Sexe, Meurtres et Cappuccino

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Sexe, Meurtres et Cappuccino Page 6

by Kyra Davis


  — On sait qui a fait le coup ?

  — Ils ne l’ont pas dit ce matin, au journal. Il paraît que sa mort remontait à quelques heures. Une si gentille fille, jetée comme ça dans la poubelle ! Quelle mort déshonorante, vous vous rendez compte ?

  Et comment ! Le coup de la benne à ordures était tellement éculé que je n’aurais pas osé le placer dans un de mes romans, même sous pseudo.

  — Les journalistes ont interviewé son frère à la télévision, mais le pauvre gars ne savait que dire. Il répétait tout le temps : « Mais je lui ai parlé hier après-midi ! Je viens juste de lui parler ! » Il avait l’air tellement sonné que ça faisait de la peine, je vous assure.

  Je tentai de me composer une expression compatissante. Comment pouvais-je à ce point manquer de cœur ? Une femme avait été tuée, cela aurait dû me suffire pour ressentir de l’affliction. Ses proches se fichaient — et ils avaient bien raison — de savoir que l’assassin était un pauvre tâcheron sans imagination !

  Alice saisit le prix de mon soda sur sa caisse enregistreuse à une vitesse supersonique, signe qu’elle n’avait pas fini de parler.

  — Andy est dans tous ses états. Il est si sensible ! En plus, je crois qu’il avait un petit béguin pour elle. Je l’ai envoyé prendre l’air tout à l’heure. Je voulais lui donner sa journée, mais il a refusé. Sacré Andy. Toujours là, même quand il est malade.

  J’acquiesçai d’un sourire machinal. Je venais de penser à ma fenêtre, que je n’avais toujours pas refermée. L’image du verre brisé au milieu de ma cuisine me revint à l’esprit. L’annonce de l’assassinat de cette Susan Lee n’avait fait que relancer mes inquiétudes. Allais-je finir ma carrière dans les poubelles d’une arrière-cour ? Triste destin pour un auteur qui avait inventé tant de scénarios macabres…

  Allons, c’était absurde. Aucun meurtrier ne s’était introduit la veille dans mon appartement. La preuve : j’étais en parfaite santé ce matin. Enfin, presque. Disons que j’avais encore une légère gueule de bois, mais en l’occurrence, je ne pouvais incriminer personne d’autre que ma vieille copine Smirnoff (prénom : Vodka).

  Je remis mes lunettes noires devant mes yeux. La journée commençait mal. J’avais besoin d’un peu de magnésium pour me remettre d’aplomb. Quel était la teneur en magnésium d’une barre de chocolat caramel-noix de pécan, au juste ?

  D’un geste, j’indiquai à Alice d’ajouter une barre chocolatée à mon achat. Peut-être que si je ne prononçais pas le mot « chocolat », les calories compteraient moins ?

  — Soyez prudente, ce soir, en fermant le magasin, dis-je en tendant à Alice un billet froissé.

  — Et vous aussi, mademoiselle Katz. L’assassin court toujours.

  Je ramassai mes emplettes, rangeai mon porte-monnaie, sortis de la boutique… et entrai en collision brutale avec un coffre-fort. Que faisait ce coffre-fort sur le trottoir ? En frottant mes yeux, je vis qu’il ne s’agissait que d’Andy.

  — Oh, désolé, mademoiselle Katz, dit celui-ci en ramassant ma canette, qui avait roulé sous un présentoir à journaux.

  — C’est moi qui vous dois des excuses. Une fois de plus, je ne regardais pas où j’allais.

  Je renversai la tête en arrière pour croiser son regard. Ses yeux étaient encore plus bouffis que les miens, sauf que dans son cas, il s’agissait de chagrin et non d’alcool.

  — J’ai appris, pour Susan, ajoutai-je. Je suis désolée pour vous.

  A ces mots, je vis son visage blêmir, tandis que ses épaules se soulevaient convulsivement. Un sanglot de détresse lui échappa, puis Andy se jeta contre moi, au risque de me renverser pour de bon. Je n’eus que le temps de tendre les bras pour atténuer le choc.

  — Ça va aller, Andy, dis-je en tapotant son dos amicalement. Ça va aller.

  — Non, ça ne va pas. Elle est morte, et moi je l’aimais bien. Elle n’aurait pas dû mourir.

  — Je sais, c’est difficile. Mais je vous assure qu’elle est mieux là où elle est, Andy.

  Il se redressa en essuyant ses larmes de sa manche.

  — Vous croyez, mademoiselle Katz ?

  A vrai dire, pas vraiment.

  — Tout à fait, Andy.

  Je pressai gentiment la partie de son bras qui n’était pas humide de larmes.

  — Tout ce que nous pouvons faire pour honorer sa mémoire, c’est rendre ce monde meilleur, pour que de telles choses n’arrivent plus jamais.

  — Je ne veux plus que de telles choses arrivent, martela Andy.

  Une telle naïveté était prodigieuse. Un peu enviable aussi, d’une certaine façon.

  — Chacun d’entre nous doit agir de son mieux, dis-je. Etre bon envers les autres, ce genre de choses…

  Les sourcils du géant se rejoignirent, signe d’une concentration intense.

  — Il faut rester soi-même, et tout ira bien, expliquai-je.

  Aussitôt, son regard s’éclaira.

  — Oui, je comprends. Je peux le faire !

  — Très bien, Andy. Je n’en attendais pas moins de vous. Maintenant, il faut que j’y aille.

  — Oh, oui. Merci beaucoup. Bonne journée, Sophie.

  Je me mis en marche en direction de ma voiture, garée quelque part vers le pôle Nord. J’éprouvais de la peine pour Andy, mais j’avais la satisfaction de l’avoir aidé de mon mieux. Il avait dû être touché, car il m’avait appelée par mon prénom.

  Evidemment, j’aurais ressenti encore plus de satisfaction si le meurtre avait eu lieu un peu moins près de chez moi.

  « Un vibromasseur offert pour tout achat supérieur à cent dollars ! » proclamait l’affiche sur la vitrine de Plaisirs Secrets. Je n’essayai même pas de refouler un éclat de rire.

  Dena émergea de l’arrière-boutique vêtue d’un jean noir et d’un T-shirt imprimé d’un motif bariolé. Elle seule pouvait porter un tel chiffon sans se ridiculiser. Elle s’approcha de moi pour m’embrasser et désigna l’affiche.

  — Tu as vu ? Il faut ce qu’il faut ! Tu viens faire des achats ou me rendre visite ?

  — Je voulais te parler, dis-je en passant un doigt distrait sur une bouteille en forme de pénis. Tu as cinq minutes ?

  — Barbie ! appela-t-elle en se retournant, tu peux tenir la caisse ?

  Une blonde athlétique moulée dans une combinaison de vinyle rose se redressa du casier de slips fendus qu’elle était occupée à remettre en ordre et adressa à Dena un sourire chaleureux.

  — Elle s’appelle vraiment Barbie ? demandai-je une fois installée dans le minuscule bureau de Dena.

  — Je me fiche de savoir son vrai prénom. Tout ce qui compte à mes yeux, c’est que cette fille est une encyclopédie de l’érotisme à elle toute seule. Je n’ai jamais eu une vendeuse aussi bien informée.

  Elle ôta une pile de factures d’un siège et me fit signe de m’y asseoir, avant de prendre place derrière sa table.

  — Qu’est-ce qui t’arrive ?

  — J’ai rencontré quelqu’un.

  — Tout de même ! Masculin ?

  — Positivement.

  — Séduisant ?

  — Définitivement.

  — Disponible ?

  — Apparemment.

  — Bingo ! Raconte, je veux tout savoir.

  — Eh bien… il n’est pas parfait, bien sûr. Par exemple, il n’aime pas le cappuccino brownie-caramel.

  — Sophie, dit Dena en se penchant sur son bureau. Je peux te faire une confidence ? Il y a des tas de gens qui n’aiment pas le cappuccino brownie-caramel. Ça n’en fait pas pour autant des monstres infréquentables. Pour ma part, je considère que Starbucks est au café ce que le fast-food est à la bonne bouffe : une aberration totalitaire et cancérigène. Dix points pour ton nouveau Jules.

  Dena utilise un système de notations assez complexe pour évaluer les hommes. Je ne connais pas le nombre de points requis, mais il semble qu’aucune de mes dernières conquêtes n’ait atteint le seuil minimal.

  — J’ai dit qu’il n’aimait pas le cappuccino, pas qu’il fuyait les coffee shops comm
e la peste.

  — Alors cinq points seulement, dit Dena en appuyant sur la touche « cinq » de sa calculette.

  — Il parle avec un accent.

  — Précise ?

  — Russe.

  Dena rentra « plus cinq » sur le clavier.

  — Il est assez léger, mais suffisant pour que ce soit… comment dire… sexy. Surtout quand il prononce son prénom, Anatoly.

  — Ça me plaît. Trois points de plus.

  — Il a dans les trente-cinq ans. Un mètre quatre-vingts, cheveux bruns, yeux bruns, très beau gosse.

  — Très bon, ça, très bon ! s’écria Dena en tapant un quinze sur sa calculatrice.

  — Il a des mains magnifiques. Grandes, solides, un peu rugueuses…

  — Arrête de m’exciter ! Allez, j’ajoute un vingt tout rond pour ses mains. Ce qui nous fait… quarante-huit points pour Anatoly. Belle prise !

  — Il faut avouer que sur le plan visuel, il vaut le détour. Question personnalité, en revanche, il m’a fallu plus de temps pour savoir ce que je pensais de lui. Il est parfois assez rude.

  — Tu ne viens pas de dire que tu aimais ça ?

  — Je parlais de ses mains, Dena. Et j’ai dit rugueux, pas rude.

  — Peu importe, dit-elle en éteignant sa calculette. On dirait qu’il te plaît. Qu’est-ce que tu attends pour le mettre dans ton lit ?

  — Je ne l’ai rencontré qu’hier !

  — Justement, tu as eu le temps.

  — Dena, tu as déjà entendu parler de cette tradition qui consiste à se laisser faire la cour ?

  — Ce truc ringard et hypocrite ? Très peu pour moi, surtout dans ma branche. Tu sais, les idéaux bourgeois, quand on tient un sex-shop… Bon, tu n’as pas répondu à ma question.

  — Je le vois samedi prochain. Il débarque à San Francisco, il m’a demandé de lui faire faire le tour de la ville. Tu vois ce que je veux dire, les téléphériques, la Coit Tower, tous ces trucs pour touristes qui me font hurler d’horreur dans les dîners en ville mais où je rêve secrètement d’aller.

  — C’est drôle, moi aussi, je sors avec un type qui vient d’arriver ici.

  — Ah, oui, le coup du siècle ? Il l’est toujours ?

  — Affirmatif.

  — Comment est-il ?

  — Très intelligent, assez original. Il travaille comme barman dans Lower Haight. Il a une vision du monde très personnelle… C’est quelqu’un qui a une autre approche des choses, qui refuse de se conformer aux diktats de la société. Un rebelle.

  — Bref, le parfait psychopathe.

  — Pas du tout. C’est un type très sain, à sa façon. On le prend souvent pour un illuminé, mais c’est parce qu’on ne le comprend pas. Il est simplement… différent.

  — J’y suis. Tu sors avec Michael Jackson.

  — Je t’en prie. Lui, au moins, n’a pas de longues conversations avec son chat.

  En guise de réponse, je tirai la langue à Dena. Celle-ci consulta sa montre.

  — Je dois déjeuner avec lui. Attends un peu, je vous présenterai.

  — Quelle bonne idée ! Je suis impatiente de voir cette perle rare. Au fait, puisqu’on parle de trucs bizarres…

  — Ce n’est pas le cas.

  — Excuse-moi, c’est sorti tout seul. Il m’est arrivé quelque chose d’inhabituel, cette nuit.

  — Ton dieu russe t’a fait des propositions cochonnes ?

  — Pas du tout.

  — Dommage. Raconte ?

  — Quand je suis rentrée, vers minuit, il y avait un verre cassé sur le carrelage de ma cuisine.

  — Mais c’est terrible ! Tu as appelé la police ?

  — Tu ne comprends pas. J’ai d’abord cru que c’était M. Katz…

  — Evidemment, qui veux-tu que ce soit ? Ce chat est l’animal le plus maladroit que je connaisse. Aussi, si tu ne le nourrissais pas vingt-quatre heures sur vingt-quatre !

  — Laisse-moi finir. Le verre était cassé au milieu de la pièce. Comme si quelqu’un l’avait fait tomber.

  — Tu veux dire que ton appartement a été visité ?

  — Possible. Je n’ai aucune preuve.

  — Rien n’a été emporté ou déplacé ?

  — Pas à ma connaissance.

  Dena croisa les bras et me jeta un regard perplexe.

  — Pour résumer, tu penses que quelqu’un s’est introduit chez toi dans le seul but de laisser tomber un verre sur le carrelage de la cuisine ?

  D’ordinaire, elle réservait ce ton condescendant à Mary Ann. Je refusai de me laisser impressionner.

  — Je sais. En soi, c’est grotesque. En revanche, ça prend un tour nettement plus inquiétant quand on fait le rapprochement avec un de mes bouquins. Tu te souviens de Sex, Drugs & Murder ?

  Le visage de Dena s’éclaira.

  — La scène du verre dans la cuisine ?

  — Bravo. C’est là qu’Alicia Bright commence à comprendre que quelqu’un s’est introduit chez elle.

  — Evidemment, mais cela ne prouve rien.

  — Non, sauf quand tu fais le rapprochement avec les coups de téléphone et la lettre anonyme que j’ai reçus.

  — Une lettre ?

  — Une phrase, plutôt. On récolte ce qu’on sème. Bizarre, non ? Quant au type qui me harcèle au téléphone, il se contente de raccrocher sans rien dire. Je n’ai jamais entendu sa voix.

  — Il faut appeler la police.

  — Pour qu’ils me répondent que j’ai affaire à quelqu’un qui s’est trompé de numéro et que mon chat a cassé un verre dans la cuisine ?

  — Enfin, tout ce que tu viens de me dire…

  — C’était uniquement pour que tu me rassures, pas pour que tu sombres dans la paranoïa avec moi.

  — Ecoute, Sophie, il est possible que quelqu’un te veuille du mal. Tu dois prévenir la police.

  — Génial. Maintenant, on est deux à se raconter des films.

  Je me passai nerveusement la main dans les cheveux, réveillant ma blessure au doigt.

  — Tiens, je me suis coupée. Exactement comme Alicia Bright. Ne me dis pas que ça, c’était prémédité !

  — Si tu essaies de me démontrer que tout cela n’est que pure coïncidence, ça ne prendra pas.

  Barbie passa la tête par la porte entrebâillée.

  — Quelqu’un pour toi, Dena.

  Je me levai, ravie de l’interruption.

  — Je vais enfin connaître le fameux... au fait, comment s’appelle-t-il ?

  — Jason Beck, répondit Dena, songeuse. Dis, tu es sûre que…

  — Tout va bien, Dena. Je me fais probablement des idées. C’est mon chat qui aura cassé ce verre. Allez, viens. Il est temps de faire les présentations.

  Elle ouvrit la bouche comme pour protester, puis renonça.

  — D’accord.

  En quittant le bureau, elle me prit par le bras pour me guider vers le magasin, où se trouvait…

  Lucifer en personne.

  5

  Il suffit à Alicia d’un regard à la voiture de Kittie pour comprendre que celle-ci ne lui avait pas tout dit.

  Sex, Drugs & Murder

  — Jason Beck ? demandai-je à Dena. Tu veux dire Jason C. Beck.

  Tous deux me jetèrent un regard surpris.

  — C comme Cinglé, précisai-je.

  Beck étira ses lèvres en un sourire ironique. Dena se tourna vers moi en sursautant.

  — Sophie ! murmura-t-elle entre ses dents. Qu’est-ce qui t’arrive ?

  D’accord, je n’étais pas très charitable. D’un autre côté, il fallait comprendre ma stupeur ! Que faisait ma meilleure amie avec ce fou furieux ?

  — J’ai rencontré Sophie hier soir, expliqua celui-ci le plus calmement du monde.

  — Sophie ? Où ?

  — Dans une galerie d’art d’Upper Market.

  — Je te croyais…

  — Parti pour un jeu de rôle ? Exact, mais j’étais en avance. J’en ai profité pour faire un saut à un vernissage. Aucun intérêt. C’était le genre de croûtes que les richards ac
hètent pour accrocher au-dessus de leurs canapés de designers à mille dollars. Aucun message, aucune revendication.

  Cette fois-ci, c’est moi qui demandai des détails.

  — Un jeu de rôle ?

  Lucifer me décocha un sourire inquiétant.

  — De vampires, précisa-t-il.

  Dena s’interposa entre lui et moi et leva les mains en signe d’apaisement.

  — Laisse-moi lui expliquer, dit-elle à Beck, avant de se tourner vers moi. Une fois par mois, un groupe de personnes…

  — De vampires, rectifia son amant.

  —... un groupe de personnes vampires se retrouve pour rejouer une scène marquante de l’univers des vampires, souvent tirée d’un livre ou d’un film.

  — Tu as lu des romans de vampires ? me demanda Beck en penchant la tête pour me voir.

  — Pas beaucoup. Dracula, bien sûr, et Les chroniques des Vampires.

  — Alors tu n’es pas complètement novice. J’adore tenir le rôle du comte Dracula.

  — Intéressant.

  — En fait, je suis Dracula.

  Il était surtout fou à lier. J’observai le personnage avec méfiance. Il portait le même pantalon de cuir noir et la même veste cloutée, et arborait la même coiffure de barbare que la veille au soir. Dena avait raison, il avait vraiment une autre approche des choses. A la lumière du jour, il semblait encore plus allumé, si j’ose dire, que la nuit.

  — Pour une créature de l’ombre, tu as l’air de bien supporter la lumière du soleil, dis-je pour le provoquer.

  Un coup pour rien. Il ne réagit pas. J’optai pour une attaque plus directe.

  — Comment savais-tu mon prénom, hier soir ? On ne nous a pas présentés.

  — J’avais remarqué plusieurs romans que tu as écrits, dans la bibliothèque de Dena. Ça m’a intrigué parce que tes bouquins n’ont pas l’air d’être son style.

  — Et c’est quoi, mon style ? l’interrompit l’intéressée d’une voix tendue.

  — Anaïs Nin plutôt que Jane Austen, si tu vois ce que je veux dire. Bref, non seulement Dena possédait tous tes livres, mais tu les lui avais dédicacés. Quand je t’ai vue hier, j’ai fait le rapprochement avec ta photo au dos du livre.

  — On dit la quatrième de couverture, rectifiai-je machinalement.

  — Je ne me souviens pas de ça, dit Dena.

 

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