by Jean M. Auel
Ayla eut un sourire de soulagement. Il était vraiment merveilleux, se disait-elle, d’avoir une amie qui la comprenait si vite.
— Les hermines sont aussi mauvaises que les gloutons, Deegie. Elles sont plus petites, c’est tout.
— Puis-je faire quelque chose pour t’aider ?
— Il nous reste encore de la viande rôtie. Elle pourrait nous être utile. Mais, d’abord, il faut trouver des traces... quand j’aurai ramassé assez de pierres.
Quand Ayla eut placé dans une bourse accrochée à sa ceinture un nombre suffisant de galets, elle ramassa sa sacoche, la jeta sur son épaule gauche. Après quoi, immobile, elle scruta le paysage, pour trouver le meilleur endroit où commencer sa quête. Deegie, près d’elle, un pas en arrière, attendait sa décision. Un peu comme si elle pensait tout haut, son amie se mit à lui parler d’une voix étouffée :
— Les belettes ne font pas de terriers. Elles se servent de ce qu’elles trouvent, même de celui d’un lapin... après en avoir tué les occupants. Il m’arrive de me dire qu’elles n’auraient pas besoin de terrier si elles n’avaient pas de petits. Et sans cesse, elles tuent, jour et nuit, même lorsqu’elles viennent de manger. Elles dévorent n’importe quoi, des écureuils, des lapins, des oiseaux, des œufs, des insectes, même de la viande pourrie, mais, la plupart du temps, elles tuent et mangent fraîche leur proie. Quand elles sont acculées, elles dégagent une odeur musquée, puante ; ce n’est pas un liquide qu’elles projettent, comme la mouffette, mais ça sent aussi mauvais. Et elles crient comme ça...
Ayla émit un son qui tenait le milieu entre le hurlement et le grognement.
— Pendant la saison de leurs Plaisirs, elles sifflent.
Deegie était frappée de stupeur. Elle venait d’en apprendre plus sur les belettes et les hermines qu’elle n’en avait jamais su de toute sa vie. Elle aurait même été incapable de dire si ces bêtes émettaient un son quelconque.
— Ce sont de bonnes mères, elles ont beaucoup de petits... deux mains...
Ayla prit le temps de retrouver le mot qui désignait le nombre en question.
— Dix, quelquefois plus. D’autres fois, quelques-uns seulement. Les jeunes restent avec la mère presque jusqu’à l’âge adulte.
Elle s’interrompit de nouveau, pour examiner les environs d’un œil critique.
— En cette période d’année, nichée peut encore être avec mère. Cherchons traces... près ronces, je crois.
Elle se dirigea vers le monticule de neige qui recouvrait plus ou moins la masse inextricable de ronces et de stolons qui poussaient à cet endroit depuis des années.
Deegie la suivit. Elle se demandait comment Ayla avait fait pour apprendre tant de choses, alors qu’elle n’était pas beaucoup plus âgée qu’elle. Elle avait remarqué quelques légères défaillances dans le langage d’Ayla – l’unique signe qui trahissait sa surexcitation. Deegie, du coup, avait pris plus nettement conscience de la perfection avec laquelle son amie s’exprimait maintenant. Elle parlait rarement très vite, mais son mamutoï était presque sans défaut, mise à part sa façon de prononcer certains sons. Peut-être ne perdrait-elle jamais cet accent... – Deegie l’espérait presque. Cela lui conférait une personnalité propre... et la rendait plus humaine.
— Cherche traces de pattes avec cinq doigts... parfois, on voit seulement quatre. Elles laissent les plus petites marques de tous les mangeurs de viande, et les pattes de derrière se placent dans les traces de pattes de devant.
Deegie demeurait un peu à l’écart : elle ne voulait pas gâter des foulées délicates. Ayla, à chacun de ses pas, scrutait longuement, minutieusement ce qui l’entourait : le sol couvert de neige, chaque mince tronc des bouleaux dénudés, les lourdes branches des sapins aux aiguilles noircies. Soudain, ses yeux interrompirent leur constante vigilance : elle avait aperçu quelque chose qui lui avait coupé le souffle. Très lentement, elle reposa son pied sur le sol, tandis que sa main cherchait dans le sac un gros morceau de bison rôti, saignant, le posait à terre, devant elle. Elle recula ensuite avec précaution, plongea les doigts dans la bourse pleine de galets.
Deegie, figée sur place portait son regard au-delà de sa compagne, elle cherchait à voir ce que voyait celle-ci. Finalement, elle surprit un mouvement. Ses yeux se fixèrent sur plusieurs petites formes blanches qui se dirigeaient tortueusement vers elles. Elles se déplaçaient avec une surprenante rapidité, tout en franchissant les tas de branches et de feuilles mortes, en grimpant aux arbres pour en redescendre aussitôt, en passant à travers les fourrés, en fouillant ou en contournant chaque trou, chaque crevasse et en dévorant tout ce qui se trouvait sur leur chemin.
Deegie n’avait encore jamais pris le temps d’étudier le comportement de ces petits carnivores voraces et elle les suivait d’un regard fasciné. De temps à autre, les hermines se dressaient sur leurs pattes de derrière, leurs petits yeux noirs et brillants aux aguets, les oreilles tendues au moindre bruit, mais toujours attirés par leur flair vers une proie infortunée.
Elles se faufilèrent à travers les nids des campagnols et des mulots, sous les racines des arbres où hibernaient tritons et grenouilles, elles se jetaient sur de jeunes oiseaux, trop paralysés par le froid, trop affamés pour s’envoler. La horde ravageuse de huit ou dix petites tueuses blanches se rapprochait. Leurs têtes se balançaient d’arrière en avant, leurs petits yeux noirs, pareils à des perles, brillaient de convoitise. Elles se jetaient avec une mortelle précision sur le cerveau, la nuque, la veine jugulaire. Elles frappaient sans le moindre scrupule. C’étaient les meurtriers les plus efficaces, les plus sanguinaires de tout le monde animal, et Deegie se sentit soudain heureuse de leur petite taille. Il n’existait, semblait-il, aucun motif à une destruction aussi gratuite, sinon le plaisir de tuer... peut-être aussi la nécessité d’alimenter sans cesse un corps perpétuellement en mouvement, dans toute la mesure prévue et voulue par la nature.
Attirées par le morceau de viande saignante, les hermines, sans hésitation, se mirent en devoir de le faire disparaître. Soudain, la confusion éclata dans le petit groupe. Des pierres lancées avec violence pleuvaient sur les petits animaux, en abattaient quelques-uns. L’odeur caractéristique du musc se répandait dans l’atmosphère. Deegie, trop absorbée dans sa contemplation des prédateurs, n’avait pas suivi les préparatifs minutieux d’Ayla et ses tirs rapides à la fronde.
A ce moment, un gros animal, sorti de nulle part, se retrouva d’un bond au beau milieu des hermines. Ayla stupéfaite, entendit un grondement menaçant. Le loup se jeta sur la tranche de bison, mais il fut tenu en respect par deux petites bêtes intrépides. Le carnivore au pelage noir eut un mouvement de recul, découvrit alors une hermine récemment mise hors d’état de nuire et s’en empara.
Mais Ayla n’était pas disposée à laisser le loup noir lui voler ses hermines : elle s’était donné trop de mal pour se les procurer. C’était elle qui les avait tuées, et elle avait besoin de leurs peaux pour la tunique blanche. Déjà, la petite bête blanche dans la gueule, le loup s’éloignait. Ayla se lança à sa poursuite. Les loups, eux aussi, mangeaient de la viande. Elle les avait étudiés de très près, du temps où elle apprenait à se servir d’une fronde. Et elle les comprenait. Sans interrompre sa course, elle ramassa une branche tombée. Un loup solitaire cédait généralement la place, devant une attaque déterminée. Celui-ci pourrait laisser tomber l’hermine.
S’il s’était agi d’une troupe de loups, ou même de deux individus seulement, elle n’aurait pas tenté un assaut aussi téméraire. Quand le loup noir fit une courte pause, afin d’assurer plus solidement sa prise sur l’hermine, Ayla se précipita sur lui, la branche haut levée pour lui en asséner un grand coup. Elle ne considérait pas la branche comme une arme bien efficace : elle voulait seulement effrayer l’animal, l’amener par la surprise à lâcher sa petite proie. Mais la surprise fut pour elle. Le loup laissa tomber l’hermine devant lui et, avec un grondement mauvais, menaçant, bondit vers la jeune femme.
La réaction immédiate de celle-ci fut pour
jeter la branche devant elle, afin de contenir l’attaquant. En elle, une subite poussée d’énergie lui conseillait de fuir. Mais la branche, fragilisée par le froid, se brisa lorsqu’elle la ramena en avant et heurta un arbre. Elle se retrouva avec, au poing, un simple tronçon. Le reste, cependant, avait frappé le loup en pleine tête. Ce fut assez pour retenir son élan : il avait bluffé, lui aussi, il n’avait pas bien envie d’attaquer. Il reprit dans sa gueule l’hermine morte, remonta la pente de l’étroite vallée boisée.
Ayla était sous le coup de la frayeur et de la colère, du choc aussi. Mais elle ne pouvait laisser l’hermine lui échapper ainsi. Une fois de plus, elle se lança à la poursuite du loup.
— Laisse-le partir ! lui cria Deegie. Tu en as bien assez ! Laisse celle-ci au loup !
Son amie ne l’entendit pas : son attention était ailleurs. Le loup se dirigeait vers une région à découvert, et elle le suivait de près. Elle plongea la main dans son petit sac à projectiles : il ne lui restait que deux pierres. Elle se mit à courir. Elle s’attendait à voir le loup lui échapper bientôt mais elle se sentait obligée de fournir encore un effort. Elle plaça un galet dans sa fronde, le projeta sur l’animal en fuite. Le second galet suivit de très près le premier, acheva l’ouvrage. Tous les deux avaient touché leur cible.
Ayla éprouva une vive satisfaction en voyant le loup s’effondrer. En voilà un qui ne lui volerait plus rien. Elle s’élança pour reprendre l’hermine, décida qu’elle pouvait tout aussi bien prendre la peau du gros carnivore. Cependant, lorsque Deegie la rejoignit, elle trouva son amie assise près du loup noir et de l’hermine blanche. Elle n’avait pas bougé. Son expression inquiéta Deegie.
— Qu’y a-t-il, Ayla ?
— J’aurais dû lui laisser emporter l’hermine. J’aurais dû comprendre qu’elle avait une bonne raison pour se jeter sur ce morceau de rôti que voulaient les hermines. Les loups connaissent bien la cruauté de ces petites bêtes, et, généralement, un loup solitaire battra en retraite sans attaquer, dans un lieu qui ne lui est pas familier. J’aurais dû lui abandonner cette hermine.
— Je ne comprends pas. Tu as retrouvé ton hermine et tu as aussi la peau d’un loup noir. Pourquoi dis-tu que tu aurais dû lui laisser l’hermine ?
Ayla désigna le ventre de la louve.
— Regarde. Elle allaitait. Elle a des petits.
— Il est encore bien tôt, non, pour qu’une louve mette bas ?
— Oui. Elle n’est pas en saison. Et c’est une solitaire. Voilà pourquoi elle avait tant de mal à trouver de quoi manger. C’est ce qui l’a poussée à vouloir prendre la viande et, ensuite, l’hermine. Regarde ses côtes. Ses petits l’ont épuisée. Elle n’a plus que la peau sur les os. Si elle vivait avec une troupe, les autres l’auraient aidée à nourrir ses petits. Mais, si elle vivait avec une troupe, elle n’aurait pas eu de petits. Le plus souvent, seule la femelle qui mène la meute en a, et cette louve n’a pas la couleur qui convient. Les loups sont accoutumés à certaines couleurs, à certaines marques. Elle, elle est comme la louve blanche que j’observais, dans le temps, quand j’apprenais à les connaître. Les autres ne l’aimaient pas non plus. Elle cherchait sans cesse à faire des avances au loup et à la louve qui menaient la meute, mais ils ne voulaient pas d’elle. Quand les autres sont devenus trop nombreux, elle est partie. Peut-être en a-t-elle eu assez de n’être aimée de personne.
Ayla baissa les yeux sur la louve noire.
— Celle-ci a fait comme elle. Peut-être est-ce ce qui l’a poussée à avoir des petits : elle était trop seule. Mais elle n’aurait pas pu les avoir si tôt. A mon avis, Deegie, c’est la même louve noire que j’ai vue, quand nous chassions le bison. Elle a dû quitter sa troupe pour se mettre à la recherche d’un mâle solitaire et former avec lui une nouvelle troupe. C’est comme ça qu’elles se forment. Mais c’est toujours plus difficile pour les solitaires. Les loups aiment chasser ensemble et ils s’aident les uns les autres. Le mâle dominant aide toujours la femelle dominante à élever ses petits. Je voudrais que tu les voies, parfois : ils aiment jouer avec les louveteaux. Mais où est le mâle de celle-ci ? En a-t-elle même trouvé un ? Est-il mort ?
Deegie eut la surprise de voir dans les yeux d’Ayla des larmes retenues... pour une louve morte.
— Ils finissent tous par mourir, Ayla. Nous retournons tous à la Mère.
— Je le sais bien, Deegie. Mais elle, d’abord, elle était différente des autres et, ensuite, elle s’est retrouvée seule. Elle aurait dû avoir droit à quelque chose, dans sa vie : un compagnon, une troupe pour l’entourer, quelques petits au moins.
Deegie commençait à comprendre pourquoi son amie manifestait une émotion aussi violente pour une vieille louve noire et décharnée : elle se mettait à la place de l’animal.
— Mais elle a eu des petits, Ayla.
— Et maintenant, ils vont mourir, eux aussi. Ils n’ont pas de troupe autour d’eux. Pas même un mâle dominant. Sans leur mère, ils vont mourir.
Ayla, brusquement, sauta sur ses pieds.
— Je ne vais pas les laisser mourir :
— Comment ça ? Où vas-tu ?
— Je vais les trouver. Je vais suivre les traces de la louve noire jusqu’à sa tanière.
— Ça pourrait être dangereux. Il y a peut-être d’autres loups dans les environs. Comment peux-tu être sûre que non ?
— J’en suis sûre, Deegie. Il me suffit de la regarder.
— Eh bien, si je ne peux pas te faire changer d’avis, je n’ai qu’une chose à te dire, Ayla.
— Quoi ?
— Si tu t’attends à me voir arpenter toute la région avec toi, à la recherche de traces de loup, tu peux porter toi-même tes hermines. Deegie fit tomber de son sac cinq petits cadavres blancs.
— Moi, j’ai bien assez à porter avec mes renards.
Le grand sourire de Deegie exprimait un pur ravissement. Ayla, en réponse, lui sourit avec une chaleureuse affection.
— Oh, Deegie, tu les as apportées jusqu’ici !
Dans un grand élan d’amitié, les deux jeunes femmes s’étreignirent.
— Un fait est certain, Ayla : on ne s’ennuie jamais en ta compagnie !
Deegie aidait Ayla à ranger les hermines dans son sac.
— Que vas-tu faire de cette louve ? Si nous ne la prenons pas, quelqu’un d’autre s’en chargera et une peau de loup noir, ce n’est pas courant.
— J’aimerais l’emporter, mais je dois d’abord retrouver ses petits.
— Très bien, je vais la porter, déclara Deegie.
Elle hissa sur son épaule le corps inerte.
— Si nous en avons le temps, tout à l’heure, je l’écorcherai.
Sur le point de poser une autre question, elle se ravisa. Elle saurait bien assez tôt ce que son amie voulait faire, si elle découvrait des louveteaux encore vivants.
Elles durent regagner la petite vallée pour trouver les traces qui les guideraient. Connaissant la précarité des vies qu’elle laissait sans défense derrière elle, la louve avait consciencieusement brouillé sa piste. A plusieurs reprises, Deegie, bien entraînée pourtant, elle aussi, fut convaincue qu’elles l’avaient perdue. Mais Ayla, poussée par son désir d’arriver au but, finissait toujours par la retrouver. Quand elles parvinrent enfin à l’endroit où, elle en était sûre, se trouvait la tanière, la position du soleil montrait que l’après-midi s’avançait.
— Je dois être franche, Ayla : je ne vois pas signe de vie.
— Il doit en être ainsi, s’ils sont seuls. S’ils donnaient signe de vie, ce serait provoquer le danger.
— Tu as peut-être raison, mais s’il y a vraiment des louveteaux là-dedans, comment vas-tu les faire sortir ?
— Je n’ai qu’un seul moyen, je pense. Je serai obligée d’aller les chercher.
— Tu ne vas pas faire ça, Ayla ! C’est très bien d’observer des loups à bonne distance, mais on ne peut pas s’introduire dans leur tanière. Si les louveteaux n’étaient pas seuls ? Il pourrait y avoir un autre adulte avec eux.
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— As-tu vu d’autres traces de loup adulte, en dehors de celles de la mère ?
— Non, mais je n’aime pas cette idée de pénétrer dans la tanière d’un loup.
— Je ne suis pas venue si loin pour m’en aller sans savoir s’il y a des louveteaux. Il faut que j’y aille, Deegie.
Ayla posa son sac, se dirigea vers l’étroit trou noir qui s’ouvrait dans la terre. Il s’agissait d’un vieux repaire, abandonné depuis longtemps parce que le site n’était pas des plus favorables. C’était ce que la louve noire avait pu trouver de mieux, après la mort, dans un combat, du vieux loup solitaire qu’avaient attiré ses chaleurs prématurées.
Ayla se mit sur le ventre, entreprit de se faufiler dans l’ouverture. Attends, Ayla ! lui cria Deegie. Tiens, prends mon couteau.
La jeune femme hocha la tête, prit le couteau entre ses dents et se glissa dans le trou. Au début, la galerie descendait, et le passage était étroit. Elle se sentit soudain bloquée, dut revenir en arrière.
— Nous ferions mieux de partir, Ayla. Il se fait tard, et tu ne peux pas entrer là-dedans, tu ne peux pas.
Ayla enleva sa pelisse.
— Il n’est pas question de renoncer, dit-elle. Je passerai.
Le froid la fit frissonner jusqu’au moment où elle se retrouva dans la tanière. Elle eut du mal à se glisser dans la première partie du tunnel, là où il descendait. Près du fond, il devenait horizontal, et elle avait un peu plus de place, mais la tanière semblait déserte. Son corps empêchait encore la lumière de pénétrer, et il lui fallut un moment pour adapter sa vision à l’obscurité. Elle allait repartir à reculons, quand elle cru entendre un bruit.
— Loup, petit loup, tu es là ? demanda-t-elle.
Elle se rappela alors les nombreuses occasions où elle avait épié et écouté les loups. Elle émit un petit gémissement suppliant, tendit l’oreille. De l’endroit le plus reculé, le plus obscur de la tanière lui parvint une plainte presque imperceptible, et elle faillit pousser un cri de joie.
Péniblement, elle se rapprocha encore de l’origine du bruit, fit entendre de nouveau le même gémissement. La réponse fut plus proche. Elle distingua deux yeux brillants, mais, lorsqu’elle tendit la main vers le louveteau, il recula, émit un petit grondement, et elle sentit des dents aiguës s’enfoncer dans sa main.