Robur-le-Conquerant

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Robur-le-Conquerant Page 18

by Jules Verne


  « Master Robur, dit-il, il me semble que la brise a quelque tendance à mollir, en gagnant dans l'ouest, il est vrai.

  - Et qu'indique le baromètre? demanda Robur, après avoir observé l'aspect du ciel.

  - Il est à peu près stationnaire, répondit le contremaître. Pourtant, il me semble que les nuages s'abaissent au-dessous de l' Albatros.

  - En effet, Tom Turner, et, dans ce cas, il ne serait pas impossible qu'il plût à la surface de la mer. Mais, pourvu que nous demeurions au-dessus de la zone des pluies, peu importe! Nous ne serons pas gênés dans l'achèvement de notre travail.

  - Si la pluie tombe, reprit Tom Turner, ce doit être une pluie fine - du moins la forme des nuages le fait supposer - et il est probable que, plus bas, la brise va calmir tout à fait.

  - Sans doute, Tom, répondit Robur. Néanmoins, il me semble préférable de ne pas redescendre encore. Achevons de réparer nos avaries et alors nous pourrons manuvrer à notre convenance. Tout est là. »

  A deux heures et quelques minutes, la première partie du travail était finie. L'hélice antérieure réinstallée, les piles qui l'actionnaient furent mises en activité. Le mouvement s accéléra peu à peu, et l'Albatros, évoluant cap au sud-ouest, revint avec une vitesse moyenne dans la direction de l'île Chatam.

  « Tom, dit Robur, il y a deux heures et demie environ que nous avons porté au nord-est. La brise n'a pas changé, ainsi que j'ai pu m'en assurer en observant le compas. Donc, j'estime qu'en une heure, au plus, nous pouvons retrouver les parages de l'île.

  - Je le crois aussi, master Robur, répondit le contremaître, car nous avançons a raison d'une douzaine de mètres par seconde. Entre trois et quatre heures du matin, l'Albatros aura regagné son point de départ.

  - Et ce sera tant mieux, Tom! répondit l'ingénieur. Nous avons intérêt à arriver de nuit et même à atterrir, sans avoir été vus. Les fugitifs, nous croyant loin dans le nord, ne se tiendront pas sur leurs gardes. Lorsque l'Albatros sera presque à ras de terre, nous essaierons de le cacher derrière quelques hautes roches de l'île. Puis, dussions-nous passer quelques jours à Chatam...

  - Nous les passerons, master Robur, et, quand nous devrions lutter contre une armée d'indigènes...

  - Nous lutterons, Tom, nous lutterons pour notre Albatros ! »

  L'ingénieur se retourna alors vers ses hommes qui attendaient de nouveaux ordres.

  « Mes amis, leur dit-il, l'heure n'est pas venue de se reposer. Il faut travailler jusqu'au jour. »

  Tous étaient prêts.

  Il s'agissait maintenant de recommencer pour le propulseur de l'arrière les réparations qui avaient été faites pour celui de l'avant. C'étaient les mêmes avaries, produites par la même cause, c'est-à-dire par la violence de l'ouragan pendant la traversée du continent antarctique.

  Mais, afin d'aider à rentrer cette hélice en dedans, il parut bon d'arrêter, pendant quelques minutes, la marche de l'aéronef et même de lui imprimer un mouvement rétrograde. Sur l'ordre de Robur, l'aide-mécanicien fit machine en arrière, en renversant la rotation de l'hélice antérieure. L'aéronef commença donc à « culer » doucement, pour employer une expression maritime.

  Tous se disposaient alors à se rendre à l'arrière, lorsque Tom Turner fut surpris par une singulière odeur.

  C'étaient les gaz de la mèche, accumulés maintenant dans le coffre, qui s'échappaient de la cabine des fugitifs.

  « Hein? fit le contremaître.

  - Qu'y a-t-il? demanda Robur.

  - Ne sentez-vous pas?... On dirait de la poudre qui brûle?

  - En effet, Tom!

  - Et cette odeur vient du dernier roufle!

  - Oui... de la cabine même...

  - Est-ce que ces misérables auraient mis le feu?...

  - Eh! si ne n'était que le feu ?... s'écria Robur. Enfonce la porte, Tom, enfonce la porte! »

  Mais le contremaître avait à peine fait un pas vers l'arrière, qu'une explosion formidable ébranla l'Albatros. Les roufles volèrent en éclats. Les fanaux s'éteignirent, car le courant électrique leur manqua subitement, et l'obscurité redevint complète. Cependant, si la plupart des hélices suspensives, tordues ou fracassées, étaient hors d'usage, quelques-unes, à la proue, n'avaient pas cessé de tourner.

  Soudain, la coque de l'aéronef s'ouvrit un peu en arrière du premier roufle, dont les accumulateurs actionnaient toujours le propulseur de l'avant, et la partie postérieure de la plate-forme culbuta dans l'espace.

  Presque aussitôt s'arrêtèrent les dernières hélices suspensives, et l'Albatros fut précipité vers l'abîme.

  C'était une chute de trois mille mètres pour les huit hommes, accrochés, comme des naufragés, à cette épave!

  En outre, cette chute allait être d'autant plus rapide que le propulseur de l'avant, après s'être redressé verticalement, fonctionnait encore!

  Ce fut alors que Robur, avec un à-propos qui dénotait un extraordinaire sang-froid, se laissant glisser jusqu'au roufle à demi disloqué, saisit le levier de mise en train, et changea le sens de la rotation de l'hélice qui, de propulsive qu'elle était, devint suspensive.

  Chute, assurément, bien qu'elle fût quelque peu retardée; mais, du moins, l'épave ne tomba pas avec cette vitesse croissante des corps abandonnés aux effets de la pesanteur. Et, si c'était toujours la mort pour les survivants de l'Albatros, puisqu'ils étaient précipités dans la mer, ce n'était plus la mort par asphyxie, au milieu d'un air que la rapidité de la descente eût rendu irrespirable.

  Quatre-vingts secondes au plus après l'explosion, ce qui restait de l'Albatros s'était abîmé dans les flots.

  XVII. Dans lequel on revient à deux mois en arrière et où l'on saute à neuf mois en avant.

  Quelques semaines auparavant, le 13 juin, au lendemain de cette séance pendant laquelle le WeldonInstitute s'était abandonné à de si orageuses discussions, il y avait eu dans toutes les classes de la population philadelphienne, noire ou blanche, une émotion plus facile à constater qu'à décrire.

  Déjà, aux premières heures de la matinée, les conversations portaient uniquement sur l'inattendu et scandaleux incident de la veille. Un intrus, qui se disait ingénieur, un ingénieur qui prétendait s'appeler de cet invraisemblable nom de Robur - Robur-le-Conquérant! - un personnage d'origine inconnue, de nationalité anonyme, s'était présenté inopinément dans la salle des séances, avait insulté les ballonistes, honni les dirigeurs d'aérostats, vanté les merveilles des appareils plus lourds que l'air, soulevé des huées au milieu d'un tumulte épouvantable, provoqué des menaces qu'il avait retournées contre ses adversaires. Enfin, après avoir abandonné la tribune dans le tapage des revolvers, il avait disparu, et, malgré toutes les recherches, on n'avait plus entendu parler de lui.

  Assurément, cela était bien fait pour exercer toutes les langues, enflammer toutes les imaginations. On ne s'en fit pas faute à Philadelphie, ni dans les trente-six autres Etats de l'Union, et, pour dire le vrai, aussi bien dans l'Ancien que dans le Nouveau Monde.

  Mais, de combien cet émoi fut dépassé, lorsque, le soir du 13 juin, il fut constant que ni le président ni le secrétaire du Weldon-Institute n'avaient reparu à leur domicile. Gens rangés pourtant, honorables et sages. La veille, ils avaient quitté la salle des séances en citoyens qui ne songent qu'à rentrer tranquillement chez eux, en célibataires dont aucun visage renfrogné n'accueillera le retour au logis. Ne se seraient-ils point absentés, par hasard? Non, ou du moins ils n'avaient rien dit qui pût le faire croire. Et même il avait été convenu que, le lendemain, ils reprendraient leur place au bureau du club, l'un comme président, l'autre comme secrétaire, en prévision d'une séance où seraient discutés les événements de la soirée précédente.

  Et non seulement, disparition complète de ces deux personnages considérables de l'Etat de Pennsylvanie, mais aucune nouvelle du valet Frycollin. Introuvable comme son maître. Non! jamais Nègre, depuis Toussaint Louverture, Soulouque et Dessaline, n'avait fait autant parler de lui. Il allait prendre une place impo
rtante, aussi bien parmi ses collègues de la domesticité philadelphienne que parmi tous ces originaux qu'une excentricité quelconque suffit à mettre en lumière dans ce beau pays d'Amérique.

  Le lendemain, rien de nouveau. Les deux collègues ni Frycollin n'ont point reparu. Sérieuse inquiétude. Commencement d'agitation. Foule nombreuse aux abords des Post and Telegraph offices, pour savoir s'il arriverait quelques nouvelles.

  Rien encore.

  Et, cependant, on les avait bien vus, tous les deux, sortir du Weldon-Institute, causer à voix haute, prendre Frycollin qui les attendait, puis descendre Walnut-Street et gagner du côté de Fairmont-Park.

  Jem Cip, le légumiste, avait même serré la main droite du président en lui disant :

  « A demain! »

  Et William T. Forbes, le fabricant de sucre de chiffons, avait reçu une cordiale poignée de Phil Evans, qui lui avait dit par deux fois :

  « Au revoir ! ... Au revoir !... »

  Miss Doll et Miss Mat Forbes, si attachées à Uncle Prudent par les liens de la plus pure amitié, ne pouvaient revenir de cette disparition, et, afin d'obtenir des nouvelles de l'absent, parlaient encore plus que d'habitude.

  Enfin, trois, quatre, cinq, six jours se passèrent, puis une semaine, deux semaines... Personne, et nul indice qui pût mettre sur la trace des trois disparus.

  On avait pourtant fait de minutieuses recherches dans tout le quartier... Rien! - Dans les rues qui aboutissent au port... Rien! - dans le parc même, sous les. grands bouquets d'arbres, au plus épais des taillis... Rien! Toujours rien!

  Toutefois, on reconnut que, sur la grande clairière, l'herbe avait été récemment foulée, et d'une façon qui sembla suspecte, puisqu'elle était inexplicable. A la lisière du bois qui l'entoure, des traces d'une lutte furent également relevées. Une bande de malfaiteurs avait-elle donc rencontré, puis attaqué les deux collègues, à cette heure avancée de la nuit, au milieu de ce parc désert?

  C'était possible. Aussi, la police procéda-t-elle à une enquête dans les formes et avec toute la lenteur légale. On fouilla la Schuylkill-river, on en racla le fond, on ébarba les rives de leur amas d'herbes. Et, si ce fut inutile, ce ne fut pas en pure perte, car la Schuylkill avait besoin d'un bon travail de faucardement. On le fit à cette occasion. Gens pratiques, les édiles de Philadelphie.

  Alors on en appela à la publicité des journaux. Des annonces, des réclamations, sinon des réclames, furent envoyées à toutes les feuilles démocratiques ou républicaines de l'Union, sans distinction de couleur. Le Daily Negro, journal spécial de la race noire, publia un portrait de Frycollin, d'après sa dernière photographie. Récompenses furent offertes, primes promises, à quiconque donnerait quelque nouvelle des trois absents, et même à tous ceux qui retrouveraient un indice quelconque de nature à mettre sur leurs traces.

  « Cinq mille dollars! Cinq mille dollars ! ... A tout citoyen qui... »

  Rien n'y fit. Les cinq mille dollars restèrent dans la caisse du Weldon-Institute.

  « Introuvables! Introuvables!! Introuvables!!! Uncle Prudent et Phil Evans de Philadelphie! »

  Il va sans dire que le club fut mis dans un singulier désarroi par cette inexplicable disparition de son président et de son secrétaire. Et, tout d'abord, l'assemblée prit d'urgence une mesure qui suspendait les travaux relatifs à la construction du ballon le Go a head, si avancés pourtant. Mais comment, en l'absence des principaux promoteurs de l'affaire, de ceux qui avaient voué à cette entreprise une partie de leur fortune en temps et monnaie, comment aurait-on pu vouloir achever l'uvre, quand ils n'étaient plus là pour la finir? Il convenait donc d'attendre.

  Or, précisément à cette époque, il fut de nouveau question de l'étrange phénomène, qui avait tant surexcité les esprits quelques semaines auparavant.

  En effet, l'objet mystérieux avait été revu ou plutôt entrevu à diverses reprises dans les hautes couches de l'atmosphère. Certes, personne ne songeait à établir une connexité entre cette réapparition si singulière et la disparition non moins inexplicable des deux membres du Weldon-Institute. En effet, il eût fallu une extraordinaire dose d'imagination pour rapprocher ces deux faits l'un de l'autre.

  Quoi qu'il en soit, l'astéroïde, le bolide, le monstre aérien, comme on voudra l'appeler, avait été réaperçu dans des conditions qui permettaient de mieux apprécier ses dimensions et sa forme. Au Canada, d'abord, au-dessus de ces territoires qui s'étendent d'Ottawa à Québec, et cela le lendemain même de la disparition des deux collègues; puis, plus tard, au-dessus des plaines du Far West, alors qu'il luttait de vitesse avec un train du grand chemin de fer du Pacifique.

  A partir de ce jour, les incertitudes du monde savant furent fixées. Ce corps n'était point un produit de la nature; c'était un appareil volant, avec application pratique de la théorie du « Plus lourd que l'air ». Et, si le créateur, le maître de cet aéronef voulait encore garder l'incognito pour sa personne, évidemment il n'y tenait plus pour sa machine, puisqu'il venait de la montrer de si près sur les territoires du Far West. Quant à la force mécanique dont il disposait, quant à la nature des engins qui lui communiquaient le mouvement, c'était l'inconnu. En tout cas, ce qui ne laissait aucun doute, c'est que cet aéronef devait être doué d'une extraordinaire faculté de locomotion. En effet, quelques jours après, il avait été signalé dans le Céleste Empire, puis sur la partie septentrionale de l'Indoustan, puis au-dessus des immenses steppes de la Russie.

  Quel était donc ce hardi mécanicien qui possédait une telle puissance de locomotion, pour lequel les Etats n'avaient plus de frontières ni les océans de limites, qui disposait de l'atmosphère terrestre comme d'un domaine? Devait-on penser que ce fût ce Robur, dont les théories avaient été si brutalement lancées à la face du Weldon-Institute, le jour où il vint battre en brèche cette utopie des ballons dirigeables?

  Peut-être quelques esprits perspicaces en eurent-ils la pensée. Mais - chose singulière assurément - personne ne songea à cette hypothèse que ledit Robur pût se rattacher en quoi que ce fût à la disparition du président et du secrétaire du Weldon-Institute.

  En somme, cela fût resté à l'état de mystère, sans une dépêche qui arriva de France en Amérique par le fil de New York, à onze heures trente-sept, dans la journée du 6 juillet.

  Et qu'apportait cette dépêche? C'était le texte du document trouvé à Paris dans une tabatière - document qui révélait ce qu'étaient devenus les deux personnages dont l'Union allait prendre le deuil.

  Ainsi donc, l'auteur de l'enlèvement c'était Robur, l'ingénieur venu tout exprès à Philadelphie pour écraser la théorie des ballonistes dans son uf! C'était lui qui montait l'aéronef Albatros! C'était lui qui, par représailles, avait enlevé Uncle Prudent, Phil Evans, et Frycollin par-dessus le marché! Et ces personnages, on devait les considérer comme à jamais perdus, à moins que, par un moyen quelconque, en construisant un engin capable de lutter avec le puissant appareil, leurs amis terrestres ne parvinssent à les ramener sur la terre!

  Quelle émotion! Quelle stupeur! Le télégramme parisien avait été adressé au bureau du Weldon-Institute. Les membres du club en eurent aussitôt connaissance. Dix minutes après, tout Philadelphie recevait la nouvelle par ses téléphones, puis, en moins d'une heure, toute l'Amérique, car elle s'était électriquement propagée sur les innombrables fils du nouveau continent. On n'y voulait pas croire, et rien n'était plus certain. Ce devait être une mystification de mauvais plaisant, disaient les uns, une « fumisterie » du plus mauvais goût, disaient les autres! Comment ce rapt eût-il pu s'accomplir à Philadelphie, et si secrètement? Comment cet Albatros avait-il atterri dans Fairmont-Park, sans que son apparition eût été signalée sur les horizons de l'Etat de Pennsylvanie?

  Très bien. C'étaient des arguments. Les incrédules avaient encore le droit de douter. Mais, ce droit, ils ne l'eurent plus, sept jours après l'arrivée du télégramme. Le 13 juillet, le paquebot français Normandie avait mouillé dans les eaux de l'Hudson, et il apportait la fameuse tabatière. Le
railway de New York l'expédia en toute hâte à Philadelphie.

  C'était bien la tabatière du président du Weldon-Institute. Jem Cip n'aurait pas mal fait, ce jour-là, de prendre une nourriture plus substantielle, car il faillit tomber en pâmoison, quand il la reconnut. Que de fois il y avait puisé la prise de l'amitié! Et Miss Doll et Miss Mat la reconnurent aussi, cette tabatière, qu'elles avaient si souvent regardée avec l'espoir d'y plonger, un jour, leurs maigres doigts de vieilles filles! Puis ce furent leur père, William T. Forbes, Truk Milnor, Bat T. Fyn et bien d'autres du Weldon-Institute! Cent fois ils l'avaient vue s'ouvrir et se refermer entre les mains de leur vénéré président. Enfin elle eut pour elle le témoignage de tous les amis que comptait Uncle Prudent dans cette bonne cité de Philadelphie, dont le nom indique - on ne saurait trop le répéter - que ses habitants s aiment comme des frères.

  Ainsi il n'était pas permis de conserver l'ombre d'un doute à cet égard. Non seulement la tabatière du président, mais l'écriture, tracée sur le document, ne permettaient plus aux incrédules de hocher la tête. Alors les lamentations commencèrent, les mains désespérées se levèrent vers le ciel. Uncle Prudent et son collègue, emportés dans un appareil volant, sans qu'on pût même entrevoir un moyen de les délivrer!

  La Compagnie du Niagara-Falls, dont Uncle Prudent était le plus gros actionnaire, faillit suspendre ses affaires et arrêter ses chutes. La Walton-Watch Company songea à liquider son usine à montres, maintenant qu'elle avait perdu son directeur, Phil Evans.

  Oui! ce fut un deuil général, et le mot deuil n'est pas exagéré, car à part quelques cerveaux brûlés comme il s'en rencontre même aux Etats-Unis, on n'espérait plus jamais revoir ces deux honorables citoyens.

  Cependant, après son passage au-dessus de Paris, on n'entendit plus parler de l'Albatros. Quelques heures plus tard, il avait été aperçu au-dessus de Rome, et c'était tout. Il ne faut pas s'en étonner, étant donné la vitesse avec laquelle l'aéronef avait traversé l'Europe du nord au sud, et la Méditerranée de l'ouest à l'est. Grâce à cette vitesse, aucune lunette n'avait pu le saisir sur un point quelconque de sa trajectoire. Tous les observatoires eurent beau mettre leur personnel à l'affût nuit et jour, la machine volante de Robur-le-Conquérant s'en était allée ou si loin ou si haut - en Icarie, comme il le disait - qu'on désespéra d'en jamais retrouver la trace.

 

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