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TENTATION Page 23

by Stephenie Meyer


  Cette nuit-là, j'eus droit à un rêve tout neuf. La pluie tombait dru, et Jacob marchait à mon côté, sans bruit, alors que mes pieds donnaient l'impression que je foulais du gravier. Ce n'était pas mon Jacob. C'était le nouveau, gracieux et amer. La souplesse de sa démarche me rappelant quelqu'un, je le regardai. Alors, il se mit à changer. Sa peau cuivrée pâlit, son visage prenant une blancheur d'ossements ; ses yeux virèrent à l'or, puis au cramoisi, au noir et derechef à l'or ; ses cheveux ras s'allongèrent et se tordirent sous l'effet du vent, prenant une couleur bronze là où la brise les effleurait ; ses traits devinrent si beaux qu'ils me brisèrent le cœur. Je tendis la main vers lui, mais il recula en levant les mains en bouclier. Edward disparut.

  Lorsque je me réveillai dans l'obscurité, je ne sus si je venais de me mettre à pleurer ou si mes larmes avaient coulé depuis que je m'étais assoupie. Je contemplai le plafond sombre. Nous étions au milieu de la nuit ; j'étais dans un demi-sommeil. Refermant les paupières, j'en appelai à une inconscience sans cauchemar.

  C'est alors que je perçus le bruit qui, dès le départ, avait dû me réveiller. Quelque chose griffait ma fenêtre avec un crissement aigu, comme des ongles grattant un carreau.

  12

  LE VISITEUR

  Terrorisée, j'ouvris les yeux en grand, bien que je fusse si épuisée et confuse que je n'étais pas certaine d'être éveillée ou endormie.

  De nouveau, on gratta à ma croisée, et le grincement haut perché retentit derechef. Ahurie et rendue encore plus maladroite par le sommeil, je titubai du lit à la fenêtre, battant des cils pour chasser mes larmes. Une énorme masse sombre tanguait de l'autre côté de la vitre, roulant et tanguant vers moi comme si elle s'apprêtait à fracasser le carreau. Horrifiée, je reculai, un hurlement au bord des lèvres.

  Victoria ! Elle était venue me chercher. J'étais finie.

  Charlie ! Non ! Pas lui !

  Je ravalai mon cri — j'allais devoir endurer la mort en silence. En aucun cas mon père ne devait débarquer dans ma chambre...

  Soudain, une voix feutrée familière s'échappa de la silhouette noire.

  — Bella ! Ouille ! Nom d'une pipe, ouvre cette fichue fenêtre ! Aïe !

  Il me fallut deux secondes pour surmonter ma peur. Puis je me précipitai à la fenêtre et l'ouvris. Une lueur provenait des nuages, vague mais suffisante pour que je distingue les formes.

  — Qu'est-ce que tu fiches ici ? balbutiai-je en identifiant Jacob.

  Il était dangereusement perché au sommet de l'épicéa qui poussait au milieu du petit jardin de devant. Sous son poids, l'arbre penchait en direction de la maison, et l'acrobate se balançait à six mètres du sol. Les rameaux de la cime raclèrent une nouvelle fois la façade, déclenchant le crissement qui m'avait alertée.

  — J'essaie de... tenir... ma promesse, haleta Jacob en agitant les jambes pour tenter de garder l'équilibre.

  Je clignai des yeux, persuadée de rêver.

  — Quand as-tu promis de te tuer en tombant d'un arbre ?

  — Écarte-toi, m'ordonna-t-il, guère amusé par ma repartie.

  — Quoi ?

  Il se balança d'avant en arrière afin d'accentuer ses oscillations.

  — Non, Jake ! protestai-je en comprenant ce qu'il avait en tête.

  Trop tard ! Je fus obligée de me jeter sur le côté car, avec un grognement, il bondit vers ma croisée ouverte. J'étouffai un deuxième piaillement, persuadée qu'il allait s'écraser au sol et se rompre le cou, ou du moins s'estropier en se fracassant contre les montants en bois de la fenêtre mais, à ma grande surprise, il voltigea adroitement dans ma chambre et atterrit sur la plante des pieds, presque sans bruit.

  Tous deux nous tournâmes automatiquement vers la porte en retenant notre souffle, attendant de voir si l'agitation avait réveillé Charlie. Au bout d'un court moment, nous perçûmes un ronflement ténu de l'autre côté du couloir. Un immense sourire fendit le visage de Jacob, visiblement très content de lui-même. Ce n'était pas le sourire que je connaissais et aimais, plutôt une parodie amère de la sincérité d'autrefois, sur ce visage qui appartenait dorénavant à Sam.

  C'en fut trop. Je m'étais endormie en pleurs à cause de ce garçon. En me rejetant sans ménagement, il avait créé un deuxième trou dans ce qu'il restait de ma poitrine, il avait donné naissance à un cauchemar tout neuf, comme une plaie s'infecte, l'insulte après le coup porté. Et voilà qu'il déboulait chez moi, rigolard, à croire qu'il ne s'était rien produit. Pire, en dépit du bruit et de la maladresse, sa subite apparition me rappelait l'habitude qu'avait eue Edward de se glisser par ma fenêtre la nuit, un souvenir qui était du sel sur mes blessures purulentes. Ajoutons à cela que j'étais crevée. Bref, je n'étais pas d'humeur charmante.

  — Fiche le camp ! sifflai-je en insufflant autant de venin que possible dans mon ordre.

  Il cilla, surpris, protesta.

  — Non ! Je suis venu m'excuser.

  — Je n'en veux pas, de tes excuses.

  Je tentai de le repousser dehors — si je rêvais, il ne risquait pas grand-chose, n'est-ce pas ? Sans résultat, car il ne broncha pas d'un millimètre. Je cessai de le toucher, reculai d'un pas. Il était torse nu, bien que l'air s'engouffrant de l'extérieur fût assez froid pour que je frissonne. Le contact de mes mains sur sa peau m'avait mise mal à l'aise. Il irradiait la chaleur, comme la fois où j'avais effleuré son front, dans la voiture. Comme s'il était encore fiévreux. Pourtant, il n'avait pas l'air malade. Immense, plutôt. Il se pencha vers moi, si grand qu'il cacha la vitre. Mon courroux l'étonnait.

  Tout à coup, je flanchai. On aurait dit que toutes mes nuits d'insomnie me tombaient dessus en même temps, et la fatigue s'empara de moi si brutalement que je faillis m'écrouler sur place. Je tanguai, luttant pour garder les yeux ouverts.

  — Bella ? chuchota Jacob anxieusement.

  Je titubai, et il me prit par le coude pour me ramener près du lit. Mes jambes se dérobèrent sous moi, et je m'affalai comme une chiffe sur le matelas.

  — Hé, ça va ? demanda Jacob, le front plissé par l'inquiétude.

  Je levai la tête vers lui, les joues encore mouillées de larmes.

  — Explique-moi un peu pourquoi ça irait, Jake !

  Sur son visage, l'angoisse céda la place à l'amertume.

  — Ben..., commença-t-il en aspirant profondément. Flûte ! Ben... je... je suis désolé, Bella.

  Il était sincère, aucun doute, même si la colère le possédait encore.

  — Pourquoi es-tu revenu ? Je n'ai rien à faire de tes excuses, Jacob.

  — Je sais, murmura-t-il. Mais je ne pouvais pas laisser les choses en l'état. C'était affreux, cet après-midi, je regrette.

  — Je n'y comprends rien.

  — Ça ne m'étonne pas. Laisse-moi t'expliquer...

  Il s'interrompit soudain, bouche ouverte, comme si quelqu'un avait coupé le son. Puis il respira, et reprit, cédant de nouveau à l'irritation.

  — Malheureusement, je n'en ai pas le droit. J'aimerais tant...

  J'enfouis ma tête dans mes mains.

  — Pourquoi ? gémis-je.

  Il ne répondit pas tout de suite. J'écartai légèrement mes doigts et découvris, décontenancée, qu'il avait les yeux à demi fermés, les mâchoires serrées, les sourcils froncés.

  — Que se passe-t-il ? insistai-je.

  Il souffla, et je me rendis compte qu'il avait retenu sa respiration.

  — Je n'y arrive pas, marmonna-t-il, frustré.

  — Tu n'arrives pas à quoi ?

  Il ignora ma question.

  — Dis-moi, Bella, t'a-t-on déjà confié un secret que tu n'avais le droit de répéter à personne ?

  Il souleva les paupières, me fixa d'un air entendu. Je pensai immédiatement aux Cullen, priant pour que ma culpabilité ne soit pas trop discernable.

  — Une chose dont tu sentais qu'il fallait éviter que Charlie ou ta mère l'apprennent ? précisa-t-il. Dont tu n'aurais parlé à personne, même pas à moi ? Même aujourd'hui ?

  Je gardai le s
ilence, tout en sachant qu'il le prendrait pour un aveu.

  — Acceptes-tu d'admettre que je suis... dans une situation identique ? Parfois, la loyauté t'empêche d'agir comme tu le voudrais. Parfois, ce secret, il ne t'appartient pas de le dévoiler.

  Bien. Il me coupait l'herbe sous le pied, là. Car il avait parfaitement raison — je détenais une vérité que je n'étais pas libre de dévoiler, que je me sentais obligée de protéger. Dont Jacob, cependant, semblait ne plus rien ignorer, soudain. Toutefois, je ne voyais pas en quoi mes mystères le concernaient, pas plus que Sam ou Billy d'ailleurs. Et puis, en quoi cela les gênait-il, maintenant que les Cullen étaient partis ?

  — J'ignore pourquoi tu es ici, Jake, si c'est pour me poser des devinettes au lieu de m'apporter des éclaircissements.

  — Excuse-moi. Je voudrais vraiment pouvoir t'expliquer.

  Longtemps, nous nous observâmes dans l'obscurité, aussi moroses l'un que l'autre.

  — Ce qui me tue, reprit-il brusquement, c'est que tu sais. Je t'ai déjà tout dit !

  — Pardon ?

  Il respira un bon coup et se pencha vers moi ; son tourment laissa place à une intensité incendiaire. Lorsqu'il ouvrit la bouche, son haleine était aussi brûlante que sa peau.

  — Tu es au courant, Bella ! Il m'est certes défendu de te parler, mais toi, il suffirait que tu devines pour nous sortir de cette impasse.

  — Deviner ? Quoi donc ?

  — Mon secret. Tu peux le faire. Parce que tu le connais déjà.

  Je tentai de m'éclaircir les idées. J'étais épuisée, et plus rien n'avait de sens. Constatant que je ne captais pas, Jacob réfléchit.

  — Attends, marmonna-t-il, je vais trouver un moyen de t'aider.

  Je ne comprenais pas du tout ce qu'il mijotait, mais ça ne devait pas être facile, car il haletait.

  — Pardon ? marmonnai-je en luttant pour rester éveillée.

  — Et si je te donnais des indices ?

  Il prit mon visage entre ses paumes immenses et trop chaudes et l'amena à quelques centimètres du sien. Il plongea son regard dans le mien, comme s'il cherchait à me passer un message au-delà de ses mots.

  — Souviens-toi de notre première rencontre. Sur la plage de La Push. Tu y es ?

  — Oui.

  — Décris-la-moi.

  J'hésitai, concentrée.

  — Tu m'as interrogée sur la Chevrolet...

  Il acquiesça.

  — Tu as mentionné la Golf...

  — Continue.

  — Nous sommes partis nous balader sur la plage...

  Mes joues se réchauffaient, entre ses mains, ce dont il n'avait sûrement pas conscience, vu la température de son corps. Je l'avais invité à se promener, flirtant avec lui de façon inepte mais efficace, car je voulais lui soutirer des informations.

  — Tu m'as raconté des histoires effrayantes..., poursuivis-je dans un souffle. Des légendes quileutes.

  — Oui, s'exclama-t-il avec ferveur. C'est ça ! Rappelle-toi !

  Malgré la pénombre, il dut me voir rougir. Comment aurais-je pu oublier ? Sans le vouloir, Jacob m'avait appris tout ce que j'avais eu besoin de savoir ce jour-là, en confirmant mes soupçons — Edward était un vampire.

  — Concentre-toi, me pressa-t-il en me vrillant de ses iris qui avaient perdu leur innocence.

  — Je me souviens.

  — Mais te souviens-tu de toutes les hist...

  Soudain, il ouvrit la bouche en grand, coupé dans son élan, comme si quelque chose obstruait sa gorge.

  — Toutes les histoires ? terminai-je à sa place.

  Muet, il opina. Mon cerveau était en ébullition. Seul un de ses récits avait réellement compté, pour moi. Il avait commencé par d'autres, mais ce prélude sans importance était flou, dans mon esprit fatigué. Je secouai la tête. Exaspéré, Jacob sauta du lit. Il appuya ses poings contre son front, se mit à respirer à petits coups rapides et furieux.

  — Tu le sais, tu le sais, marmonna-t-il pour lui-même.

  — Jake ? S'il te plaît, Jake, je n'en peux plus. Je ne suis bonne à rien, à cette heure. Peut-être que demain...

  — ... ça te reviendra. Je crois deviner pourquoi tu n'as retenu qu'une légende, ajouta-t-il aigrement avant de se rasseoir près de moi. M'autorises-tu à te poser une question à ce sujet ? Ça m'a toujours intrigué.

  — Quel sujet ?

  — Les vampires.

  Interdite, je le dévisageai. Sans attendre ma réponse, il enchaîna.

  — Franchement, tu ne te doutais de rien ? C'est vraiment moi qui t'ai révélé ce qu'il était ?

  Comment savait-il ? Et pourquoi s'était-il brusquement décidé à croire à ce qu'il avait condamné comme des contes de bonne femme ? Serrant les dents, je le fusillai du regard, bien décidée à ne pas parler. Il comprit.

  — Tu vois maintenant ce que j'ai voulu dire en parlant de loyauté ? murmura-t-il. Pour moi, c'est pareil, en pire. Tu n'imagines même pas à quel point je suis prisonnier...

  Il ferma les yeux comme s'il souffrait physiquement. J'en fus effarée. Plus même, j'eus une bouffée de haine. Je détestais qu'il eût mal. Qu'on lui fît mal — l'image de Sam s'imposa à moi. Au moins, moi, j'étais volontaire ; je protégeais le secret des Cullen par amour ; un amour non partagé mais authentique. Jacob, lui, semblait être dans une situation très différente.

  — Tu n'as aucun moyen de te libérer ? chuchotai-je en effleurant les picots de sa nuque tondue.

  Ses mains se mirent à trembler.

  — Non, chuchota-t-il, les paupières toujours closes. Je suis lié à vie. Condamné à perpétuité. Plus, peut-être, ajouta-t-il avec un rire sans joie.

  — Oh ! geignis-je. Et si nous nous sauvions ? Juste toi et moi ? Si nous quittions cet endroit et laissions Sam derrière nous ?

  — Il ne s'agit pas d'une chose que je peux fuir, Bella. Et pourtant, si j'en avais le loisir, je partirais avec toi. (Ses épaules aussi tremblaient, à présent.) Écoute, soupira-t-il, il faut que je m'en aille.

  — Pourquoi ?

  — Premièrement, parce que j'ai l'impression que tu vas tomber dans les pommes d'un instant à l'autre. Tu as besoin de dormir. Et moi, j'ai besoin que tu disposes de toutes tes capacités de réflexion pour deviner.

  — Et deuxièmement ?

  — Parce que je suis venu en douce. Je ne suis pas censé te rencontrer. Ils risquent de s'interroger. Je vais être obligé de leur avouer la vérité, j'imagine.

  — Tu n'as pas à tout leur dire ! m'insurgeai-je.

  — Quand bien même, je le ferai.

  — Je les hais ! marmonnai-je, furibonde.

  Jacob rouvrit les yeux et me contempla avec surprise.

  — Non, Bella, ne leur en veux pas. Ce n'est pas la faute de Sam. Ce n'est la faute de personne. Je te l'ai déjà dit... c'est moi. En fait, Sam... eh bien, il est vraiment supercool. Jared et Paul sont chouettes aussi. Paul est un peu... Quant à Embry, il a toujours été mon ami. Là-dessus, rien n'a changé. C'est même la seule chose qui n'a pas changé. Je regrette la mauvaise opinion que j'ai pu avoir de Sam autrefois...

  « Supercool », le Sam ? Je regardai Jacob avec ébahissement, mais jugeai inutile de protester.

  — Alors pourquoi ne t'autorise-t-il pas à me fréquenter ?

  — Parce que c'est dangereux, souffla-t-il en baissant la tête.

  Un frisson de frayeur me parcourut. Était-il également au courant de cela ? Je pensais être la seule. Mais il avait raison. Nous étions au beau milieu de la nuit, l'heure idéale pour chasser. Jacob n'aurait pas dû se trouver dans ma chambre. Si un tueur surgissait, il fallait que je sois isolée.

  — N'empêche, reprit-il à voix basse, si j'avais estimé que c'était trop... risqué, je ne serais pas venu. Je t'ai fait une promesse, Bella. Je ne me doutais pas qu'elle serait si difficile à tenir, mais j'ai bien l'intention d'essayer de la respecter.

  Remarquant que je ne comprenais pas l'allusion, il s'expliqua.

  — Après ce film idiot, je t'ai juré que je ne te ferai jamais de mal... Or, cet ap
rès-midi, le moins que l'on puisse dire, c'est que j'ai trahi ma parole.

  — Ne t'inquiète pas, j'ai compris que c'était malgré toi.

  Il s'empara de ma main.

  — Merci, Bella. Je vais m'arranger afin d'être là pour toi, comme je te l'ai promis.

  Il sourit, soudain, d'un sourire qui n'appartenait pas à mon Jacob ni à celui de Sam, plutôt un drôle de mélange des deux.

  — Toutefois, ça m'aiderait beaucoup si tu devinais mon secret toute seule. S'il te plaît.

  — D'accord, répondis-je mollement.

  — De mon côté, je tâcherai de revenir, même si eux, bien sûr, feront tout pour m'en empêcher.

  — Ne les écoute pas.

  — J'essayerai, marmotta-il en secouant la tête comme s'il doutait de sa réussite en la matière. Et toi, dès que tu auras compris, passe me l'annoncer. Enfin, seulement si tu en as envie.

  Tout à coup, il paraissait avoir songé à un détail déplaisant, et ses mains se remirent à trembler.

  — Pour quelle raison n'en aurais-je pas envie ?

  Il avait également retrouvé le visage sombre qui appartenait à Sam.

  — J'en vois au moins une, lâcha-t-il d'un ton sec. Je me sauve. Tu me rendrais service ?

  J'acquiesçai, médusée par son brusque changement d'attitude.

  — Si tu ne veux pas me revoir, au moins appelle-moi. Que je sache à quoi m'en tenir.

  — Ça n'arrivera pas...

  — Préviens-moi, c'est tout, me coupa-t-il.

  Il se leva, s'approcha de la fenêtre.

  — Ne sois pas idiot, Jake, tu vas te casser une jambe. Passe par la porte, Charlie dort.

  — Je ne risque rien, objecta-t-il.

  Il se tourna néanmoins vers la porte. En passant devant moi, il hésita, les traits empreints d'une expression de souffrance aiguë. Il tendit la main en un geste suppliant. Je la pris et, soudain, il m'attira à lui, si brutalement que je rebondis contre son torse.

  — Juste au cas où, chuchota-t-il dans mes cheveux en me serrant très fort, à me rompre les côtes.

  — Je... j'étouffe ! haletai-je.

  Il me relâcha aussitôt, tout en me retenant par la taille. Puis il me repoussa doucement vers le lit.

 

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