Une demeure permanente
Et des armes pour se défendre
Une plage peu fréquentée
Un coup de feu un seul
Stupéfaction du père
Mort depuis longtemps.
4
Tous ces gens mangent
Ils sont gourmands ils sont contents
Et s'ils rient ils mangent plus.
Confections
1
Simplicity yea even to write
To-day at least the hand is there
2
It is meet to scrutinize
The inquisitive
When one is weary
3
The violence of sea-winds
Ships old faces
A permanent abode
Weapons to defend one
A shot one only
Stupefaction of the father
Dead this long time
4
All these people eat
They are gluttonous they are happy
The more they laugh the more they eat
5
Par-dessus les chapeaux
Un régiment d'orfraies passe au galop
C'est un régiment de chaussures
Toutes les collections des fétichistes déçus
Allant au diable.
6
Des cataclysmes d'or bien acquis
Et d'argent mal acquis.
7
Les oiseaux parfument les bois
Les rochers leurs grands lacs nocturnes.
8
Gagner au jeu du profil
Qu'un oiseau reste dans ses ailes.
9
Immobile
J'habite cette épine et ma griffe se pose
Sur les seins délicieux de la misère et du crime.
5
Above the hatwear
A regiment of ospreys gallops past
It is a regiment of footwear
All the disillusioned fetishists and their complete collections
Off to the devil
6
Cataclysms of gold well-gotten
And of silver ill-gotten
7
The birds perfume the woods
The rocks their great nocturnal lakes
8
Play at profile and win
Let a bird abide in its wings
9
Rapt
I dwell in this thorn and my claw alights
On the sweet breasts of poverty and crime
10
Pourquoi les fait-on courir
On ne les fait pas courir
L'arrivée en avance
Le départ en retard
Quel chemin en arrière
Quand la lenteur s'en mêle.
Les preuves du contraire
Et l'inutilité.
11
Une limaille d'or un trésor une flaque
De platine au fond d'une vallée abominable
Dont les habitants n'ont plus de mains
Entraîne les joueurs à sortir d'eux-mêmes.
12
Le salon à la langue noire lèche son maître
Il l'embaume il lui tient lieu d'éternité.
13
Le passage de la Bérésina par une femme rousse à grandes
mamelles.
14
Il la prend dans ses bras
Lueurs brillantes un instant entrevues
Aux omoplates aux épaules aux seins
Puis cachées par un nuage.
Elle porte la main à son cœur
Elle pâlit elle frissonne
Qui donc a crié?
Mais l'autre s'il est encore vivant
On le retrouvera
Dans une ville inconnue.
10
Why are they made to run
They are not made to run
Arriving underdue
Departing overdue
What a road back
When slowness takes a hand
Proofs of the contrary
And futility
11
Gold-filings a treasure a platinum
Puddle deep in a horrible valley
Whose denizens have lost their hands
It takes the players out of themselves
12
The drawing-room with its black tongue licks its master
Embalms him performs the office of eternity
13
The Beresina forded by a sandy jug-dugged woman
14
He takes her in his arms
Bright gleams for a second playing
On the shoulder-blades the shoulders and the breasts
Then hidden by a cloud
She carries her hand to her heart
She pales she quakes
Whose then was the cry
But he if he still lives
He shall be rediscovered
In a strange town
15
Le sang coulant sur les dalles
Me fait des sandales
Sur une chaise au milieu de la rue
J'observe les petites filles créoles
Qui sortent de l'école en fumant la pipe.
16
Il ne faut pas voir la réalité telle que je suis.
17
Toute la vie a coulé dans mes rides
Comme une agate pour modeler
Le plus beau des masques funèbres.
18
Les arbres blancs les arbres noirs
Sont plus jeunes que la nature
Il faut pour retrouver ce hasard de naissance
Vieillir.
19
Soleil fatal du nombre des vivants
On ne conserve pas ton cœur.
(A toute épreuve, 1930)
15
The blood flowing on the flags
Furnishes me with sandals
I sit on a chair in the middle of the street
I observe the little Creole girls
Coming out of school smoking pipes
16
Do not see reality as I am
17
All life even as an agate has poured itself
Into the seams of my countenance and cast
A death-mask of unrivalled beauty
18
The black trees the white trees
Are younger than nature
In order to recover this freak of birth one must
Age
19
Fatal sun of the quick
One cannot keep thy heart
(All Proof, 1930)
ARTHUR RIMBAUD
Le Bateau Ivre
Comme je descendais des Fleuves impassibles,
Je ne me sentis plus guidé par les haleurs:
Des Peaux-Rouges criards les avaient pris pour cibles,
Les ayant cloués nus aux poteaux de couleurs.
J'étais insoucieux de tous les équipages,
Porteur de blés flamands ou de cotons anglais.
Quand avec mes haleurs ont fini ces tapages,
Les fleuves m'ont laissé descendre où je voulais.
Drunken Boat
Downstream on impassive rivers suddenly
I felt the towline of the boatmen slacken.
Redskins had taken them in a scream and stripped them and
Skewered them to the glaring stakes for targets.
Then, delivered from my straining boatmen,
From the trivial racket of trivial crews and from
The freights of Flemish grain and English cotton,
I made my own course down the passive rivers.
Dans les clapotements furieux des marées,
Moi, l'autre hiver, plus sourd que les cerveaux d'enfants,
Je courus! et les Péninsules démarrées
N'ont pas subi tohu-bohus plus triomphants.
La tempête a béni mes éveils maritimes.
Plus léger qu'un bouchon j'ai dansé sur les flots
Qu'on ap
pelle rouleurs éternels de victimes,
Dix nuits, sans regretter l'œil niais des falots.
Plus douce qu'aux enfants la chair des pommes sures,
L'eau verte pénétra ma coque de sapin
Et des taches de vins bleus et des vomissures
Me lava, dispersant gouvernail et grappin.
Et, dès lors, je me suis baigné dans le poème
De la mer infusé d'astres et lactescent,
Dévorant les azurs verts où, flottaison blême
Et ravie, un noyé pensif, parfois, descend;
Blanker than the brain of a child I fled
Through winter, I scoured the furious jolts of the tides,
In an uproar and a chaos of Peninsulas,
Exultant, from their moorings in triumph torn.
I started awake to tempestuous hallowings.
Nine nights I danced like a cork on the billows, I danced
On the breakers, sacrificial, for ever and ever,
And the crass eye of the lanterns was expunged.
More firmly bland than to children apples' firm pulp,
Soaked the green water through my hull of pine,
Scattering helm and grappling and washing me
Of the stains, the vomitings and blue wine.
Thenceforward, fused in the poem, milk of stars,
Of the sea, I coiled through deeps of cloudless green,
Where, dimly, they come swaying down,
Rapt and sad, singly, the drowned;
Où, teignant tout à coup les bleuités, délires
Et rhythmes lents sous les rutilements du jour,
Plus fortes que l'alcool, plus vastes que vos lyres,
Fermentent les rousseurs amères de l'amour!
Je sais les cieux crevant en éclairs, et les trombes
Et les ressacs et les courants; je sais le soir,
L'aube exaltée ainsi qu'un peuple de colombes,
Et j'ai vu quelquefois ce que l'homme a cru voir.
J'ai vu le soleil bas taché d'horreurs mystiques
Illuminant de longs figements violets,
Pareils à des acteurs de drames très antiques,
Les flots roulant au loin leurs frissons de volets.
J'ai rêvé la nuit verte aux neiges éblouies,
Baisers montant aux yeux des mers avec lenteur,
La circulation des sèves inouïes
Et l'éveil jaune et bleu des phosphores chanteurs.
Where, under the sky's haemorrhage, slowly tossing
In thuds of fever, arch-alcohol of song,
Pumping over the blues in sudden stains,
The bitter rednesses of love ferment.
I know the heavens split with lightnings and the currents
Of the sea and its surgings and its spoutings; I know
evening,
And dawn exalted like a cloud of doves.
And my eyes have fixed phantasmagoria.
I have seen, as shed by ancient tragic footlights,
Out from the horror of the low sun's mystic stains,
Long weals of violet creep across the sea
And peals of ague rattle down its slats.
I have dreamt the green night's drifts of dazzled snow,
The slow climb of kisses to the eyes of the seas,
The circulation of unheard of saps,
And the yellow-blue alarum of phosphors singing.
J'ai suivi, des mois pleins, pareille aux vacheries
Hystériques, la boule à l'assaut des récifs,
Sans songer que les pieds lumineux des Maries
Pussent forcer le muffle aux Océans poussifs.
J'ai heurté, savez-vous? d'incroyables Florides
Mêlant aux fleurs des yeux de panthères aux peaux
D'hommes, des arcs-en-ciel tendus comme des brides
Sous l'horizon des mers, à de glauques troupeaux.
J'ai vu fermenter les marais, énormes nasses
Où pourrit dans les joncs tout un Léviathan,
Des écroulements d'eaux au milieu des bonaces
Et les lointains vers les gouffres cataractant!
Glaciers, soleils d'argent, flots nacreux, cieux de braises,
Échouages hideux au fond des golfes bruns
Où les serpents géants dévorés des punaises
Choient des arbres tordus avec de noirs parfums!
I have followed months long the maddened herds of the
surf
Storming the reefs, mindless of the feet,
The radiant feet of the Marys that constrain
The stampedes of the broken-winded Oceans.
I have fouled, be it known, unspeakable Floridas, tangle of
The flowers of the eyes of panthers in the skins of
Men and the taut rainbows curbing,
Beyond the brows of the seas, the glaucous herds.
I have seen Leviathan sprawl rotting in the reeds
Of the great seething swamp-nets;
The calm sea disembowelled in waterslides
And the cataracting of the doomed horizons.
Iridescent waters, glaciers, suns of silver, flagrant skies,
And dark creeks' secret ledges, horror-strewn,
Where giant reptiles, pullulant with lice,
Lapse with dark perfumes from the writhing trees.
J'aurais voulu montrer aux enfants ces dorades
Du flot bleu, ces poissons d'or, ces poissons chantants.
Des écumes de fleurs ont béni mes dérades,
Et d'ineffables vents m'ont ailé par instants.
Parfois, martyr lassé des pôles et des zones,
La mer, dont le sanglot faisait mon roulis doux,
Montait vers moi ses fleurs d'ombre aux ventouses jaunes
Et je restais ainsi qu'une femme à genoux,
Presqu'île ballottant sur mes bords les querelles
Et les fientes d'oiseaux clabaudeurs aux yeux blonds,
Et je voguais lorsqu'à travers mes liens frêles
Des noyés descendaient dormir à reculons…
Or, moi, bateau perdu sous les cheveux des anses,
Jeté par l'ouragan dans l'éther sans oiseau,
Moi dont les Monitors et les voiliers des Hanses
N'auraient pas repêché la carcasse ivre d'eau,
I would have shown to children those dorados
Of the blue wave, those golden fish, those singing fish;
In spumes of flowers I have risen from my anchors
And canticles of wind have blessed my wings.
Then toward me, rocking softly on its sobbing,
Weary of the torment of the poles and zones,
The sea would lift its yellow polyps on flowers
Of gloom and hold me—like a woman kneeling—
A stranded sanctuary for screeching birds,
Flaxen-eyed, shiteing on my trembling decks,
Till down they swayed to sleep, the drowned, spreadeagled,
And, sundering the fine tendrils, floated me.
Now I who was wrecked in the inlets' tangled hair
And flung beyond birds aloft by the hurricane,
Whose carcass drunk with water Monitors
And Hanseatic sloops could not have salved;
Libre, fumant, monté de brumes violettes,
Moi qui trouais le ciel rougeoyant comme un mur
Qui porte, confiture exquise aux bons poètes,
Des lichens de soleil et des morves d'azur,
Qui courais taché de lunules électriques,
Planche folle, escorté des hippocampes noirs,
Quand les Juillets faisaient crouler à coups de triques
Les cieux ultramarins aux ardents entonnoirs,
Moi qui tremblais, sentant geindre à cinquante lieues
Le rut des Béhémots et des Maelstroms épais,
Fileur éternel des immobilités bleues,
Je regrette l'Europe aux anciens parapets.
J'ai vu des archipels sidéraux!
et des îles
Dont les cieux délirants sont ouverts au vogueur:
Est-ce en ces nuits sans fond que tu dors et t'exiles,
Million d'oiseaux d'or, ô future Vigueur?
Who, reeking and free in a fume of purple spray,
Have pierced the skies that flame as a wall would flame
For a chosen poet's rapture, and stream and flame
With solar lichen and with azure snot;
Who scudded, with my escort of black sea-horses,
Fury of timber, scarred with electric moons,
When Sirius flogged into a drift of ashes
The furnace-cratered cobalt of the skies;
I who heard in trembling across a waste of leagues
The turgent stroms and Behemoths moan their rut,
I weaving for ever voids of spellbound blue,
Now remember Europe and her ancient ramparts.
I saw archipelagoes of stars and islands launched me
Aloft on the deep delirium of their skies:
Are these the fathomless nights of your sleep and exile,
Million of golden birds, oh Vigour to be?
Mais, vrai, j'ai trop pleuré. Les aubes sont navrantes,
Toute lune est atroce et tout soleil amer.
L'âcre amour m'a gonflé de torpeurs envirantes.
Oh! que ma quille éclate! Oh! que j'aille à la mer!
Si je désire une eau d'Europe, c'est la flache
Collected Poems in English and French Page 5