu’au pré et siffla les chevaux. Ils apparurent aussitôt, et elle les conduisit dans un pré abrité du vent. Elle revint, préoccupée par le chemin du retour vers la Grande Rivière Mère, chemin qu’elle était la seule à connaître. Elle ne réagit pas tout de suite à l’appel de son nom.

  — Ayla !

  Cette fois l’appel était net. Elle se retourna et vit Cavoa qui, du seuil de son logis, lui faisait signe en prenant soin de ne pas se montrer.

  — Qu’y a-t-il, Cavoa ?

  — J’ai quelque chose à te montrer. J’aimerais avoir ton avis.

  Ayla s’approcha. La jeune femme ôta ses mitaines et dévoila le petit objet rond en ivoire caché dans sa main. Elle le remit délicatement à Ayla.

  — Je viens de le terminer.

  Émerveillée, Ayla examina la sculpture qui représentait le visage de S’Armuna.

  — Oh, Cavoa ! Je savais que ton art était grand, mais pas à ce point ! s’exclama-t-elle.

  C’était à peine un buste, le cou n’était même pas esquissé, mais on ne pouvait se méprendre sur l’identité de celle qui l’avait inspiré. Les cheveux noués en chignon sur le haut de la tête, le visage légèrement de guingois, un côté plus petit que l’autre, l’ensemble dégageait pourtant une sorte de beauté et de dignité qui rappelait irrésistiblement S’Armuna.

  — Est-ce qu’elle te plaît ? Crois-tu qu’elle l’aimera ? demanda Cavoa avec anxiété. Je voulais lui offrir quelque chose de rare.

  — Je l’aime beaucoup, assura Ayla. Ta sculpture exprime très bien tes sentiments. Tu as un don merveilleux, Cavoa, fais attention de bien t’en servir. Tes figurines peuvent posséder un grand pouvoir. S’Armuna a été sage de te choisir pour l’assister.

  Vers le soir, le blizzard hurlait de fureur. Il était dangereux de s’aventurer dehors, même pour quelques pas. S’Armuna décrocha un bouquet d’herbes séchées qui pendait d’un râtelier près de l’entrée, et qu’elle voulait ajouter au breuvage qu’elle préparait pour la Cérémonie du Feu. Dans le foyer, les flammes dansaient doucement, et Ayla et Jondalar venaient de se coucher. La chamane pensait les imiter après avoir terminé sa mixture.

  Soudain, le lourd rabat de l’entrée se souleva, laissant filtrer dans l’antichambre un courant d’air glacial accompagné de quelques flocons. Esadoa souleva le deuxième pan et apparut, en pleine détresse.

  — S’Armuna ! Dépêche-toi, c’est Cavoa ! Le travail a commencé. D’un bond, Ayla se leva sans laisser à S’Armuna le temps de répondre.

  — Elle a bien choisi sa nuit ! s’exclama la chamane en essayant de garder son calme pour ne pas inquiéter la future grand-mère. Tout va bien, Esadoa, elle n’accouchera pas dans la minute.

  — Elle n’est pas chez moi. Elle a insisté pour sortir dans cette tempête. Elle est dans la grande habitation. Elle tenait à ce que son bébé y naisse, je me demande pourquoi. Elle veut qu’Ayla vienne, pour être sûre que tout se passe bien pour le bébé.

  — Il n’y a personne là-bas, s’inquiéta S’Armuna. Elle n’aurait jamais dû sortir par ce temps-là.

  — Je n’ai pas pu l’en empêcher, gémit Esadoa qui s’empressa de retourner auprès de sa fille.

  — Attends-nous ! cria S’Armuna. Autant partir ensemble. On risquerait de se perdre dans cette tempête.

  — Loup nous montrera le chemin, dit Ayla en faisant signe à l’animal qui dormait en boule au pied du lit.

  — Ça vous dérangerait que je vienne ? demanda Jondalar.

  Il n’était pas vraiment désireux d’assister à la naissance, mais il ne voulait pas laisser Ayla sortir dans ce blizzard sans lui. S’Armuna lança un coup d’œil interrogateur à Esadoa.

  — Ça ne me dérange pas, dit la vieille femme, mais la présence d’un homme est-elle nécessaire ?

  — Rien ne l’interdit, fit S’Armuna, et Cavoa aimera peut-être avoir un homme près d’elle. Elle n’a pas de compagnon.

  Ils bravèrent tous les quatre les morsures du vent et affrontèrent ensemble les bourrasques de neige. En arrivant, ils trouvèrent la jeune femme recroquevillée près du feu éteint, le corps crispé de douleur, les yeux agrandis par la peur. Elle poussa un profond soupir en voyant sa mère accompagnée des trois autres. En un clin d’œil, Ayla avait déjà allumé le feu – à la grande surprise d’Esadoa – et Jondalar était ressorti chercher de la neige qu’il se proposait de faire fondre. Esadoa prépara le lit sur la plate-forme et S’Armuna choisit des herbes dans l
a réserve qu’elle avait rapportée la veille de son foyer.

  Ayla installa la jeune femme confortablement, afin qu’elle pût se coucher ou s’asseoir à son gré. Ensuite, elle attendit S’Armuna, et elles l’examinèrent ensemble. Après avoir rassuré Cavoa qu’elles laissèrent en compagnie de sa mère, les deux femmes marchèrent jusqu’à la cheminée pour discuter discrètement.

  — Tu as remarqué ? demanda S’Armuna.

  — Oui. Tu sais ce que ça signifie ?

  Jondalar, qui s’était tenu volontairement à l’écart, s’approcha lentement des deux femmes et crut déceler sur leur visage une légère inquiétude qui l’emplit d’appréhension. Il s’assit sur le rebord d’une couche et caressa Loup d’une main distraite.

  Jondalar trompait l’attente en arpentant les lieux de long en large. Loup le regardait sans comprendre. Le géant trouvait que le temps ne passait pas assez vite, regrettait que la tempête ne se calmât pas, et se rongeait les sangs à ne rien faire. Il essaya de parler à Cavoa, cherchant des mots d’encouragement, lui souriait, mais il se sentait surtout inutile. Que pouvait-il faire ? Finalement, comme la nuit avançait, il s’endormit sur une couche, alors que les échos de la tempête résonnaient comme un contrepoint à l’attente exaspérante éclairée par une lumière blafarde, ponctuée de halètements périodiques de plus en plus rapprochés.

  Un soudain regain d’activité mêlé de voix précipitées le réveilla. Le jour pointait par les fentes qui entouraient le trou d’évacuation de la fumée. Il se leva, s’étira et se frotta les yeux. Totalement ignoré par les trois femmes, il sortit uriner. Il remarqua avec joie que la tempête s’était calmée, et que de rares flocons tourbillonnaient encore.

  Alors qu’il s’apprêtait à rentrer, il entendit les premiers cris d’un nouveau-né. Il sourit, mais resta dehors de peur d’importuner. A sa grande surprise, un deuxième cri perça le silence, et bientôt un étrange duo s’époumona. Il y en a deux ! s’exclama Jondalar. Incapable de résister, il entra dans la caverne.

  Ayla sourit en voyant arriver Jondalar et brandit un bébé emmailloté.

  — C’est un garçon ! s’écria-t-elle.

  S’Armuna tenait dans ses bras un second bébé et s’apprêtait à couper le cordon ombilical.

  — Et ça, c’est une fille, dit-elle. Des jumeaux ! C’est un signe favorable. Peu de bébés naissaient à l’époque d’Attaroa, mais je crois que cela va changer. Je crois que la Mère nous fait comprendre que le Camp des Trois Sœurs va de nouveau prospérer.

  — Est-ce que tu reviendras ? demanda Doban à Jondalar.

  Il marchait déjà mieux, mais s’aidait encore des béquilles que le géant lui avait fabriquées.

  — Non, Doban, je ne crois pas. Un Voyage me suffit. Il est temps que je m’arrête quelque part et que je fonde un foyer.

  — J’aimerais bien que tu t’installes près d’ici, Zelandon.

  — Moi aussi, affirma Jondalar. Tu vas devenir un bon tailleur de silex, et j’aimerais t’apprendre encore beaucoup de choses. Ah, à propos, tu peux m’appeler Jondalar, tu sais.

  — Non, tu es Zelandon.

  — Tu veux sans doute dire Zelandonii ?

  — Non, Zelandon.

  — Oui, c’est bien ce qu’il veut dire, expliqua S’Amodun qui assistait à la scène en souriant. Il t’appelle Elandon, mais il y ajoute le titre de respect : S’Elandon.

  Bien qu’un peu gêné, Jondalar rosit de plaisir.

  — Je te remercie, Doban. Permets-moi donc de t’appeler S’Ardoban.

  — Oh, non ! C’est trop tôt. Quand je saurai travailler le silex aussi bien que toi, tu pourras m’appeler S’Ardoban. Pas avant.

  Jondalar étreignit le jeune garçon, donna quelques accolades aux S’Armunaï qui s’étaient réunis, et discuta encore un moment avec eux. Les chevaux étaient chargés, et patientaient à quelques pas de là. Loup s’était allongé, et observait Jondalar. Il se releva en apercevant Ayla qui sortait de l’habitation avec S’Armuna. Jondalar se réjouit de les voir enfin arriver.

  — ... c’est beau, disait la vieille femme, et cette preuve d’amitié m’émeut énormément, mais... tu ne crois pas que ce soit dangereux ?

  — Tant que tu la gardes précieusement, comment une simple figurine serait-elle dangereuse ? Elle te rapprochera de la Mère, assura Ayla, et te permettra de mieux La comprendre.

  Elles s’étreignirent avec chaleur, et S’Armuna serra fort Jondalar dans ses bras. Elle se recula quand ils appelèrent les chevaux, puis s’avança de nouveau et retint la main du géant.

  — Quand tu verras Marthona, dis-lui que S’Armu... non, dis-lui que Bodoa lui envoie toute son amitié.

  — Je n’y manquerai pas. Je suis sûr que ça lui fera plaisir, dit Jondalar en enfourchant l’étalon.

  Ils se retournèrent et saluèrent une dernière fois. Jondalar était soulagé de partir. Il garderait toujours de ce Camp des souvenirs mitigés.

  Comme ils s’éloignaient du Camp des Trois Sœurs, la neige se remit à tomber. Ceux du Camp leur faisaient de grands signes d’adieu.

  — Bon Voyage, S’Elandon ! criait Doban.

  — Que la paix t’accompagne, Ayla ! disait un autre.

  En les regardant s’enfoncer dans le brouillard de flocons, rares étaient ceux qui ne croyaient pas – ou ne voulaient pas croire – que Jondalar et Ayla leur avaient été envoyés pour les débarrasser d’Attaroa et pour libérer les hommes. Ils ne doutaient pas que dès que le couple de cavaliers aurait disparu, ils reprendraient la forme de la Grande Terre Mère et de Son Compagnon Céleste, et qu’ils rejoindraient les cieux en chevauchant le vent, suivis par leur fidèle protecteur, l’Etoile du Loup.

  34

  Ayla ouvrant la marche, ils repartirent vers la Grande Rivière Mère en suivant le chemin qu’elle avait emprunté lorsqu’elle traquait les Louves. Ils franchirent le petit affluent et bifurquèrent ensuite vers le sud-ouest à travers les plaines venteuses de l’ancien bassin qui séparait les deux principales chaînes de montagnes.

  Bien qu’il neigeât peu, d’incessantes rafales de vent les obligeaient souvent à s’abriter. Dans ce froid intense, les flocons tournoyaient au gré du vent et se transformaient en gravillons gelés en se mêlant aux particules de lœss broyées par les glaciers en marche. Les bourrasques cinglaient leurs joues nues. L’herbe jaunie s’était aplatie depuis longtemps, mais grâce au vent qui empêchait la neige de s’accumuler, sauf dans quelques poches abritées, il en restait assez pour que les chevaux pussent brouter.

  Le chemin parut court à Ayla, débarrassée du souci de suivre une piste en terrain difficile, mais Jondalar était surpris par la distance qui les séparait de la rivière. Il ne s’était pas rendu compte qu’ils étaient si haut vers le nord. Il en déduisit que le Camp des S’Armunaï était sûrement proche du Grand Glacier.

  Il n’avait pas tort. S’ils étaient montés plus haut, ils auraient atteint le gigantesque mur de glace en une poignée de jours de marche. Au début de l’été, juste avant d’entamer leur Voyage, ils avaient chassé le mammouth à l’orée de ce même glacier, mais beaucoup plus à l’est. Depuis, ils avaient contourné l’immense arc de cercle de la chaîne de montagnes par le sud et étaient remontés par le flanc ouest, atteignant presque la colossale étendue glacée.

  En arrivant à la Grande Rivière Mère, ils laissèrent derrière eux les derniers massifs détachés et les contreforts détritiques des monts qui avaient dominé leurs premières étapes, et ils obliquèrent vers l’ouest en direction d’une nouvelle chaîne montagneuse plus importante et plus haute.

  Ils revinrent sur leurs pas à la recherche de l’endroit où ils avaient caché leur tente et leur équipement après que Whinney avait été enlevée par la troupe de chevaux sauvages.

  — Il me semble reconnaître le paysage... ce doit être par ici, dit Jondalar.

  — Oui, c’est aussi mon impression. Je me rappelle ce promontoire, mais le reste a tellement changé ! fit Ayla avec désarroi.

  Les rives gelées, les congères et les tertr
es de neige empêchaient de voir où commençait le fleuve. Les rafales de vent et la glace qui s’était déposée sur les branches dans une alternance de gel et de redoux avaient couché plusieurs arbres. Des arbrisseaux et des ronciers ployaient sous le poids de la glace et de la neige ; les voyageurs, les prenant pour des rochers, s’empêtraient dans leurs branches quand ils tentaient de les escalader.

  L’homme et la femme s’arrêtèrent près d’un bosquet et scrutèrent les environs en quête d’un indice qui les guiderait jusqu’au fourré où ils avaient caché leur tente et leur réserve de vivres.

  — Nous ne sommes pas loin. Je sais que c’est par ici, mais tout est si différent ! s’exclama Ayla. L’apparence est souvent trompeuse, tu ne trouves pas ?

  — C’est vrai, tout change en hiver, dit Jondalar en la regardant sans comprendre.

  — Je ne parle pas seulement du paysage. C’est difficile à expliquer. Regarde S’Armuna, par exemple. Lorsque nous sommes partis, elle t’a demandé de transmettre son bonjour à ta mère. Mais elle a spécifié de la part de Bodoa. C’est sous ce nom que ta mère la connaît, n’est-ce pas ?

  — Oui, certainement. Dans sa jeunesse, elle devait s’appeler Bodoa.

  — Et elle a abandonné son nom pour devenir S’Armuna. C’est comme la zelandoni dont tu parles si souvent, celle qui s’appelait Zolena.

  — Oui, on abandonne son nom volontairement en devenant Celle Qui Sert la Mère.

  — Oui, je sais, dit Ayla. Creb faisait pareil quand il revêtait l’habit de Mog-ur. Il ne renonçait pas à son nom, mais il était un autre homme quand il dirigeait la cérémonie en tant que Mog-ur. Creb ressemblait à son totem de naissance, le Chevreuil, timide et tranquille. Il parlait peu, comme s’il épiait les autres de sa cachette. Mais lorsqu’il était Mog-ur, il prenait la puissance et l’autorité de son totem, l’Ours des Cavernes. Il n’était jamais complètement ce qu’il paraissait être.

  — Toi aussi, tu es comme cela, Ayla. La plupart du temps tu préfères écouter, mais avec un malade ou un blessé, tu changes. Tu prends l’initiative, tu ordonnes et on t’obéit.

 

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