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LE GRAND VOYAGE

Page 29

by Jean M. Auel


  Si Serenio était vraiment enceinte à mon départ, et si elle a eu un autre enfant, est-il le fruit de mes entrailles ? Est-il... mon... mon fils ? C’est ce que prétend Ayla. Non, c’est impossible. Les hommes n’ont pas d’enfants, à moins que la Grande Mère n’en fabrique un avec l’esprit d’un homme. Serait-il l’enfant de mon esprit ?

  Lorsque nous arriverons chez les Sharamudoï, je pourrai au moins m’assurer qu’elle a bien eu cet enfant. Comment réagira Ayla, si l’enfant de Serenio est, en quelque sorte, une parcelle de moi ? Qu’est-ce que Serenio pensera d’Ayla ? Et Ayla, que pensera-t-elle de Serenio ?

  13

  Le lendemain, la chaleur était moins étouffante, mais Ayla avait hâte de partir. Elle fit jaillir des étincelles de son silex en espérant que le feu prendrait vite. La nourriture qu’elle avait préparée la veille et de l’eau auraient suffi pour leur déjeuner, et tout en pensant aux Plaisirs qu’elle avait partagés avec Jondalar, le remède miracle d’Iza commença à lui peser. Si elle ne buvait pas son infusion, peut-être s’apercevrait-elle qu’un bébé grandissait dans son ventre. Mais Jondalar redoutait tant qu’elle fût enceinte pendant le Voyage qu’il était préférable de prendre sa tisane.

  La jeune femme ignorait comment le remède agissait. Ce qu’elle savait, c’est qu’en buvant chaque matin quelques gorgées amères de la puissante décoction de fils d’or entre ses périodes lunaires, ainsi qu’un petit bol de sauge pendant celles-ci, elle ne serait jamais enceinte.

  S’occuper d’un bébé pendant le Voyage ne serait pas si difficile, mais elle avait peur d’accoucher seule. Que serait-il advenu si Iza ne l’avait pas aidée quand elle avait donné le jour à Durc ?

  Ayla écrasa un moustique, et en attendant que l’eau bouillît, elle vérifia la quantité d’herbe restante. Elle constata avec soulagement qu’il y en avait suffisamment pour attendre la sortie des marais. Ces plantes ne poussaient que sur des terrains secs, et de préférence montagneux. En palpant les différentes bourses et petits paquets de plantes médicinales, elle s’aperçut qu’il lui en restait assez en cas d’urgence, bien qu’elle eût préféré remplacer celles de la dernière récolte par de plus fraîches. Heureusement, elle n’avait pas eu à piocher dans sa réserve.

  Ils venaient à peine de reprendre leur route en direction du couchant qu’ils furent arrêtés par un assez large cours d’eau. Jondalar détacha les paniers de charge accrochés aux flancs de Rapide, les entreposa dans le canot, et se mit à étudier la rivière. Elle coulait dans le même sens que la Grande Mère et s’y jetait en formant un angle aigu.

  — Ayla, tu as vu comment cet affluent se jette dans la Mère ? Il fonce droit au milieu et s’y mélange sans provoquer de remous. Je suis sûr que c’est de là que vient le courant qui nous a emportés hier.

  — Oui, je crois que tu as raison. Tu aimes comprendre le pourquoi de choses, n’est-ce pas ? demanda-t-elle en souriant.

  — Enfin, l’eau ne se met pas à couler rapidement sans raison ! Il fallait bien trouver une explication.

  — Et tu l’as trouvée.

  Après qu’ils eurent traversé l’affluent, Ayla s’aperçut avec grand plaisir que Jondalar était de bonne humeur. Et elle était soulagée que Loup les suivît plutôt que de partir dans d’interminables explorations. Même les chevaux semblaient contents. Le repos leur avait fait du bien. Ayla était tonifiée et reposée, elle aussi, et, peut-être parce qu’elle venait de vérifier ses réserves de plantes médicinales, elle était très attentive à la flore qu’ils rencontraient, ainsi qu’à la faune. Les changements, aussi subtils fussent-ils, ne lui échappaient pas.

  Les oiseaux constituaient toujours la forme de vie sauvage dominante, la famille du héron étant la mieux représentée. Mais les autres espèces abondaient. D’immenses volées de pélicans et de cygnes muets tournoyaient au-dessus de leur tête, ainsi que différentes sortes de rapaces, tels les milans noirs, les pygargues, les bondrées et les faucons hobereaux. Ayla vit bon nombre de petits oiseaux, sautillant, voletant, pépiant, fiers de leurs habits de lumière : rossignols et fauvettes, fauvettes à tête noire, gobe-mouches nains ou bruns, merles à tête d’or, etc.

  Il y avait beaucoup de butors nains dans le delta, mais forts de leur excellent camouflage, ils chantaient à tue-tête, incognito. Leur sorte de grognements caverneux résonnaient du matin au soir, et s’intensifiaient à la tombée du jour. Mais qu’on tentât de les approcher, ils tendaient le cou à la verticale et se fondaient si bien dans les roseaux où ils nichaient qu’il eût été impossible de les distinguer des longues tiges vertes. Pourtant, Ayla en vit quelques-uns raser l’eau en quête de poissons. En vol, les butors nains étaient aisément reconnaissables. Les petites plumes du devant de l’aile et à la base de la queue étaient assez pales, et contrastaient avec les rémiges et les pennes foncées de la queue.

  Les marécages abritaient aussi un nombre surprenant d’animaux adaptés aux divers paysages. Par exemple chevreuils et sangliers dans les sous-bois, lièvres, hamsters et cerfs géants à la lisière des fourrés. Tout en chevauchant, ils rencontraient des animaux qu’ils n’avaient pas vus depuis longtemps, et se les montraient. Là, c’était un saïga qui dépassait en trombe un troupeau d’aurochs. Ailleurs un chat sauvage moucheté traquant un oiseau sous l’œil intéressé d’un léopard tapi dans un arbre. Un couple de renards avec ses petits, une paire de blaireaux grassouillets, et là-bas, des putois à la fourrure marbrée blanc, jaune et marron. Ils virent aussi des loutres dans un cours d’eau, et des visons en compagnie de leurs proies favorites, les rats musqués.

  Et il y avait les insectes. De grandes libellules jaunes sillonnant l’air, et de délicates demoiselles ornant les fleurs ternes des plantains de leurs étincelantes couleurs bleues et vertes. Des essaims d’insectes à la piqûre brûlante apparurent soudain. On aurait dit qu’ils avaient tous éclos le même jour. L’humidité et la chaleur qui régnaient dans les ruisseaux d’eau stagnante et les bassins fétides étaient fort propices à la couvaison des myriades d’œufs minuscules. Les premiers nuages de petits moucherons étaient apparus dans la matinée, au-dessus de l’eau uniquement. Ayla et Jondalar les avaient oubliés.

  A la tombée de la nuit, il était devenu impossible de les oublier. Les moucherons s’insinuaient dans la lourde fourrure des chevaux trempés de sueur, bourdonnaient devant leurs yeux, s’enfonçaient dans leur bouche et leurs naseaux, et le pauvre loup n’était pas mieux loti. Les animaux bataillaient contre des millions de mites. Les insupportables insectes se prenaient aussi dans les cheveux des humains. Ayla, tout comme Jondalar, en recrachait par dizaines, et s’essuyait sans cesse les yeux pour ne pas être aveuglée. Les nuées de moucherons s’épaississaient à mesure qu’on se rapprochait de l’eau et Jondalar se demanda où établir le campement.

  Il aperçut une colline verdoyante sur sa droite et entreprit de l’escalader pour avoir une vue d’ensemble. Arrivés au sommet, ils virent en bas l’eau scintillante d’un bras mort. La végétation y était moins luxuriante que sur le delta – mais, loin des eaux stagnantes des marais, les insectes y seraient aussi moins abondants. Sur la rive, des buissons et quelques arbres bordaient une grande plage accueillante.

  Loup dévala la colline en courant, et les chevaux le suivirent au petit trot nonchalant. Ayla et Jondalar n’eurent que le temps de leur ôter les paniers de charge et de détacher le travois avant de se ruer tous ensemble dans l’eau claire. Même Loup, d’habitude si nerveux à l’idée de traverser une rivière à la nage, fit le tour du lac en pataugeant.

  — Tu crois qu’il commence à aimer l’eau ? demanda Ayla.

  — Je l’espère. Il nous reste tellement de rivières à franchir.

  Les chevaux plongèrent leur tête dans le lac, crachant et soufflant l’eau par leurs naseaux, puis allèrent sur la rive se rouler dans la boue en se tortillant pour se gratter. Ayla ne put s’empêcher d’éclater de rire en les voyant grimacer de plaisir. Ils se relevèrent couverts de boue. En séchant, elle les débarrasserait de leur sueur, des peaux mortes et
autres œufs d’insectes, causes de leurs démangeaisons infernales.

  Ils campèrent au bord du lac et partirent le lendemain matin de bonne heure, espérant trouver pour le soir un endroit aussi agréable. Une vague de moustiques suivit l’éclosion des moucherons, et leurs multiples piqûres forcèrent Ayla et Jondalar à s’emmitoufler sous de lourdes peaux qui leur tenaient affreusement chaud. Ils ne virent pas arriver les mouches. Elles étaient d’une autre espèce que celles qui accompagnaient toujours les chevaux : elles étaient petites et elles piquaient. Bien que la soirée fût chaude, ils durent vite s’enfouir sous leurs fourrures pour échapper aux hordes volantes.

  Ils ne levèrent le camp que tard le lendemain matin. Ayla voulut d’abord cueillir des plantes pour calmer la brûlure des piqûres et confectionner un insectifuge. Dans un coin ombragé, elle trouva du romarin des marais aux curieuses feuilles lancéolées recouvertes de poils roux, connu pour ses propriétés cicatrisantes et calmantes, et elle en cueillit pour fabriquer une lotion. Elle découvrit du plantain et s’empressa d’en récolter les larges feuilles pour ajouter à la solution. Ces plantes possédaient des vertus calmantes pour toutes piqûres ou furoncles, et soignaient même de graves ulcères ou autres blessures. Plus tard, dans les steppes où l’humidité était moindre, elle cueillerait des fleurs d’absinthe[6], excellent antidote contre les poisons ou autres réactions toxiques.

  Elle fut enchantée de trouver des soucis d’un jaune étincelant, dont elle appréciait les vertus antiseptiques et le pouvoir cicatrisant immédiat, et qui, en solution concentrée, éloignaient les insectes. A la lisière d’un bois exposé au soleil, elle découvrit de l’origan vulgaire, qui était non seulement un excellent insectifuge en solution externe, mais qui, bu en infusion, donnait à la sueur une odeur épicée qui repoussait les mouches, moucherons et puces. Elle essaya même d’en faire boire aux chevaux et à Loup.

  Jondalar surveillait ses préparations, la bombardant de questions, et écoutant les explications avec un grand intérêt. Ses démangeaisons soulagées, il se félicita de voyager en compagnie d’une femme aussi experte. Seul, il aurait dû supporter les cuisantes brûlures sans broncher.

  Ils se mirent en route vers le milieu de la matinée, et les subtils changements qu’Ayla avait remarqués la veille s’amplifièrent soudain. On voyait moins de marais, moins d’îles et davantage d’eau. Le bras nord du delta perdit son réseau de chenaux, et sans crier gare, il s’unit à un des bras centraux et doubla de largeur. Un peu en amont, le bras méridional, qui s’était déjà joint à l’autre bras central, établit la jonction et les quatre bras ne formèrent plus qu’un seul et même fleuve immense.

  La Grand Rivière Mère, après avoir traversé un continent entier, gonflée de centaines d’affluents et des eaux de fonte de deux chaînes de glaciers, se trouvait bloquée vers le sud dans son accès à la mer par le socle granitique d’anciennes montagnes érodées. Sous la pression gigantesque de ses eaux déferlantes, le fleuve avait fini par percer la roche. Étranglée dans ces gorges étroites, la Grande Mère avait repris de la puissance pour creuser un méandre aigu avant de former un vaste delta jusqu’à la mer.

  C’était la première fois qu’Ayla voyait l’énorme fleuve dans toute sa splendeur, et même Jondalar, qui était pourtant passé par là, n’avait pas eu la chance de le contempler sous une telle perspective. Abasourdis, ils se laissèrent captiver par le spectacle. L’énorme étendue d’eau rappelait plus la mer qu’un simple fleuve, et la surface tumultueuse et miroitante ne trahissait qu’une infime partie du pouvoir dévastateur qu’abritaient ses profondeurs.

  Ayla remarqua une branche d’arbre qui flottait vers eux, simple brindille portée par les flots, mais un curieux détail attira son attention : elle avançait trop lentement. Ayla retint son souffle. Ce qu’elle voyait passer, ce n’était pas une branche, mais un arbre tout entier ! L’arbre le plus grand qu’elle eût jamais vu.

  — Voilà la Grande Rivière Mère, dit simplement Jondalar.

  Il l’avait déjà suivie sur toute sa longueur, et savait quelle distance elle avait parcouru, les régions qu’elle avait traversées, et tout le chemin qu’il leur restait avant d’achever leur Voyage. Bien qu’Ayla n’en saisît pas toutes les implications, elle comprenait que la Rivière Mère, parvenue au terme de son Voyage, atteignait son apogée et ne serait plus jamais aussi Grande.

  Ils remontaient le fleuve gonflé d’eau, laissant derrière eux l’embouchure et sa touffeur, et avec elle une bonne partie des insectes qui les empoisonnaient. Ils s’aperçurent bientôt qu’ils abandonnaient aussi les vastes steppes. Prairies et marécages cédaient la place à des collines boisées, entrecoupées de prés verdoyants.

  A l’ombre des arbres, la température était plus fraîche. Ce changement leur procura un tel plaisir, qu’arrivant à un grand lac cerné de bois, et bordé par un joli pré, ils furent tentés de planter leur campement malgré l’heure prématurée. Ils chevauchèrent le long d’un ruisseau qui menait à une plage de sable, mais en l’approchant, Loup se mit à gronder, poils hérissés, à l’arrêt. Ayla et Jondalar étudièrent les environs, à la recherche du danger qui troublait le jeune animal.

  — Je ne vois rien de particulier, s’étonna Ayla. Mais Loup a senti quelque chose d’inquiétant.

  — De toute façon, il est trop tôt pour camper. Allons-nous-en ! décida Jondalar après un dernier coup d’œil au lac accueillant.

  Il fit faire volte-face à Rapide et se dirigea vers le fleuve. Loup s’attarda avant de les rejoindre.

  Ils traversèrent des petits bois agréables et Jondalar ne regretta pas sa décision. Au cours de l’après-midi, ils rencontrèrent des lacs de toutes tailles. La région en était pleine. Il ne comprenait pas pourquoi il ne reconnaissait pas ce passage, lorsqu’il se souvint qu’avec Thonolan, ils avaient descendu le fleuve dans un bateau des Ramudoï, ne s’arrêtant qu’occasionnellement sur les rives.

  Pourtant, il pensait que la région se prêtait à la vie humaine. Il ne se rappelait pas si les Ramudoï lui avaient parlé d’autres Peuples du Fleuve vivant dans les parages. Il se garda bien de faire part de ses pensées à Ayla. Si l’endroit était habité, personne ne daigna se montrer. Pourtant Jondalar se demandait ce qui avait pu inquiéter Loup. Avait-il reniflé l’odeur d’humains apeurés ? Ou bien hostiles ?

  Le soleil se cachait déjà derrière les montagnes qui se profilaient à l’horizon quand ils s’arrêtèrent au bord d’un lac, bassin collecteur des ruisseaux avoisinants. Un chenal conduisait au fleuve par lequel de grosses truites et des saumons avaient remonté le courant jusqu’au lac.

  Depuis qu’ils suivaient le fleuve et que le poisson constituait leur aliment de base, Ayla continuait à tresser le filet qu’elle avait commencé, chaque fois qu’elle en avait l’occasion. Elle s’inspirait de ceux que le clan de Brun utilisait pour capturer les gros poissons dans la mer. Elle essaya plusieurs sortes de plantes pour fabriquer les cordages, et en particulier les plus riches en fibres. Le lin et le chanvre convenaient le mieux, bien que le chanvre fût plus rugueux.

  Elle avait maintenant une surface de filet suffisante et elle entra dans l’eau avec Jondalar, chacun tenant l’une des extrémités. Parvenus à distance convenable de la rive, ils revinrent sur leurs pas en le tirant.

  Voyant qu’ils avaient capturé quelques jolies truites, Jondalar manifesta un intérêt accru pour le filet et essaya d’imaginer un moyen d’y attacher une sorte de manche pour qu’une seule personne puisse pêcher, et sans entrer dans l’eau. Il laissa germer son idée.

  Le lendemain, ils continuèrent leur route vers les montagnes à travers des bois d’essences rares. De nombreuses variétés d’arbres à feuilles caduques et de conifères se mêlaient dans ces forêts multicolores, semées de prairies et de lacs, et de tourbières et de marécages près de la vallée alluviale. Certaines espèces poussaient en groupe, d’autres non, en fonction des microclimats, de l’altitude, de l’humidité ou de la nature du sol, lequel était soit riche en terreau, soit sablonneux, soit un mélange de sab
le et d’argile, ou encore une combinaison des trois.

  Les arbres à feuilles persistantes se rencontraient surtout sur l’ubac et les sols sablonneux, et, selon le degré d’humidité, atteignaient des hauteurs impressionnantes. Une épaisse forêt d’épicéas géants, hauts de cinquante mètres, recouvrait le bas d’une colline. Ensuite venaient des pins qu’on aurait crus de même taille, alors qu’atteignant pourtant les quarante mètres, ils poussaient juste au-dessus. Des sapins immenses, d’un vert foncé, précédaient des massifs de grands bouleaux blancs. Les saules, eux-mêmes, dépassaient les vingt mètres.

  Sur l’adret, lorsque le sol était humide et fertile, des forêts de bois dur aux larges feuilles atteignaient des hauteurs impressionnantes, elles aussi. Des bouquets de chênes géants, au tronc impeccablement droit et dépourvu de branches avant la couronne verte au sommet, montaient jusqu’à quarante mètres. Des tilleuls et des frênes gigantesques atteignaient presque la même taille, tout comme des érables magnifiques.

  Au loin, les voyageurs apercevaient les feuilles argentées de peupliers blancs mêlés à des bouquets de chênes, et lorsqu’ils arrivèrent dans la forêt, ils constatèrent qu’elle fourmillait de pinsons nichés dans la moindre faille. Ayla trouva même des nids remplis d’œufs et d’oisillons, bâtis dans des nids de pies et de buses, eux-mêmes occupés par des œufs et des oisillons. Des rouges-gorges vivaient également dans ce bois, mais leurs petits avaient déjà toutes leurs plumes.

  A flanc de colline, là où le dôme de verdure laissait pénétrer les rayons du soleil, les sous-bois étaient d’une richesse luxuriante, et des clématites en fleur ou des lianes pendaient souvent des plus hautes branches. Les cavaliers approchèrent d’un bouquet d’ormes et de saules blancs au tronc recouvert de vigne grimpante, et ruisselants de lianes. Ils découvrirent des nids d’aigles criards et de cigognes noires, passèrent près d’un torrent bordé de trembles et d’épaisses touffes de saules marseaux, et de haies de mûres. Une alternance de bosquets d’ormes majestueux, de bouleaux élégants, et de tilleuls odorants, ombrageaient une colline où ils s’arrêtèrent pour cueillir dans les fourrés tout ce qui pouvait se manger : framboises, orties, noisettes pas encore mûres, juste comme Ayla les aimait, et quelques pommes de pin pleines de pignons.

 

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