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Cinq Semaines En Ballon

Page 23

by Jules Verne


  —En es-tu certain, Dick,

  —Evidemment. Je ne me trompe pas! C'est une chasse, mais une chasse a l'homme! Ce n'est point un chef qui les precede, mais un fugitif.

  —Un fugitif! dit Samuel avec emotion.

  —Oui!

  —Ne le perdons pas de vue et attendons. "

  Trois ou quatre milles furent promptement gagnes sur ces cavaliers qui filaient cependant avec une prodigieuse velocite.

  " Samuel! Samuel! s'ecria Kennedy d'une voix tremblante.

  —Qu'as-tu, Dick?

  —Est-ce une hallucination? est-ce possible?

  —Que veux-tu dire?

  —Attends.

  Et le chasseur essuya rapidement les verres de la lunette et se prit a regarder.

  " Eh bien? fit le docteur.

  —C'est lui, Samuel!

  —Lui! " s'ecria ce dernier.

  " Lui " disait tout! Il n'y avait pas besoin de le nommer!

  " C'est lui a cheval! a cent pas a peine de ses ennemis! il fuit!

  —C'est bien Joe! dit le docteur en palissant.

  —Il ne peut nous voir dans sa fuite!

  —Il nous verra, repondit Fergusson en abaissant la flamme de son chalumeau.

  —Mais comment?

  —Dans cinq minutes nous serons a cinquante pieds du sol; dans quinze, nous serons au-dessus de lui.

  —Il faut le prevenir par un coup de fusil!

  —Non! il ne peut revenir sur ses pas, il est coupe.

  —Que faire alors?

  —Attendre.

  —Attendre! Et ces Arabes?

  —Nous les atteindrons! Nous les depasserons! Nous ne sommes pas eloignes de deux milles, et pourvu que le cheval de Joe tienne encore

  —Grand Dieu! fit Kennedy.

  —Qu'y-a-t-il? "

  Kennedy avait pousse un cri de desespoir en voyant Joe precipite a terre. Son cheval, evidemment rendu, epuise, venait de s'abattre.

  " Il nous a vus, s'ecria le docteur; en se relevant il nous a fait signe!

  —Mais les Arabes vont l'atteindre! qu'attend-il! Ah! le courageux garcon! Hourra! " fit le chasseur qui ne se contenait plus.

  Joe, immediatement releve apres sa chute, a l'instant ou l'un des plus rapides cavaliers se precipitait sur lui, bondissait comme une panthere, l'evitait par un ecart, se jetait en croupe, saisissait l'Arabe a la gorge, de ses mains nerveuses, de ses doigts de fer, il l'etranglait, le renversait sur le sable, et continuait sa course effrayante.

  Un immense cri des Arabes s'eleva dans l'air; mais, tout entiers a leur poursuite, ils n'avaient pas vu le Victoria a cinq cents pas derriere eux, et a trente pieds du sol a peine; eux-memes, ils n'etaient pas a vingt longueurs de cheval du fugitif.

  L'un d'eux se rapprocha sensiblement de Joe, et il allait le percer de sa lance, quand Kennedy, l'eil fixe, la main ferme, l'arreta net d'une balle et le precipita a terre.

  Joe ne se retourna pas meme au bruit. Une partie de la troupe suspendit sa course, et tomba la face dans la poussiere a la vue du Victoria; l'autre continua sa poursuite.

  " Mais que fait Joe? s'ecria Kennedy, il ne s'arrete pas!

  —Il fait mieux que cela, Dick; je l'ai compris! il se maintient dans la direction de l'aerostat. Il compte sur notre intelligence! Ah! le brave garcon! Nous l'enleverons a la barbe de ces Arabes! Nous ne sommes plus qu'a deux cents pas.

  —Que faut-il faire? demanda Kennedy.

  —Laisse ton fusil de cote.

  —Voila, fit le chasseur en deposant son arme.

  —Peux-tu soutenir dans les bras cent cinquante livres de lest?

  —Plus encore.

  —Non, cela suffira. "

  Et des sacs de sable furent empiles par le docteur entre les bras de Kennedy.

  " Tiens-toi a l'arriere de la nacelle, et sois pret a jeter ce lest d'un seul coup. Mais, sur ta vie! ne le fais pas avant mon ordre!

  —Sois tranquille!

  —Sans cela, nous manquerions Joe, et il serait perdu!

  —Compte sur moi! "

  Le Victoria dominait presque alors la troupe des cavaliers qui s'elancaient bride abattue sur les pas de Joe Le docteur, a l'avant de la nacelle, tenait l'echelle deployee, pret a la lancer au moment voulu. Joe avait maintenu sa distance entre ses poursuivants et lui, cinquante pieds environ. Le Victoria les depassa.

  " Attention! dit Samuel a Kennedy.

  —Je suis pret.

  —Joe! garde a toi!... " cria le docteur de sa voix retentissante en jetant l'echelle, dont les premiers echelons souleverent la poussiere du sol.

  A l'appel du docteur, Joe, sans arreter son cheval, s'etait retourne; l'echelle arriva pres de lui, et au moment ou il s'y accrochait

  " Jette, cria le docteur a Kennedy.

  —C'est fait "

  Et le Victoria, deleste d'un poids superieur a celui de Joe, s'eleva a cent cinquante pieds dans les airs.

  Joe se cramponna fortement a l'echelle pendant les vastes oscillations qu'elle eut a decrire; puis faisant un geste indescriptible aux Arabes, et grimpant avec l'agilite d'un clown, il arriva jusqu'a ses compagnons qui le recurent dans leurs bras.

  Les Arabes pousserent un cri de surprise et de rage. Le fugitif venait de leur etre enleve au vol, et le Victoria s'eloignait rapidement.

  " Mon maetre! Monsieur Dick! " avait dit Joe.

  Et succombant a l'emotion, a la fatigue, il s'etait evanoui, pendant que Kennedy, presque en delire, s'ecriait:

  " Sauve! sauve!

  —Parbleu! " fit le docteur, qui avait repris sa tranquille impassibilite.

  Joe etait presque nu; ses bras ensanglantes, son corps couvert de meurtrissures, tout cela disait ses souffrances. Le docteur pansa ses blessures et le coucha sous la tente.

  Joe revint bientot de son evanouissement, et demanda un verre d'eau-de-vie, que le docteur ne crut pas devoir lui refuser, Joe n'etant pas un homme a traiter comme tout le monde. Apres avoir bu, il serra la main de ses deux compagnons et se declara pret a raconter son histoire.

  Mais on ne lui permit pas de parler, et le brave garcon retomba dans un profond sommeil, dont il paraissait avoir grand besoin.

  Le Victoria prenait alors une ligne oblique vers l'ouest. Sous les efforts d'un vent excessif, il revit la lisiere du desert epineux, au-dessus des palmiers courbes ou arraches par la tempete; et apres avoir fourni une marche de pres de deux cents milles depuis l'enlevement de Joe, il depassa vers le soir le dixieme degre de longitude.

  CHAPITRE XXXVII

  La route de l'ouest.—Le reveil de Joe.—Son entetement.—Fin de l'histoire de Joe.—Tagelel.—Inquietudes de Kennedy.—Route au nord.—Une nuit pres d'Agbades.

  Le vent pendant la nuit se reposa de ses violences du jour, et le Victoria demeura paisiblement au sommet d'un grand sycomore; le docteur et Kennedy veillerent a tour de role, et Joe en profita pour dormir vigoureusement et tout d'un somme pendant vingt-quatre heures.

  Voila le remede qu'il lui faut, dit Fergusson; la nature se chargera de sa guerison. "

  Au jour, le vent revint assez fort, mais capricieux; il se jetait brusquement dans le nord et le sud, mais en dernier lieu, le Victoria fut entraene vers; l'ouest.

  Le docteur, la carte a la main, reconnut le royaume du Damerghou, terrain onduleux d'une grande fertilite, avec les huttes de ses villages faites de longs roseaux entremeles des branchages de l'asclepia; les meules de grains s'elevaient, dans les champs cultives, sur de petits echafaudages destines a les preserver de l'invasion des souris et des termites.

  Bientot on atteignit la ville de Zinder, reconnaissable a sa vaste place des executions; au centre se dresse l'arbre de mort; le bourreau veille au pied, et quiconque passe sous son ombre est immediatement pendu!

  En consultant la boussole, Kennedy ne put s'empecher de dire:

  " Voila que nous reprenons encore la route du nord!

  —Qu'importe? Si elle nous mene a Tombouctou, nous ne nous en plaindrons pas! Jamais plus beau voyage n'aura ete accompli en de meilleures circonstances!...

  —Ni en meilleure sante, riposta Joe
, qui passait sa bonne figure toute rejouie a travers les rideaux de la tente.

  —Voila notre brave ami! s'ecria le chasseur, notre sauveur! Comment cela va-t-il?

  —Mais tres naturellement, Monsieur Kennedy, tres naturellement! Jamais je ne me suis si bien porte! Rien qui vous rapproche un homme comme un petit voyage d'agrement precede d'un bain dans le Tchad! n'est-ce pas, mon maetre?

  —Digne ceur! repondit Fergusson en lui serrant la main. Que d'angoisses et d'inquietudes tu nous a causees!

  —Eh bien, et vous donc! Croyez-vous que j'etais tranquille sur votre sort? Vous pouvez vous vanter de m'avoir fait une fiere peur!

  —Nous ne nous entendrons jamais, Joe, si tu prends les choses de cette facon.

  —Je vois que sa chute ne l'a pas change, ajouta Kennedy.

  —Ton devouement a ete sublime, mon garcon, et il nous a sauves; car le Victoria tombait dans le lac, et une fois la, personne n'eut pu l'en tirer.

  —Mais si mon devouement, comme il vous plaet d'appeler ma culbute, vous a sauves, est-ce qu'il ne m'a pas sauve aussi, puisque nous voila tous les trois en bonne sante? Par consequent, dans tout cela, nous n'avons rien a nous reprocher.

  —On ne s'entendra jamais avec ce garcon-la, dit le chasseur.

  —Le meilleur moyen de s'entendre, repliqua Joe, c'est de ne plus parler de cela. Ce qui est fait est fait! Bon ou mauvais, il n'y a pas a y revenir.

  —Entete! fit le docteur en riant. Au moins tu voudras bien nous raconter ton histoire?

  —Si vous y tenez beaucoup! Mais, auparavant, je vais mettre cette oie grasse en etat de parfaite cuisson, car je vois que Dick n'a pas perdu son temps

  —Comme tu dis, Joe.

  —Eh bien! nous allons voir comment ce gibier d'Afrique se comporte dans un estomac europeen. "

  L'oie fut bientot grillee a la flamme du chalumeau, et, peu apres, devoree. Joe en prit sa bonne part, comme un homme qui n'a pas mange depuis plusieurs jours. Apres le the et les grogs, il mit ses compagnons au courant de ses aventures; il parla avec une certaine emotion, tout en envisageant les evenements avec sa philosophie habituelle Le docteur ne put s'empecher de lui presser plusieurs fois la main, quand il vit ce digne serviteur plus preoccupe du salut de son maetre que du sien; a propos de la submersion de l'ele des Biddiomahs, il lui expliqua la frequence de ce phenomene sur le lac Tchad.

  Enfin Joe, en poursuivant son recit, arriva au moment ou, plonge dans le marais, il jeta un dernier cri de desespoir.

  " Je me croyais perdu, mon maetre, dit-il, et mes pensees s'adressaient a vous. Je me mis a me debattre. Comment? je ne vous le dirai pas; j'etais bien decide a ne pas me laisser engloutir sans discussion, quand, a deux pas de moi, je distingue, quoi? un bout de corde fraechement coupee; je me permets de faire un dernier effort, et, tant bien que mal, j'arrive au cable; je tire; cela resiste; je me hale, et finalement me voila en terre ferme! Au bout de la corde je trouve une ancre!... Ah! mon maetre! j'ai bien le droit de l'appeler l'ancre du salut, si toutefois vous n'y voyez pas d'inconvenient. Je la reconnais! une ancre du Victoria! vous aviez pris terre en cet endroit! Je suis la direction de la corde qui me donne votre direction, et, apres de nouveaux efforts, je me tire de la fondriere. J'avais repris mes forces avec mon courage, et je marchai pendant une partie de la nuit, en m'eloignant du lac. J'arrivai enfin a la lisiere d'une immense foret. La dans un enclos des chevaux paissaient sans songer a mal. Il y a des moments dans l'existence ou tout le monde sait monter a cheval, n'est-il pas vrai? Je ne perds pas une minute a reflechir, je saute sur le dos de l'un de ces quadrupedes, et nous voila filant vers le nord a toute vitesse. Je ne vous parlerai point des villes que je n'ai pas vues, ni des villages que j'ai evites. Non. Je traverse les champs ensemences, je franchis les halliers, j'escalade les palissades, je pousse ma bete, je l'excite, je l'enleve! J'arrive a la limite des terres cultivees. Bon! le desert! cela me va; je verrai mieux devant moi, et de plus loin. J'esperais toujours apercevoir le Victoria m'attendant en courant des bordees. Mais rien. Au bout de trois heures, je tombai comme un sot dans un campement d'Arabes! Ah! quelle chasse!... Voyez-vous, Monsieur Kennedy, un chasseur ne sait pas ce qu'est une chasse, s'il n'a ete chasse lui-meme! Et cependant, s'il le peut, je lui donne le conseil de ne pas en essayer! Mon cheval tombait de lassitude; on me serre de pres; je m'abats; je saute en croupe d'un Arabe! Je ne lui en voulais pas, et j'espere bien qu'il ne me garde pas rancune de l'avoir etrangle! Mais je vous avais vus!.. et vous savez le reste. Le Victoria court sur mes traces, et vous me ramassez au vol, comme un cavalier fait d'une bague. N'avais-je pas raison de compter sur vous? Eh bien! Monsieur Samuel, vous voyez combien tout cela est simple. Rien de plus naturel au monde! Je suis pret a recommencer, si cela peut vous rendre service encore! et, d'ailleurs, comme je vous le disais, mon maetre, cela ne vaut pas la peine d'en parler.

  —Mon brave Joe! repondit le docteur avec emotion. Nous n'avions donc pas tort de nous fier a ton intelligence et a ton adresse!

  —Bah! Monsieur, il n'y a qu'a suivre les evenements, et on se tire d'affaire! Le plus sur, voyez-vous, c'est encore d'accepter les choses comme elles se presentent. "

  Pendant cette histoire de Joe, le ballon avait rapidement franchi une longue etendue de pays. Kennedy fit bientot remarquer a l'horizon un amas de cases qui se presentait avec l'apparence d'une ville. Le docteur consulta sa carte, et reconnut la bourgade de Tagelel dans le Damerghou.

  " Nous retrouvons ici, dit-il, la route de Barth. C'est la qu'il se separa de ses deux compagnons Richardson et Overweg. Le premier devait suivre la route de Zinder, le second celle de Maradi, et vous vous rappelez que, de ces trois voyageurs, Barth est le seul qui revit l'Europe.

  —Ainsi, dit le chasseur, en suivant sur la carte la direction du Victoria, nous remontons directement vers le nord?

  —Directement, mon cher Dick.

  —Et cela ne t'inquiete pas un peu?

  —Pourquoi?

  —C'est que ce chemin-la nous mene a Tripoli et au-dessus du grand desert.

  —Oh! nous n'irons pas si loin, mon ami; du moins, je l'espere.

  —Mais ou pretends-tu t'arreter?

  —Voyons, Dick, ne serais-tu pas curieux de visiter Tembouctou.

  —Tembouctou?

  —Sans doute, reprit Joe. On ne peut pas se permettre de faire un voyage en Afrique sans visiter Tembouctou!

  —Tu seras le cinquieme ou sixieme Europeen qui aura vu cette ville mysterieuse!

  —Va pour Tembouctou!

  —Alors laisse-nous arriver entre le dix-septieme et le dix-huitieme degre de latitude, et la nous chercherons un vent favorable qui puisse nous chasser vers l'ouest.

  —Bien, repondit le chasseur, mais avons-nous encore une longue route a parcourir dans le nord?

  —Cent cinquante milles au moins.

  —Alors, repliqua Kennedy, je vais dormir un peu.

  —Dormez, Monsieur, repondit Joe; vous-meme, mon maetre, imitez M. Kennedy; vous devez avoir besoin de repos, car je vous ai fait veiller d'une facon indiscrete. "

  Le chasseur s'etendit sous la tente; mais Fergusson, sur qui la fatigue avait peu de prise, demeura a son poste d'observation.

  Au bout de trois heures, le Victoria franchissait avec une extreme rapidite un terrain caillouteux, avec des rangees de hautes montagnes nues a base granitique; certains pics isoles atteignaient meme quatre mille pieds de hauteur; les girafes, les antilopes, les autruches bondissaient avec une merveilleuse agilite au milieu des forets d'acacias, de mimosas, de souahs et de dattiers; apres l'aridite du desert, la vegetation reprenait son empire. C'etait le pays des Kailouas qui se voilent le visage au moyen d'une bande de coton, ainsi que leurs dangereux voisins les Touareg.

  A dix heures du soir, apres une superbe traversee de deux cent cinquante milles, le Victoria s'arreta au-dessus d'une ville importante; la lune en laissait entrevoir une partie a demi ruinee; quelques pointes de mosquees s'elancaient ca et la frappees d'un blanc rayon de lumiere; le docteur prit la hauteur des etoiles, et reconnut qu'il se trouvait sous la latitude d'Aghades.

>   Cette ville, autrefois le centre d'un immense commerce, tombait deja en ruines a l'epoque ou la visita le docteur Barth.

  Le Victoria, n'etant pas apercu dans l'ombre, prit terre a deux milles au-dessus d'Agbades, dans un vaste champ de millet. La nuit fut assez tranquille et disparut vers les cinq heures du matin, pendant qu'un vent leger sollicitait le ballon vers l'ouest, et meme un peu au sud.

  Fergusson s'empressa de saisir cette bonne fortune. Il s'enleva rapidement et s'enfuit dans une longue traenee des rayons du soleil.

  CHAPITRE XXXVIII

  Traversee rapide.—Resolutions prudentes.—Caravanes.—Averses continuelles.—Gao.—Le Niger.—Golberry, Geoffroy, Gray.—Mungo-Park.—Laing.—Rene Caillie.—Clapperton.—John et Richard Lander.

  La journee du 17 mai fut tranquille et exempte de tout incident; le desert recommencait; un vent moyen ramenait le Victoria dans le sud-ouest; il ne deviait ni a droite ni a gauche; son ombre tracait sur le sable une ligne rigoureusement droite.

  Avant son depart, le docteur avait renouvele prudemment sa provision d'eau; il craignait de ne pouvoir prendre terre sur ces contrees infestees par les Touareg Aouelimminien. Le plateau, eleve de dix-huit cents pieds au-dessus du niveau de la mer, se deprimait vers le sud. Les voyageurs, ayant coupe la route d'Aghades a Mourzouk, souvent battue par le pied des chameaux, arriverent au soir par 16 degrees de latitude et 4 degrees 55' de longitude, apres avoir franchi cent quatre-vingts milles d'une longue monotonie.

  Pendant cette journee, Joe appreta les dernieres pieces de gibier, qui n'avaient recu qu'une preparation sommaire; il servit au souper des brochette de becassines fort appetissantes. Le vent etant bon, le docteur resolut de continuer sa route pendant une nuit que la lune, presque pleine encore, faisait resplendissante. Le Victoria s'eleva a une hauteur de cinq cents pieds, et, pendant cette traversee nocturne de soixante milles environ, le leger sommeil d'un enfant n'eut meme pas ete trouble.

  Le dimanche matin, nouveau changement dans la direction du vent; il porta vers le nord-ouest; quelques corbeaux volaient dans les airs, et, vers l'horizon, une troupe de vautours, qui se tint fort heureusement eloignee.

 

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