A woman and a man
Didn’t love the man and woman who loved them
Once upon one time
Once upon perhaps only one time
A woman and a man loved each other.
CHANSON-CAILLOU
J’arrive en chantant
Visage de bois visage de bois
Je pars en rêvant
Ô mon amour ô mon roi
Viennent les Printemps
Odeurs des bois odeurs des bois
à nous deux tuons le temps
Pour qu’il renaisse avec la joie
Eh quoi je suis toute seule
Cercueil de bois cercueil de bois
Ô mon amour ma chère gueule
Te souviens-tu de moi parfois?
PEBBLE-SONG
I arrive I’m singing
Wooden face wooden face
When I leave I’m dreaming
O my love my king my ace
Comes another may-time
Woody smells woody smells
Time to kill our playtime
Soon reborn with peal of bells
Hey I’m all alone now
Wooden coffin wooden coffin
O my love my own now
Think of me remember often
Ô JEUNESSE
Ô jeunesse voici que les noces s’achèvent
Les convives s’en vont des tables du banquet
Les nappes sont tachées de vin et le parquet
Est blanchi par les pas des danseurs et des rêves
Une vague a roulé des roses sur la grève
quelque amant malheureux jeta du haut du quai
Dans la mer en pleurant reliques et bouquets
Et les rois ont mangé la galette et la fève
Midi flambant fait pressentir le crépuscule
Le cimetière est plein d’amis qui se bousculent
que leur sommeil soit calme et leur mort sans rigueur
Mais tant qu’il restera du vin dans les bouteilles
qu’on emplisse mon verre et bouchant mes oreilles
J’écouterai monter l’océan dans mon cœur.
DAYS OF YOUTH
Days of youth the wedding is over
The guests are leaving the banquet
There’s wine on the cloths, and the parquet
Is whitened by dancers and dreams.
A wave strewed the foreshore with roses
Love’s victim has hurled off the quayside
Weeping wretchedly keepsakes and posies
The kings ate the cake and the bean.
Flaming noon foreshadows the twilight
Friends jostle in graveyards to slumber
In peace and for death without stiffness
But while there’s still wine in the bottles
Fill my glass and with ears stopped I’ll listen
To my heart where the ocean is rising.
BAGATELLES
BAGATELLES
Vous reviendrez me voir, dit-elle
Quand vous serez riche à millions
Quand les roses de Bagatelle,
Sous la neige s’épanouiront.
Lavant le sable des rivières,
Brisant le quartz, ouvrant le tronc
Des caoutchoucs à la lisière
D’un enfer d’arbres aux fûts ronds,
Libérant des nids de pétrole,
Ou labourant les Alaskas,
Quatre-vingts ans, la terre molle
Cacha le trésor des Incas.
Quand il revint, elle était morte,
Il était bête, il était vieux,
Mais les amants de cette sorte
Ne sont pas tellement nombreux.
Que fleurissent à Bagatelle
Les roses de poudre et frimas,
Mais que fleurissent surtout celles
Que l’on aime jusqu’au trépas.
BAGATELLES
BAGATELLES
You’ll come back to me, she said,
Rich as Croesus, when the rose
Down at Bagatelle shall spread
Buds and blossoms in the snows.
Washing loads of river-sand,
Breaking quartz to smithereens
Tapping rubber from a stand
Of infernal round-boled trees
Freeing up the beds of oil
Heavy work in the Alaskas
Eighty years in yielding soil
Hidden treasure of the Incas
He came back but she’d passed over.
He was old and cretinous.
Even so, this type of lover,
They are hardly numerous.
May there bloom at Bagatelle
Roses of the snow and frost
May those darlings bloom as well
That we love till life is lost.
LE NUAGE
Le nuage dit à l’indien:
«Tire sur moi tes flèches,
Je ne sentirai rien.»
«C’est vrai, rien ne t’ébrèche,
Répond le sauvage,
Mais vois mes tatouages!
Rien de pareil sur les nuages.»
THE CLOUD
Said a cloud in the sky
To a warlike brave
Let your arrows go zing
I won’t feel a thing
Said the brave so bold
You cannot be holed
But here’s where you lose
You have no tattoos.
CHANSONS BRÈVES
i
Depuis si longtemps que tu chantes
N’as-tu pas soif? N’as-tu pas faim?
J’ai soif! mais la fontaine est lente
J’ai faim! M’aimeras-tu demain?
ii
Vous n’aviez pas ces yeux ma chère
Tout cet avril qui fut le nôtre
J’y lis une phrase étrangère
J’y vois le souvenir des autres
iii
Ma jalousie est semblable à la neige
Elle est monotone et pourtant
Elle recouvre, elle protège
Toute la gloire du printemps.
SHORT SONGS
i
Aren’t you hungry? Thirsty too?
You interminably croon.
Yes I am! The fountain’s slow
Will you love me very soon?
ii
All this April-time of ours,
Those were not my darling’s eyes!
There I scanned a stranger’s phrase,
Someone else’s memories.
iii
Like the snow, my jealousy
Is a tiresome, dreary thing.
Yet it cloaks protectively
All the glory of the spring.
CHANSON
De bon cœur, la bonne aventure,
Chante colombe, au fond du bois;
L’étoile baigne aux sources pures,
Trois par trois sont partis les mois,
De bon cœur, la bonne aventure.
Qu’elle était douce à son amant.
De bon cœur, la bonne aventure,
Allons à son enterrement;
Et qu’elle avait belle figure,
Qu’elle était douce à son amant.
Il en aima bien mieux les autres,
Chante colombe au fond des bois;
Meurent prophète et ses apôtres,
On s’oubliera selon les lois.
On en aimera mieux les autres.
Vienne le jour des vieux bilans,
L’étoile baigne aux sources pures.
Qu’elle était douce à son
amant,
De bon cœur, la bonne aventure.
Vienne le jour des vieux bilans.
Trois par trois sont partis les mois,
Qui se souvient encore d’elle?
Après trois fois trois ans, ma foi,
À la sienne reste fidèle,
Chante colombe, au fond des bois.
SONG
In good heart, the future’s fair,
Sing, you dove, deep in the wood,
Pure spring waters bathe a star,
Three times three the months have fled,
In good heart, the future’s fair.
To her darling she was good,
In good heart, the future’s fair,
Now in earth we’ll see her laid;
And her face and form were fair,
To her darling she was good.
Others more than her he’d cherish,
Sing, you dove, deep in the wood;
Prophets and apostles perish,
We’ll forget, by rights we should.
Others more than her we’ll cherish.
Check the figures, how they stood,
Pure spring waters bathe a star.
To her darling she was good,
In good heart, the future’s fair.
Check the figures, how they stood.
Three times three the months have fled,
Who remembers her today?
Three times three years now, dear God,
Faithful to your darling stay,
Sing, you dove, deep in the wood.
MINOTAURE
[Révue Littéraire]
À manger son propre sang
En tartine sur du pain
À boire l’eau de l’étang
Où les morts prennent leur bain
À prononcer des paroles
Nées de cœurs empoisonnés
À fréquenter les écoles
Des esprits emprisonnés
À marcher sur le chemin
Où l’on marche avec les mains
Le Minotaure a vieilli
Loin des siens et du pays
Il va retrouver les sphinx
Les licornes et les lynx
Qui lui disent il est tard
Déjà l’on ferme l’enceinte
L’homme salera ton lard
Dans un coin du labyrinthe
Mugis encore si tu peux
Minotaure de rien, Minotaure de peu.
MINOTAUR
[A literary magazine.]
He ate his own gore
On buttered sliced bread
He drank from the mere
Where wallow the dead
He uttered the phrases
Of hearts that were poisoned
Enrolled in the classes
Of spirits imprisoned
He strolled on the strands
Where you stand on your hands
The minotaur’s senile
A lonely old exile
He searches for sphinxes
For unicorns lynxes
Who tell him it’s late
The labyrinth’s barred
Behind its back gate
They’ll pickle your lard
Won’t you venture to roar
Little Minus-o-taur?
LA REINE COUCHÉE DANS SON LIT
La Reine couchée dans son lit
Écoute un rossignol chanter
Écoute aussi la sentinelle
Qui fait les cent pas dans la cour
Cent pas par-ci, cent pas par-là
Une reine et un rossignol
Et le soldat qui sent le rhum
Dans la cour du royal palais
Le soldat couché dans son lit
N’écoute pas chanter la Reine
N’écoute pas le rossignol
Qui fait les cent pas dans la cour
Et le rossignol dans son nid
N’écoute pas la sentinelle
N’écoute pas même la Reine
Qui fait les cent pas dans la cour
Cent pas par-ci, cent pas par-là
Voilà bientôt quatre cents pas
Avec les cent pas du passant
Dans ce palais extravagant
QUEEN IN BED
Queen in bed is listening
Nightingale she hears it sing
Hears the sentry pacing hard
Ten by ten one hundred yard
Loudly pacing palace guard
Ten by ten one hundred yard
One queen and one nightingale
Sentry in the palace yard
Pacing pungent red rum smell
In his bed the sentinel
Heeds no singing queen at all
Listens to no nightingale
Pacing ten by ten the yard
In her nest the nightingale
Heeds no sentinel at all
Listens to no singing queen
Pacing ten by ten the yard
Hundred here a hundred there
Hundred more as someone passes
Very soon four hundred paces
Palaces are lavish places
SIRAMOUR
Semez, semez la graine
Aux jardins que j’avais.
Je parle ici de la sirène idéale et vivante,
de la maîtresse de l’écume et des moissons de la nuit
Où les constellations profondes comme des puits grincent de toutes leurs poulies et renversent à pleins seaux sur la terre et le sommeil un tonnerre de marguerites et de pervenches.
Nous irons à Lisbonne, âme lourde et cœur gai,
Cueillir la belladone aux jardins que j’avais.
Je parle ici de la sirène idéale et vivante,
Pas la figure de proue mais la figure de chair,
La vivante et l’insatiable,
Vous que nul ne pardonne,
me lourde et cœur gai,
Sirène de Lisbonne,
Lionne rousse aux aguets.
Je parle ici de la sirène idéale et vivante.
Jadis une sirène
À Lisbonne vivait.
Semez, semez la graine
Aux jardins que j’avais.
Que Lisbonne est jolie.
La fumée des vapeurs
Sous la brise mollie
Prend des formes de fleurs.
Nous irons à Lisbonne
me lourde et cœur gai,
Vous que nul ne pardonne,
Lionne rousse aux aguets.
Semez, semez la graine,
Je connais la chanson
Que chante la sirène
Au pied de la maison.
Nous irons à Lisbonne
me lourde et cœur gai,
Cueillir la belladone
Aux jardins que j’avais.
Il est minuit très noire,
La nuit toutes les fleurs,
Versez, versez à boire,
Sont de même couleur.
Je connais la sirène
Je connais sa chanson
Voyez sa robe traîne
Et charme les poissons.
Mais la graine qui germe
Connaîtra pas ses fleurs.
Chaque jour a son terme,
Chaque amour ses douleurs.
Tout en elle est semblable à l’eau, son élément,
Mais à l’eau de montagne et qui glace les membres
Du nageur qui s’y risque et devient son amant:
Il souffre. Il sombre. Il meurt dans ces flots de décembre.
Surrealist, Lover, Resistant Page 23