LE GRAND VOYAGE

Home > Literature > LE GRAND VOYAGE > Page 70
LE GRAND VOYAGE Page 70

by Jean M. Auel


  — Où a-t-il bien pu trouver des idées pareilles ? s’étonna Jondalar.

  — A quoi ressemblait ce Brugar ? demanda Ayla, prise d’une inspiration subite.

  — Il avait les traits épais et rudes, mais il savait être séduisant quand il le fallait.

  — Y a-t-il beaucoup de Têtes Plates, dans cette région ? demanda alors Ayla.

  — Il y en a eu, mais il en reste peu. Plus à l’ouest, on en trouve davantage. Pourquoi ?

  — Et comment sont-ils acceptés par les S’Armunaï ? En particulier ceux qui sont nés d’esprits mêlés.

  — Eh bien, à l’inverse des Zelandonii nous ne les considérons pas comme des monstres. Certains hommes ont choisi des Têtes Plates pour compagnes et leurs descendants sont tolérés, mais ils n’ont de place dans aucun des deux peuples, d’après ce que j’ai compris.

  — A ton avis, Brugar est-il le produit d’esprits mêlés ? demanda Ayla.

  — Pourquoi toutes ces questions ?

  — Parce que je ne serais pas surprise qu’il ait vécu, ou qu’il ait grandi chez ceux que vous appelez les Têtes Plates.

  — Qu’est-ce qui te fait croire cela ?

  — Les comportements que tu as décrits font partie des usages du Clan.

  — Le Clan ?

  — Oui, c’est ainsi que se nomment les Têtes Plates entre eux, expliqua Ayla, qui examina ensuite plusieurs hypothèses. Mais s’il était capable de charmer, ça voudrait dire qu’il pouvait s’exprimer facilement, il n’avait donc pas toujours vécu avec le Clan. Il n’y était certainement pas né, et on avait dû l’y envoyer plus tard. Et en tant qu’esprit mêlé, il devait y être à peine toléré. On devait même le trouver difforme. Je doute qu’il ait pu comprendre leurs coutumes, et il a dû rester à l’écart. Sa vie n’a sûrement pas été facile.

  S’Armuna était déconcertée. Elle se demandait comment Ayla, une étrangère, avait pu deviner tant de choses.

  — Pour quelqu’un qui n’a jamais rencontré Brugar, tu m’as l’air de bien le connaître, remarqua-t-elle.

  — Il est donc né d’esprits mêlés ? intervint Jondalar.

  — Oui. Attaroa m’a raconté ses origines, ou plutôt ce qu’elle en savait. Apparemment, la mère de Brugar était un mélange d’humain et de Tête Plate, et sa grand-mère était une vraie Tête Plate, commença S’Armuna.

  Elle a probablement été engrossée par un Autre qui l’a forcée à partager les Plaisirs, se dit Ayla. Et elle a donné le jour à une métisse, comme l’enfant que j’ai vue au Rassemblement du Clan, et qui a été promise à Durc.

  — Son enfance n’a pas été heureuse, continuait S’Armuna. Elle a quitté son peuple avant même d’être mûre. Elle est partie avec un homme de la Caverne de ceux qui vivent à l’ouest.

  — Les Losadunaï ? demanda Jondalar.

  — Oui, je crois bien qu’on les appelle ainsi. Toujours est-il que peu après son départ, elle a eu un enfant mâle. C’était Brugar.

  — Qu’on nommait aussi Brug, j’imagine ? intervint Ayla.

  — Comment l’as-tu deviné ?

  — Brug était sans doute son nom du Clan.

  — Je crois bien que l’homme avec qui sa mère s’est enfuie la battait souvent. Pourquoi ? Je l’ignore. Certains hommes sont ainsi.

  — Les femmes du Clan apprennent à accepter ce genre de traitement, expliqua Ayla. Les hommes n’ont pas le droit de se battre, mais lorsqu’ils réprimandent une femme, il leur arrive de la frapper. Ils ne doivent pas les battre durement, mais certains le font.

  S’Armuna prit un air entendu.

  — Alors, j’imagine qu’au début, la mère de Brugar trouvait normal que l’homme avec qui elle vivait la batte, mais les choses ont dû empirer. Avec ce genre d’homme, il faut s’y attendre. Il s’est mis à corriger l’enfant, et c’est sans doute ce qui a décidé la mère à s’enfuir et à retourner chez son peuple.

  — Si elle avait eu du mal à vivre avec le Clan, ça a dû être encore plus pénible pour son fils qui n’était même pas un esprit mêlé, remarqua Ayla.

  — Oui, si les esprits se mélangent comme on le croit, Brugar devait être trois quarts humain et un quart Tête Plate, calcula S’Armuna. Ayla pensa soudain à son fils, Durc. Broud doit lui rendre la vie difficile. Et s’il tournait comme Brugar ? Non, Durc est un vrai esprit mêlé, il a Uba pour l’aimer et Brun pour l’éduquer. Brun l’a accepté parmi le Clan quand il était encore le chef et que Durc n’était qu’un bébé. Il s’assurera que Durc connaît toutes les coutumes du Clan. Il pourrait parler si quelqu’un le lui apprenait, mais il a peut-être la mémoire ancestrale du Clan. Si c’est le cas, avec l’aide de Brun, il deviendra un membre du Clan à part entière.

  Un soupçon effleura l’esprit de S’Armuna.

  — Où as-tu appris à connaître si bien les Têtes Plates, Ayla ? demanda-t-elle.

  Ayla fut prise au dépourvu. Elle n’était pas sur ses gardes comme elle l’eût été avec Attaroa, et elle ne chercha pas à éluder la question.

  — Ce sont eux qui m’ont élevée, avoua-t-elle tout simplement. Mon peuple est mort dans un tremblement de terre, et les Têtes Plates m’ont recueillie.

  — Ton enfance a dû être encore plus pénible que celle de Brugar, murmura S’Armuna avec compassion.

  — Non, au contraire. On ne me considérait pas comme une fille du Clan difforme. J’étais différente, une Autre, comme ils nous appellent. Ils n’attendaient rien de moi. Je faisais parfois des choses qui les surprenaient et ils me trouvaient un peu lente, vu la difficulté que j’avais à me souvenir. Je ne prétends pas que tout a été facile, il a fallu que j’apprenne leurs coutumes, que je me conforme à leurs usages. Ça n’a pas été simple, mais j’ai eu de la chance. Ceux qui m’ont élevée, Creb et Iza, m’aimaient beaucoup. Sans eux, je ne crois pas que j’aurais survécu.

  Le récit d’Ayla intriguait fort S’Armuna, mais elle jugea que le moment n’était pas venu de lui demander des éclaircissements.

  — C’est une chance que tu ne sois pas métisse, déclara-t-elle en lançant un coup d’œil significatif à Jondalar. D’autant que tu vas rencontrer les Zelandonii.

  Ayla surprit son regard et crut en comprendre le sens. Elle se souvint de la réaction de Jondalar lorsqu’il avait appris d’où elle venait. Et il avait encore plus mal réagi en découvrant que son fils était le produit d’esprits mêlés.

  — Qu’est-ce qui te fait croire qu’elle ne les a pas déjà rencontrés ? interrogea Jondalar.

  S’Armuna prit le temps de la réflexion. Comment le savait-elle ? Elle adressa un sourire au géant.

  — Tu disais que tu rentrais chez les tiens, et Ayla a dit « sa langue » et pas « notre langue », commença-t-elle.

  Soudain, elle eut une révélation.

  — Le langage ! L’accent ! C’est ça ! Je sais où je l’ai déjà entendu. Brugar avait le même accent ! Pas aussi prononcé que le tien, Ayla. Et pourtant, il parlait moins bien le s’armunaï que toi le Zelandonii. Mais il avait dû développer certaines intonations... pas vraiment un accent... lorsqu’il vivait avec les Têtes Plates. Maintenant que je l’ai entendu de nouveau, je crois que je n’oublierai jamais plus cette prononciation particulière.

  Ayla était vexée. Elle s’était donnée beaucoup de mal pour apprendre à parler correctement, mais elle avait toujours éprouvé des difficultés à prononcer certains sons. Habituellement, elle acceptait les remarques, mais S’Armuna semblait y attacher tellement d’importance !

  — Je sais désolée, Ayla, s’excusa la chamane en remarquant la mine déconfite de la jeune femme. Je ne voulais pas te vexer. D’ailleurs, tu parles très bien Zelandonii, et même mieux que moi, j’ai tellement oublié. Et tu n’as pas vraiment d’accent, c’est... c’est difficile à expliquer. Je suis sûre que la plupart des gens ne le remarquent même pas. Mais tu m’as permis de cerner la personnalité de Brugar, et ça m’aide à mieux comprendre Attaroa.

  — T’aider à comprendre Attaroa ? s’exclama Jondalar. Comment peut-on comprendre tan
t de cruauté ?

  — Elle n’a pas toujours été ainsi. Lorsque je suis revenue de chez les Zelandonii, j’ai commencé par l’admirer, et je la plaignais beaucoup. Mais avec le recul, je crois maintenant que Brugar était fait pour elle.

  — Comment peux-tu dire une chose pareille ?

  — Elle avait été préparée à accepter sa cruauté, précisa S’Armuna. Petite fille, Attaroa a été maltraitée. Elle n’aimait pas en parler, mais je crois que sa mère la détestait. On m’a dit qu’elle l’avait abandonnée. Elle a disparu et on n’a plus jamais entendu parler d’elle. Attaroa a été recueillie par un homme dont la compagne était morte en couches avec son bébé, dans des circonstances suspectes. Les soupçons se sont confirmés quand on a appris qu’il battait Attaroa et qu’il l’avait prise avant qu’elle ne fût femme. Mais on a laissé faire parce que personne ne voulait se charger d’elle, parce qu’il y avait quelque chose de trouble dans ses origines. Attaroa a donc été livrée à la merci de la cruauté de cet homme. Il a fini par mourir et des personnes de son Camp ont arrangé son Union avec le nouveau chef de celui-ci.

  — Sans son consentement ? demanda Jondalar.

  — Disons qu’ils l’ont « encouragée » à accepter, et ils lui ont fait rencontrer Brugar. Comme je l’ai déjà dit, il savait charmer, et je crois qu’il l’a trouvée belle.

  Jondalar parut approuver. Il s’était dit, lui aussi, qu’Attaroa aurait pu être très séduisante.

  — Je pense qu’elle avait hâte de s’unir, poursuivit S’Armuna. C’était comme prendre un nouveau départ. Mais elle a vite découvert que l’homme qu’elle avait rejoint était pire que celui qu’elle avait connu. Brugar ne partageait les Plaisirs que dans les coups et les humiliations, ou pire même. A sa façon, il... je n’ose dire qu’il l’aimait, mais il avait certainement des sentiments pour elle. Il était si... si malsain. Pourtant, elle fut la seule à oser le défier, en dépit de tout ce qu’il lui faisait subir.

  S’Armuna hocha la tête d’un air grave.

  — Brugar était fort, reprît-elle, très fort, et il prenait plaisir à torturer les autres, surtout les femmes. Je suis sûr qu’il jouissait de les voir souffrir. Tu prétendais que les Têtes Plates mâles n’avaient pas le droit de se battre entre eux, mais qu’ils pouvaient frapper les femmes. Cela explique peut-être son comportement. Brugar aimait voir Attaroa se rebeller. Elle était beaucoup plus grande que lui, et vigoureuse. Il aimait mater ses révoltes, et il adorait qu’elle le défiât. Il y trouvait une excuse pour lui faire mal, et il semblait sortir renforcé de leurs bagarres. Cela lui donnait un sentiment de puissance.

  Les malheurs d’Attaroa ressemblaient trop à une situation qu’elle avait bien connue pour laisser Ayla indifférente. Elle frissonna, et se sentit un élan de sympathie et de compassion pour la Femme Qui Ordonne.

  — Il s’en vantait devant les autres hommes, et ces imbéciles l’encourageaient, poursuivit la vieille femme. Plus Attaroa résistait, plus il lui faisait payer cher, jusqu’à ce qu’elle finisse par se soumettre. Il pouvait alors la désirer. Je me suis souvent demandé ce qui se serait passé si Attaroa avait été docile les premiers temps. Se serait-il lassé d’elle ou aurait-il cessé de la battre ?

  C’était aussi la question qu’Ayla s’était posée. Et lorsqu’elle ne lui avait plus résisté, Broud s’était lassé.

  — Mais j’en doute, continua S’Armuna. Plus tard, quand la Mère l’a honorée et qu’elle a arrêté de le braver, il n’a pas changé pour autant. C’était sa compagne, il s’imaginait qu’il avait le droit de lui faire tout ce qui lui plaisait.

  Je n’étais pas la compagne de Broud, se souvint Ayla, et Brun ne lui permettait pas de me battre. Il en avait certes le droit, mais le reste du clan de Brun n’approuvait pas la façon dont il me traitait. Tout le monde trouvait cela bizarre, et Broud avait fini par me laisser tranquille.

  — Même quand Attaroa a été enceinte, Brugar continuait de la battre ? s’étonna Jondalar, choqué.

  — Oui, et pourtant il avait l’air content qu’elle attende un enfant. J’ai été enceinte, moi aussi, songea Ayla. Décidément, elle partageait beaucoup de choses avec Attaroa.

  — Attaroa venait me trouver pour que je la soigne, continuait S’Armuna, hochant la tête d’un air de pitié. Ce qu’il lui faisait... c’était horrible. Je répugne à le dire. Elle pouvait s’estimer heureuse quand elle ne récoltait que des bleus.

  — Mais pourquoi avoir supporté tout cela ?

  — Elle n’avait nulle part où aller, ni parents ni amis. Ceux de son Camp lui avaient bien fait comprendre qu’ils ne voulaient pas d’elle, et elle était trop fière pour s’imposer à eux. Elle préférait souffrir plutôt que d’avouer comment elle était traitée. Dans un sens, je la comprends, assura S’Armuna. Personne n’a jamais levé la main sur moi, bien que Brugar ait essayé, une fois. Mais je ne suis pas partie, je croyais qu’on ne voudrait pas de moi ailleurs. J’avais pourtant de la famille, mais j’étais Celle Qui Sert la Mère, et je refusais d’admettre à quel point la situation s’était détériorée. C’eût été avouer mon échec.

  Jondalar approuva d’un signe de tête. Il avait ressenti ce sentiment d’échec, lui aussi. Il jeta un coup d’œil à Ayla, et, une agréable chaleur l’envahit. Comme il l’aimait !

  — Attaroa haïssait Brugar, poursuivit S’Armuna, mais je crois qu’elle l’a aussi aimé, à sa manière. Parfois, elle le provoquait exprès. Je me suis souvent demandé s’il n’attendait pas qu’elle dépasse la douleur pour la prendre et, sinon l’aimer ni lui procurer les Plaisirs, du moins lui prouver qu’elle était désirée. Il est possible que la cruauté de Brugar ait enseigné à Attaroa une sorte de Plaisir pervers. Maintenant elle atteint ses Plaisirs en torturant les autres, et en les regardant souffrir. En l’observant bien, on se rend compte à quel point cela l’excite.

  — J’en arrive à la plaindre, déclara Jondalar.

  — Plains-la si tu veux, mais ne lui fais jamais confiance, recommanda S’Armuna. Elle est folle. Elle est possédée par un puissant démon. Je ne suis pas sûre que vous puissiez comprendre. Avez-vous jamais haï au point d’en perdre la raison ?

  Les yeux dilatés, Jondalar fut bien obligé de l’admettre. Oui, il connaissait cette haine. Un jour, il avait frappé un homme sans pouvoir s’arrêter, même lorsque l’autre gisait, inconscient.

  — On dirait que cette haine maladive ne quitte jamais Attaroa, expliqua S’Armuna. Elle réussit parfois à le cacher – on peut même dire qu’elle y excelle – mais c’est la haine qui la gouverne. Elle est incapable de penser comme tout le monde. En fait, elle n’est plus humaine.

  — Il doit bien lui rester des sentiments humains ? fit Jondalar.

  — Te souviens-tu des funérailles qui ont suivi ton arrivée ? demanda S’Armuna.

  — Oui, celles des trois jeunes gens. Il y avait deux garçons, mais je n’ai pas pu définir le sexe du troisième. Je me souviens m’être demandé de quoi ils étaient morts. Ils étaient si jeunes.

  — C’est Attaroa qui est responsable de leur mort, affirma S’Armuna. Et celui dont tu n’as pu définir le sexe, c’était son propre enfant.

  Un bruit soudain leur fit tourner la tête vers l’entrée du foyer de S’Armuna.

  31

  Une jeune femme se tenait sur le seuil, l’air très agité. Jondalar remarqua que c’était encore presque une fillette, et Ayla qu’elle était au terme de sa grossesse.

  — Qu’y a-t-il, Cavoa ? demanda S’Armuna.

  — Epadoa vient de rentrer avec ses Louves, et Attaroa est en train de la réprimander.

  — Je te remercie de m’avoir prévenue, déclara la vieille femme, avant de se retourner vers ses invités. Les murs de ce foyer sont si épais qu’il est presque impossible d’entendre ce qui se passe dehors, leur dit-elle. Nous devrions aller voir.

  Ils se précipitèrent dans l’étroit passage, et la jeune femme s’effaça pour les laisser passer.

  — Pas longtemps attendre, lança Ayla en s’armunaï, avec un sourire complic
e.

  Cavoa eut un petit rire nerveux, et baissa les yeux.

  Ayla se demandait ce qui effrayait la jeune femme et lui donnait cet air malheureux, alors que les futures mères étaient plutôt épanouies d’habitude, mais elle se rappela ensuite que le premier bébé était souvent attendu avec angoisse. Dès qu’ils furent dehors, les hurlements d’Attaroa leur parvinrent.

  — ... que tu as trouvé leur campement. Tu as laissé passer ta chance ! Tu te prétends Louve et tu n’es pas capable de retrouver une piste ! s’égosillait-elle, ponctuant ses cris de ricanements moqueurs.

  Des flammes de colère brillaient dans le regard d’Epadoa, qui serra les dents mais ne répondit pas. Une petite foule s’était rassemblée, et les observait à distance. La femme revêtue de peaux de loups remarqua alors que tous les regards convergeaient vers le foyer de S’Armuna, et découvrit avec stupeur la jeune femme blonde qui venait vers elle, suivie, ce qui la surprit encore plus, par le géant. Jamais aucun homme n’était revenu volontairement !

  — Que faites-vous ici ? lâcha Epadoa.

  — Je viens de te le dire. Tu as raté ta chance, ricana Attaroa. Ils sont revenus d’eux-mêmes.

  — Pourquoi es-tu surprise de nous trouver là ? fit Ayla. N’étions-nous pas conviés à un festin ?

  S’Armuna traduisit.

  — Le festin ne sera pas prêt avant ce soir, dit Attaroa d’un ton cassant, pour signifier leur congé aux visiteurs. Viens Epadoa, j’ai à te parler.

  Elle tourna le dos aux curieuses qui s’étaient attroupées, et rentra dans son habitation. Epadoa dévisagea Ayla, l’air mauvais, et rejoignit la Femme Qui Ordonne.

  Après son départ, Ayla scruta le pré avec appréhension. Après tout, Epadoa et ses Louves avaient la réputation de chasser les chevaux. Ayla poussa un soupir de soulagement en voyant Whinney et Rapide au bout du pré en pente, dont l’herbe sèche et cassante les nourrirait tout de même. Elle tourna la tête du côté des bois accrochés au versant de la colline qui descendait vers le Camp, espérant apercevoir Loup et se montrer dans son champ de vision pour qu’il ne se sente pas abandonné.

 

‹ Prev